M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. S’agissant de l’agriculture, les enjeux sont tout aussi importants.

Inquiet pour les grandes cultures et pour l’élevage, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, Bruno Le Maire, a pris un certain nombre de mesures.

Il est désormais possible d’utiliser les jachères sans restriction. En ce qui concerne la paille, enjeu dont vous avez souligné l’importance, la solidarité doit jouer à plein : la paille doit être réservée en priorité aux éleveurs. À cet égard, on ne peut que se féliciter des initiatives prises en la matière par la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, la FNSEA, avec des contrats de vente de paille entre départements.

M. Didier Boulaud. Il faut arrêter de mettre les Français sur la paille !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Enfin, je rappelle que la suspension de l’assurance récolte ne concerne que les nouveaux souscripteurs. Les agriculteurs qui procèdent au renouvellement de leur contrat ont la possibilité de le faire jusqu’au 15 mai. Néanmoins, le ministre de l’agriculture reste vigilant pour que les pratiques commerciales des assureurs respectent la réglementation en vigueur.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire travaillent de concert pour permettre une meilleure gestion de la ressource, et donner de la visibilité, en premier lieu à la profession agricole. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

fonctionnement de la poste

M. le président. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. La Poste a annoncé, récemment, le lancement, au 1er octobre prochain, d’une nouvelle offre dite « de courrier rapide » - rapide… - pour les particuliers et les entreprises en j+2.

Dans son communiqué, La Poste précise vouloir réduire ainsi son empreinte écologique et garantir un niveau de fiabilité et de qualité de service plus élevé.

Toujours selon La Poste, le nouveau service est censé s’inscrire dans une optique de développement durable en limitant le transport aérien à la Corse et aux départements d’outre-mer.

La nouvelle offre se veut également plus économique, avec un nouveau timbre au prix de 57 centimes.

M. Roland Courteau. Et voilà !

M. Michel Teston. Quel que soit le soin apporté par La Poste pour justifier cette refonte hautement symbolique de son offre, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit de mettre en place un courrier à deux vitesses,…

M. Michel Teston. … pour favoriser la distribution à j+2.

En effet, le prix du nouveau timbre étant inférieur à celui du timbre habituel, qui passera à 60 centimes le 1er juillet prochain, le nombre de courriers distribués à j+2 va très probablement augmenter fortement. (M. René-Pierre Signé s’exclame.)

Le risque est donc réel d’assister à un vrai recul en matière d’acheminement du courrier par rapport à la situation actuelle, laquelle est certes imparfaite, …

M. Michel Teston. … mais où plus de 83 % des courriers revêtus de la mention « lettre prioritaire » sont distribués à j+1.

À la demande du chef de l’État, la majorité présidentielle a voté, en 2009, la transformation de La Poste en société anonyme, ouvrant ainsi la voie à l’entrée ultérieure d’actionnaires privés dans le capital de La Poste.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Michel Teston. Le Gouvernement va-t-il maintenant avaliser un nouvel affaiblissement du service public postal en acceptant que la distribution du courrier à j+2 devienne la règle à terme ?

Opposé à cette évolution prévisible, le groupe socialiste du Sénat attend une réponse claire à cette question. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jean-Michel Baylet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous le savez, la loi du 9 février 2010 a renforcé la présence postale sur le territoire,…

M. Roland Courteau. Ce n’est pas vrai !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. … avec l’obligation désormais inscrite dans la loi de maintenir un réseau postal.

M. Didier Boulaud. Dans le IXe arrondissement de Paris, peut-être ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. En effet, monsieur le sénateur ! Je vous remercie de me donner l’occasion de confirmer qu’il existe dans le IXe arrondissement de Paris une poste centrale, rue Choron ! Vous voyez que je connais un tout petit peu La Poste ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Ce réseau postal est constitué d’au moins 17 000 points de contact.

M. René-Pierre Signé. Ils disparaissent !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Je précise que 90 % de la population est située à moins de cinq kilomètres d’un point de contact, notamment en Ardèche, monsieur Teston.

Pour la part de la population qui est éloignée de plus de cinq kilomètres du réseau postal, la distance à parcourir ne saurait dépasser vingt minutes de trajet automobile.

Au total, ce dispositif a été complété, comme vous le savez, par un contrat de présence postale territoriale, signé en janvier 2011 entre l’État, l’Association des maires de France et La Poste. Il a accru la contribution financière de l’État, qui est passée à 170 millions d'euros.

M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas la contribution de l'État !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Un décret venant spécifier cette part de l’État est sur le point d’être signé. Il est présenté à la Commission européenne par le Conseil d’État.

Ce contrat prévoit de maintenir dans chaque département un nombre de points de contact en zones prioritaires, notamment dans les communes rurales.

M. René-Pierre Signé. Dans les cafés et les épiceries !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Il est aussi précisé que les horaires d’ouverture ne peuvent pas être modifiés…

M. Pierre-Yves Collombat. Si, une fois tous les deux ans !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. … sans l’accord du maire – c’est sans précédent ! – et en fonction de l’activité économique. Vous le savez, monsieur Teston, puisque vous avez, je crois, travaillé sur ce sujet.

Donc, prétendre, comme vous le faites, qu’il y a affaiblissement du service public est une erreur. Je m’inscris en faux contre cette affirmation !

M. Roland Courteau. Et le prix du timbre ?

M. le président. Il vous faut conclure, monsieur le secrétaire d'État.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. La Poste est en train d’être modernisée, mesdames, messieurs les sénateurs. Elle n’a jamais été aussi proche des Français ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est faux, archifaux !

M. Roland Courteau. À quoi servent ces questions si l’on n’y répond pas !

seuils relatifs aux intercommunalités

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.

Je souhaite avoir une confirmation du caractère purement indicatif du seuil de 5 000 habitants figurant à l’article L. 5210-1-1 nouveau du code général des collectivités territoriales, article issu de la loi de réforme des collectivités territoriales que le Sénat a votée récemment et qui est en train d’entrer en application.

Indépendamment de ce que je pense de ce texte – chacun le sait, d’ailleurs –, je rappelle que la lettre de ladite loi porte bien ce seuil au rang des « orientations » à prendre en compte dans le cadre du schéma départemental de coopération intercommunale.

Tel est bien aussi l’esprit de cette loi, et je souhaite que vous nous en assuriez, monsieur le ministre.

Ainsi, qu’il s’agisse des travaux préparatoires à la réforme ou des déclarations faites par M. le Premier ministre devant les maires de France réunis en congrès, le Gouvernement avait indiqué très clairement le caractère non impératif et non normatif de ce seuil. Je souhaite que ce soit réaffirmé.

De même, la maxime latine qu’avait alors utilisée votre prédécesseur dans cet hémicycle, démontrant que les actes, les contrats doivent être compris dans le sens où ils produisent un effet plutôt que dans celui où ils n’en ont aucun, résumait bien la portée purement indicative de ce texte.

Monsieur le ministre, cette souplesse demandée et actée par le Parlement a été longuement débattue dans cette enceinte. Elle trouve son fondement dans les différences démographiques d’un territoire à l’autre : le seuil de 5 000 habitants ne veut pas dire la même chose en région parisienne et dans mon département, où la densité peut, par endroits, n’atteindre que 12 habitants au kilomètre carré. Avoir une seule et même règle n’a aucun sens ! (Marques d’approbation sur diverses travées.)

Votre circulaire du 27 décembre 2010 donnant aux préfets les premières indications pour la mise en œuvre des dispositions du texte rappelle bien que la loi a fixé des « orientations », mais elle est malheureusement beaucoup plus restrictive et directive que la lettre et l’esprit de la loi. Le sentiment sur le terrain, d’après les retours que nous en avons tous ici, est qu’on essaie de forcer la main aux élus.

M. Robert Hue. Bien sûr !

M. Philippe Adnot. C’est ainsi que cette circulaire est comprise localement.

M. le président. Il vous faut conclure, mon cher collègue.

M. Philippe Adnot. J’attends donc avec intérêt de votre part, monsieur le ministre, la confirmation que ce seuil est non pas obligatoire, mais bien indicatif.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela ne sert à rien !

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.

M. Philippe Richert, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, dans la très grande majorité des départements, les préfets ont présenté à la commission départementale de la coopération intercommunale un projet de schéma visant à atteindre les objectifs que nous avons assignés à la réforme de la carte intercommunale.

L’objectif principal est de mieux faire correspondre les périmètres des ECPI avec les bassins de vie qu’ils administrent. Il y va de l’efficacité du système. Cela suppose de procéder à des regroupements d’un minimum de 5 000 habitants pour tout EPCI.

Je répète ce qui a été clairement dit lors des débats : nous souhaitons certes atteindre cet objectif, mais des exceptions sont à prévoir. La première concerne les zones de montagne, et la deuxième les départements qui connaissent des situations particulières, notamment en termes de densité démographique.

Comme le disait Joseph Joubert, « le but n’est pas toujours placé pour être atteint, mais pour servir de point de mire ».

M. Jean Desessard. C’est comme pour le retour à l’équilibre budgétaire !

M. Didier Boulaud. C’est le mirage qui s’éloigne !

M. Philippe Richert, ministre. C’est ainsi qu’il faut comprendre la décision prise, d’un commun accord, par le Parlement et le Gouvernement de fixer un seuil de 5 000 habitants pour les EPCI.

Je rappelle, en conclusion, que nous avons sept mois devant nous, à compter du schéma soumis par le préfet : trois mois de concertation avec les EPCI et les communes, et quatre mois de débats au sein de la commission départementale. Cette période doit être l’occasion d’un vrai dialogue, une vraie concertation pour nous permettre de trouver, dans le maximum de cas, une solution susceptible d’être acceptée par les élus et par le préfet, ce qui n’est que la traduction d’un texte que nous avons porté très largement ensemble.

Ce qui doit nous réunir aujourd’hui, au-delà des difficultés ponctuelles, c’est la volonté d’aller de l’avant et de trouver des solutions dans le cadre d’un débat que nous voulons constructif. Telle est la réponse concrète que je souhaitais apporter à Philippe Adnot. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

7

Souhaits de bienvenue à des délégations de parlementaires congolais, slovènes et hongrois

M. le président. Mes chers collègues, il m’est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, de trois délégations de parlementaires. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.) 

La première délégation, de l’Assemblée nationale de la République du Congo, est conduite par M. Sylvestre Ossiala, président de la commission de l’économie et des finances, la délégation ayant été accueillie au Sénat par notre collègue Christophe-André Frassa. (Applaudissements.)

La deuxième délégation, de députés slovènes, est conduite par Mme Brenda Pecan, accueillis au Sénat par notre collègue Colette Mélot, présidente du groupe d’amitié. (Applaudissements.)

Cette visite coïncide avec le vingtième anniversaire de l’indépendance de la Slovénie, qui vient de signer un accord de partenariat stratégique de grande ampleur avec notre pays. Nous accueillerons, d’ailleurs, le président de la République slovène dans quelques jours.

La troisième délégation, de députés hongrois, est conduite par M. Ferenc Kalmar et accueillie au Sénat par notre collègue M. Michel Billout, président du groupe d’amitié. (Applaudissements.)

La Hongrie, où une délégation de sénateurs français s’est rendue à l’automne dernier, préside actuellement l’Union européenne.

Ces visites soulignent l’intensité de la coopération parlementaire entre notre institution et les parlements étrangers.

En votre nom à tous, je veux dire à nos hôtes combien nous sommes honorés de leur visite et combien nous sommes heureux de les recevoir. (Applaudissements.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.)

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

8

Article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi organique portant diverses mesures de nature organique relatives aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution
Article 1er

Collectivités régies par l'article 73 de la Constitution

Suite de la discussion et adoption, en procédure accélérée, d'un projet de loi organique dans le texte de la commission, modifié

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi organique portant diverses mesures de nature organique relatives aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution.

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi organique portant diverses mesures de nature organique relatives aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution
Article 1er bis (nouveau)

Article 1er (suite)

Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise et Patient, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le II de l'article L.O. 3445-2 est abrogé ;

II. - Après l'alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le II de l'article L.O. 4435-2 est abrogé ;

La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.

M. Jean-Étienne Antoinette. Cet amendement prévoit de supprimer le terme automatique de la demande d'habilitation tendant à adapter une disposition législative ou réglementaire par certaines collectivités d'outre-mer.

Je souligne qu’il s’agit seulement de la « demande » d’habilitation, donc de la première étape de la procédure : en aucun cas l’habilitation elle-même ne sera rendue définitive.

En droit positif, une telle demande d’habilitation devient caduque la veille du renouvellement des membres élus de la collectivité ou en cas de vacance de l’ensemble des sièges, pour des raisons institutionnelles ou pour des motifs plus tragiques – le rapporteur de l’époque parlait à l’Assemblée nationale de « décès global »…

La caducité automatique des demandes d’habilitation apparaît comme un frein à l’emploi de cette procédure par la collectivité ultramarine lorsque la fin de la mandature approche. En effet, entre les délais de recours, le délai de publication, le délai – « raisonnable », mais fort long – d’étude de la demande par le Premier ministre ou par le Parlement, il peut s’écouler beaucoup de temps avant que la demande d’habilitation n’arrive à une conclusion.

Cette caducité automatique a un effet mécanique : les collectivités ne vont plus présenter de demande un, deux, voire trois ans avant la fin de la mandature ; c’est donc aux assemblées nouvellement aux affaires qu’il reviendrait de déposer un dossier – bien argumenté, car les habilitations prévues à l’article 73 de la Constitution appellent des demandes très abouties de la part des collectivités – dans les premières années suivant leur élection.

Dès lors, pour empêcher qu’une fin de non-recevoir ne soit opposée à une demande, il faut ôter au Gouvernement et au Parlement la possibilité de laisser courir le temps jusqu’à ce renouvellement pour ne pas répondre à ladite demande.

En conséquence, si l’on souhaite, dans la droite ligne de la réforme constitutionnelle de 2008, ouvrir ou faciliter l’accès aux habilitations pour les différentes collectivités de Guyane, Martinique et Guadeloupe, il faut supprimer la caducité automatique de la demande.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cointat, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je comprends fort bien cet amendement, mais je ne suis pas certain que la solution préconisée par Jean-Étienne Antoinette soit de nature à régler le problème. Je m’explique.

Actuellement, en effet, une demande d’habilitation à laquelle, pour des raisons diverses, il n’a pas été donné suite devient caduque à la fin du mandat de l’assemblée qui en est à l’origine. Cependant, quand bien même la demande ne deviendrait pas caduque, elle resterait toujours dans les limbes, car il faudrait de toute façon une nouvelle délibération de l’assemblée afin, en quelque sorte, de la « ressusciter ». Et permettre de « relancer » les anciennes demandes pourrait être dangereux. Je crains en effet que de nombreuses demandes ne restent en suspens, puis ne soient oubliées.

Même si, personnellement, je partage le sentiment des auteurs de l’amendement, je considère que la solution qu’ils proposent n’est pas la bonne, raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. En complément des propos de M. le rapporteur, je dirai qu’il y aura, de toute évidence, une demande expresse de la collectivité, que le renouvellement de sa majorité amènera à se repositionner. Il fallait, en tout état de cause, empêcher toute rupture de continuité au risque, sinon, d’avoir des demandes d’habilitation qui ne seraient pas traitées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la demande d’habilitation est l’expression d’une volonté politique et, à cet égard, je tiens à réagir aux propos qui ont été tenus ce matin s’agissant des dispositions relatives à ces habilitations de l’article 1er du projet de loi organique : le Gouvernement pourrait avoir la volonté, ai-je cru comprendre, de se donner la possibilité d’émettre des avis d’opportunité…

Monsieur Serge Larcher, depuis le début de cette mandature, jamais nous n’avons émis un avis d’opportunité ! Si nous n’avons pas traité une demande d’habilitation, c’est parce que nous n’avions pas la certitude, du fait de l’enchevêtrement des compétences, que les deux collectivités concernées étaient d’accord.

Grâce au projet de loi organique que nous examinons aujourd'hui et grâce à la collectivité unique, les problèmes de ce type vont être définitivement réglés. C’est donc une véritable avancée que permet ce texte.

Il est important de rappeler que l’évolution institutionnelle traduite par ce projet de loi organique est véritablement l’expression de la volonté politique exprimée par les élus, à un moment donné ; il ne répond à une demande ni du Gouvernement, ni du Président de la République, qui jamais n’ont entamé de démarche visant à enclencher une évolution institutionnelle dans ces territoires.

Nous respectons cette volonté politique, qui doit s’exprimer, et, s’agissant de cette évolution institutionnelle, je tiens à dire que la question s’est posée bien avant la crise de 2009 : elle s’est posée en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique en 2003, et elle avait été relancée dès 2008 par l’ancienne majorité de la Guyane, et il avait même été reproché au Gouvernement, à cette occasion, de ne pas aller assez vite.

Ce n’est donc pas dans la précipitation que nous avons consulté les électeurs ; nous avons attendu que les élus nous en fassent la demande. Le Président de la République a d’ailleurs pris le soin de recevoir l’ensemble des élus de la Guyane et de la Martinique pour s’assurer qu’ils voulaient vraiment cette consultation, laquelle a ensuite été organisée sur la base d’une réunion du congrès et des élus de la Martinique et de la Guyane. Alors, non, il n’y a pas eu de précipitation !

En revanche, monsieur Frimat, nous avons effectivement pris le temps nécessaire pour préparer le texte, et cela parce que nous nous sommes inscrits dans une démarche de collaboration avec les élus.

Et, monsieur Virapoullé, si le Président de la République n’a pas fait le choix de consulter sur le fondement de l’article 72-4 de la Constitution - c’était une possibilité et non pas une obligation -, c’est parce que l’important était que les électeurs puissent se prononcer sur les compétences, mais en laissant une ouverture pour l’élaboration d’un statut « à la carte », notre souci étant que le statut soit adapté au projet de territoire.

L’évolution institutionnelle n’est en effet pas une fin en soi. C’est non pas un objectif, mais un moyen pour mettre en œuvre un projet de territoire, le Président de la République l’a toujours dit, y compris avant d’être élu, déjà lorsqu’il était ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

Dans l’exercice des responsabilités qui sont les nôtres, nous faisons donc preuve d’une entière constance.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, pour explication de vote.

M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le rapporteur, parce que vous comprenez le sens de cet amendement, je vais me permettre d’insister.

La caducité automatique apparaît comme un non-sens au regard de la théorie de la continuité de la personnalité morale et de celle des actes administratifs unilatéraux.

Dans le système proposé, il n’est clairement plus possible d’introduire une demande d’habilitation moins de deux ans avant la fin de la mandature.

Certes, quand une assemblée délibère, l’exécutif a l’obligation d’exécuter sa délibération, mais, si une majorité nouvellement élue ne désire pas que l’instruction d’une demande d’habilitation se poursuive, elle pourra, dans le respect des mêmes formes, prendre une délibération, justement pour annuler cette demande.

Au contraire, et cela pour répondre à votre observation, si la majorité souhaite toujours l’habilitation, il y a une différence en termes de procédure entre la poursuite de l’instruction d’une demande d’habilitation et l’introduction d’une nouvelle demande.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.

M. Bernard Frimat. Je soutiens la position de M. Antoinette.

Effectivement, quand une collectivité prend une délibération, quoi qu’il arrive ensuite, ses décisions ne seront pas supprimées, du fait de la continuité de la personne publique : la personne morale qui succède à une autre à la tête d’une collectivité lui succède dans ses droits et obligations.

En l’espèce, une demande d’habilitation a été faite par la collectivité et, tant que la collectivité ne rapporte pas elle-même, parce qu’elle l’estime inutile, cette demande, il est normal, d’un point de vue strictement juridique, que celle-ci continue à courir.

Pourquoi se compliquer la vie en frappant cette demande de caducité ?

Il faut bien distinguer deux cas : ou l’habilitation a été accordée, et, dans ce cas, les propositions du rapporteur sont tout à fait positives et nous les soutiendrons ; ou nous sommes dans le cas particulier que vise Jean-Étienne Antoinette, et il s’agit non pas d’une habilitation, mais d’une demande d’habilitation qui a été faite et qui « vit sa vie ».

Pourquoi frapper automatiquement de caducité cette demande au lieu de laisser à la collectivité qui, dans sa continuité de personne morale, en est l’auteur la possibilité, si elle le souhaite, de mettre fin à la procédure ?

Il n’y a donc, dans cet amendement, aucun élément qui puisse gêner qui que ce soit d’un point de vue politique, mais j’y vois peut-être le souci de respecter le droit et la continuité de la personne morale, tout simplement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise et Patient, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 5, première phrase et alinéa 20, première phrase

Remplacer les mots :

les deux mois

par les mots :

le mois

La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.

M. Jean-Étienne Antoinette. Nous reprenons un amendement présenté par le rapporteur en commission, car nous en assumons totalement l’esprit.

Le texte initial du projet de loi organique ne mentionne aucun délai pour la publication de la demande d’habilitation formulée par une collectivité locale.

Le rapporteur a parfaitement vu qu’il était possible que la délibération demandant habilitation ne soit pas publiée. Il s’agirait d’une fin de non-recevoir opposée à la collectivité locale, quelle que soit la légitimité du motif.

Le rapporteur a donc fait adopter un amendement en commission portant sur le délai dans lequel doit être publiée la délibération portant demande d’habilitation, délai fixé à deux mois.

Pourquoi deux mois ?

Ce délai de deux mois paraît exorbitant pour passer de la transmission d’un acte administratif à sa publication, et cela d’autant plus qu’il n’est pas sans conséquence, puisqu’il conditionne l’entrée en vigueur de la délibération.

Si nous voulons que les délibérations portant demande d’habilitation sur le fondement de l’article 73 de la Constitution entrent rapidement dans la légalité administrative, si nous voulons que le Gouvernement et le Parlement répondent aux demandes d’habilitation, il ne faut pas envoyer un signal faible en fixant le délai de publication au Journal officiel à deux mois, ce qui ne se justifie pas ; il faut certes prévoir un délai, mais un délai suffisamment court pour que le Gouvernement ne puisse ralentir une procédure dont il maîtrise déjà de nombreuses étapes, en particulier l’examen de la légalité et de l’opportunité. Un mois suffit pour tenir compte des contraintes matérielles liées à la publication au Journal officiel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?