M. Jacques Mahéas. Résultat, trois cents familles demandent un autre mode d’accueil. Lequel ? Principalement l’accueil en crèche.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Une maison d’assistante maternelle !

M. Jacques Mahéas. L’accueil chez une assistante maternelle, oui.

Mais, rendez-vous compte, les demandes de trois cents familles représentent, pour une ville de trente-cinq mille habitants, la création de cinq crèches de soixante berceaux, soit cent créations de postes !

Je prendrai un autre exemple concernant, cette fois, la police nationale.

Si tant de communes ont opté pour une police locale, c’est bien parce que la police nationale n’était pas assez efficiente ! Et on le comprend très bien quand on constate que, malheureusement, aucun commissariat n’a bénéficié du moindre emploi sur les cinq cents créations annoncées par le préfet de police en Île-de-France ! J’en sais quelque chose, puisqu’il manque à Neuilly-sur-Marne une vingtaine de policiers sur l’effectif théorique d’une centaine !

Ce ne sont là que deux exemples, mais je pourrais en citer bien d’autres ! Par conséquent, face aux difficultés que rencontrent les communes, les départements et les régions, n’insistez pas sur la vertu de l’État ! (Approbations sur les travées du groupe socialiste.) Au bout du bout, c’est bien la commune qui récolte les charges décentralisées, après le département et la région !

Il est véritablement peu vertueux de votre part d’avoir procédé à une décentralisation sans transfert des moyens appropriés pour que les collectivités territoriales assument les responsabilités qui étaient autrefois celles de l'État.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je ne pensais pas intervenir, mais je ne peux m’abstenir dans cet intéressant débat de fond, après les interventions que je viens d’entendre.

M. Bernard Frimat a fait allusion à la gestion locale. Mais, dans l’exercice de nos mandats locaux, nous faisons tous, dans des fonctions diverses, selon qu’il s’agit de grandes villes ou de petites collectivités territoriales, de la gestion locale. Par conséquent, nous devons rester objectifs.

Comme le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Alain Vasselle, l’a rappelé tout à l’heure, il ne faut pas oublier non plus, ce que l’on fait trop souvent, les dizaines de milliards d’euros qui sont inscrits dans le budget et que l’État alloue à l’ensemble des collectivités territoriales : communes, intercommunalités, départements et régions !

Il est vrai qu’il s’agit d’un sujet très technique et fort peu médiatique pour nos concitoyens, à l’exception, bien sûr, des élus qui sont au cœur de nos collectivités territoriales et qui s’en rendent compte. Toutefois, il y aurait des messages forts à faire passer, ne serait-ce que, dans la section de fonctionnement du budget des communes, avec la dotation globale de fonctionnement et les dotations de péréquation telles que la dotation de solidarité rurale, la dotation de solidarité urbaine, la dotation élu local, la dotation nationale de péréquation, etc., sans parler des compensations liées aux impôts locaux ou encore les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, qui aident non seulement les communes concernées, mais en outre les communes défavorisées.

Ce sont autant de dotations qui « tombent » dans les différents budgets communaux, qu’il s’agisse des communes et des intercommunalités, qui sont loin d’être négligeables et qui permettent aux collectivités territoriales de vivre !

Certes, elles investissent, il faut le reconnaître et s’en féliciter, mais l’État le fait aussi par l’intermédiaire des dotations d’investissement. C’est ainsi que la dotation globale d’équipement permet, par le biais des représentants de l’État, d’aider les collectivités locales, en particulier les petites communes. C’est encore une façon de soutenir l’investissement de nos collectivités territoriales qui pratiquent une gestion de proximité.

Enfin, M. le ministre en a parlé tout à l’heure, le dispositif du plan de relance qui permet le remboursement anticipé du fonds de compensation pour la TVA constitue aussi un soutien très important. Nombre de collectivités locales ont d’ailleurs signé des conventions avec les représentants de l’État, justement pour percevoir ces remboursements très rapidement ! Il en est de même du plan de relance du secteur du bâtiment et des travaux publics.

Alors restons objectifs et disons la vérité ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

M. Jean Louis Masson. Cet amendement est sympathique, mais on ne peut pas toujours se plaindre des transferts de charges, surtout quand les représentants des collectivités concernées ont, par le passé, réclamé de tels transferts !

Par exemple, les départements avaient insisté lourdement pour un transfert des routes nationales. Entre 2002 et 2007, nous avons assisté, au cours des débats, à d’importants conflits pour savoir qui, entre les départements et les régions, accaparerait les compétences ainsi décentralisées !

Des sénateurs présidents de conseil général ont siégé assidûment dans cet hémicycle pour modifier la version initiale du projet de loi qui prévoyait un transfert plus important en faveur des régions, au détriment des départements.

Si on se plaint maintenant de la charge que cela représente pour les départements, c’était aux élus de l’époque qui se battaient pour récupérer de telles attributions de réfléchir avant. On ne peut pas réclamer des charges et se plaindre ensuite de ne pouvoir équilibrer un budget !

Toutefois, de manière plus générale, cet amendement pose un vrai problème, à savoir que les collectivités territoriales ont de moins en moins de ressources. Les subventions européennes ont été verrouillées, la DGE et la DGF sont bloquées, la taxe professionnelle n’est pas réellement compensée...

Dans le même temps, elles ont de plus en plus, non pas d’attributions décentralisées – je ne suis pas d’accord sur cette analyse-là –, mais de charges créées ex nihilo !

Prenons l’exemple de l’accessibilité des bâtiments d’habitation collectifs existants pour les personnes handicapées ou de l’assainissement. Pour les petites communes rurales, c’est une vraie catastrophe !

Le problème n’est donc pas lié à des transferts de charges, mais à la création de charges. Les collectivités territoriales sont ainsi prises en étau entre, d’une part, des recettes qui diminuent et, d’autre part, des charges qui sont progressivement créées.

Je l’ai dit tout à l’heure, il n’est pas toujours souhaitable de supprimer des impôts. Pour ma part, j’ai voté contre la suppression de la taxe professionnelle, car je considère que cette suppression est une erreur. Cela revient en effet à faire disparaître un impôt qui rapportait de l’argent, en le remplaçant par des compensations plus ou moins gelées.

Il convient donc de dépasser le cadre de cet amendement pour réfléchir de manière plus globale sur cette question.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

J’ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 94 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l’adoption 153
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014
Article 5

Articles additionnels après l'article 4

Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 7 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion est ainsi modifié :

1° Les quatre derniers alinéas du II sont supprimés ;

2° Après le II, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ... . - À compter de l'exercice 2010, l'État assure la compensation au département des sommes versées au titre des articles L. 262-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles sur la base de la différence entre le produit de cette compensation et les dépenses réelles constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.

« Cette compensation est ajustée chaque année, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

« Dans l'attente du calcul de la compensation définitive au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. »

II. - La compensation complémentaire aux départements est assurée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.

III. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je regrette que MM. Vasselle et Marini soient partis… Nous nous chargerons de leur faire le compte rendu du débat, qui est intéressant.

Je souhaite, madame la présidente, présenter en même temps les amendements nos 2, 3 et 4, qui procèdent de la même philosophie que l’amendement qui vient d’être rejeté.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion les deux amendements suivants.

L’amendement n° 3, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° La section 1 du chapitre II du titre III du livre Ier est complétée par une sous-section ainsi rédigée :

« Sous-section 3

« Dispositions communes à l'allocation personnalisée d'autonomie à domicile et en établissement 

« Art. L. 232-11-1. - À compter de 2010, les charges résultant, pour les départements, des prestations versées au titre des articles L. 232-3 et L. 232-8 du code de l'action sociale et des familles sont compensées sur la base des dépenses constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.

« La compensation versée en application de l'article L. 232-3 précité est calculée hors le montant actualisé versé en 2001 au titre de la prestation spécifique de dépendance, créée par la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance.

« Les compensations versées au titre des deux alinéas précédents sont ajustées par département, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

« Dans l'attente du calcul de ces compensations définitives au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. »

2° Après l'article L. 232-3, il est inséré un article L. 232-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 232-3-1. - I. - Pour chaque département, le droit à compensation de l'allocation personnalisée d'autonomie à domicile est calculé en prenant en référence le plan d'aide moyen national établi par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

« Sur la base de la moyenne des dépenses constatées au titre des trois derniers exercices, la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule, pour chaque département et au niveau national, les montants moyens des plans d'aide établis à l'aide de la grille nationale mentionnée à l'article L. 232-2 pour chacun des groupes iso-ressources.

« Elle détermine aussi pour chaque département et au niveau national le montant moyen des plans d'aide sur l'ensemble de ces groupes.

« II. - Pour les départements dont le montant moyen des plans d'aide est supérieur au montant moyen des plans d'aide au niveau national, le droit à compensation est calculé en multipliant le nombre réel de bénéficiaires par le montant national résultant du calcul effectué au deuxième alinéa du I.

« III. - Pour les départements dont le montant moyen des plans d'aide est inférieur au montant moyen des plans d'aide au niveau national, le droit à compensation est calculé en multipliant le nombre réel de bénéficiaires par le montant départemental résultant du calcul effectué au deuxième alinéa du I.

« IV. - Chaque département reçoit 90 % du droit à compensation visé au II et III. »

3° Après l'article L. 232-8, il est inséré un article L. 232-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 232-8-1. - I. - Le droit à compensation de l'allocation personnalisée d'autonomie en établissement est calculé en prenant en compte l'ensemble des forfaits globaux mentionnés au 2° de l'article L. 314-2 versés dans le département aux établissements relevant du I de l'article L. 313-12.

« La caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule pour chaque département et au niveau national, les valeurs départementales et la valeur nationale du point groupe iso-ressources dépendance en divisant pour le dernier exercice connu le total des forfaits globaux mentionnés au 2° de l'article L. 314-2 par le total des points groupes iso-ressources dépendance des établissements concernés.

« La caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule aussi le groupe iso-ressources moyen pondéré des établissements relevant du I de l'article L. 313-12 dans le département.

« II. - Pour les départements dont la valeur du point groupe iso-ressources dépendance est supérieure au montant de la valeur nationale, le droit à compensation est calculé en multipliant d'abord, la valeur nationale du point groupe iso-ressources dépendance par le groupe iso-ressources moyen pondéré départemental, et ensuite, le résultat ainsi obtenu par le nombre départemental de places dans les établissements relevant du I de l'article L. 313-12.

« III. - Pour les départements dont la valeur du point groupe iso-ressources dépendance est inférieure au montant de la valeur nationale, le droit à compensation est calculé en multipliant d'abord, la valeur départementale du point groupe iso-ressources dépendance par le groupe iso-ressources moyen pondéré départemental, et ensuite, le résultat ainsi obtenu par le nombre départemental de places dans les établissements relevant du I de l'article L. 313-12. 

« IV. - Chaque département reçoit 90 % du droit à compensation visé aux II et III. »

II. - La compensation complémentaire aux départements est assurée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.

III. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° 4, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 245-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 245-1-1. - À compter de 2010, les charges résultant pour les départements des prestations versées au titre de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles sont compensées sur la base des dépenses constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.

« La compensation versée au titre de l'alinéa précédent est ajustée par département, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. 

« Dans l'attente du calcul de cette compensation définitive au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. »

II. - La compensation complémentaire aux départements est assurée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.

III. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Nicole Bricq. Au cours de la discussion générale, notre collègue Bernard Angels a fait référence à ces amendements, qui ne devraient pas déclencher de polémique au sein de cet hémicycle. Il s’agit de garantir le principe, dans ce projet de loi de programmation des finances publiques, de la compensation intégrale des dépenses sociales, à savoir le versement du RSA, de l’APA et de la PCH.

Je rappelle que, pour l’année en cours, le déficit de compensation du transfert de ces trois allocations s’élèvera à près de 6 milliards d’euros. Je ne donnerai pas davantage de chiffres, car il s’agit non pas d’une bataille de chiffres, mais de principe, qui relaie du reste la résolution votée les 20 et 21 octobre, lors du congrès annuel de l’Assemblée des départements de France à Avignon. Les présidents des conseils généraux, qui ont unanimement adopté ce texte, espèrent, par ce biais, être enfin entendus par le Gouvernement et le Parlement, afin qu’une solution satisfaisante soit élaborée.

L’équation est connue, le constat ayant été dressé dans le rapport Jamet : les dépenses sociales, que, par définition, les départements ne peuvent maîtriser, s’accroissent, alors que la pression s’organise sur des recettes de plus en plus contraintes.

Se pose également un problème de principe. Dans le programme du Conseil national de la résistance, qui a conduit à la création de la sécurité sociale, les dépenses individuelles sociales étaient assurées par la solidarité nationale. Aujourd’hui, ces dépenses sont de plus en plus souvent financées par les impôts locaux, dont on sait par ailleurs qu’ils sont profondément injustes, dans la mesure où ils ne tiennent pas compte des revenus des ménages et de leurs facultés contributives. La solidarité locale se substitue à la solidarité nationale, mettant ainsi en cause notre pacte social et républicain.

Quant au cinquième risque, dont le financement est toujours remis à plus tard par le Gouvernement, et qui n’est donc toujours pas programmé, il ne pourra pas prendre en charge l’ensemble des dépenses sociales. On ne peut donc plus s’en contenter.

Il convient en effet de protéger les départements de l’effet de ciseaux qu’ils connaissent fort bien et qui a été amplifié par la crise. Il faut trouver une solution pour calmer l’angoisse des départements, que ceux-ci soient dirigés par la gauche ou par la droite. Il y va de la solidarité nationale.

Quant à la proposition formulée à l’issue du rapport Jamet et qui consiste, pour les départements les plus en difficulté, à obtenir des avances remboursables conditionnées à la signature d’un contrat de stabilisation, il s’agit d’une réponse conjoncturelle à un problème structurel d’évolution des dépenses. Par ailleurs, notre débat précédent a bien illustré ce point, ces avances contribuent à éveiller une certaine suspicion concernant la gestion des départements. Il y aurait ceux qui gèrent bien et ceux qui gèrent mal. Les termes de ce débat bien connu ne sont pas acceptables ! Du reste, ce système n’a pas fonctionné, puisque, à ma connaissance, les présidents de conseils généraux ne se précipitent pas pour obtenir ces avances remboursables. Je crois qu’un seul département, les Ardennes, aurait sollicité le recours à ce dispositif, les autres y voyant bien évidemment une volonté de mise sous tutelle.

Selon moi, ces trois amendements, qui reprennent mot pour mot la résolution adoptée au congrès de l’Assemblée des départements de France, devraient faire l’unanimité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ces trois amendements suscitent très certainement une adhésion assez franche des présidents de conseils généraux. Il n’a pas dû être trop difficile d’obtenir un accord général en la matière !

Cela étant, ces amendements ont-ils vraiment leur place dans le texte qui est en cours de discussion ? À la vérité, ils ont toutes les caractéristiques de cavaliers !

J’en viens au fond.

L’amendement n° 2 concerne la compensation des dépenses liées au versement du RSA, qui sont à la charge des départements. La loi prévoit que les charges résultant pour les départements de la généralisation du RSA seront compensées à l’euro près pour les années 2009 et 2010. La compensation sera, à compter de 2011, définitivement figée au niveau des dépenses constatées dans les comptes administratifs de l’année 2010.

Convenons-en, pour les années 2009 et 2010, ce mode de compensation est très protecteur pour les départements. À compter de 2011, il sera semblable à celui qui est mis en œuvre pour le RMI et respectera les obligations constitutionnelles de l’État en matière d’extension de compétences.

M. Jean-Michel Baylet. Dans la réalité, ce n’est pas le cas !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Bricq, vos propositions seront au cœur de la discussion dont fera l’objet la proposition de loi que vous avez déposée sur ce sujet. Nous en discuterons, ainsi que d’autres textes, au cours des prochaines semaines.

La seule crainte que nous pouvons nourrir est celle d’une déresponsabilisation des départements si les dépenses sont remboursées à l’euro près. Selon moi, si cette orientation est la bonne, il conviendra néanmoins de prévoir une sorte de ticket modérateur, afin de responsabiliser les opérateurs.

L’amendement n° 3 concerne l’allocation personnalisée d’autonomie. La question du financement de la dépendance pèse lourdement sur les finances départementales. La mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque devrait déposer ses conclusions au cours des prochaines semaines.

Par ailleurs, nous aurons probablement l’occasion, monsieur le ministre, d’évoquer le financement de la dépendance à l’occasion de la réforme de la fiscalité sur le patrimoine. Nous devrons alors revoir les barèmes des droits de succession, dont la hausse pourrait apporter un début de réponse au problème posé.

Pour le reste, le dispositif tel que vous l’envisagez présente le même inconvénient de déresponsabiliser les opérateurs.

Enfin, à court terme, dans le but de soulager les départements le plus en difficulté, voici ce que M. le ministre envisageait il y a quelques jours devant l’Assemblée nationale : « Une commission a été créée, dont trois départements se sont déjà rapprochés pour voir de quelle manière ils pouvaient être accompagnés. Il n’est pas contestable que nous devrons, dans les semaines à venir ou, au plus tard, d’ici à la fin de l’année, offrir des réponses concrètes et développées pour permettre de franchir le cap, dans l’attente de la réforme de la dépendance. »

Cette question sera sans doute débattue dans les prochaines semaines lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011 ou du projet de loi de finances rectificative.

Concernant l’amendement n° 4, qui vise à compenser intégralement les dépenses engagées au titre du versement de la prestation de compensation du handicap, je rappelle que la loi prévoit actuellement le versement par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie de concours financiers aux départements pour contribuer au financement de cette prestation. Ces concours devraient atteindre 505 millions d’euros en 2010, assurant ainsi un taux de couverture d’environ 78,5 %.

Cet amendement, comme les deux précédents, présente l’inconvénient de déresponsabiliser totalement les départements dans leur gestion de la prestation de compensation du handicap, laquelle est remboursée à l’euro près. Je le répète, si nous décidons, le moment venu, de revoir les modalités de compensation des dépenses engagées par les conseils généraux, il faudra prévoir un ticket modérateur de responsabilisation.

Enfin, cet amendement, s’il était adopté, pourrait se révéler particulièrement coûteux pour l’État.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission ne peut qu’émettre un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Todeschini. Au préalable, je voudrais vous dire, monsieur le ministre, que votre politique, celle du Président de la République, celle du Gouvernement, menace réellement la démocratie et les services publics de proximité.

Vous nous tenez de beaux discours sur la réduction nécessaire des déficits. Or vous avez essayé, tout à l’heure, de pointer du doigt les collectivités locales alors que vous faites peser sur elles des charges qui incombent à l’État.

Je vous ai connu beaucoup plus critique sur ce sujet, mais il est vrai que les propos en question remontent à plusieurs mois, avant que vous n’ayez rejoint le Gouvernement ! (Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.)

Cette volonté de réduire l’action publique locale est illustrée par votre choix d’aggraver la situation financière des départements. Ces derniers sont confrontés à un effet de ciseaux qui ne cesse de s’amplifier et qu’aggravera encore ce projet de loi de programmation.

Les départements sont confrontés, d’une part, à une baisse importante de leurs recettes, et, d’autre part, à une forte croissance de leurs dépenses sociales, sur lesquelles ils ne disposent que de très faibles marges de manœuvre.

Or, si les départements sont tout à fait disposés à assurer leur mission de solidarité, ils ont besoin, pour ce faire, d’un soutien beaucoup plus important de l’État, et, surtout, plus sincère.

Les dépenses sociales liées au RSA, à l’APA et à la PCH, que les départements versent pour le compte de l’État, leur sont compensées à hauteur d’un peu plus de la moitié. Ainsi, fort injustement, l’État parvient à économiser plus de 6 milliards d’euros. En somme, le Gouvernement demande aux collectivités de faire toujours plus avec toujours moins ! Depuis 2002, les départements ont ainsi dû dépenser sur leurs recettes propres près de 20 milliards d’euros pour assurer la continuité du versement de ces prestations sociales fondamentales qui participent du socle républicain sur lequel repose notre démocratie.

En effet, certaines dépenses, comme celles qui sont liées au versement de l’APA, progressent de plus de 8 % par an, sans pour autant que les recettes augmentent dans les mêmes proportions.