Mme Raymonde Le Texier. … sont sous-payées et vivent perpétuellement dans la peur de perdre leur emploi sans pouvoir en retrouver un autre. Elles sont maltraitées, y compris à l’agence de Pôle emploi, où l’on rétorque à une candidate à un poste dans une grande surface : « Ça, c’est pour le haut du panier ; vous, vous êtes le fond de la casserole ! » Voilà, pour ma part, ce qui m’a frappée ! Entre vous et nous, la différence est donc effectivement très grande.

Vous savez, comme nous, que les hommes et les femmes ne sont pas à égalité, que, à travail équivalent, elles n’ont pas le même salaire, ne percevront pas les mêmes pensions et seront les premières victimes du report de l’âge ouvrant droit à la retraite à taux plein de 65 ans à 67 ans. Il faut donc que vous assumiez le fait que, finalement, la cause des femmes vous est indifférente !

Bientôt, les douze coups de minuit vont sonner. Cendrillon a compris que le prince n’avait absolument rien de charmant. De plus il est ruiné. Enfin, c’est un goujat, parce qu’il lui demande de porter le poids d’une partie de sa dette. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Ce soir, Cendrillon a enfin pris conscience qu’elle était la cinquième roue du carrosse et elle demande la suppression de cet article ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Bricq. Il y a longtemps que nous ne croyons plus aux contes de fées, hélas !

M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.

Mme Claire-Lise Campion. Le report de l’âge d’annulation de la décote à 67 ans pénalisera particulièrement les femmes. À ce sujet, Mme Karniewicz, présidente de la CNAV, a tenu les propos suivants lors de son audition par la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale :

« Il est prévisible que ce seront majoritairement des femmes qui devront attendre l’âge de 67 ans pour bénéficier du taux plein ou alors partiront plus tôt mais avec une retraite amputée de la décote. Si l’âge moyen de la retraite pour les femmes est aujourd’hui de 61,5 ans, c’est que les femmes n’ont pas cumulé suffisamment d’annuités pour prendre leur retraite à 60 ans : elles doivent attendre d’avoir 65 ans pour bénéficier du taux plein. Si l’on porte l’âge légal de la retraite à 62 ou 63 ans, le “taquet” restera-t-il à 65 ans, ou bien passera-t-il à 67 ou 68 ans ? C’est l’hypothèse retenue par les travaux du COR. »

Dans ce cas, la situation des femmes serait rendue non pas plus difficile, mais dramatique.

Je voudrais également revenir sur les très pertinentes propositions contenues dans le rapport de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité de septembre dernier, relatif aux inégalités entre les hommes et les femmes. Aux yeux de la HALDE, il importe en particulier que le système des pensions prenne mieux en compte la situation des femmes, en particulier de celles qui travaillent à temps partiel. Il faudrait permettre aux travailleurs à temps partiel, qui sont majoritairement des femmes, de cotiser sur la base d’un temps complet, grâce à une participation de l’employeur.

La HALDE rappelle que plus de 30 % des femmes occupent un emploi à temps partiel, ce qui les pénalise fortement au regard de la retraite, le calcul de leur pension étant assis sur un salaire très faible et sur un nombre de trimestres de cotisation généralement insuffisant.

La HALDE préconisait en outre de prendre en compte les cent meilleurs trimestres, au lieu des vingt-cinq meilleures années, pour déterminer le montant de la pension. Cela permettrait de ne pas aggraver, au moment de la retraite, les effets de la précarité que les femmes, notamment, connaissent tout au long de leur activité professionnelle.

Une autre piste intéressante serait d’accroître l’allocation versée durant le congé parental, de manière à faciliter l’accès à celui-ci et, surtout, à inciter davantage de pères à faire le choix de suspendre leur carrière pour élever les enfants. Il est en effet primordial de soutenir l’engagement professionnel des femmes, en encourageant le partage des tâches au sein du couple. Il conviendrait également d’offrir aux femmes de meilleures conditions de retour à l’activité professionnelle.

M. Jacques Mahéas. Belle démonstration !

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.

Mme Bariza Khiari. La cause des femmes, si bien défendue par mes collègues, mérite d’être soutenue encore et toujours. Or, de ce point de vue, notre hémicycle est visiblement hémiplégique, puisque les membres de la majorité, y compris nos collègues femmes, restent muets sur ce sujet ! Permettez-moi de m’en étonner ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

Mme Catherine Troendle. C’est faux ! Vous exagérez !

Mme Bariza Khiari. Exprimez-vous donc, mes chers collègues !

Le recul de l’âge de la retraite à taux plein contribuera à fragiliser davantage encore le sort des femmes. Vous restez sourds aux arguments développés sur ce point par l’opposition, monsieur le ministre, méprisant des personnes dont la situation est pourtant préoccupante. Nous ne tomberons pas dans le piège de votre annonce concernant les femmes nées entre 1951 et 1955. C’est la philosophie générale du texte qu’il faut changer !

Comme chacun sait, à travail égal, les femmes ont un salaire inférieur à celui des hommes, quel que soit le poste occupé. L’écart varie de 17 % à 25 %, et les promesses du Président Sarkozy n’y ont rien changé. Je rappelle qu’il avait confié à Xavier Bertrand, alors ministre du travail, le soin de veiller à mettre un terme à ces inégalités. On voit aujourd’hui le résultat !

M. Jean Desessard. Eh oui ! Il est aujourd’hui secrétaire général de l’UMP !

Mme Bariza Khiari. De plus, à peine 44 % des femmes réussissent à effectuer une carrière complète. La retraite accentue encore ces inégalités, puisque sur dix femmes retraitées, quatre touchent moins de 600 euros mensuels ! La retraite n’est donc pas favorable aux femmes, et vous aggravez leur situation. Allez-vous persister dans cette voie ? Il semble que oui.

Le report de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans, couplé au recul de l’âge d’accès au taux plein de 65 à 67 ans, va inciter de nombreuses femmes, pour toucher de 50 à 100 euros de plus par mois, à travailler jusqu’à 67 ans. Est-il normal d’offrir ce genre de perspective à des mères de famille qui ont élevé leurs enfants pour le bien de la République ? Est-ce là tout ce que nous pouvons leur proposer ? Je me refuse à accepter que la moitié de la population de notre pays soit traitée avec un tel mépris. Encore une fois, ces femmes ont élevé des enfants qui vont concourir au financement de la retraite de leurs aînés, d’où une carrière en dents de scie : ô paradoxe, elles s’en trouveront pénalisées au moment de leur propre retraite !

Mais ce qui scandalise les Français, c’est, au-delà de cette réforme des retraites, le projet de société que vous portez. À écouter vos discours, « casser les tabous », c’est faire preuve de modernisme, de capacité d’anticipation, de vision de l’avenir. Au nom de ce massacre des tabous, vous supprimez un acquis social majeur, le droit à la retraite à 60 ans. Que proposez-vous aux Français en échange ? De légaliser les paris en ligne ? Beau projet de civilisation ! De travailler le dimanche ? Jolie vision de la vie en société ! De faire payer les pauvres pour les plus riches ? Belle politique de civilisation !

Pour toutes ces raisons, nous rejetons cette prétendue réforme et demandons la suppression de cet article ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Je rappellerai que la demi-part fiscale évoquée par Mme Bricq avait pour vocation d’aider les parents isolés. Le dispositif a été à ce point détourné de sa finalité première que nous avons dû le recentrer, en en précisant les conditions d’accès. Cela a fait l’objet d’un long débat, mais nous avons eu raison de le faire.

Mme Nicole Bricq. Vous ne l’emporterez pas au paradis, s’il existe !

M. Éric Woerth, ministre. À l’origine, la retraite à 60 ans concernait avant tout les hommes. Les statistiques montrent ainsi que, en 1983, 25,9 % des femmes seulement partaient à la retraite avec un taux plein et à la suite d’une carrière complète, contre 60 % en 2009. En quelque trente ans, la situation s’est donc améliorée, même si ce n’est jamais suffisant. Dans le même temps, la proportion est passée de 58 % à 71 % pour les hommes. Je ne conteste pas qu’une réelle inégalité persiste, mais le décalage tend donc à se réduire.

M. Jacques Mahéas. Ce que vous nous dites n’est pas nécessairement positif !

M. Éric Woerth, ministre. La retraite à 60 ans était donc clairement une mesure destinée aux hommes, c’est là un simple constat. Aucune mesure de rattrapage ou de compensation n’était prévue pour les femmes à l’époque de son instauration.

Revenons maintenant sur le cas des caissières d’hypermarché qui voudraient travailler à temps plein.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’ancien directeur général de Carrefour touche une retraite de 500 000 euros !

M. Éric Woerth, ministre. J’observe que Carrefour a pris certaines initiatives pour que moins de caissières travaillent à temps partiel, mais c’est un autre débat !

Quoi qu’il en soit, une caissière qui travaille à temps partiel valide des trimestres complets de cotisation. Sa pension de retraite sera donc souvent plus élevée que son salaire d’activité, grâce aux effets du minimum contributif, qui permet d’estomper, au moment du départ à la retraite, les différences salariales et les inégalités professionnelles.

Si par malheur cette salariée souffre de troubles musculo-squelettiques, comme nombre de travailleurs de notre pays, elle pourra bénéficier de la retraite à 60 ans, pour cause de pénibilité. Cette mesure concerne potentiellement toutes les personnes dont les métiers impliquent des postures pénibles susceptibles d’occasionner de tels troubles.

Le cas d’une employée de blanchisserie ayant commencé à travailler à 14 ans a également été évoqué.

M. Éric Woerth, ministre. Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le sénateur, cette personne n’aura pas à cotiser pendant quarante-huit ans ! Ce n’est pas du tout cela !

M. Jacques Mahéas. Je n’ai jamais dit ça ! Vous étiez absent lorsque j’ai abordé ce sujet !

M. Éric Woerth, ministre. Ayant commencé à travailler à l’âge de 14 ans, elle prendra sa retraite à 58 ans puisqu’elle bénéficiera du dispositif prévu pour les carrières longues.

M. Jacques Mahéas. Permettez-moi de vous interrompre, monsieur le ministre !

M. Éric Woerth, ministre. Laissez-moi terminer !

J’ai évoqué l’espérance de vie à 60 ans, non pas l’espérance de vie à la naissance ! L’espérance de vie à 60 ans a augmenté de cinq ans depuis les années quatre-vingt.

M. Jacques Mahéas. De quatre ans, et non pas de quinze, comme le prétendait M. Fillon !

M. Éric Woerth, ministre. M. Fillon évoquait quant à lui l’espérance de vie à la naissance, monsieur le sénateur. (M. Jacques Mahéas s’exclame.) Mon propos se fondait bien sur l’espérance de vie à 60 ans. Une personne aujourd’hui âgée de 62 ans est généralement en meilleure forme que ne l’était hier une personne de 60 ans.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4, 119 et 255.

J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe socialiste, l'autre du CRC-SPG.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 12 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 152
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de soixante-six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 851, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le IV de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à supprimer l’exonération de la contribution sociale généralisée et de cotisations sociales prévue pour les contributions des employeurs au financement des régimes de retraite chapeau relevant de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale et à replacer ainsi ces dispositifs dans le droit commun.

Encore une fois, notre objectif est d’aller chercher l’argent où il se trouve. Le cœur du régime de retraite, ce ne sont pas les mesures d’âge. Ce système est un outil de répartition de la richesse, et c’est sans doute cela qui vous gêne !

En ce qui concerne les cotisations patronales, la situation frôle l’indécence. Aujourd’hui, les employeurs ne cotisent pour les gros salaires que jusqu’à un plafond de 2 885 euros. Les énormes augmentations que s’octroient régulièrement les patrons ne contribuent donc pas au financement des retraites. En appliquant les cotisations patronales sur la totalité du salaire, on dégagerait près de 7 milliards d'euros de ressources supplémentaires.

Le Gouvernement prétend que ces nouveaux prélèvements feraient régresser l’emploi et l’investissement. Pourtant, les études officielles, notamment celles de la Cour des comptes, montrent que la baisse des cotisations patronales n’a pas eu d’effet notable sur l’emploi. En effet, les deux tiers de ces exonérations profitent au secteur des services, qui ne peut procéder à des délocalisations.

Augmenter les cotisations ne réduirait donc pas l’emploi. De même, ce sont non pas les salariés et la protection sociale qui freinent l’investissement, mais les actionnaires, qui préfèrent empocher des dividendes plutôt que d’investir pour l’avenir de l’économie.

La solution pour équilibrer le régime des retraites, c’est de favoriser la création d’emplois et le recul du chômage ! Le nombre de retraités est passé de 7 millions à 15 millions en trois décennies, quasiment sans hausses de cotisations. C’est la création d’emplois qui a permis de financer les conséquences de cette évolution. Le Gouvernement reconnaît lui-même qu’une baisse du chômage diminuerait fortement le besoin de financement, mais il ne fait rien pour y parvenir, au contraire.

L’insuffisance actuelle des recettes est très largement due aux effets de la crise et à la montée du chômage qui en est la conséquence. Ainsi, 680 000 emplois nets ont disparu en moins de dix-huit mois, ce qui représente plusieurs milliards d'euros de perte pour les régimes de retraite pour les quinze ans à venir, en raison de la chute de la masse salariale. À l’inverse, en créant 300 000 emplois par an de 2010 à 2020, on dégagerait 24 milliards d'euros de ressources nouvelles pour les retraites. Pour cela, il faut une politique volontariste en faveur des salariés, des services publics, une véritable politique industrielle orientée vers la reconversion écologique de l’économie.

Résoudre le problème des retraites suppose le recours à deux outils : la création d’emplois et la suppression des exonérations patronales, s’agissant notamment de la contribution sociale généralisée et des cotisations sociales prévues au titre de la contribution des employeurs au financement des régimes de retraite chapeau. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. L'amendement n° 836, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article

I. - L'article L. 137-15 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette contribution à la charge de l'employeur est affectée aux régimes obligatoires d'assurance maladie et vieillesse dont relèvent les bénéficiaires selon une clé de répartition définie par décret. »

II. - À l'article L. 137-16 du même code, le taux : « 4 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».

III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Claude Danglot.

M. Jean-Claude Danglot. Hier, monsieur le ministre, en répondant aux motions que les groupes d’opposition avaient déposées sur ce projet de loi, vous avez osé affirmer que vous et vos amis aviez été les seuls à prendre des mesures pour encadrer l’attribution de parachutes dorés et de stock-options.

Cela mérite d’être nuancé, car si vous avez agi, c’est sous la double contrainte médiatique et populaire qui faisait suite à un certain nombre de scandales. On se souvient même que, dans un premier temps, vous avez tenté de vous en tenir à la mise en place d’un code de bonne conduite. Hélas ! nous le voyons à l’occasion de chaque nouvelle affaire, ce code dit « moral » n’empêche rien, car la finance internationale, celle qui sacrifie l’emploi sur l’autel des dividendes, n’a pas de morale.

Lorsque vous vous êtes enfin décidés à intervenir, ce fut à reculons. Ainsi, vous avez tout d’abord créé un forfait social à 2 %, autant dire presque rien, taux que vous avez doublé en 2009.

Or, ce que vous feignez d’oublier, c’est que nous avons pour notre part à de multiples reprises, et avant même que vous ne proposiez ce forfait social, défendu ici même une mesure simple : l’assujettissement de tous les éléments accessoires de rémunération au taux normal de cotisations sociales. Non seulement nous ne sommes pas restés inactifs, mais nous sommes allés bien plus loin que vous. Et si nous proposons de taxer ces compléments de salaires à hauteur de 20 %, c’est que nous sommes convaincus que rien ne justifie que leurs bénéficiaires, qui sont d’ailleurs ceux qui se voient attribuer les rémunérations les plus avantageuses, soient dispensés de contribuer aux mécanismes de solidarité, d’autant qu’ils disposent déjà du bouclier fiscal.

Nous ne perdons pas de vue le fait que cet article concerne aussi des personnes aux revenus plus modestes, les salariés. Eux n’ont pas de parachutes dorés, mais reçoivent des primes occasionnelles et annuelles de 1 500 euros et bénéficient de mécanismes d’intéressement ou de participation, au choix.

Nous considérons tous ces éléments comme des moyens de contournement de la législation sociale. Si les employeurs y ont recours, c’est parce que cela leur permet d’éviter à la fois les augmentations collectives de salaires et l’application du taux normal de cotisations sociales ; c’est parce que cela leur permet d’appliquer la règle du cas par cas, qui détruit les solidarités et met les salariés en concurrence permanente entre eux.

Ce mode managérial est à bout de souffle et nous connaissons aujourd’hui ses conséquences désastreuses sur la santé des salariés, notamment en termes de risques psychosociaux.

Les salariés eux-mêmes le disent lorsqu’ils sont interrogés sur ce point : leur revendication première, c’est l’augmentation des salaires et non le versement de primes individuelles et aléatoires.

M. le président. L'amendement n° 852, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le treizième alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Vous avez refusé d’adopter notre amendement qui tendait à interdire les mécanismes d’attribution d’actions ou de stock-options gratuites. Nous le regrettons, car ces mécanismes participent à l’intoxication de notre économie et entraînent des conséquences gravissimes en matière d’emploi. Pourtant, deux ans et demi après la crise, l’urgence est, à nos yeux, de désarmer la finance afin que l’argent serve non plus à l’accumulation de richesses qui ne sont jamais partagées, mais au financement d’une véritable politique de l’emploi qui privilégierait l’emploi de qualité et rémunérateur.

Si vous n’avez pas voulu stopper l’intoxication de l’économie par une finance mondialisée qui tourne à vide et joue contre l’emploi, peut-être entendrez-vous enfin notre appel répété à assujettir à cotisations sociales les actions gratuites distribuées par les entreprises. Disons-le clairement, ces dispositifs ne sont destinés qu’à une minorité de dirigeants.

Pour imposer cette réforme, le Gouvernement mise sur l’inquiétude : les comptes sociaux seraient dans le rouge et il faudrait prendre toutes mesures pour les rétablir, y compris les plus douloureuses pour les salariés. Or nous constatons que vous refusez systématiquement tous les amendements tendant au partage des efforts que nous avons déposés.

Avec cet amendement, nous n’annonçons pas le Grand Soir, nous demandons tout simplement l’assujettissement à cotisations sociales des actions distribuées gratuitement. Connaissant votre propension à refuser le débat sur le financement, je devine que vous vous prononcerez contre. Nous sommes cependant en droit de nous demander pourquoi. Si la sécurité sociale a besoin de ressources complémentaires, pourquoi se priver d’un tel dispositif ? Pourquoi renoncer à une mesure qui permettrait de récupérer quelques millions d’euros, de réinsuffler dans notre économie un peu de sens et de permettre l’émergence d’un cercle vertueux ?

Nous demandons un vote par scrutin public sur cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 856, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les entreprises qui ont recours au travail de nuit des salariés tel que défini à l'article L. 3122-29 du code du travail voient la part patronale de leurs cotisations sociales majorée de 10 %.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et sous l’influence du droit communautaire, l’interdiction du travail de nuit pour les femmes a été levée un peu plus d’un siècle après son instauration. Censée encadrer plus fortement le travail de nuit en consacrant le caractère dérogatoire de cette organisation de travail, elle n’a en réalité absolument pas empêché le recours au travail de nuit. Selon un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental, la progression du travail de nuit observée depuis 1991 se confirme en 2008, aussi bien pour les hommes que pour les femmes.

Ainsi, alors que, en 1991, 13 % des salariés travaillaient de façon occasionnelle ou habituelle entre minuit et cinq heures du matin, ils sont 15,4 % dans ce cas en 2008, soit une hausse de 1,1 million du nombre de salariés concernés entre 1991 et 2008. C’est surtout pour les femmes que la progression est la plus sensible, puisqu’elles ne représentaient que 5,8 % des salariés concernés par le travail de nuit en 1991.

Cette augmentation du travail de nuit habituel est particulièrement marquée pour les femmes entre 2002 et 2008. Sept catégories socioprofessionnelles regroupent les deux tiers des salariés travaillant habituellement de nuit, avec une forte distinction entre secteurs à forte dominante masculine et secteurs essentiellement féminins. Les hommes travaillant habituellement la nuit se trouvent parmi les ouvriers de l’industrie, les policiers, les militaires, les chauffeurs et autres professions largement masculines. Les femmes qui travaillent de nuit exercent surtout les fonctions d’employé civil et d’agent de service de la fonction publique ou les professions intermédiaires de la santé et du travail social. Toutefois, il faut noter que le travail de nuit est aussi de plus en plus fréquent pour les ouvrières non qualifiées de l’industrie.

Or, de l’avis de tous les professionnels de santé, le travail de nuit a des effets délétères sur la santé des salariés et donc sur leur durée de vie.

M. Roland Courteau. C’est particulièrement vrai !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est pourquoi nous proposons de majorer la part patronale des cotisations sociales pour les entreprises qui ont recours au travail de nuit. Par cette mesure, nous pensons garantir au travail de nuit un caractère exceptionnel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. L’amendement n° 855, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - Les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 6243-2 du code du travail sont supprimés.

II. - L’article L. 6243-3 du code du travail est abrogé.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Dans deux rapports sur les exonérations de charges sociales transmis à la commission des finances de l’Assemblée nationale en juillet 2006 et en octobre 2007, la Cour des comptes avait relevé que les nombreux dispositifs d’allégement de charges sociales étaient insuffisamment évalués, en dépit de la charge financière croissante qu’ils représentaient pour les finances publiques, soit 27,8 milliards d’euros en 2007, ou 1,5 % du PIB.

Ces remarques n’auront pas eu beaucoup d’effet puisque, en 2008, les exonérations de cotisations de sécurité sociale accordées aux employeurs ont atteint le montant record de 30,7 milliards d’euros, soit 13 % de plus que l’année précédente.

La Cour des comptes relevait pourtant l’inefficience d’une telle politique. Pour elle, l’efficacité sur l’emploi des allégements généraux de cotisations sociales sur les bas salaires est en effet trop incertaine pour ne pas conduire à reconsidérer leur ampleur, voire leur maintien. Quant aux allégements ciblés sur des territoires ou des secteurs d’activité, leur manque de lisibilité et leur incidence limitée sur l’emploi justifient un réexamen des différents mécanismes.

La pertinence de l’argument selon lequel ces exonérations serviraient à sauver des emplois doit donc être relativisée. En revanche, force est de constater qu’elles pèsent lourdement sur les comptes publics. Si, dans bien des cas, l’État s’engage à compenser ces exonérations auprès de la sécurité sociale, ce sont, en réalité, chaque année plus de 2 milliards d’euros qui ne sont pas remboursés et qui font défaut pour financer la protection sociale.

Pourtant, le Gouvernement refuse de remettre cette politique d’exonération en question et réfute de manière dogmatique tous les arguments montrant que les moyens existent pour sauver le système de retraite par répartition, garantir un droit à la retraite à 60 ans pour tous et une augmentation des pensions de retraite.

Vous comprendrez donc que, de notre côté, nous ayons du mal à accepter, en cette période de raréfaction des ressources pour la sécurité sociale, que l’on continue à exonérer les employeurs de cotisations sociales pour les apprentis qu’ils accueillent.

M. le président. L’amendement n° 857, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les entreprises dont le nombre de contrats à temps partiel, au sens de l’article L. 3123-1 du code du travail, correspondent à au moins 10 % de la masse salariale voient la part patronale des cotisations sociales majorée de 10 %.

La parole est à M. Jean-François Voguet.