M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Thierry Foucaud. Jamais le bouclier fiscal n’a été utilisé par le nombre de contribuables qui nous avait été annoncé au départ. Jamais il n’a servi à autre chose qu’à compenser les effets de l’impôt de solidarité sur la fortune. Jamais il n’a permis de modifier durablement les pratiques des intéressés, qui ne se sont pas mis à investir au profit de la collectivité.

Payer des impôts est le devoir de tout citoyen dès lors que ses ressources ou son patrimoine le lui permettent. C’est en associant chacun à l’effort commun que notre pays pourra avancer sur la voie du progrès.

En supprimant le bouclier fiscal, mes chers collègues, vous donnerez à ses quelques bénéficiaires la fierté de contribuer justement aux efforts de l’ensemble de la nation.

M. Roland Courteau. C’est bien vu !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous sommes bien entendu défavorables à la suppression sèche du bouclier fiscal. Nous préférons raisonner, comme Jean Arthuis, sous la forme harmonieuse d’un triptyque. (Sourires.)

À cet égard, permettez-moi, monsieur le ministre, de rappeler, très immodestement, ce que disait déjà la commission en 2009 dans son rapport d’information intitulé : « Quels prélèvements obligatoires pour la sortie de crise ? » Elle y détaillait ses évaluations, lesquelles ne sont pas très éloignées de celles que nous faisons aujourd’hui.

Je ne ferai que reprendre les intitulés de nos paragraphes.

« a) Le “bouclier fiscal” vise à prévenir la spoliation de certains contribuables… » Je le maintiens. (M. François Fortassin s’exclame.) Même si cela vous fait réagir, mon cher collègue, c’est la vérité ! Nous sommes dans un monde ouvert – même les Hautes-Pyrénées sont ouvertes sur l’extérieur ! (Sourires) – et nous sommes en compétition. C’est une réalité ! Nous n’échapperons pas au débat sur la compétitivité de la fiscalité française, que cela plaise ou non.

« b) … mais il présente de réels effets pervers ».

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous en sommes évidemment très conscients à un moment où, du fait de la crise, il faut réduire les déficits publics et faire des efforts non seulement sur les dépenses, mais aussi sur les recettes.

« c) Le principe du "triptyque" et son évaluation financière ». Nous expliquions alors que, en cas de suppression de l’ISF et du bouclier fiscal, il faudrait se procurer 3,35 milliards d’euros de recettes. Je pense que cette évaluation est toujours valable aujourd’hui. Nous indiquions que la création d’une tranche marginale supérieure de l’impôt sur le revenu permettrait d’escompter un rendement de l’ordre de 1 milliard d’euros et que différentes mesures de fiscalité de l’épargne seraient nécessaires pour trouver le reste.

Peut-être faudrait-il aujourd'hui prévoir en outre un nouvel impôt sur le patrimoine, dont l’assiette serait plus réduite que l’impôt actuel.

Nous concluions ainsi : « d) Une réforme qui ne doit pas être adoptée à contretemps ». Vous le voyez, monsieur le ministre, nous étions prudents, pour ne pas dire que nous étions très sénatoriaux…

Je pense que nous ne disposons pas ce soir de toutes les simulations…

Mme Nicole Bricq. Au printemps ! Toujours au printemps !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … nous permettant de déterminer ce que doit être… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Oh, vous savez, les choses sont plus compliquées que vous le croyez ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq. On sait qu’elles sont compliquées !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pour disposer des simulations et des évaluations nous permettant de dimensionner de façon harmonieuse les trois panneaux du triptyque, il convient d’attendre encore un peu.

M. Roland Courteau. Il faut toujours attendre !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cher président Arthuis, ce qui nous apparaissait comme étant à moyen terme de 2009 est désormais du court terme puisque le Premier ministre mettra en place lundi soir, si je ne me trompe, le groupe de travail chargé de lancer les études concrètes sur ce sujet. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Roland Courteau. Qui va faire partie de ce groupe de travail ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. En définitive, nous aurons eu raison. En la matière, il ne faut pas avoir d’amour-propre d’auteur. Ce qui compte, c’est de faire progresser nos idées et d’œuvrer dans le sens de l’intérêt général.

M. Jean-Marc Todeschini. Et non dans le sens des intérêts de l’UMP !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il me semble donc qu’il est utile que le Sénat balise le chemin. L’initiative du président Arthuis est profondément utile à cet égard.

M. Roland Courteau. Celle de Thierry Foucaud aussi !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Elle montre bien la continuité de nos travaux.

Je pense que, d’ici à la fin du premier semestre de 2011, nous allons faire aboutir cette réforme, conformément à la volonté qui a été affirmée par le Président de la République.

M. Jean-Marc Todeschini. Nous y voilà !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais, que voulez-vous, dans ce pays, il y a un Président de la République ! Ce sont les institutions de la Ve République et nous vivons sou la Ve République ! Le triptyque sera dans le style de la Ve République.

M. Jean-Marc Todeschini. Donc, on a perdu du temps !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La proposition du président Arthuis va dans le bon sens, mais elle est encore légèrement prématurée.

Ces observations devraient le conduire, après avoir écouté celles et ceux qui voudraient prendre part au débat,…

M. François Marc. Nous n’allons pas débattre de ce sujet maintenant !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … à retirer son amendement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. Monsieur Arthuis, l'amendement n° II-430 est-il maintenu ?

M. Jean Arthuis. Oui, madame la présidente, ne serait-ce que pour qu’il y ait un débat.

Mme la présidente. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. J’ai apprécié au plus haut point l’intervention de M. le rapporteur général, au cours de laquelle il s’est livré à un exercice de casuistique digne des meilleures écoles de jésuites ! (Sourires.)

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je ne suis pas passé chez les jésuites, je suis passé chez les marianistes ! (Nouveaux sourires.)

M. François Fortassin. Si vous aviez vraiment considéré que le bouclier fiscal « présente de réels effets pervers », ce qui est à mes yeux tout à fait vrai, vous l’auriez spontanément fait disparaître de notre fiscalité. Vous avez préféré vous dire que vous aviez le temps. Et de nous expliquer que c’était très compliqué, qu’il fallait d’abord étudier tout cela de près…

Que vous ayez mis en place le bouclier fiscal, c’est une chose – nous n’étions pas d’accord, mais cela peut se concevoir –, mais rembourser à des gens, de manière rétroactive, des sommes dont ils n’ont nul besoin pour acheter la baguette de pain et la barre de chocolat du goûter, c’est tout de même de la provocation ! Il s’agissait ni plus ni moins de faire des cadeaux à des amis !

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Badré.

M. Denis Badré. Madame la présidente, vous n’avez pas encore sollicité l’avis du Gouvernement, mais ce n’est pas plus mal : celui-ci pourra ainsi répondre à tous ceux d’entre nous qui souhaitent faire vivre ce débat, aux côtés de Jean Arthuis.

Mes chers collègues, il ne vous a pas échappé que, ayant rejoint sa place dans l’hémicycle, le président de la commission des finances est redevenu un sénateur centriste.

Mme Nicole Bricq. Il nous l’a dit !

M. Denis Badré. Il l’a en effet indiqué tout à l’heure très clairement. Il a ajouté qu’il était fier de l’être. Du reste, pour leur part, les centristes sont fiers de le compter dans leurs rangs. Ils sont donc tout à fait solidaires de l’amendement qu’il a présenté et ils l’accompagnent dans sa démarche avec la même constance que celle dont il fait preuve lui-même pour défendre la thèse de la trilogie.

Pour répondre à Thierry Foucaud, je veux évoquer un souvenir qui n’est pas si vieux puisqu’il remonte à l’an dernier, pratiquement jour pour jour.

M’adressant à vous, chers collègues de gauche, je vous avais dit que, si vous vouliez véritablement la fin du bouclier fiscal – et nous la souhaitons avec vous –, il faudrait un jour que vous fassiez mouvement sur l’ISF.

Je m’étais ensuite tourné vers vous, chers collègues qui siégez à droite de l’hémicycle, pour vous dire que, si vous souhaitiez, et à juste titre, la fin de l’ISF, il faudrait que vous fassiez mouvement sur le bouclier fiscal.

Un an plus tard, nous en sommes toujours au même point.

L’amendement présenté par Jean Arthuis est à la fois équilibré, juste et de simplification.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument !

M. Denis Badré. Je rappelle qu’il a fallu défiler sept fois autour de Jéricho pour en faire tomber les murailles. J’espère que nous n’aurons pas besoin de nous y reprendre à sept fois avant de faire céder les murailles du bouclier fiscal.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce sont des murailles de gruyère, maintenant ! (Sourires.)

M. Denis Badré. Je note d’ailleurs que, au fil du temps, la trilogie est devenue une tétralogie.

Un sénateur du groupe socialiste. Ça pourrait aussi devenir un vaisseau fantôme ! (Nouveaux sourires.)

M. Denis Badré. M. le rapporteur général nous a demandé d’attendre un peu, le temps que des simulations soient réalisées, ajoutant qu’un groupe de travail allait être mis en place dans la perspective d’une réforme fiscale au printemps prochain.

Pourquoi attendre si longtemps alors que les jours et les heures nous séparant de la réunion de la commission mixte paritaire pourraient nous permettre d’aller au bout de la démarche, de prendre immédiatement cette mesure qui va dans le bon sens et que, de toute façon – j’en suis à peu près sûr –, nous adopterons finalement au printemps prochain ? Nous gagnerions ainsi un an dans la mise en œuvre de cette mesure de simplification et de justice.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je tiens à faire remarquer au président de la commission des finances, même s’il a, en cet instant, rejoint les travées du groupe de l’Union centriste, ce qui l’honore – il faut défendre ses positions –, que nous n’avons pas déposé sur la seconde partie du projet de loi de finances les amendements que nous avions défendus en première partie. Qu’il m’en donne acte.

M. Jean Arthuis. Tout à fait.

Mme Nicole Bricq. Nous sommes en effet souvent accusés de prolonger les débats…

Si j’ai bien écouté M. le sénateur Arthuis, parce que le compte n’y était pas, la trilogie est devenue une tétralogie ! Je lui suggère, pour la prochaine fois, de nous chanter sa proposition sur un air d’opéra !

Mais, trêve de plaisanterie : nous désapprouvons la tétralogie tout autant que nous désapprouvions la trilogie. Nous n’avons jamais considéré que l’ISF était une monnaie d’échange. Pour nous, l’abolition du bouclier fiscal est un préalable à toute réforme de la fiscalité. C’est du reste pour cela que nous allons voter l’amendement de nos collègues du groupe CRC-SPG visant à le supprimer purement et simplement. Le bouclier fiscal est un boulet pour les uns, un poison pour les autres, et même la Commission européenne s’en mêle !

Nous sommes aussi contre cette tétralogie parce que nous voulons une réforme qui mette en place un grand impôt sur le patrimoine, ne portant pas uniquement sur les plus-values, mais aussi sur le stock. Vous le savez très bien, les inégalités de patrimoine ont explosé au cours des dix dernières années. Nous sommes revenus à une société d’héritiers, où il n’y a quasiment plus de progressivité de l’impôt ni d’égalité de contribution entre les citoyens.

Nous voulons aussi un grand impôt sur le revenu, ayant une assiette élargie et présentant une réelle progressivité. Il ne sera donc pas nécessaire de créer une nouvelle tranche d’imposition sur le revenu, car nous considérons que les revenus du travail ne doivent pas être pénalisés par rapport à ceux du capital.

Par conséquent, monsieur Arthuis, nous ne pouvons pas être, sur le fond, en accord avec votre proposition. Si jamais vous la maintenez, nous voterons contre, comme nous l’avons fait les fois précédentes.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. L’amendement n° II-430 participe du débat sur le devenir de notre fiscalité. Son auteur souhaite qu’il prenne date, en quelque sorte, pour la future réforme de la fiscalité du patrimoine que le Président de la République a annoncée voilà quelques semaines.

Monsieur Arthuis, il y a deux points sur lesquels nous serons toujours en accord avec vous.

Le premier concerne la suppression pure et simple du bouclier fiscal dont l’inutilité est de plus en plus clairement établie.

M. Thierry Foucaud. Il souffre, en outre, notamment depuis cette année, d’avoir manifestement bénéficié à des contribuables qui n’en avaient guère besoin, comme l’a rappelé tout à l’heure notre collègue François Fortassin.

Savoir que le plus gros chèque émis par le Trésor Public a été adressé à Mme Bettencourt, et que cette dernière semble avoir fait peu de cas du respect du droit fiscal, suffit à condamner plus encore une mesure que nos compatriotes n’ont jamais comprise, et qu’ils sont toujours aussi peu nombreux à utiliser.

Qu’on y songe, moins de 20 000 foyers fiscaux en bénéficient, alors que nous avons plus de 36 millions de contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu. De même, on dénombre moins de 10 000 contribuables à l’ISF sur 600 000 foyers éligibles !

Le second point sur lequel nous sommes d’accord avec vous concerne la nécessité de modifier les conditions d’imposition des plus-values et de supprimer le plus possible l’usage du prélèvement libératoire.

Nous sommes partisans d’une assiette élargie de l’impôt sur le revenu, où l’ensemble des revenus serait soumis au barème progressif. Cela passe, notamment, par l’abandon des dispositifs libératoires.

Au demeurant, si l’on voulait aller dans ce sens, on pourrait fort bien décider, la première année d’application d’un dispositif universel de soumission au barème, de faire des actuels prélèvements libératoires des acomptes déductibles de l’imposition découlant de la déclaration complète des revenus.

En revanche, nous ne sommes pas d’accord avec vous, monsieur Arthuis, sur deux points.

Le premier concerne la suppression de l’ISF qui semble pourtant constituer un impôt largement accepté par la population de notre pays, y compris par ceux qui en sont redevables.

En effet, si l’ISF est si confiscatoire, comment se fait-il que 85 % de ses contribuables ne sollicitent ni le dispositif ISF-PME, ni le dispositif « Dutreil », ni le bouclier fiscal, ou je ne sais quelle autre mesure de « niche », pour ne pas avoir à l’acquitter en totalité ?

Quand on voit qu’un patrimoine de plus de 30 millions d’euros en valeur imposable produit parfois seulement 270 000 euros de droits à payer, on se dit que l’ISF est loin de constituer le racket fiscal qu’on tend à vouloir nous présenter, comme le fait, notamment et très souvent, M. le rapporteur général !

Le second point de désaccord réside dans le niveau de majoration de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, dont il est évident qu’elle constituera la principale recette de remplacement destinée à compenser la disparition de l’ISF.

Soyons précis, la suppression de l’ISF coûte 4 milliards d’euros. La suppression du bouclier fiscal rapporte 678 millions d’euros. Le relèvement de la taxation des plus-values des ménages pourrait dégager 1,2 à 1,4 milliard d’euros, ce qui signifie que l’on attend plus de 2 milliards d’euros du relèvement de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu.

Le problème est le suivant : l’assiette de l’impôt sur le revenu étant constituée, d’abord et avant tout, de rémunérations salariales, de pensions et retraites, et de revenus d’activités productives non salariées, c’est donc, une fois de plus, le travail que l’on va taxer davantage !

Mme Nicole Bricq. Exactement !

M. Roland Courteau. Tout à fait !

M. Thierry Foucaud. De fait, tout relèvement de la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu ne peut qu’accompagner une large réforme fiscale établissant l’égalité de traitement entre les revenus d’activité et les autres.

Augmentons d’abord l’assiette soumise au barème progressif et, surtout, n’allégeons pas une fiscalité du patrimoine qui ferait que les détenteurs de revenus les plus élevés, mais privés d’un patrimoine constitué, paieraient bien plus que leurs équivalents dotés de biens de famille d’une valeur plus importante !

Donc, oui à la hausse de la taxation des plus-values et à la fin des prélèvements libératoires, oui à la suppression du bouclier fiscal, non à la disparition de l’ISF ! Enfin, oui à un impôt sur le revenu plus juste et, bien sûr, plus équitable !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Massion.

M. Marc Massion. Il serait intéressant que M. Arthuis regagne le banc de la commission et que, en tant que président de la commission des finances, il donne son avis sur l’amendement du sénateur Arthuis !

À ce titre, s’il est en cohérence avec ce qu’il a dit antérieurement, en particulier en réponse à nos amendements de la première partie du projet de loi de finances, il devrait conseiller au sénateur Arthuis de retirer son amendement et d’attendre le premier semestre de 2011 au cours duquel le sujet devrait, en principe, être tranché.

Mme la présidente. Après ces différentes interventions, je me tourne à présent vers le Gouvernement pour lui demander son avis sur les amendements nos II-430 et II-513 rectifié.

M. François Baroin, ministre. Je veux vous remercier, monsieur Arthuis, pour cet amendement que je reçois avant tout comme un amendement d’appel anticipant le débat qui va nous animer de manière soutenue durant les semaines et mois à venir. Rendez-vous est pris en juin prochain pour la discussion du projet de loi de finances rectificative, qui nous amènera à trancher, à agir, à voter et à modifier le dispositif actuel.

Il s’agit là non pas simplement de paroles, mais d’un engagement de la part du Gouvernement, de la définition d’une méthode et d’un calendrier ! Nous aurons à définir des objectifs.

Vous comprendrez que le Gouvernement, par ma voix, ne puisse anticiper sur les travaux du groupe qui sera mis en place, sous l’autorité du Premier ministre, demain soir à Matignon.

Cependant, je rends hommage, cher Jean Arthuis, à la solidité et à la constance du plaidoyer que vous développez avec conviction sur ce sujet depuis des années et je puis vous assurer que vous occuperez naturellement une place éminente au sein de ce groupe, aux côtés du rapporteur général.

Je ne sais si nous déboucherons sur une trilogie, un triptyque, un tripode, un trépied, voire une tétralogie, …

Mme Nicole Bricq. Ce sera bientôt un « Wagner » !

M. François Baroin, ministre. … mais nous trouverons bien le terme final qui nous permettra d’aboutir à une solution équilibrée.

Je note aussi dans vos propositions constantes, monsieur le président de la commission, à l’égal d’ailleurs du degré d’implication personnelle de M. le rapporteur général au travers de ses multiples rapports depuis de nombreuses années, la nécessité de lier, dans le débat, la présence du bouclier fiscal et de cette anomalie française qu’est l’impôt de solidarité sur la fortune. Même le gouvernement Zapatero, pourtant socialiste, a fait disparaître ce qui peut être considéré comme l’équivalent espagnol de l’ISF ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq. Nous l’avons déjà dit en première partie !

M. François Baroin, ministre. Si même lui peut le faire, vous, madame Bricq, et vos amis, devriez pouvoir rejoindre le Gouvernement sur le fait de lier les deux volets dans cette réforme !

M. Jean-Marc Todeschini. Il faut attendre décembre 2012 pour cela !

M. François Baroin, ministre. Toutefois, je crois comprendre que, vous, vous préconisez la suppression du bouclier fiscal, et rien d’autre !

M. François Marc. Vous, vous avez vidé les caisses de l'État de 80 milliards d’euros !

M. François Baroin, ministre. Dans la mesure où nous avons donc un point de divergence dès le départ sur la réforme, je ne peux que vous donner rendez-vous lors du débat parlementaire qui nous permettra de confronter nos points de vue, et non pas dans le groupe de travail. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq. Eh bien voilà ! Et nous ?

M. François Baroin, ministre. Vous ne pouvez pas demander de participer à ce groupe alors que vous refusez le postulat même d’une réflexion équilibrée sur l’évolution de la fiscalité concernant le patrimoine et ses revenus.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Vous ne pouvez pas être dedans et dehors !

M. François Baroin, ministre. Je ne veux pas m’étendre davantage. J’ai, comme vous tous, mon avis personnel, mon engagement, ma réflexion. J’apporterai ma contribution et je porterai naturellement la parole du Gouvernement dans le cadre de ces travaux.

La Cour des comptes nous accompagnera, puisqu’elle devrait déposer, fin janvier ou début février, son rapport, commandé par le Président de la République, sur la convergence fiscale entre la France et l’Allemagne,

Nous devrions pouvoir élaborer un texte qui serait présenté en Conseil des ministres au cours du mois de mai, ce qui nous permettrait de saisir le Parlement, comme le Président de la République l’a souhaité et comme le Premier ministre s’y est engagé, dans le courant du mois de juin.

M. François Marc. C’est votre problème !

M. François Baroin, ministre. Compte tenu des éléments que je viens de vous livrer, cher Jean Arthuis, le retrait serait la meilleure des positions.

Il nous donnerait le temps de mener à bien les études, de définir une méthode de travail commune, puis de procéder une large diffusion. Sur un tel sujet, qui met en présence deux symboles importants, il est indispensable en effet d’avoir le temps pour permettre à la société française d’appréhender et de s’approprier cette réforme utile !

Mme la présidente. Monsieur Arthuis, l’amendement n° II-430 est-il maintenu ?

M. Jean Arthuis. J’ai choisi de présenter cet amendement dans la seconde partie du projet de loi de finances parce que je ne souhaite pas qu’il y ait de rétroactivité. Tout amendement en première partie créerait une rétroactivité, contraire à nos principes constitutionnels.

J’entends bien que la Ve République a un Président, mais, jusqu’à preuve du contraire, c’est le Parlement qui vote la loi.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Marc Todeschini. On n’est pas dans le sarkozysme !

M. Jean Arthuis. C’est, dans ce cadre-là, que je soumets cet amendement.

La Commission européenne a accroché à la fois le bouclier fiscal et l’ISF. D’ailleurs, les concepteurs de l’ISF avaient, dès l’origine, conscience que tout ce qui était délocalisable devait être exclu de l’assiette. C’est ainsi que des œuvres d’art sont sorties de l’assiette de l’ISF. Chacun comprendra que c’est une certaine vision de la justice !

J’ai déposé cet amendement précisément au nom de la justice. Nous sommes conscients que, dans l’épreuve que nous avons à affronter, il faut être à la fois pédagogue et donner des gages d’équité.

S’agissant de la fiscalité du patrimoine, nous aurons d’autres occasions de revenir sur le sujet. Lorsqu’il sera question de financer la dépendance, je n’imagine pas que l’on pourra laisser en l’état le barème des droits de successions.

Mme Nicole Bricq. Je l’espère ! Mais vous avez voté la loi TEPA !

M. Jean Arthuis. Il n’était pas alors question de dépendance !

M. Albéric de Montgolfier. Madame Bricq, avez-vous voté le financement de la dépendance ?

M. Jean Arthuis. En tout état de cause, puisque nous voulons prendre date, pardonnez-moi, monsieur le ministre, mes chers collègues, mais je maintiens mon amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-430.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Union centriste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 125 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Majorité absolue des suffrages exprimés 171
Pour l’adoption 42
Contre 300

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° II-513 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-302, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l’article 58 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le II de l’article 125-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au d du 1°, les mots : « à compter du 1er janvier 1990 » sont remplacés par les mots : « entre le 1er janvier 1990 et le 31 décembre 2010 » ;

2° Après le d du 1°, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« e. À 8,5 % lorsque la durée a été supérieure ou égale à huit ans pour les bons ou contrats souscrits à compter du 1er janvier 2011. Toutefois, ce taux est réduit à 5,5 %, si la durée du contrat a été égale ou supérieure à dix ans et si le contrat est un contrat régi par le deuxième alinéa de l’article L. 131-1 du code des assurances et dont l’unité de compte est la part ou l’action d’un organisme de placement collectif en valeurs mobilières dont l’actif est constitué pour 15 % au moins :

« - d’actions ne relevant pas du 3 du II de l’article L. 211-1 du code monétaire et financier, admises aux négociations sur un marché d’instruments financiers, dont le fonctionnement est assuré par une entreprise de marché ou un prestataire de services d’investissement ou tout autre organisme similaire étranger ;

« - de droits ou bons de souscription ou d’attribution attachés aux actions mentionnées à l’alinéa précédent ;

« - d’actions ou de parts émises par des sociétés qui exercent une activité mentionnée à l’article 34 du présent code dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers français ou étranger, dont le fonctionnement est assuré par une entreprise de marché ou un prestataire de services d’investissement ou tout autre organisme similaire étranger, sous réserve que le souscripteur du bon ou contrat, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne détiennent pas ensemble, pendant la durée du bon ou contrat, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices de la société ou n’ont pas détenu une telle participation à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription du bon ou contrat. »

II. – La perte éventuelle de recettes pour l’État et les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.