Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec cet article 20, il s’agit, en fait, de décliner l’application de la réforme des retraites dans un ensemble de professions du secteur public soumises à des régimes spéciaux.

Les dispositions prévues à cet article se présentent de façon assez marquée comme une simple coordination, mais elles produisent en réalité un volume non négligeable de pseudo-économies pour le compte spécial de pensions.

Sont ainsi directement visés les personnels actifs de la police, les agents du contrôle aérien, les personnels de surveillance des établissements pénitentiaires et les enseignants de nos universités, entre autres métiers, et je salue au passage les sapeurs-pompiers professionnels !

Pour faire bonne mesure, la commission des affaires sociales a voté quelques amendements complémentaires qui tendent à mettre en cause les bonifications de carrière de certains agents, après que l’Assemblée nationale a allongé la liste des professions visées en y introduisant, notamment, les aides-soignants. La démarche menée par le Gouvernement et sa majorité, comme nous l’avons vu lors de l’examen des articles 8 et 9, tend donc à faire payer une partie de la réforme des retraites aux agents du secteur public.

On aura noté précédemment que, pour le moment, la plus sérieuse source de recettes induites est la mise en cause des statuts spécifiques des catégories dites « actives », même si la décote doit largement jouer son rôle dans les années à venir.

Allonger la durée de cotisation des agents publics, c’est effectivement exposer un plus grand nombre d’entre eux à la décote, surtout quand on sait que les fonctionnaires disposent, de manière générale, d’une durée de cotisation légèrement supérieure à 144 trimestres.

Cela signifie que, si leur emploi public a été le seul de leur vie professionnelle, ils s’exposeront rapidement à une décote importante sur leur pension : le passage à 40 annuités impliquait déjà la validation de 160 trimestres ; celui à 41,5 annuités placerait la barre à 166 trimestres.

Nul doute que le Gouvernement attend de cette situation qu’elle lui permette de dégager quelques menues économies au sein des effectifs appelés, chaque année, à faire valoir leur droit à pension.

L’article 20 consacre donc l’ensemble des attaques portées au statut des fonctionnaires : allongement de la durée de cotisation, minoration du droit à pension, réduction des bonifications, élargissement du risque de décote, etc. Mes chers collègues, nous ne pouvons que vous appeler à le repousser sans la moindre équivoque, en adoptant notre amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 157.

Mme Raymonde Le Texier. L’intention du Gouvernement est toujours la même.

Il applique aux régimes spéciaux le relèvement des bornes d’âge prévu par le projet de loi, dès que la montée en charge de la réforme de 2008 sera achevée, c’est-à-dire à la fin de l’année 2017. Pour notre part, nous condamnons le dispositif dans toutes ses déclinaisons.

Nous l’avons dit et nous le répétons, le groupe socialiste, comme la société française dans son ensemble, sait qu’une réforme des retraites est nécessaire, mais il veut qu’elle soit juste. Il n’ignore pas que le seuil des 60 ans constitue pour les Français un bouclier social, que vous entendez supprimer mais que nous jugeons indispensable à la cohésion sociale.

Nous demandons donc la suppression de cet article 20.

M. le président. L’amendement n° 351 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 25 et 157 ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression de l’article 20.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Cette explication de vote vaudra aussi pour l’article 20, monsieur le président.

Je me permettrai de citer quelques extraits d’une longue lettre que nous a envoyée une retraitée de la fonction publique, peu de temps après avoir appris que le présent texte viendrait en débat au Sénat :

« Le 30 juin 1950, j’ai quitté les bancs du lycée sur lesquels j’avais continué ma scolarité après le passage du brevet.

« Le 1er juillet de la même année, j’entrais comme agent auxiliaire dans le bureau de poste de ma commune de résidence pour commencer à y travailler comme opératrice du téléphone.

« J’avais à l’époque 18 ans et nous étions chargées, moi et mes collègues, de mettre en relation, sur les antiques standards téléphoniques à fiches, les personnes qui appelaient l’opératrice et les numéros de téléphone qu’elles voulaient joindre.

« Durant toutes les années cinquante et soixante, j’ai pratiqué à peu près tous les métiers de l’administration des postes et télécommunications.

« J’ai été, un temps, employée au centre des chèques postaux de Paris, où je passais mon temps à faire de la saisie mécanographique des opérations avant que de procéder à la destruction des chèques émis par les clients.

« J’ai intégré les services d’exploitation du téléphone, au moment où l’État avait décidé de procéder au développement du réseau national, en abandonnant peu à peu le réseau dit “manuel” pour le réseau automatique.

« Pour le téléphone, j’ai connu toutes les évolutions technologiques, jusqu’au jour où, en deux secondes, la France a ainsi pu basculer de la numérotation à sept chiffres à la numérotation à huit chiffres.

« J’ai aussi travaillé en bureau de poste, à une époque où la France comptait 18 000 bureaux, c’était même la publicité grand public de La Poste,… » – Je vois que M. Longuet acquiesce. Il a l’air tout à fait au courant ! – « …et où nous nous attachions à permettre aux usagers de recevoir leur courrier le lendemain de son envoi.

« Comme j’ai commencé à travailler à 18 ans, j’ai cotisé pendant 41,5 annuités à la retraite.

« Et comme j’ai fini ma carrière en position de cadre B, je dispose aujourd’hui d’une retraite qui dépasse un peu les 1 800 euros mensuels, d’autant que j’ai eu deux enfants de mon mariage, même si mon mari est aujourd’hui décédé.

« Cette retraite, inférieure de plus de 20 % à ma dernière rémunération – qui dépassait certes les 2 000 euros, mais au bout de plus de 40 années de carrière – est considérée comme trop élevée pour que je puisse aujourd’hui percevoir du régime général la moindre réversion de la retraite de mon mari.

« Alors que celui-ci, décédé avant l’âge de 60 ans, a cotisé pendant 35 ans, je ne touche que la réversion de quelques caisses de retraite complémentaire auxquelles il avait souscrit au fil de sa carrière.

« Avec ce que je perçois comme pension, je ne me considère pas comme une privilégiée, et mon revenu me permet de faire face, sans trop de difficultés mais en faisant tout de même attention, aux charges de ma maison et de profiter de ma retraite pour faire quelques voyages.

« Rien de sensationnel, d’autant que ma santé s’est détériorée avec le temps et que je dois suivre plusieurs traitements ».

Mes chers collègues, cette situation-là n’a rien d’exceptionnel. Elle est même finalement assez banale. Tout au plus peut-on dire que certains agents du secteur public ont eu une carrière aussi longue que cette personne, mais perçoivent une pension plus faible, parce qu’ils n’ont pas terminé leur carrière au même niveau.

Ce qui est certain, c’est que l’ensemble des mesures dites « de coordination » de l’article 20 conduiront, à un titre ou à un autre, à minorer les droits à pension et s’attaqueront au pouvoir d’achat des retraités du secteur public.

Mes chers collègues, je vous remercie de m’avoir écouté patiemment.

M. Jean Desessard. Attentivement !

M. Guy Fischer. Je crois qu’il était important de faire entendre la voix…

M. Gérard Longuet. De la base !

M. Guy Fischer. Tout à fait, cher collègue ! C’est la voix de la base, des Français ordinaires, de la proximité.

M. Jean Desessard. Et des cadres B de La Poste !

M. Guy Fischer. Nous ne voterons donc pas cet article et nous vous invitons bien sûr à adopter ces amendements tendant à le supprimer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 25 et 157.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 809, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 1 à 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Cet amendement tend à supprimer les alinéas 1 à 5 de cet article, qui portent, pour les agents de police, le droit à la retraite à 27 ans de cotisations, contre 25 ans à l’heure actuelle.

En effet, contrairement à ce que le Gouvernement voudrait faire croire, les régimes spéciaux sont concernés. Si la loi ne leur est pas applicable aujourd'hui, elle le sera demain, en 2017, ce qui vous permettra d’agir par la suite, par la voie réglementaire, c’est-à-dire de manière dissimulée, mais surtout en évitant ce front commun des mobilisations que vous craignez plus que tout.

Par cet amendement, nous entendons rappeler le caractère profondément injuste de votre réforme. L’ensemble des dispositions affectant les droits en matière de retraite représenterait une ponction de 22,6 milliards d’euros en 2018 et de 25,1 milliards d’euros en 2020.

Parallèlement, les propositions concernant la mise à contribution des hauts revenus, des revenus du capital et des entreprises ne font qu’égratigner les dispositions en faveur de ces derniers. Il est vrai que la taxation dont il est question ici n’est qu’illusoire. Il s’agit de donner le change à celles et ceux qui, contrairement à vous, proposent de réelles mesures de solidarité. En outre, comme vous refusez de mener une politique courageuse à l’égard des marchés financiers, vous reportez les efforts sur les salariés et les fonctionnaires !

Le prix de la réforme pour la fonction publique serait de 10 milliards d’euros en 2020 sur 25 milliards d’euros de ponction sur les salaires et les retraites, soit 40 % de l’effort total, alors que les fonctions publiques représentent 20 % de l’emploi salarié en France.

Cela passe, notamment, par une réduction des droits découlant du service actif qui reconnaît collectivement, par corps, la pénibilité dans la fonction publique et donne droit à un départ anticipé.

Pourtant, les agents de la police nationale connaissent réellement des conditions de travail dégradées.

Comment pourrait-il en être autrement quand le ministre de l’intérieur fait de la culture du résultat l’alpha et l’oméga de sa politique, alors que, dans le même temps, la RGPP conduira à la suppression de 10 000 postes entre 2004 et 2012, dont 4 000 postes rien que cette année ?

Si vous poursuivez cette politique, les agents et les Français doivent le savoir, il ne restera plus, à terme, que 100 000 policiers pour effectuer l’ensemble des missions de sécurité sur le territoire. C’est dire s’il sera porté atteinte aux conditions de travail de cette catégorie !

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression des alinéas 1 à  5 de cet article.

M. le président. L'amendement n° 810, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Vous savez désormais ce que nous pensons de l’application de cet article aux agents de la police nationale et les raisons pour lesquelles nous y sommes opposés. Je n’y reviendrai donc pas.

Avec cet amendement, nous proposons la suppression du cinquième alinéa de cet article, qui reporte de deux ans l’âge à partir duquel les bonifications du « cinquième » sont minorées. En d’autres termes, vous trouvez là un moyen supplémentaire de réduire les retraites et les pensions des agents de la police nationale. Certes, vous avez fait le choix de prolonger la durée d’activité de ces agents. Pour autant, vous n’étiez pas obligé de modifier les règles concernant les bonifications du « cinquième ».

C’est pourquoi, afin de ne pas continuer à pénaliser les agents de police, nous demandons la suppression de cet alinéa.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 809 et 810.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements nos 809 et 810.

Monsieur Autain, si nous suivions votre proposition présentée à l’amendement n° 810, tous les fonctionnaires de police seraient pénalisés.

Le report de deux ans que propose le Gouvernement permet d’éviter une extinction précoce du dispositif. La disposition est donc cohérente.

Je comprends tout à fait la logique de votre amendement, qui s’inscrit dans une perspective d’abandon du dispositif général. Toutefois, les limites d’âge étant repoussées de deux années, il faut automatiquement prévoir cette mesure de coordination.

En tout état de cause, si vous le souhaitez, je reste à votre disposition pour en rediscuter avec vous.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 809.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 810.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 811, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 6 à 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Avec cet amendement, nous entendons supprimer les dispositions de cet article qui sont applicables aux ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne. Cette profession, dont le statut a d’ailleurs été remis en cause par la directive européenne dite « Ciel unique », joue, vous le savez, un rôle important, car elle assure la chaîne de sécurité.

Au-delà de ce cas spécifique, monsieur le secrétaire d'État, nous souhaitons dénoncer le sort que vous réservez aux salariés dont le régime de retraite est dérogatoire au droit commun.

Je pense particulièrement à la manière dont vous avez refusé le dialogue social. En effet, les salariés des régimes de retraite réglementaires n’ont appris que vers la fin du mois de mai dernier s’ils seraient ou non concernés par le projet de loi.

D’ailleurs, les déclarations de M. Éric Woerth ont été très évasives, indiquant, en ce qui concerne les régimes spéciaux : « le sujet a été très largement abordé », lors de la réforme de 2007, et « beaucoup a été fait, ils sont en train de converger vers le système général. ». Ces propos tendaient à faire croire que les régimes spéciaux ne seraient pas concernés. On se souvient aussi de cette autre déclaration : « Nous respecterons à la lettre les engagements qui ont été pris en 2007. […] Les régimes spéciaux ont été réformés et considérablement réformés. »

On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien, puisque votre réforme sera applicable dès 2017 à l’ensemble des salariés des régimes dits spéciaux. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les cheminots, les dockers ou les agents des transports publics sont mobilisés contre votre projet de loi.

En réalité, ce qui compte pour vous, dans votre stratégie qui consiste à opposer les Français entre eux, c’est de pouvoir faire la démonstration que les bénéficiaires des régimes spéciaux, que vous présentez comme des privilégiés, sont eux aussi concernés.

Cependant, les privilégiés ne sont pas ceux que vous montrez du doigt ; ce sont celles et ceux qui n’ont pas besoin de travailler pour gagner de l’argent, et en gagner beaucoup. Ainsi, la plus grande fortune de France, qui est également le plus gros bénéficiaire du bouclier fiscal, perçoit plus de 32 000 euros de salaire par jour, ce qui équivaut à une rémunération égale à 25 355 fois le SMIC. Et l’on voudrait encore nous faire croire que ce sont les agents de la RATP, de la SNCF ou les salariés des mines qui seraient des privilégiés !

Alors que la crise n’est pas encore finie et que l’on demande aux salariés d’en payer le prix, les dividendes, eux, ne cessent de fleurir. Si l’on en croit Le Figaro du 23 février 2010, un tiers des entreprises cotées au CAC 40 ont augmenté les dividendes qu’elles distribuent à leurs actionnaires. Sept entreprises sur vingt-trois se montrent plus généreuses avec leurs actionnaires : en tête de peloton se trouve BNP Paribas et, en queue, sa rivale, la Société Générale, qui a pu obtenir de l’État le remboursement d’une part importante des dettes qu’elle a enregistrées en raison des pratiques spéculatives qu’elle laissait se développer, voire qu’elle encourageait.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Même avis, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bien que nous ayons déjà abordé la question des aiguilleurs du ciel à deux reprises, à l’occasion de l’examen de l’article 14 et, à l’instant, avec la présentation de cet amendement par M. Vera, il me semble utile d’apporter une précision supplémentaire.

Monsieur le secrétaire d'État, vous prenez souvent les exemples européens pour justifier votre réforme et vos politiques en général. Permettez-moi de faire de même en vous rappelant que, dans tous les pays européens, y compris dans ceux où la sécurité aérienne est assurée par des entreprises privées, l’âge de départ à la retraite est inférieur à 55 ans. Il faut dire que tous les pays ont compris que, pour assumer les responsabilités qui sont les leurs, mieux valait que les personnels concernés soient en bonne santé. C’est d’ailleurs ce postulat de base qui a conduit l’Europe à renforcer les critères médicaux et à étendre les causes d’inaptitude.

Prolonger la durée d’activité de ces agents aux missions singulières, c’est donc prendre le risque de multiplier les cas de licenciement pour inaptitude, ce qui n’est souhaitable ni pour les comptes sociaux ni pour les salariés concernés.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous invitons à voter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 811.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 20 (début)
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Discussion générale

10

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit communautaire, déposée sur le bureau de notre assemblée.

11

Communications du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le Président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 15 octobre 2010 :

- une décision du Conseil d’État sur une question prioritaire de constitutionnalité (n° 2010-84 QPC) ;

- et une décision de la Cour de cassation sur une question prioritaire de constitutionnalité (n° 2010-85 QPC).

Acte est donné de ces communications.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

12

Article 20 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Article 20

Réforme des retraites

Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

Nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 20.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Articles additionnels après l'article 20 (réservés)

Article 20 (suite)

M. le président. L'amendement n° 812, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 9 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le III de l’article 20, dont nous proposons la suppression, prévoit de repousser de deux ans l’âge légal de départ à la retraite pour les fonctionnaires appartenant aux corps du personnel de surveillance de l’administration pénitentiaire.

Ces agents sont, comme vous le savez, des acteurs indispensables de la vie en milieu carcéral. La dégradation de leurs conditions de travail, l’accroissement du stress, qui résulte notamment du manque cruel et grandissant de moyens, nous conduisent à proposer que ces agents ne soient pas concernés par cette loi, même en 2017.

Nous ne savons que trop, en effet, que vous entendez poursuivre dans l’avenir votre politique comptable de destruction des emplois publics. Le projet de budget pour 2011 du ministère de la justice en est la triste démonstration, puisqu’il ne prévoit aucune revalorisation indemnitaire et statutaire. Il limite les créations d’emplois à 413 et étend la réserve civile pénitentiaire.

Cette dernière mesure constitue une négation du stress qu’engendre ce métier et constitue une remise en cause insidieuse des difficultés de ce travail. Car, après tout, si un retraité peut le faire, c’est que ce n’est pas si dur que cela !

Pour vous, les surveillants pénitentiaires doivent travailler plus longtemps, y compris après leur départ à la retraite. Cette vision, nous ne la partageons pas. C’est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de ces alinéas.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales. La commission est évidemment défavorable à cet amendement qui vise à supprimer les alinéas 9 à 11 de l’article 20.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Même avis, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. J’ai une demande à formuler plus particulièrement à l’intention de M. le ministre.

Je reviens de Neuilly-sur-Marne, ville située à quinze kilomètres de Paris. Ce soir, j’ai pu constater que les automobilistes s’affolent devant les stations-service où les files d’attente atteignent plusieurs centaines de mètres dans certains secteurs. Le département de Seine-Saint-Denis a été également le théâtre de scènes extrêmement conflictuelles entre la police et les jeunes.

D’ailleurs, monsieur le ministre, vous avez très mal répondu à Mme Voynet ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Patrick Courtois. Oh ! Ce n’est pas bien !

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Je lui ai très bien répondu !

M. Jacques Mahéas. Le jour où vous aurez un enfant qui aura reçu un flash-ball, peut-être réagirez-vous d’une façon différente ! Dans ma ville, cela m’est arrivé ! Donc, je sais de quoi je parle ! (M. le ministre proteste.)

Monsieur le ministre, avez-vous relu ce que vous avez dit ?

M. Éric Woerth, ministre. J’ai honte pour vous !

M. Jacques Mahéas. Moi aussi, j’ai honte pour vous ! C’est tout à fait réciproque !

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vous n’étiez pas là quand M. le ministre a répondu !

M. Éric Woerth, ministre. Vous n’étiez pas là ! Vous n’êtes jamais là !

M. Jacques Mahéas. On a le droit de lire les comptes rendus ! (Exclamations sur les travées de lUMP.) Si vos propos ont été mal rapportés, faites faire des rectifications !

Les étudiants et les lycéens sont traités en irresponsables. (M. Nicolas About s’exclame.) Très franchement, je pense que tel n’est pas le fond de la pensée de plusieurs d’entre vous ici.

S’agissant de ce texte, les sondages sont très mauvais pour vous. Je vais vous faire une proposition qui vous paraîtra vraisemblablement provocatrice, monsieur le ministre : demandez une suspension de séance. (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Patrick Courtois. Et comment donc !

M. Jacques Mahéas. Téléphonez éventuellement à M. le Président de la République pour demander que l’on s’arrête là et que l’on remette tout à plat sur la table ! (Protestations sur les mêmes travées.) Demandez qu’entre hommes de bonne volonté, on trouve une solution, parce qu’on frôle de graves difficultés ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tous ceux qui ont eu à cœur, dans cette enceinte, de travailler sur la loi pénitentiaire, qui n’a bien entendu pas donné de résultats entièrement satisfaisants ni reçu l’ombre d’une application à ce jour, savent très bien que la question de la vie dans les établissements pénitentiaires tient beaucoup non seulement à un certain nombre de modifications de la législation, mais aussi à la qualité du travail du personnel.

À cet égard, chacun sait, parce qu’on a eu l’occasion d’en parler ici pendant de très longues heures, que la situation des personnels pénitentiaires n’est, en général, pas très enviable.

Je pense à ceux d’entre eux qui font l’effort – tous ne le font peut-être pas – de contribuer à rendre la vie en détention supportable pour les uns et les autres. C’est un bien mauvais signe qu’on leur envoie en refusant de maintenir pour eux le droit à pension qu’ils ont aujourd’hui !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 812.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 813, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 12 à 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Je voudrais faire un commentaire sur la politique menée par le Gouvernement au travers de cette réforme des retraites.

Le souci du Gouvernement, dans sa volonté de réduire les déficits budgétaires, est de faire pression pour diminuer de manière drastique les dépenses publiques. Il demande au plus grand nombre de faire des économies pour qu’elles se fassent avant tout sur le dos des travailleurs.

Lors de nos débats, vous avez affirmé, monsieur Woerth, que nous n’aimions pas les entreprises. Ce propos nous paraît scandaleux ! Mais à voir la politique que vous menez, on pourrait vous rétorquer que de votre côté, vous n’aimez pas le monde du travail !