Articles 27 ter, 27 quater et 27 quinquies
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Articles additionnels après l’article 27 sexies A (réservés)

Article 27 sexies A (nouveau) (réserve)

Après le I de l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Le calcul de l’âge mentionné aux 2° du I s’effectue à compter de 2016 à partir de l’âge mentionné au premier alinéa de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale. Cet âge est fixé par décret de manière croissante à raison de quatre mois par année pour les années 2011 à 2016. »

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le président, le Gouvernement souhaite que la discussion de cet article soit réservée jusqu’à mercredi.

En effet, la commission a avancé sur le sujet extraordinairement sensible de l’amiante et le Gouvernement est prêt à suivre cette avancée, mais il a besoin de temps pour faire en sorte que la rédaction du texte soit la plus claire possible.

M. Daniel Raoul. Ça nous changera !

M. Éric Woerth, ministre. Car nous considérons que tel n’est pas encore le cas et nous souhaitons pouvoir discuter en nous appuyant sur un texte qui soit vraiment solide. C’est pourquoi il me semble raisonnable de remettre cette discussion à la séance de mercredi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve ?

M. Gérard Dériot, vice-président de la commission des affaires sociales. Si j’ai bien compris, M. le ministre approuve sur le fond les amendements identiques qui ont été déposés sur l’article 27 sexies A – je suis, à titre personnel, l’auteur de l’un d’entre eux –, mais il souhaite que nous parvenions à la rédaction la plus sûre possible.

Pour la commission, il est évident que les victimes de l’amiante doivent pouvoir continuer à bénéficier des limites d’âge actuelles pour entrer dans le dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, ou CAATA.

Au nom de la commission, j’émets donc un avis favorable sur cette demande de réserve, de manière que nous puissions examiner cet article et les amendements qui s’y rapportent au cours de la journée de mercredi.

M. le président. Je vais également demander à M. Jean-Pierre Godefroy de nous dire ce qu’il en pense, car il est l’auteur d’un des amendements identiques.

M. Jean-Pierre Godefroy. Bien sûr, je n’ai pas d’avis à donner, mais, dans la mesure où M. le ministre vient de nous dire que sa demande répondait au souhait d’obtenir une rédaction du texte qui offre toutes garanties de sécurité, je suis tout à fait d’accord pour que la discussion de cet article soit renvoyée à mercredi.

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. J’espère que la commission pourra se réunir à nouveau avant la discussion de cet article, afin de définir clairement sa position avant d’arriver en séance.

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Gérard Dériot, vice-président de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, il m’a semblé comprendre que nous serions saisis d’un amendement du Gouvernement : la commission devra donc nécessairement se réunir pour en prendre connaissance.

M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?...

La réserve est ordonnée.

Article 27 sexies A (Nouveau) (réservé)
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Articles 27 sexies et 27 septies

Articles additionnels après l’article 27 sexies A (réservés)

M. le président. Je rappelle que l’ensemble des amendements portant articles additionnels ont été réservés jusqu’après l’article 33.

Articles additionnels après l’article 27 sexies A (réservés)
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Article 27 octies (Nouveau)

Articles 27 sexies et 27 septies

(Supprimés)

Chapitre III

Dispositions communes

[Division et intitulé nouveaux]

Articles 27 sexies et 27 septies
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Article additionnel avant l'article 28 (réservé)

Article 27 octies (nouveau)

Avant le 1er janvier 2014, le Gouvernement présente au Parlement un rapport établissant un bilan de l’application des dispositions du présent titre.

Sur la base des travaux du comité scientifique, ce rapport formule des propositions en vue de prendre en compte la pénibilité à effets différés.

M. le président. L'amendement n° 1083, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer l'année :

2014

par l'année :

2012

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Dans le texte qui nous est présenté, on repousse à 2014 la date d’échéance pour la présentation au Parlement du rapport. Or, il nous semble important d’en disposer avant. Nous préférons donc que cette date soit fixée au 1er janvier 2012.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission juge nécessaire de maintenir l’échéance de 2014, afin que le comité ait le temps de mener ses études. L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1083.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1167 rectifié, présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf et Darniche, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Nous proposons de supprimer l’alinéa 2, afin de ne pas présumer des conclusions du rapport que le Gouvernement devra remettre pour évaluer le dispositif de compensation de la pénibilité. C’est, là aussi, une question d’ordonnancement. Comme j’ai eu l’occasion de l’expliquer à plusieurs reprises cet après-midi au sujet du mécanisme, je considère qu’on va trop vite. C’est pourquoi cette suppression est nécessaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Nous avons déjà évoqué cette pénibilité à effets différés. La commission souhaite que la réflexion sur la prise en compte de ce type de pénibilité soit lancée dès à présent. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Également défavorable.

M. Philippe Dominati. Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 1167 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 27 octies.

(L'article 27 octies est adopté.)

TITRE V

MESURES DE SOLIDARITÉ

Chapitre Ier

Dispositions applicables au régime des exploitants agricoles

Article 27 octies (Nouveau)
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Article 28 (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel avant l'article 28 (réservé)

Article additionnel avant l'article 28 (réservé)
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Article 28

M. le président. Je rappelle que l’ensemble des amendements portant articles additionnels ont été réservés jusqu’après l’article 33.

Article 28 (Texte non modifié par la commission)
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Articles additionnels après l'article 28 (réservés)

Article 28

(Non modifié)

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 732-56 est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Sont affiliées au régime de l’assurance vieillesse complémentaire obligatoire les personnes ayant, à compter du 1er janvier 2011 ou postérieurement à cette date, la qualité d’aide familial telle que définie au 2° de l’article L. 722-10 ou la qualité de collaborateur d’exploitation ou d’entreprise agricole telle que définie à l’article L. 321-5. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 732-58 est ainsi rédigé :

« – par le produit des cotisations dues, au titre de ce régime, par les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole pour leurs propres droits et, le cas échéant, pour les droits des bénéficiaires mentionnés au IV de l’article L. 732-56 ; »

3° Après le deuxième alinéa de l’article L. 732-59, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les personnes mentionnées au IV de l’article L. 732-56, l’assiette des cotisations est égale à un montant forfaitaire fixé par décret. » ;

4° Le premier alinéa de l’article L. 732-60 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « personnes affiliées » sont remplacés par les mots : « chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole affiliés » ;

b) Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Les aides familiaux et les collaborateurs d’exploitation ou d’entreprise agricole affiliés au présent régime bénéficient, à compter de la date d’effet de leur retraite mentionnée aux articles L. 732-34 et L. 732-35, et au plus tôt au 1er janvier 2011, d’une retraite exprimée en points de retraite complémentaire. » ;

5° L’article L. 732-62 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de décès d’un aide familial ou d’un collaborateur d’exploitation ou d’entreprise agricole après le 31 décembre 2010, son conjoint survivant a droit au plus tôt au 1er janvier 2011 à une pension de réversion du régime complémentaire s’il remplit les conditions personnelles prévues au premier alinéa. Cette pension de réversion est d’un montant égal à 54 % de la pension de retraite complémentaire dont bénéficiait ou aurait bénéficié l’assuré. Toutefois, lorsque la pension de retraite n’a pas été liquidée au jour du décès de l’assuré, cette pension de réversion est versée sans condition d’âge si le conjoint survivant est invalide au moment du décès ou ultérieurement, ou s’il a au moins deux enfants à charge au moment du décès de l’assuré. »

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier, sur l'article.

Mme Jacqueline Alquier. L’article 28 vise à étendre la retraite complémentaire obligatoire – la RCO – du régime des exploitants agricoles aux aides familiaux et aux collaborateurs de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole.

Cette extension était réclamée depuis longtemps. C’est une avancée que nous saluons, même si nous considérons que cette demande aurait pu être satisfaite plus tôt puisqu’une proposition de loi du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, portant sur le même objet, a été rejetée en janvier dernier. Cette proposition de loi allait d’ailleurs plus loin : elle prévoyait une contribution de l’État pour la mise en place de cette extension, comme lors de la mise en place de la RCO par le gouvernement Jospin. Les chefs d’exploitation avaient alors bénéficié de droits gratuits.

Dans le présent texte, nous aurions apprécié une telle mesure d’accompagnement. Ce serait digne et respectueux du travail fourni par les agriculteurs pour le bien commun : ils nous nourrissent, offrent un poumon vert à nos villes, entretiennent les espaces ruraux...

Cet article vient donc normaliser une situation dont vous reconnaissez vous-mêmes, fût-ce avec retard, qu’elle était anormale, mais nous en prenons acte !

Néanmoins, en permettant l’affiliation à la RCO des aides familiaux et collaborateurs d’exploitation à compter du 1er janvier 2011, vous excluez un grand nombre de personnes du bénéfice de la loi.

Il faut donc, pour être complètement juste, élargir le champ d’application très restreint de ce projet de loi, qui remet à un avenir lointain une avancée dont les aides et conjoints ont besoin maintenant, alors qu’ils se trouvent aujourd’hui trop souvent dans une situation de précarité inacceptable du fait de l’indigence des retraites agricoles versées.

L’examen de cet article me donne l’occasion d’insister à nouveau sur la baisse constante du pouvoir d’achat des agriculteurs et de leurs ayants droit.

La dernière revalorisation, de l’ordre de 25 euros mensuels, n’a concerné que les personnes ayant eu une carrière complète. Elle est loin de leur permettre de percevoir les 85 % du SMIC attendus puisque le montant minimum atteint aujourd’hui péniblement 645 euros pour une carrière complète de chef d’exploitation et 512 euros pour un conjoint ayant également effectué une carrière complète.

Il paraît alors nécessaire de revenir sur une demande légitime, soutenue par notre groupe lors des débats à l’Assemblée nationale : il faut que le montant d’une pension de retraite agricole ne puisse pas être inférieur à l’allocation de solidarité aux personnes âgées, qui remplace le minimum vieillesse et assure un revenu minimal de 709 euros.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, sur l'article.

M. Yannick Botrel. Cet article apporte une avancée, dans la mesure où il tend à permettre l’extension du bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire aux aides familiaux et aux conjoints collaborateurs, qui en étaient exclus jusqu’à présent.

Toutefois, cette amélioration ne change pas le fond du problème : la faiblesse des retraites agricoles.

Les conditions de ressources des retraités agricoles sont inacceptables. Qu’on en juge : ces ressources s’élèvent, en moyenne mensuelle, à 645 euros pour un chef d’exploitation et 512 euros pour son conjoint, et ce pour une carrière complète.

M. Roland Courteau. Une honte !

M. Yannick Botrel. Il s’agit des retraites les plus basses en France. Elles n’atteignent même pas 75 % du SMIC. D’ailleurs, 90 % des mono-pensionnés du secteur agricole vivent en dessous du seuil de pauvreté, qui est de 817 euros par mois.

Injustice supplémentaire, les pensions agricoles se calculent sur toute la carrière, soit 162 trimestres à ce jour, alors que celles du régime général se calculent sur les vingt-cinq meilleures années. (M. Roland Courteau acquiesce.)

Ce mode de calcul est désavantageux en raison de l’incertitude des recettes. Les années d’exercice déficitaire, sur 41,5 années, seront hautement préjudiciables au calcul de la retraite, alors qu’un calcul sur les vingt-cinq meilleures années mettrait les exploitants dans une situation moins défavorable.

Dès lors, l’extension du bénéfice de la RCO aux aides familiaux et aux conjoints collaborateurs ne peut être qu’accueillie avec satisfaction, une satisfaction toutefois relative. En effet, il s’agit simplement de la réparation d’une injustice flagrante.

Il y a fort à parier que cette avancée se traduira par une augmentation des cotisations sociales, qui pèsent déjà lourdement dans les comptes des exploitations. De plus, nous ne pouvons que déplorer la date d’application du 1er janvier 2011, dans la mesure où elle prive ceux qui prennent actuellement leur retraite ou qui sont déjà en retraite du bénéfice de ces mesures.

Bien entendu, le groupe socialiste du Sénat a déposé un amendement visant à étendre le champ d’application du bénéfice de la RCO dans ce cadre, mais il doit se contenter de demander un rapport pour ne pas tomber sous le coup de l’article 40.

Cette situation n’est en effet pas acceptable pour les personnes qui sont actuellement retraitées, qui remplissent les critères et dont les conditions sociales sont plus que précaires. Il s’agit d’un manque de cohérence avec les autres systèmes de retraite. De plus, le système mis en place supprime les points gratuits, qui existaient avant le 1er janvier 2009.

Ce projet de loi portant réforme des retraites aurait mérité une vraie réflexion sur la situation des retraités agricoles et de leurs conditions de vie. Les articles 28 et 29 effleurent seulement la question, ne proposant que des palliatifs à une situation méritant une refonte globale.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Yannick Botrel. D’ailleurs, nous l’avons dit, envisager le départ en retraite à 62 ans ne semble pas réaliste. On ne tient compte ni des travaux pénibles effectués, ni de la charge de travail, par tous les temps et avec des horaires extrêmes, ni des vacances réduites et souvent inexistantes, ni des débuts de carrière précoces, ni des difficultés en fin de carrière, ni des tâches lourdes.

Au-delà, c’est un manque de prise en compte de la paupérisation grandissante des agriculteurs et des retraités de l’agriculture.

Globalement, le pouvoir d’achat des agriculteurs baisse. La revalorisation des pensions ne concerne que des personnes ayant effectué une carrière complète. Ainsi, la revalorisation prévue dans la loi de finances pour 2009 n’a touché que 10 % des retraités agricoles.

Nous ne pouvons donc pas être défavorables aux mesures proposées à cet article, mais il faut régler, de toute urgence, la question des retraites agricoles, dans un esprit de justice sociale et de refus de la précarisation des agriculteurs retraités. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.

M. Guy Fischer. Avec ce titre V, nous entamons l’examen des mesures de solidarité et, avec le chapitre Ier, les dispositions applicables au régime des exploitants agricoles.

Le secteur agricole est symptomatique de ce fossé qui se creuse entre les riches et les pauvres comme du désespoir qui gagne les travailleurs. Ces travailleurs, on voudrait les faire travailler plus sans pour autant leur proposer un travail et sans prendre en considération la pénibilité de leurs métiers.

Les agriculteurs, toutes filières confondues, sont en colère et inquiets.

La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, comme sa « grande sœur », la loi de modernisation de l’économie, ne prend pas en considération les rapports commerciaux déséquilibrés entre les différents acteurs de la filière agricole. Elle ne garantit absolument pas des prix rémunérateurs aux agriculteurs. Alors que des milliers de travailleurs agricoles arrivent à peine à vivre, on leur demande de travailler plus longtemps pour avoir le droit de prendre leur retraite.

L’extension de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints collaborateurs et aides familiaux, prévue à l’article 28 du projet de loi, est donc une bonne chose en soi.

Il s’agit là d’une mesure d’équité, dont bénéficient directement les personnes les plus démunies dans le cadre du régime agricole, en particulier les femmes ayant contribué sans reconnaissance économique ni sociale à la vie des exploitations tout au long de leur vie.

Mme Annie David. Eh oui, toujours les femmes !

M. Guy Fischer. Il était grand temps d’accorder, à celles dont l’activité, du fait d’une division sexuelle du travail, était spécifique et reconnue de tous – je pense notamment aux tâches quotidiennes de suivi et de gestion de l’exploitation, effectuées en sus des tâches plus spécifiquement familiales –, une juste rétribution de leurs efforts, trop longtemps passés sous silence.

Cependant, contrairement à ce qui s’était passé en 2003, le Gouvernement ne veut pas attribuer des droits gratuits aux nouveaux bénéficiaires. En clair, cela signifie que, si la RCO n’est perçue que sur les années cotisées, la retraite complémentaire sera insignifiante pendant longtemps.

Par ailleurs, selon le projet de loi, l’assiette des cotisations sera forfaitaire, dans des conditions fixées par décret. Comme le notent certains syndicats d’agriculteurs, l’assiette minimum de cotisation actuellement en vigueur pour la RCO des chefs d’exploitation agricole est supérieure à l’assiette sociale déclarée par 70 % d’entre eux. C’est donc la grande majorité des agriculteurs qui surcotisent pour leur retraite complémentaire.

Cette assiette minimum devrait être ramenée à des niveaux plus proches de la réalité des revenus des agriculteurs. Peut-être M. le ministre nous donnera-t-il des indications sur ce décret pour que nous sachions quelles seront les modalités retenues ?

Enfin, une attention particulière doit être portée à la situation des conjoints d’exploitation.

En effet, les mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 remontent le niveau de retraite des conjoints participant aux travaux à la pension annuelle majorée de référence de deuxième niveau – la PMR2 –, soit 508 euros par mois, et le niveau de retraite des conjoints collaborateurs à la pension annuelle majorée de référence de premier niveau – la PMR1 –, soit 639 euros par mois entre 1999 et 2008.

Rappelons que les conjoints collaborateurs, en choisissant ce statut lors de sa création en 1999, ont dû cotiser davantage pour acquérir plus de droits à la retraite.

Les pensions restent très faibles et leur statut incomplet.

Ainsi, nous avions proposé, pour tenir compte des réalités sociales, que soit prise en compte la conclusion d’un pacte civil de solidarité. Nous pensons qu’il est temps d’étendre le bénéfice de la pension de réversion aux couples pacsés dont le contrat excède deux ans, comme le préconise d’ailleurs le Médiateur de la République.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, sur l’article.

Mme Christiane Demontès. La retraite des agriculteurs n’est certainement pas une problématique nouvelle. Elle concerne très directement 4 millions de nos concitoyens, soit, à parts égales, 2 millions de salariés et 2 millions de non-salariés.

Dire que les agriculteurs sont très inquiets est une lapalissade. Comment ne le seraient-ils pas quand les pensions des anciens exploitants figurent parmi les retraites françaises les plus faibles ? Nombreux sont les retraités agricoles à ne pas atteindre le minimum vieillesse alors qu’ils justifient d’une carrière complète.

Les chiffres sont sans appel : 645 euros de retraite de base par mois en moyenne pour les chefs d’exploitation, selon la FNSEA, et 745 euros par mois en moyenne si l’on compte la retraite complémentaire, contre environ 1 200 euros par mois pour l’ensemble des retraités français, retraite complémentaire comprise.

La raison fondamentale de ces faibles montants réside dans la faiblesse du revenu des agriculteurs. Comment en serait-il autrement lorsque la prestation dépend de la cotisation versée, elle-même assise sur le revenu ? Or plus de 65 % des exploitants déclarent moins de 16 000 euros de revenu annuel.

La part la plus importante de la retraite étant proportionnelle au revenu, il n’est pas étonnant que la retraite totale soit faible. Un élément majeur tire les retraites paysannes vers le bas : les périodes de crise sanitaire d’élevage, de crise de commercialisation des fruits et légumes ou de cours bas pour les céréales « plombent » le revenu et font mécaniquement chuter le nombre de points de retraite.

De plus, les pensions des agriculteurs, à la différence de celles de la plupart des salariés, ne sont pas assises sur les vingt-cinq meilleures années, mais adossées au revenu moyen de toute leur carrière.

Ces montants sont aussi la conséquence de l’état dans lequel se trouve notre monde agricole. Depuis de trop nombreuses années, il est soumis à la déréglementation, à la constante pression à la baisse des prix de vente et à l’augmentation des coûts de production. Prise en tenaille, notre agriculture connaît une crise sans précédent. Celle-ci n’épargne aucun territoire, aucune filière. Partout, les femmes et les hommes qui travaillent dans ce secteur essentiel à notre société enregistrent des baisses de revenu impressionnantes, qui avoisinent les 34 % en moyenne.

M. Roland Courteau. Et il y a des baisses bien plus fortes !

Mme Christiane Demontès. Dans ce contexte fait d’urgence et de nécessaire mise en perspective, nous espérions que la loi de modernisation de l’agriculture apporterait enfin des réponses : mais rien, ou si peu d’avancées ; en tout cas, pas de réglementation, pas de prix plancher. Ainsi, l’objectif de stabilisation des revenus agricoles n’est pas atteint, et le rapport de force déséquilibré en faveur des industriels et distributeurs, qui pénalise tant le monde agricole, est toujours aussi prégnant. Certains évoquent même le risque de voir 200 000 à 300 000 emplois menacés à court terme dans ce secteur.

Un plan quinquennal destiné à relever les retraites de base des agriculteurs avait vu le jour sous le gouvernement de Lionel Jospin, qui s’était engagé budgétairement au nom de la solidarité nationale. Les retraites des chefs d’exploitation avaient été relevées de 29 %, celles des veuves de 49 %, et celles des conjoints ou aides familiaux de 80 %. L’effort budgétaire était allé croissant, et était passé de 1,1 milliard à 2,2 milliards de francs de 1999 à 2002.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

Mme Christiane Demontès. Conjointement, un régime complémentaire obligatoire avait vu le jour. Compte tenu du régime démographique, l’État avait pris à sa charge le tiers du montant à verser aux 475 000 chefs d’exploitations.

Récemment, une proposition de loi émanant de notre collègue député Germinal Peiro a été débattue à l’Assemblée nationale. Elle visait à étendre ce dispositif de retraite obligatoire aux conjoints et aides familiaux... L’UMP l’a rejetée !

Le 11 septembre 2007, le Président de la République déclarait, à Rennes : « Ces inégalités, on les retrouve pour vos anciens. Et là aussi j’ai envie de dire la vérité. Les retraites moyennes agricoles sont de moins de 400 euros par mois. Et ce n’est pas parce que les agriculteurs manifestent moins, en tout cas les retraités, que cette injustice est plus acceptable. Qui peut dire que c’est une situation digne et équitable, alors que le métier est par ailleurs si rude ? Et je pense aussi aux veuves. (...] Je vais changer cette situation parce qu’elle est indigne ». On retrouve bien là la tonalité des propos du Président de la République !

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Christiane Demontès. Dans les faits, ce texte ne propose rien ou presque rien. Certes, il y a bien la mesure consistant à étendre le bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire agricole à partir du 1er janvier 2011, ou postérieurement à cette date, mais elle ne s’adresse pas aux retraités.

Nous le savons tous, les agriculteurs n’ont jamais demandé une aumône, ils ne demandent que leurs droits.

Bref, si cet article constitue une timide avancée, il reste bien en deçà des attentes du monde agricole, et notamment des agriculteurs âgés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. L’amendement n° 267, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet, est ainsi libellé :

I. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

6° À l'article 4 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « ou un non-salarié ».

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean Desessard.