M. le président. La parole est à M. Robert Hue, pour la réplique.

M. Robert Hue. Monsieur le ministre d’État, je suis satisfait d’un certain nombre d’aspects que vous venez d’évoquer.

Je ferai simplement remarquer qu’en Tunisie, ce qui a été rejeté, ce n’est pas le drapeau de la France, ce sont les relations détestables qui prévalaient entre les gouvernements précédents et M. ben Ali.

J’en reviens au problème des flux migratoires.

Des représentants de la Tunisie sont venus dernièrement en France pour obtenir la renégociation des accords bilatéraux. A priori le gouvernement français est dans le même état d’esprit. Il est urgent que s’engage cette démarche visant à la conclusion d’accords nouveaux, car en dépend fortement l’évolution démocratique de ce pays, qui est confronté à des difficultés sociales majeures.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Monsieur le président, monsieur le ministre de la coopération, mes chers collègues, on l’a dit avant moi, 2011 restera une année historique pour le Maghreb. Soulèvements, révolutions et changements de régime bouleversent les cartes jusqu’aux confins du Moyen-Orient. Ces évolutions se font au prix du sang, de la répression mais sont empreintes d’espoir, espoir auquel nous devons répondre sans les décevoir.

Ma question concerne la Tunisie.

Le pays en est à son quatrième gouvernement. Il semble que la population ne souffre aucune concession à l’égard des anciens responsables politiques ayant appartenu an régime de ben Ali au pouvoir pendant trente ans. Il est à craindre que ce qui devait s’apparenter à une transition démocratique ne devienne une crise institutionnelle.

Monsieur le ministre, quel soutien notre pays peut-il apporter aux Tunisiens pour les aider dans cette résurrection démocratique ?

Cette semaine, le président de la Banque mondiale se rend en Tunisie. Il est primordial que le pays puisse sortir d’un système économique fondé uniquement sur le tourisme de masse. La Tunisie doit aujourd’hui répondre aux besoins de sa jeunesse, dont une grande partie est diplômée, comme l’illustre notre tradition d’échange universitaire. Pour autant, nombre de ces jeunes sont au chômage.

Lors de son déplacement à Tunis les 20 et 21 avril dernier, M. le ministre des affaires étrangères a annoncé la mobilisation de 350 millions d’euros sous forme de prêts bilatéraux. Mercredi dernier, vous-même, monsieur le ministre, avez reçu les ministres tunisiens des finances, du commerce et du tourisme, de la formation professionnelle et de l’emploi. Je me réjouis de cet entretien « pluriel », car il témoigne d’une vision globale pour relancer l’économie nationale tunisienne, incluant les facteurs de développements sociaux. Toutefois, pouvez-vous nous préciser si un calendrier ou des évaluations seront mis en place afin d’accompagner au mieux ce pays ?

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la coopération.

M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais m’efforcer de répondre avec précision à la question posée par Bernard Fournier, en m’inspirant notamment des réponses qui ont déjà été apportées à certains d’entre vous sur la situation tunisienne, un sujet très important qui nous préoccupe tous.

Après les événements qui ont eu lieu, une certaine instabilité gouvernementale s’est en effet installée dans ce pays, qui en est à son quatrième gouvernement.

Comme il l’a expliqué tout à l’heure, M. le ministre d’État s’est lui-même rendu en Tunisie et a pu rencontrer à cette occasion le Président de la République, le Premier ministre ainsi que plusieurs ministres. Il a pu constater que l’équipe gouvernementale en place était expérimentée et de très haut niveau.

Comme vous l’avez souligné, monsieur Fournier, j’ai moi-même reçu plusieurs ministres tunisiens, notamment ceux en charge des finances, du commerce, du tourisme, de la formation professionnelle, de l’emploi, des transports et de l’équipement. Tous sont des chefs d’entreprises ou des personnes issues de divers secteurs professionnels qui ont momentanément quitté leurs fonctions pour servir leur pays dans cette période essentielle de transition devant conduire aux élections législatives.

C’est pourquoi, aujourd’hui, la France ne craint pas d’aider substantiellement nos amis tunisiens à repartir du bon pied, car les perspectives, qu’elles soient économiques, politiques ou diplomatiques, nous semblent positives.

Je précise enfin que nous militons, dans le cadre de l’Union européenne, en faveur de l’octroi à la Tunisie du statut avancé. Nous y travaillons en détail sur le plan politique, sans oublier les aspects financiers.

Ayez confiance dans l’avenir de la Tunisie, mesdames, messieurs les sénateurs, et n’oubliez pas qu’il appartient avant tout aux Tunisiens !

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, pour la réplique.

M. Bernard Fournier. Ces précisions étant de nature à répondre à nos préoccupations, je remercie M. le ministre de sa réponse.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’état de nos relations avec la Syrie.

Je crains que la France, en dépit de ses efforts, ne paie aujourd’hui les choix calamiteux du début du quinquennat.

Le fait que le président Sarkozy ait renforcé ou renoué les relations avec les pires dictateurs du monde arabe que sont Khadafi ou Bachar el-Assad, leur rendant ainsi une légitimité internationale, était une erreur.

Le fait d’établir des liens avec la Syrie en marge de la diplomatie officielle l’était également – je rappelle à ce propos les innombrables missions de Claude Guéant à Damas lorsqu’il était secrétaire général de l’Élysée.

En quoi ces accords, passés hors de tout contrôle du Parlement, ont-ils consisté ? Nous voudrions savoir dans quelle mesure ils pèsent sur la politique menée actuellement.

En apparence, la politique française a aujourd’hui radicalement changé, et nous approuvons totalement le vote de la résolution du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, qui demande à la Syrie de mettre un terme à la violation des droits de l’homme contre son peuple, et qui met en place une commission d’enquête.

De même, nous approuvons les déclarations du ministre des affaires étrangères et celles du représentant permanent de la France auprès des Nations unies.

Toutefois, face à une répression qui a pris la forme d’actes de guerre caractérisés contre les habitants des villes de Deraa, Douma et Banyas, entres autres, et d’arrestations massives ces deux derniers jours, nous estimons que la France doit aller au-delà des déclarations.

Le Gouvernement entend-il prendre des mesures contraignantes contre Assad, son entourage et les responsables de la répression, en atteignant leurs avoirs financiers, leurs propriétés, et en les empêchant d’entrer sur notre territoire ?

Quelles sanctions défendrez-vous aux prochaines réunions du Conseil de sécurité de l’ONU ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Henri de Raincourt, ministre. Bien qu’elle ne soit pas si éloignée dans le temps, la période à laquelle vous faites référence était fondamentalement différente de celle que nous connaissons aujourd’hui, madame la sénatrice. Cela justifie, me semble-t-il, les positions successives adoptées par le Gouvernement français.

Il s’agissait en l’occurrence de discuter d’État à État. Et, lorsque nous tentons de contribuer modestement à la création d’un environnement favorable à la paix dans cette partie du monde – souvenons-nous plus particulièrement du Liban – je ne vois pas comment nous pourrions nous passer d’une discussion avec la Syrie. (M. Robert del Picchia applaudit.)

Nous n’avons jamais dépassé ce qu’il était convenable de faire en matière de relations diplomatiques.

S’agissant maintenant de la situation actuelle, la France condamne sans réserve, de la manière la plus solennelle qui soit, toutes les exactions. Elle a demandé à la Syrie que cessent les violences. Nous avons convoqué l’ambassadrice de Syrie à Paris, et la réciproque s’est déroulée à Damas. Nous essayons également de mobiliser autour de nous nos partenaires du Conseil de sécurité, mais sans grand succès jusqu’à présent.

À propos du Conseil des droits de l’homme, nous partageons votre sentiment, madame la sénatrice : nous militons pour que la candidature de la Syrie ne soit pas acceptée.

Enfin, nous travaillons, au sein de l’Union européenne, à la mise en place de sanctions fortes telles qu’un embargo sur les armes, le gel de l’accord d’association, la révision de la politique de coopération entre l’Union européenne et la Syrie ou encore des sanctions individuelles contre les responsables de la répression sanglante de ces dernières semaines.

Je puis vous assurer, madame, que le Gouvernement français n’a pas, à l’égard de la Syrie, une position différente de celle qu’il exprime de façon générale au cours de ce printemps des peuples qui se battent pour plus de liberté et de dignité. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour la réplique.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. J’ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre, et je vous ferai remarquer que je n’ai jamais mis en cause les prises de position de la France. Mais des prises de position verbales aux actes, il est un pas qu’il faut aujourd’hui franchir…

Dès maintenant, les biens et avoirs de tous les responsables syriens en France doivent être gelés. Cela concerne directement le général Manaf Tlass, responsable des exactions à Banyas. La diplomatie de connivence, qui était un peu la règle ces derniers temps dans les relations entre Paris et Damas, doit absolument cesser.

Enfin, la France doit demander au Conseil de sécurité de l’ONU la comparution de Bachar el-Assad et des responsables de la répression devant la Cour pénale internationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre, ainsi que M. le ministre d’État, d’avoir répondu aux questions qui vous étaient posées.

Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques.

Avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-huit heures, sous la présidence de Mme Monique Papon.)

PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

9

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine (deux propositions de loi)
Discussion générale (suite)

Gestion effective du risque de submersion marine

Suite de la discussion et adoption de deux propositions de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine (deux propositions de loi)
Article 1er

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du texte élaboré par la commission sur les propositions de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cela fait plus d’un an que la tempête Xynthia s’est abattue sur l’ouest de notre pays, et les plaies sont loin d’être refermées. Certains sinistrés pleurent encore les victimes quand d’autres se battent pour reprendre, tant bien que mal, une vie normale.

Xynthia a été d’une ampleur exceptionnelle, conjonction de plusieurs phénomènes naturels imprévisibles qui expliquent sa brutalité. Malheureusement, nous pouvons craindre que seule son ampleur soit hors du commun. En effet, l’actualité nous démontre chaque jour que les catastrophes naturelles ne cessent de se multiplier.

Des tempêtes de 1999 à celles de Xynthia ou de Klaus, en passant par les inondations survenues dans le Var en 2010, il semble évident que nous devons reconsidérer notre politique en matière de gestion des risques car ces phénomènes sont de plus en plus fréquents et appelés à se reproduire.

Un cabinet d’études spécialisé dans les risques naturels a estimé à 670 le nombre de catastrophes naturelles depuis 2001 et l’année 2010 constitue à cet égard un record. Il a chiffré à 13,65 milliards d’euros le « coût total des dommages assurés liés aux catastrophes naturelles ». En prenant en compte les biens non assurés – routes, forêts, infrastructures publiques –, ce coût atteindrait « environ 30 milliards d’euros depuis 2001 ».

Forts de ces constats, nous nous devons de procéder de façon urgente à une remise en cause complète et collective de notre capacité à faire face à ces phénomènes. Il est fort regrettable que ce soit un drame de l’ampleur de Xynthia qui ait été l’élément déclencheur.

L’adage dit que ce sont de nos échecs et de nos erreurs que nous apprenons le plus. C’est encore une fois le cas et, malheureusement, au prix de nombreuses vies humaines.

Reconsidérer notre politique de gestion du risque, c’est donc commencer par faire preuve de beaucoup plus d’humilité en la matière.

L’homme a souvent cru pouvoir maîtriser les éléments et contrôler la nature. Mais cette dernière nous rappelle bien souvent qu’elle est toute puissante et, même armés des technologies les plus avancées, nous ne pouvons lutter.

Il est pourtant de notre devoir d’anticiper au mieux ces catastrophes afin de ne plus jamais les subir de la sorte. Les recommandations de cette proposition de loi sont donc une première étape nécessaire pour doter la France d’une véritable culture du risque.

Elles sont le fruit de plus d’un an de travail et concrétisent une partie des propositions du rapport d’information de juillet 2010.

À ce sujet, je tiens à saluer le travail de nos deux collègues Alain Anziani et Bruno Retailleau, qui ont porté ce sujet difficile et fourni un travail de grande qualité.

Dans le cadre de cette mission d’information, nous nous étions rendus dans les territoires sinistrés, en Vendée et en Charente-Maritime notamment.

À cette occasion, nous avons tous été frappés par l’ampleur des dégâts, tant humains que matériels, tant sociaux qu’économiques.

Puis, très vite, la tristesse a fait place à la stupeur : constructions d’habitation dont plus de 200 000 situées en dessous du niveau de la mer ; permis de construire non ou mal instruits, délivrés à la chaîne, notamment dans des zones soumises à hauts risques ; méconnaissance totale des risques liés aux zones du littoral ; quasi-absence de plans de prévention des risques d’inondation dans les communes sinistrées.

La liste pourrait être très largement allongée.

Il a aussi fallu ajouter au désarroi des sinistrés une gestion malheureuse de cette catastrophe, tout du moins dans un premier temps.

Il est donc impensable que nous revivions cela et, à ce titre, la tempête Xynthia a dispensé au moins un enseignement positif : celui de nous révéler les graves défaillances de notre système et de nous démontrer, si ce n’était pas encore le cas, que la France n’était absolument pas préparée aux risques de submersion marine.

C’est donc non pas seulement une modification de la législation qui doit avoir lieu, même si elle est indispensable, mais une véritable révolution des mentalités en France dans le domaine de la gestion et de l’appréhension des risques naturels, au niveau tant de l’État, de l’administration et des élus, que des citoyens.

M. Bruno Retailleau, rapporteur. Absolument !

Mme Nicole Bonnefoy. C’est notre système entier qui a failli dans son ensemble et je tiens vraiment à insister sur cette globalité de l’échec car, comme l’a démontré le rapport d’information, la responsabilité a été largement collective. Je regrette qu’à un moment on ait pu rejeter la faute sur les élus locaux, en première ligne sur ce drame, occultant toutes les autres responsabilités de l’État et de l’administration française.

Si faute exclusive il devait y avoir, elle serait imputable au diktat de l’argent et de la pression foncière qui a sévi sur les zones du littoral. En effet, les demandes de permis de construire se sont multipliées de façon exponentielle durant des années.

Les pressions financières étaient telles qu’elles ont nécessairement favorisé des accords précipités et inconsidérés : sans examens préalables des risques encourus ; sans que les décideurs concernés, principalement les maires des petites communes, aient eu les outils en main et les moyens de s’en servir pour évaluer ces risques.

Chacun doit donc prendre sa part de responsabilité et c’est notre devoir de législateur de tirer les leçons de cette tragédie et de tenter d’y apporter des réponses adaptées.

Nous devons mettre en place une véritable politique de l’anticipation et de la gestion des risques qui devra nécessairement passer par une meilleure prévention et une meilleure information dans ce domaine.

Il est impensable que les victimes d’une telle tragédie revivent la gestion hâtive de ce drame, à l’image de ces fameuses zones noires introduites dans la précipitation et de façon unilatérale, qui sont tombées tel un couperet sans possibilité de négociation.

Il est donc nécessaire que la France se dote enfin d’une politique adaptée à de tels phénomènes afin de pouvoir en limiter si possible les conséquences.

C’est tout l’objet de cette proposition de loi et nous pouvons nous en féliciter. Mes collègues ont déjà largement exposé ses objectifs, mais je tiens à revenir sur certains d’entre eux, qui me semblent fondamentaux.

En premier lieu, la gestion du risque et l’aménagement du territoire ne pouvant plus être disjoints, cette proposition de loi promeut une approche globale du risque de submersion marine, en adéquation avec la mise en œuvre prochaine de la directive communautaire relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation. L’objectif est de consolider la chaîne du risque à chacune de ses étapes : prévention, prévision et gestion.

La prise en compte simultanée des crues et des risques littoraux au sein des plans de prévention des risques d’inondation en était le préalable indispensable. L’affirmation de la suprématie de la prévention des risques sur le droit de l’urbanisme en était une traduction impérieuse.

En effet, la majorité des communes touchées par la tempête Xynthia ne disposait pas de plans de prévention des risques d’inondation. Sur les quelque 900 communes du littoral, environ 5 % seulement en étaient dotées. De plus, même lorsque ces plans existaient, ils n’étaient pas pour autant efficaces, la simple annexion des plans de prévention des risques d’inondation aux documents d’urbanisme n’entraînant pas nécessairement une cohérence entre les deux.

Désormais, les plans de prévention des risques naturels s’imposeront aux documents locaux d’urbanisme, qui devront être révisés dans les plus brefs délais pour être en conformité avec les prescriptions de ces plans.

Les maires seront, eux, dans l’obligation d’arrêter des plans communaux de sauvegarde dès lors qu’est prescrit un plan de prévention des risques.

Dans ce cadre, je me félicite que les élus locaux bénéficient d’un appui technique de l’État pour ce faire. En effet, se retrouver dans les méandres de l’administration ou du droit en vigueur n’est pas chose aisée, surtout lorsque l’on est maire d’une petite commune et que l’on ne dispose pas de services importants pour se faire aider. L’aide des services de l’État est donc primordiale et permettra très certainement d’accélérer la mise en conformité des documents d’urbanisme aux plans de prévention des risques naturels.

La proposition de loi vise également à sensibiliser les populations à l’existence du risque en leur inculquant des comportements adaptés en cas de catastrophe naturelle. Cela se fera par le biais d’exercices de simulation et par l’instauration d’une journée nationale de la prévention des risques naturels. Ainsi, nous sensibiliserons le public le plus large possible.

Dans le même temps, les préfets disposeront de tous les leviers nécessaires pour s’assurer de cette mise en conformité. Ils auront également des obligations, comme celle de communiquer aux maires, tous les trois ans, une synthèse des risques naturels auxquels les communes sont exposées.

Pour sa part, l’État devra assumer ses fonctions générales de planification et de contrôle en tant que garant de la sécurité des personnes et des biens. Il devra publier, tous les trois ans, une évaluation globale du fonctionnement des ouvrages de protection contre la mer et les inondations et, tous les six ans, un plan d’action concernant les digues.

C’est seulement avec cet effort collectif et cette conscience commune du risque que nous pourrons faire avancer notre pays dans la bonne voie.

Je me félicite donc de l’ensemble de ces mesures qui, en plus de renforcer et de sécuriser substantiellement notre système actuel, responsabilisent l’ensemble des acteurs concernés.

En consolidant l’ensemble de la chaîne de gestion du risque, nous pouvons espérer nous prémunir contre la survenue d’un autre drame de cette ampleur.

Néanmoins, le groupe socialiste proposera une série d’amendements qui, sans remettre en cause l’esprit de ce texte, permettront de l’améliorer.

J’espère que, à l’instar du rapport d’information du mois de juin dernier, cette proposition de loi, une fois modifiée, recueillera l’unanimité de notre Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

Chapitre 1er

De l’approche globale du risque de submersion marine

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine (deux propositions de loi)
Article 2

Article 1er

L’article L. 562-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Au I, après le mot : « inondations, », sont insérés les mots : « les risques littoraux, » ;

2° Après le VI, il est inséré un paragraphe VI bis ainsi rédigé :

« VI bis. – Les plans de prévention des risques d’inondation des communes littorales traitent simultanément mais de façon spécifique les risques de crues et les risques littoraux, dont les submersions marines. » ;

3° Dans le premier alinéa du VII, après les mots : « et des risques », sont insérés les mots : « et de prise en compte des ouvrages visés à l’article L. 562-8-1, ».

Mme la présidente. L'amendement n° 11, présenté par M. Courteau, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que leurs effets cumulés

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je voudrais dire tout d’abord combien je suis satisfait de l’intégration du risque de submersion marine et, plus globalement, des risques littoraux dans les plans de prévention des risques naturels prévisibles.

Je soutiens aussi le fait que la commission de l’économie ait préféré une approche intégrée de tous les risques d’inondation.

J’estimais, en effet, que créer une nouvelle catégorie de plans de prévention des risques spécifiquement dédiée au risque de submersion marine en parallèle des plans de prévention des risques d’inondation risquait de rendre les choses plus complexes et la prévention moins efficace, d’autant que, comme vous l’avez noté dans le rapport, monsieur le rapporteur, dans certaines communes littorales, il faut prendre en compte la confluence des eaux fluviales et maritimes. Dans ces cas-là, traiter des risques de crues et de submersion marine dans le même document paraît plus pertinent.

Toutefois, j’estime que la rédaction actuelle de l’alinéa 4 de l’article 1er n’est pas tout à fait complète.

En effet, cet alinéa dispose : « Les plans de prévention des risques d’inondation des communes littorales traitent simultanément mais de façon spécifique les risques de crues et les risques littoraux, dont les submersions marines. »

Je propose de compléter cet alinéa en faisant référence aux effets cumulés de ces différents risques d’inondation.

J’estime qu’un document comportant deux volets différents, l’un portant sur les crues et l’autre portant sur les submersions marines, ne nous permettrait pas d’appréhender correctement l’intensité du risque d’inondation auquel les communes littorales sont soumises. Il faudrait croiser les données pour les communes littorales proches d’un estuaire ou d’une embouchure.

En effet, la conjonction d’une crue fluviale et d’un niveau de la mer exceptionnellement élevé en raison de forts coefficients de marée ou de marée de tempête peut provoquer une inondation beaucoup plus importante que prévu dans les espaces littoraux.

Dans ce cas, les eaux de crue sont refoulées dans les terres beaucoup plus loin et l’évacuation à l’exutoire peut être ralentie.

Bref, vous l’aurez compris, les dégâts potentiels matériels et humains peuvent alors être encore plus importants et il faut donc réfléchir à l’occupation des sols qui permettra de réduire ces risques au minimum. J’espère, mes chers collègues, que vous soutiendrez cet amendement, qui complète le texte du rapporteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Retailleau, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Il semble opportun de prévoir que les plans de prévention des risques d’inondation, les PPRI, traitent aussi les effets cumulés des risques de crues et les risques littoraux, notamment dans les zones estuariennes.

En conséquence, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Courteau, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je vous propose, mes chers collègues, de modifier les modalités de prise en compte des ouvrages construits en vue de prévenir les inondations et les submersions dans les PPRI.

Au départ, les propositions de loi prévoyaient que ces ouvrages, essentiellement les digues, soient directement pris en compte dans les PPRI. La commission a estimé préférable de renvoyer les modalités de cette prise en compte à un décret, sans aucune précision.

Les derniers alinéas de l’article L. 562-1 du code de l’environnement disposent déjà que des décrets en Conseil d’État définissent en tant que de besoin les modalités de qualification des aléas et des risques, les règles générales d’interdiction, de limitation et d’encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité, ainsi que d’information des populations, dans les zones exposées aux risques définies par les plans de prévention des risques naturels prévisibles, les PPRN. Un autre décret serait donc nécessaire.

Toutefois, la première version qui nous avait été soumise précisait bien que ces ouvrages seraient appréhendés autant dans leur fonction de protection qu’en tant qu’objet de danger, ce qui ne figure plus dans la version actuelle. Je le regrette, car, même si la rédaction n’était pas vraiment satisfaisante, elle permettait de remettre en question l’illusion de sécurité créée par les digues et de sensibiliser les élus locaux et la population.

C’est pourquoi je propose, d’une part, de supprimer cet alinéa introduit en commission, aux termes duquel un décret en Conseil d’État précise les modalités de prise en compte des ouvrages construits en vue de prévenir les inondations et les submersions visées à l’article L. 562-8-1 du code de l’environnement et, d’autre part, d’entériner explicitement dans les PPRN le principe dit de transparence des digues.

Il est clair que, dans la délimitation du zonage des PPRI, les surfaces qui seraient atteintes par les eaux si les digues venaient à être rompues ou submergées doivent être considérées comme inondables. Cette recommandation ayant d’ailleurs été formulée dans le rapport interministériel intitulé : « Tempête Xynthia, retour d’expérience, évaluation et proposition d’actions », rendu public en mai 2010, il me semble important de lui donner un caractère normatif.