Mme Raymonde Le Texier. C’est le dernier de leur souci !

M. Yves Daudigny. … ce peut-être d’autant moins que vous avez renoncé – cela a déjà été dit – à contenir les dépassements d’honoraires, qui prennent des proportions parfois invraisemblables. Vous avez aussi refusé de légaliser le testing, qui a pourtant fait ses preuves. Vous avez même fait machine arrière en renonçant, au mépris du texte adopté par le Parlement, soit dit en passant, aux deux seules mesures phares de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », destinées à réduire ou prévenir les déserts médicaux.

L’accès aux soins hospitaliers publics reste gravement mis en danger. Nombre de services, en sous-effectif, sont au bord de l’implosion, et la situation de celui des urgences de l’hôpital Tenon, qui a dû être momentanément fermé faute de personnel, a déjà été évoquée. Selon l’analyse de la Cour des comptes, l’ONDAM hospitalier, qui, notamment, ne retrace pas les compensations opérées entre dotations affectées au financement des missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation – les MIGAC – et tarifs, ne permet pas de mesurer la réalité des déficits et reste plus proche du mirage que de la réalité. Il n’est pas un quotidien régional qui n’évoque de fermeture de services !

La branche famille, outre la ponction inacceptable de recettes déjà évoquée, est traitée à la même enseigne que tous les services publics de ce pays, et dispose d’une sous-dotation financière et humaine. Résultat : les caisses sont aussi au bord de l’implosion et certaines ont même dû fermer guichet pour rattraper les retards.

Le secteur médico-social subit, quant à lui, la même politique récessive de désinvestissement et d’attente : attente d’une modification des financements de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et de la prestation de compensation du handicap, la PCH, attente du décret de tarification, attente concernant la prise en charge de la dépendance, toujours annoncée et non encore engagée.

Il est pourtant urgent d’agir, tous les présidents de conseils généraux le disent.

À cet égard, il serait de bonne politique de réaffecter les 100 millions d’euros excédentaires de l’ONDAM médico-social au financement de l’APA et de la PCH, plutôt que de les restituer à l’assurance maladie.

Vous m’avez indiqué en commission, monsieur le ministre, que, pour cet excédent, aucun autre choix n’était possible, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, étant financée de façon étanche par l’assurance maladie. Il serait donc logique que les crédits qui ne sont pas dépensés reviennent à cette dernière. Vous avez tenu le même raisonnement à l’Assemblée nationale.

Le problème est que ce raisonnement est parfaitement faux.

M. Yves Daudigny. Je le répète pour que les choses soient claires : l’objectif global des dépenses médico-sociales est constitué à hauteur de 1,3 milliard d’euros de recettes propres. Il suffirait de fixer cette somme à 1,2 milliard d’euros pour retrouver les 100 millions d’euros susvisés. Il n’y a pas d’étanchéité totale entre les deux types de ressources !

Last but not least, je rappelle, comme l’a fait à juste titre notre collègue rapporteur Sylvie Desmarescaux, que l’article L. 14-10-8 du code de l’action sociale et des familles prévoit expressément que les crédits non consommés à la clôture de l’exercice donnent lieu à report automatique sur les exercices suivants.

Mes chers collègues, il n’est ni normal ni acceptable que la représentation nationale soit contrainte de travailler et de délibérer dans de telles conditions, qu’il s’agisse du calendrier et, parfois, de l’opacité.

Rarement, malheureusement, demande de renvoi en commission n’a été aussi justifiée.

Nombreux, je le sais, sont mes collègues partageant les constats que je viens d’exposer. Nous sommes également nombreux, j’en suis convaincu, à partager une haute conception du rôle du Parlement, de son travail et du respect qui lui est dû. Il est peut-être temps de réhabiliter ouvertement ces principes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne vais pas surprendre M. Daudigny en lui faisant remarquer que les groupes de l’opposition n’hésitent pas à user de tous les artifices de procédure pour pouvoir s’exprimer contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce faisant, ils introduisent dans leur argumentation des éléments qui ne plaident aucunement en faveur de leur demande, en l’espèce en faveur d’un renvoi du texte à la commission des affaires sociales.

Vous le savez pertinemment, mes chers collègues de l’opposition, ce renvoi ne ferait pas progresser d’un iota le contenu du projet de loi. Nous avons travaillé celui-ci avec les différents rapporteurs et d’une manière approfondie, nous avons procédé à de très nombreuses auditions et nous considérons que le texte, tel qu’il a été construit par le Gouvernement, répond aux attentes du pays et permet de consolider l’avenir de notre système de sécurité sociale.

C’est pourquoi la commission des affaires sociales vous demande, mes chers collègues, de ne pas voter la motion que vient de nous présenter notre collègue Yves Daudigny.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant au renvoi à la commission.

(La motion n'est pas adoptée.)

M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Demandes de réserve et de priorité

Demande de renvoi à la commission
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Première partie

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Baroin, ministre. Monsieur le président, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve des amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l’article 9, de l’article 9, des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 9, de l’article 12 bis et, par cohérence, de l’article 14 jusqu’à la séance de mercredi après-midi.

Par ailleurs, après le vote de la troisième partie, le Gouvernement demande que soient appelés en priorité les articles 59 à 71.

M. le président. Conformément à l’article 44, alinéa 6, du règlement, je suis donc saisi, par le Gouvernement, d’une demande de réserve des articles et amendements que M. le ministre vient de citer jusqu’à mercredi après-midi et d’une demande d’appel en priorité, après le vote de la troisième partie, des articles 59 à 71.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Favorable, monsieur le président.

Demandes de réserve et de priorité
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Article 1er

M. le président. Je consulte le Sénat sur les demandes de réserve et de priorité présentées par le Gouvernement.

(La réserve et la priorité sont ordonnées.)

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2009

Première partie
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Article 2 et annexe A

Article 1er

Au titre de l’exercice 2009, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

163,2

173,6

-10,4

Vieillesse

179,4

188,4

-8,9

Famille

56,6

58,4

-1,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

11,8

12,5

-0,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

405,6

427,3

-21,7

;

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

139,7

150,3

-10,6

Vieillesse

91,5

98,7

-7,2

Famille

56,1

57,9

-1,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

10,4

11,1

-0,7

Toutes branches (hors transferts entre branches)

292,4

312,7

-20,3

;

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

12,9

16,0

-3,2

;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 158,1 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, s’élevant à 1,5 milliard d’euros ;

6° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 5,3 milliards d’euros.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.

M. Bernard Cazeau. Monsieur le ministre, le déficit que vous nous présentez pour 2009, à savoir 20,3 milliards d’euros, est le plus élevé de l’histoire de la protection sociale depuis son instauration à la Libération. Vous vous félicitez, par ailleurs, de n’avoir pas atteint la prévision de 23,4 milliards d’euros établie au mois de novembre 2008.

En réalité, il faudrait ajouter dans la balance des comptes sociaux plus de 1,4 milliard d’euros de dette pour les autres régimes, notamment le régime social des indépendants dont bénéficient les commerçants et les artisans, et 3,2 milliards d’euros du Fonds de solidarité vieillesse, ce qui ferait un total d’environ 25 milliards d’euros de déficit accumulé en 2009. Pis, pour cet exercice, toutes les branches du régime général ont été déficitaires, y compris les branches famille et accidents du travail, qui étaient encore excédentaires ou à l’équilibre en 2008.

Certes, vous nous rappelez à tout moment – vous l’avez encore fait hier soir – que la crise, engendrant du chômage, a conduit à une diminution importante des recettes liées à la masse salariale. Oui, c’est vrai, je vous rassure, nous l’avons nous aussi vu passer, cette crise !

M. François Baroin, ministre. C’est beaucoup mieux qu’hier !

M. Bernard Cazeau. Mais quand nous vous disons que ce n’est pas la seule raison, vous avez l’impression que nous nions l’évidence.

Or si nous reprenons les évolutions des comptes de la sécurité sociale depuis 2002, nous voyons une succession de déficits, avec une pointe en 2004, année où l’on comptait déjà 13,2 milliards d’euros de déficit. Nous avons ainsi enregistré 68,3 milliards d’euros de déficit cumulé entre 2002 et 2008 et il n’était pas encore question de crise. À l’inverse de l’Allemagne, dont vous citez abondamment les chiffres, la France est donc partie avec un très important handicap pour affronter cette fameuse crise !

Pourquoi une telle situation ? Parce que depuis plusieurs années, le Gouvernement essaie de trouver la solution à ce problème à travers des économies de bouts de chandelles, qui prennent la forme de la maîtrise médicalisée. Rendez-vous compte, mes chers collègues : Mme la ministre de la santé a parlé, hier soir, de quelques centaines de millions d’euros, alors qu’il nous faudrait trouver 21 milliards d’euros. D’ailleurs, cette maîtrise se fait souvent au détriment de nos concitoyens. Ces économies sont autant d’échecs, car, comme vous le savez, monsieur le ministre, ce n’est pas la solution principale.

Il faut aujourd’hui – je serai encore plus tenté de le dire à votre collègue Roselyne Bachelot-Narquin – mener à bien des réformes structurelles.

Il en est une que j’évoque souvent : la nécessité de trouver d’autres éventualités que le paiement à l’acte. Mais, pour cela, il faut une véritable volonté politique, ainsi qu’un grand débat avec les professions de santé et les représentants syndicaux, à la manière des pays du Nord de l’Europe, comme cela a eu lieu en Suède, au Danemark et même en Allemagne. Nous ne devons pas nous contenter de quelques semaines de discussion, comme pour les retraites.

Aujourd'hui, la crise a bon dos : elle vous permet de vous voiler la face et d’espérer des jours meilleurs. Mais si vous en restez aux méthodes actuelles, vous ne ferez qu’accumuler les déficits et vous serez à la merci des variations de la croissance et donc de l’emploi.

Au bout du compte, ce sont les Français qui en pâtiront. Ainsi, sur quatre ans, entre 2005 et 2009, le taux de prise en charge des dépenses de santé par l’assurance maladie a diminué de 1,5 point, passant de 77 % à 75,5 %. C’est ce qui explique que, l’année dernière, plus de 14 % des assurés sociaux ont renoncé aux soins. Voilà la réalité, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l’article.

M. Guy Fischer. Avec l’article 1er, vous nous proposez d’approuver les tableaux d’équilibre par branche et les dépenses constatées lors du dernier exercice clos, celui de 2009.

Pour nous, c’est une nouvelle fois l’occasion – croyez bien que nous le regrettons – de constater l’inefficacité et, surtout, l’injustice de votre politique sociale. Année après année, nous n’avons de cesse de vous exhorter à prendre les mesures de financement qui s’imposent pour permettre, enfin, à notre protection sociale de recouvrer l’équilibre.

Vous repoussez toujours ces mesures au motif que Nicolas Sarkozy aurait pris l’engagement devant ses électeurs de n’accroître ni les prélèvements ni les impôts. Nous l’avons vu, cela est faux, puisque, en réalité, les impôts augmenteront de plus de 100 milliards d’euros. Je devrais plutôt dire que le Président de la République s’est engagé à ne pas augmenter les prélèvements et les impôts qui sont perceptibles et qui intéressent directement ses électeurs, c'est-à-dire les riches.

On sait, en effet, depuis votre récent passage à Bruxelles, que vous prévoyez en toute discrétion d’augmenter de 1 % supplémentaire la part de richesse nationale qui sera prélevée en 2011 par rapport à 2010. Cela devrait permettre de dégager 20 milliards d’euros.

Une telle mesure ne nous satisfait absolument pas dans la mesure où les efforts sont inégalement répartis. J’en veux pour preuve la réforme des retraites : les dispositions prises à l’encontre des fonctionnaires – augmentation inégalée du niveau de cotisations, durcissement des conditions d’accès au minimum garanti et fermeture du dispositif de cessation d’activité pour les parents disposant de 15 ans de carrière dans la fonction publique – vous permettent déjà de récupérer 10 milliards d’euros.

Vous refusant à prendre les mesures qui s’imposent, vous vous contentez d’utiliser les droits des assurés sociaux comme de véritables variables d’ajustement. Ce sont les assurés sociaux qui vont payer, c'est-à-dire le plus grand nombre, les personnes modestes, les salariés, les travailleurs. Vous avez, à ce titre, multiplié les mesures de déremboursements et instauré les franchises médicales, le forfait de 2 euros sur les transferts sanitaires, l’augmentation de 10 % à 40 % de la pénalisation pour non-respect du parcours de soins, le forfait de 18 euros sur les actes hospitaliers lourds. Bref, des mesures qui rétrécissent le champ d’intervention de la sécurité sociale et ont pour conséquence de rendre de plus en plus nécessaire l’acquisition d’une mutuelle complémentaire.

Et pourtant, malgré cela, les comptes sociaux ne cessent de se détériorer. Comment pourrait-il en aller autrement ? C’est bien la preuve qu’il faut rechercher des solutions ailleurs que dans la maîtrise des dépenses, laquelle ne suffit pas à résoudre durablement les difficultés que rencontre la sécurité sociale.

D’ailleurs, le tableau d’équilibre 2009 de l’ensemble des régimes obligatoires de base présenté dans le rapport du député Yves Bur en est la parfaite démonstration. Les prévisions de dépenses effectuées en 2009 comparées à celles qui seront effectivement réalisées en 2011 n’ont que peu évolué. En effet, si les dépenses constatées ont en effet légèrement augmenté pour la branche maladie, elles sont, pour toutes les autres branches, inférieures aux prévisions de 2009. À l’inverse, les recettes réellement perçues en 2011 au titre de l’année 2009 sont toutes inférieures, pour ne pas dire très inférieures, aux prévisions.

C’est la démonstration que la priorité de votre Gouvernement devrait être, si vous aviez à cœur d’assurer la sauvegarde de la sécurité sociale, d’en assurer un financement pérenne et durable reposant d’abord et avant tout sur des emplois de qualité. Or, force est de constater, en regardant l’exercice 2009, que ce n’est pas le cas.

Accepter ces tableaux d’équilibre reviendrait, pour nous, à considérer que vous-même, monsieur le ministre, et vos collègues n’êtes pas responsables de la dégradation des comptes sociaux.

Telle n’est pas notre conviction, puisque nous considérons, au contraire, que ce sont vos politiques d’exonérations sociales et fiscales qui conduisent aux situations que nous connaissons actuellement.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre l’article 1er, symbole de votre refus d’agir, si ce n’est toujours pour les mêmes, le patronat et les plus riches. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Je vais mettre aux voix l’article 1er.

La parole est à M. René-Pierre Signé, pour explication de vote.

M. René-Pierre Signé. Cela vient d’être dit et démontré, le budget de la sécurité sociale est loin d’atteindre l’équilibre. Il faudra bien, un jour, en trouver la cause, si l’on a le courage de la chercher et de la traiter.

Nous n’avons jamais réfléchi à une véritable politique à long terme de l’offre médicale en France. Faute d’avoir organisé le parcours des malades à partir d’un accès primaire au médecin généraliste, qui aurait dû recevoir une formation adaptée dans ce sens, nous accroissons mécaniquement la demande au spécialiste, dont ce n’est pas le travail, son rôle devant rester celui de consultant.

À ce jeu absurde, tout le monde perd : les malades allant d’un praticien à un autre généraliste ou spécialiste, les spécialistes se cantonnant dans des tâches subalternes, et les financeurs, qui payent souvent ainsi des prestations de médiocre qualité.

Notre système de santé prend l’eau et, comme mon ami Bernard Cazeau l’a dit, ce n’est pas seulement à cause de la crise. Il est, à bien des égards, archaïque ; la médecine à deux vitesses est parmi nous.

Il faut que cesse le temps des réformes inutiles, car insuffisantes, et pesant toujours sur les malades : déremboursement des médicaments ou des frais de transport, augmentation du forfait hospitalier ou des cotisations sociales, prix à payer sur les ordonnances. Il faut aller au cœur même du problème, chercher la cause et la traiter, je l’ai dit voilà un instant. La cause tient dans les abus d’actes inutiles englobés dans un activisme nuisible, l’abus d’examens aussi onéreux qu’inutiles, imagerie, endoscopies, analyses superfétatoires dont on regarde à peine le résultat.

Quand se décidera-t-on à imposer une répartition équitable des médecins sur le territoire national afin d’éviter la surconsommation d’actes inutiles en ville et le désert médical des campagnes ?

Quand se décidera-t-on – Bernard Cazeau a évoqué ce point – à supprimer le paiement à l’acte, déjà abandonné dans les autres pays européens, qui engendre une multiplication nuisible et inévitable des abus et ne permet pas de rémunérer les médecins à leur juste niveau ? La timide limitation du coût de ces actes, car, heureusement, les médecins ne sont plus dans une pratique libre d’honoraires – 99,7 % d’entre eux sont payés par les assurances sociales –, a entraîné, en retour, leur multiplication, avec les prescriptions discutables qui en résultent.

Quand se décidera-t-on à évaluer l’utilité de certaines pratiques médicales et chirurgicales ? Les endoscopies digestives qui consomment près de 30 % des actes d’anesthésie sont-elles toutes indispensables en termes de santé publique ? Et je passe sur les scanners au premier vertige ou les IRM pour une banale sciatique !

De nombreuses évaluations objectives de notre système de soins sont occultées pour éviter les sujets qui fâchent. Abandonnés à leur sort peu enviable, ou bien les malades n’auront plus accès aux soins, pour ceux qui ne pourront plus payer leur mutuelle, ou bien, à l’opposé, pour les plus nantis, ils n’auront plus la possibilité de consulter le médecin de leur choix à l’hôpital ou en secteur privé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
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Deuxième partie

Article 2 et annexe A

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés à l’occasion de l’approbation, à l’article 1er, des tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2009.

ANNEXE A

Rapport décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés sur l’exercice 2009

I. – S’agissant du régime général :

Les comptes du régime général ont été déficitaires de 20,3 milliards d’euros en 2009. La branche Maladie a ainsi enregistré un déficit de 10,6 milliards d’euros, la branche Accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) un déficit de 0,7 milliard d’euros, la branche Vieillesse un déficit de 7,2 milliards d’euros et la branche Famille un déficit de 1,8 milliard d’euros.

Pour faciliter le retour de la croissance, qui constituait un objectif prioritaire, il a été décidé dans le cadre exceptionnel de l’année 2010 de ne pas procéder sur cette année à des reprises de dette par la Caisse d’amortissement de la dette sociale. En effet, en vertu des dispositions organiques, un transfert de dette aurait nécessité une hausse de prélèvements obligatoires qui aurait pesé sur le pouvoir d’achat au moment où l’économie traversait une de ses crises les plus graves.

Aussi, le Gouvernement a pris les engagements nécessaires afin que les besoins de trésorerie de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) consécutifs au déficit global du régime général puissent être financés au moyen de ressources non permanentes, dans la limite des plafonds fixés par les lois de financement de la sécurité sociale. En 2009, ce financement a reposé sur les emprunts de trésorerie auprès de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que sur des émissions de billets de trésorerie sur les marchés financiers. En 2010, l’ACOSS a en outre eu recours à des prêts d’un an de la part de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi qu’à des émissions d’euro commercial papers effectuées en partenariat avec l’agence France Trésor.

II. – S’agissant des organismes concourant au financement des régimes :

Couverture du déficit du fonds de solidarité vieillesse (FSV)

Le FSV a enregistré en 2009 un déficit de 3,2 milliards d’euros. Le FSV ne disposant pas de réserves, ce déficit, qui correspond également à son déficit cumulé en raison de la reprise de dette intervenue en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, est inscrit au bilan en fonds de roulement négatif.

Le fonds n’ayant pas le droit d’emprunter, ce déficit a entraîné une dette vis-à-vis de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) au titre de la prise en charge des cotisations de chômage. Cette dette a été financée in fine par les emprunts de trésorerie de l’ACOSS, dans les mêmes conditions que les déficits propres de la CNAV.

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.

M. Bernard Cazeau. Nous ne pouvons entériner un rapport qui consolide les comptes de 2009 en actant notamment un déficit de 25 milliards d’euros et qui décrit les mesures prises en 2010 pour combler les déficits.

Dans ce rapport, vous prenez acte de votre non-recours à la CADES pour éponger le déficit de 2009 et du report du besoin de trésorerie sur l’ACOSS, dans la limite d’un plafond autorisé. Vous décidez, ou plus exactement vous vous vantez, de ne pas augmenter les prélèvements obligatoires afin de ne pas pénaliser la croissance.

Les critères européens vous obligent à ne pas les augmenter, mais que faites-vous en prolongeant la durée de la CRDS ? L’année passée, pour pallier vos débordements, et comme l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale ne pouvait plus faire face à ses engagements, vous avez organisé un tour de passe-passe en autorisant l’ACOSS à emprunter plus que le plafond de ressources vous l’autorisait.

L’emprunt a été réalisé pour partie auprès de la Caisse des dépôts et consignations, mais également sur les marchés financiers, via l’émission de billets de trésorerie. Cela n’a pas réglé le problème.

Vous recommencez en 2010 et, au lieu de prendre des mesures structurelles pour stopper l’accroissement de la dette, vous faites le choix d’une autorisation de découvert auprès de l’ACOSS et d’un programme d’émission de billets de trésorerie par la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 61,6 milliards d’euros, alors qu’il y a peu de temps on était à 15 milliards d’euros.

Vous reculez le paiement de la dette et la charge de son financement est sans cesse reportée sur les générations futures, ce qui nous semble indécent. C’est cette même irresponsabilité que nous avons dénoncée, dans cet hémicycle, voilà quelques semaines lorsque nous avons parlé de la CADES.

Vous avez imposé, malgré les protestations vigoureuses de votre majorité, une modification de la loi organique qui rallongera la durée de vie de la CADES. Et vous proposez une usine à gaz absolument invraisemblable, puisque vous procédez à un véritable « rapt » des ressources de la sécurité sociale d’aujourd’hui pour garantir la dette sociale demain, comme si la sécurité sociale était dans une forme si spectaculaire qu’elle puisse se passer de près de 4 milliards d’euros de CSG, comme si cela avait un sens de fragiliser notre politique familiale.

Ne nous demandez pas aujourd’hui d’approuver un texte qui est le reflet de l’échec des politiques successives menées par les gouvernements de droite depuis 2002. En effet, en huit ans, le déficit du régime général s’est creusé de plus de 15 milliards d’euros, alors qu’il était à l’équilibre, ou presque, lorsque vous êtes arrivés au pouvoir !

Rappelons qu’avant 2002 les comptes sociaux avaient connu plusieurs années de soldes positifs. Ce sont donc bien des gouvernements soutenus par l’actuelle majorité qui ont appauvri notre système de protection sociale, financièrement et qualitativement pour les assurés.

C’est pourquoi nous n’approuverons pas votre rapport. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l’article.

Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à travers l’adoption de cet article 2, vous nous demandez d’approuver le rapport situé en annexe A, lequel décrit les mesures prises en 2010 par le Gouvernement pour combler les déficits de 2009 des quatre branches du régime général et des organismes concourant au financement des régimes.

Or, pour financer ces déficits, en lieu et place de ressources pérennes et stables, vous proposez de recourir à l’emprunt. Cette solution, déjà proposée l’an dernier, avait d’ailleurs été critiquée par notre commission. Je regrette que nous n’ayons pas été, cette année, un peu plus critiques sur le fait de repousser sur les générations futures le remboursement de notre dette.

Vous comptez faire un emprunt, réalisé pour partie auprès de la Caisse des dépôts et consignations, et, plus grave encore, par l’émission de billets de trésorerie sur les marchés financiers, à quoi il convient d’ajouter l’émission par l’ACOSS d’« Euro commercial papers » effectuée en partenariat avec l’agence France Trésor.

J’y vois là un double paradoxe. D’abord, parce que vous faites le choix de placer l’avenir de la sécurité sociale dans les mains de celles et ceux qui sont précisément responsables de la financiarisation à outrance de notre économie…