compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaire :

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Rappel au règlement (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi garantissant le droit au repos dominical
Article additionnel avant l'article 1er

Droit au repos dominical

Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, à la demande du groupe CRC, après concertation avec les partenaires sociaux, de la proposition de loi garantissant le droit au repos dominical, présentée par Mme Annie David et plusieurs de ses collègues (proposition n° 794 rectifié [2010-2011], texte de la commission n° 90, rapport n° 89).

Mes chers collègues, je vous rappelle que nous avons achevé le 16 novembre dernier la discussion générale de cette proposition de loi et que nous en sommes donc parvenus à la discussion des articles.

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi garantissant le droit au repos dominical
Article 1er

Article additionnel avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mmes Procaccia, Debré, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Léonard, Lorrain, Milon, Pinton, Savary, Villiers et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L´article L. 1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Avant leur examen en commission en première lecture dans l'assemblée à laquelle appartient leur auteur, les propositions de loi des membres du Parlement qui entrent dans le champ défini au premier alinéa font également l´objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l´ouverture éventuelle d'une négociation entre ces organisations. Les modalités de mise en œuvre de cette concertation sont définies par chaque assemblée. »

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent amendement vise à étendre le principe de concertation préalable avec les partenaires sociaux défini par la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007, dont je fus le rapporteur au Sénat, aux propositions de loi dont l’examen est envisagé par le Parlement et qui portent sur les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle.

Il s’agit de compléter les dispositions du droit du travail en vigueur définies par l’article L. 1 du code du travail, qui ne permettent pas actuellement aux partenaires sociaux de se saisir d’un projet de réforme d’origine parlementaire afin d’engager une concertation préalable.

Je tiens à préciser que les dispositions de la loi du 31 janvier 2007 concernant l’examen des projets de loi sont jugées positivement par les partenaires sociaux.

Je vous invite, madame la rapporteure, mes chers collègues, à relire les débats de l’époque : ils attestent que je demandais déjà la concertation avec les partenaires sociaux sur les textes d’origine parlementaire.

Le dépôt d’une proposition de loi et son inscription à l’ordre du jour des deux assemblées peuvent permettre de réformer, parfois en profondeur, le droit du travail ; il est donc important de procéder, au préalable, à une concertation avec les partenaires sociaux.

Le fait que l’avis du Conseil d’État puisse désormais être recueilli sur les propositions de loi illustre la convergence récente des procédures de préparation des initiatives législatives gouvernementales et parlementaires.

D’ailleurs, il y a deux ans, le Premier ministre a consulté les présidents des deux assemblées sur le souhait des organisations syndicales et patronales d’être mieux associées à la préparation des propositions de loi à caractère social qui sont dans le champ de la négociation collective.

Un protocole relatif à la consultation des partenaires sociaux sur les propositions de loi a ainsi été élaboré au Sénat et à l’Assemblée nationale. Gérard Larcher, initiateur du projet au Sénat, l’a précisé: « L’objectif est double. Il s’agit de concilier à la fois la concertation sociale avec l’indépendance et l’efficacité du législateur, mais aussi le respect du droit d’initiative et d’amendements des parlementaires avec les compétences de la conférence des présidents en matière d’ordre du jour. »

Cette initiative, c’est la majorité présidentielle qui l’a portée ! Il est vrai que, lorsque la gauche gouverne, elle s’exonère des consultations, comme vous nous l’avez montré avec les 35 heures ! (M. Jean Desessard s’exclame.)

M. Ronan Kerdraon. Pas du tout !

Mme Catherine Procaccia. Quelle belle image, mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, avez-vous donné à cette époque !

Je tiens d’ailleurs à rappeler que ce souhait d’une extension du principe de concertation préalable aux partenaires sociaux est partagé par la gauche : une proposition de loi, en attente d’inscription à l’ordre du jour du Parlement, déposée par Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche à l’Assemblée nationale, va dans le même sens que l’amendement n° 3. Celui-ci devrait donc recevoir l’approbation de Mme la présidente et rapporteure de la commission des affaires sociales puisqu’il est conforme aux souhaits de ses partenaires de gauche.

Pour conclure, je rappelle que notre ancienne collègue Raymonde Le Texier avait également proposé d’inscrire dans le code du travail la formalisation de la consultation des partenaires sociaux pour les propositions de loi comme pour les projets de loi.

L’amendement n° 3 vise à donner une assise législative au protocole expérimental tout en laissant aux assemblées la latitude nécessaire quant à leurs règlements. J’espère qu’il recueillera un large consensus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, rapporteure. Cet amendement est un cavalier législatif.

Avant de modifier le code du travail dans le sens voulu par les auteurs de l’amendement, il faudrait faire le bilan du protocole, proposé par Gérard Larcher, organisant la concertation avec les partenaires sociaux sur les propositions de loi.

Si je suis d’accord avec vous, madame la sénatrice, sur le principe d’une consultation des partenaires sociaux en cas de dépôt d’une proposition de loi, il n’en reste pas moins que l’amendement n° 3 n’a pas sa place dans ce texte.

Par ailleurs, il ne me semble pas que le dialogue social que vous réclamez aujourd’hui ait été mis en place pour la proposition de loi dite « Warsmann 4 », dont vous êtes rapporteur pour avis au Sénat, alors qu’une vingtaine d’articles concernent le code du travail.

S’il y a nécessité à instaurer le dialogue social, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui n’est pas, je le répète, le bon support législatif pour le faire. La commission des affaires sociales vous invite plutôt à déposer une proposition de loi à cette fin. En attendant, elle émet un avis défavorable sur l’amendement n° 3.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Le Gouvernement ne considère pas l’amendement n° 3 comme un cavalier législatif, bien au contraire, puisque le texte examiné aujourd’hui par le Sénat concerne le droit du travail.

Renforcer la concertation préalable avec les partenaires sociaux, ainsi que le proposent les auteurs de l’amendement, va dans le bon sens, et le Gouvernement est donc totalement favorable à ce dernier.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.

M. Ronan Kerdraon. Voilà un amendement quelque peu cavalier !

Nous sommes très heureux de constater que nos collègues de l’opposition sénatoriale se rallient aujourd’hui à une position que nous avons défendue en son temps.

Je rappelle que lorsque M. Gérard Larcher, alors ministre du travail, avait proposé, dans le cadre de la loi du 31 janvier 2007, la concertation préalable avec les partenaires sociaux pour l’élaboration des projets de loi, nous avons approuvé et voté cette disposition.

Nous avions néanmoins fait observer à cette époque qu’il était regrettable que la nouvelle procédure ne s’applique pas aux propositions de loi.

Mme Catherine Procaccia. Je l’avais dit en tant que rapporteur !

M. Ronan Kerdraon. Nous avions même noté que cet oubli risquait de permettre au Gouvernement de faire porter par des parlementaires, et donc sans s’embarrasser d’une concertation, des textes qui seraient en fait d’initiative gouvernementale.

Cette remarque a sans doute été jugée pertinente puisque le bureau du Sénat, également sous l’impulsion de M. Gérard Larcher, président du Sénat à l’époque, a adopté le 16 décembre 2009 un protocole en faveur d’une concertation préalable avec les partenaires sociaux.

Depuis lors, une procédure de consultation est obligatoire au Sénat pour tout texte portant sur les relations individuelles et collectives de travail, l’emploi et la formation professionnelle, relevant du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle.

L’Assemblée nationale a suivi notre exemple puisqu’elle a adopté à l’unanimité une proposition de loi de nos collègues députés socialistes, laquelle est déposée depuis sur le bureau du Sénat.

En l’espèce, la présidente de la commission des affaires sociales a décidé d’appliquer à la proposition de loi dont nous reprenons l’examen aujourd’hui la procédure de consultation voulue par Gérard Larcher, bien qu’il s’agisse d’un texte à la limite du champ du protocole. Il y a lieu de le souligner et de la remercier d’avoir pris ces garanties.

Pour notre part, nous estimons qu’il serait regrettable d’adopter la disposition présentée par l’amendement n° 3, qui est un cavalier, au débotté et à l’occasion d’un texte dont l’objet n’est pas d’organiser la concertation sociale. Plutôt que d’adopter cet amendement, il serait préférable de soumettre la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale à un vote du Sénat en bonne et due forme. Par ailleurs, il serait utile de recueillir l’avis de la commission des lois, qui devrait également être saisie d’un texte de cette nature.

La Haute Assemblée a la réputation d’être une chambre de réflexion. Le sujet prête à le démontrer.

Nous devons à la fois faire avancer le dialogue social, mais aussi préserver le droit d’initiative parlementaire, qu’il s’agisse des propositions de loi ou des amendements.

À cet égard, j’appelle l’attention du Sénat sur un point : les délais entre le dépôt d’une proposition de loi et son examen en séance publique se trouvent considérablement allongés par une concertation obligatoire. Ce nouveau paramètre ne doit pas avoir une incidence négative sur notre compétence de législateur.

Il convient de mettre en balance l’ensemble de ces éléments et de prendre toutes les précautions utiles, surtout en ce qui concerne le droit du travail, droit spécifique en ce qu’il doit tenir compte de la sujétion inhérente à la relation de travail.

Pour ces motifs, nous ne voterons pas l’amendement n° 3.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Pasquet. L’amendement n° 3 présenté par les sénatrices et sénateurs du groupe UMP vise à étendre aux propositions de loi le mécanisme de consultation des partenaires sociaux applicable aux projets de loi en vertu de la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social. Celle-ci prévoit que tout projet gouvernemental, modifiant le code du travail, doit impérativement faire l’objet d’une saisine préalable des organisations syndicales et patronales pour les inviter à ouvrir une négociation interprofessionnelle.

Si les déclarations des auteurs de cet amendement nous paraissent nobles, nous nous étonnons tout de même qu’un dispositif visant à mieux associer les partenaires sociaux à l’élaboration de la loi soit proposé au détour d’un amendement.

En effet, la mesure ayant des conséquences directes sur la place des partenaires sociaux dans l’élaboration de la loi, il aurait été souhaitable qu’elle fasse l’objet non pas d’un amendement, mais d’une proposition de loi. Cela aurait permis de soumettre cette idée au protocole organisant, à titre expérimental, la concertation avec les partenaires sociaux préalablement à l’examen, par le Sénat, des propositions de loi relatives aux relations individuelles et collectives du travail, à l’emploi et à la formation professionnelle. Avouez qu’il est tout de même paradoxal de prôner plus de dialogue social et d’agir par voie d’amendement, c’est-à-dire en utilisant la seule procédure qui n’est soumise à aucun formalisme en la matière. Il s’agit pourtant d’une question importante, qui mérite la consultation des partenaires sociaux.

Par ailleurs, avant d’étendre le principe de la concertation sociale à tous les textes législatifs, ne serait-il pas utile de procéder à l’évaluation du protocole expérimental existant ?

J’espère – je le dis sans esprit de polémique – que les sénateurs de l’UMP garderont en mémoire l’amendement qu’ils nous présentent aujourd’hui. Nul doute, alors, qu’ils repousseront, comme nous le ferons, les dispositions de la proposition de loi du député UMP Jean-Luc Warsmann dite de « simplification du droit ».

En effet, ce texte, sous couvert de simplifier les démarches administratives, contient certaines dispositions impactant le droit du travail – Mme la rapporteure a parlé tout à l’heure d’une vingtaine d’articles –, toujours dans un même souci de dérégulation. Il prévoit ainsi que, en cas de modification de la durée du travail, les clauses du contrat de travail concernant la protection du salarié seraient caduques. À titre d’exemple, un employeur pourrait exiger de son salarié qu’il travaille 48 heures une semaine et 10 heures la semaine suivante, sans que celui-ci puisse s’y opposer. Cette disposition, qui va à l’encontre des décisions de la Cour de cassation et des droits fondamentaux des salariés, n’a évidemment fait l’objet d’aucune concertation avec les partenaires sociaux, à moins de considérer que la transposition en droit des propositions formulées par le MEDEF vaut concertation.

En tout état de cause, le groupe CRC votera contre cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Mme Isabelle Debré. Comme l’a expliqué ma collègue Catherine Procaccia, cet amendement a pour objet d’étendre aux propositions de loi le principe de concertation préalable avec les partenaires sociaux prévu par la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007, lorsqu’elles portent sur les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle.

La loi du 31 janvier 2007 visant les projets de loi constituait un premier pas sur la voie d’un changement de mentalité, en alliant volontés des partenaires sociaux et nécessité d’action des pouvoirs publics. Il est en effet primordial, dans une démocratie, de donner la parole aux principaux acteurs qui régissent notre société et d’établir un dialogue constant entre les élus et les représentants des divers groupes socioprofessionnels. Nous nous accordons à penser qu’en nous appuyant davantage sur les partenaires sociaux nous obtenons des lois mieux rédigées et pouvant satisfaire aux exigences de tous.

Cette loi a constitué une avancée majeure. En fixant les responsabilités de chacun, elle a permis de structurer, depuis trois ans, les relations entre pouvoirs publics et partenaires sociaux.

Dès lors, les partenaires sociaux ont toute légitimité pour négocier et conclure des accords dans le cadre des règles légales, et les pouvoirs publics ont également toute légitimité pour modifier les lois, après les avoir négociées, et les faire appliquer.

C’est aussi pour cela que, depuis 2007, nous élaborons avec les partenaires sociaux un agenda social, qui constitue la feuille de route annuelle des discussions et des réformes à mener. Chacun y contribue.

Nous voulons réformer notre pays sur la base de compromis constructifs plutôt que dans l’affrontement stérile.

D’ailleurs, depuis juillet 2009, le Premier ministre a obtenu des présidents des deux assemblées, comme l’a dit précédemment Mme Procaccia, l’adoption de deux protocoles permettant d’appliquer les modes opératoires prévus par la loi du 31 janvier 2007 aux textes d’origine parlementaire lorsque leur inscription à l’ordre du jour est envisagée.

Ces innovations sont dues à la majorité présidentielle. De mémoire, le dialogue social était inexistant lors de ce que j’appellerai « l’affaire des 35 heures », aucune concertation préalable n’ayant eu lieu, au risque de froisser les partenaires sociaux.

Mme Annie David, rapporteure. Et le sommet social sur les 35 heures ?

Mme Isabelle Debré. L’amendement n° 3, madame la rapporteure, chers collègues de la majorité sénatoriale, devrait vous séduire. En effet, le député Jean-Marc Ayrault a pris l’initiative de déposer l’année dernière une proposition de loi en ce sens. Cette dernière a été adoptée à l’Assemblée nationale ; vous nous demandez aujourd'hui de déposer une proposition de loi : que n’inscrivez-vous à l’ordre du jour, dans l’espace réservé au groupe socialiste-EELV, la proposition de loi votée par l’Assemblée nationale ?

Votre collègue Michel Liebgott disait alors que, « entre la théorie et la pratique, on sait qu’il y a un gouffre ». Cette phrase serait-elle devenue la maxime de la politique de l’opposition ?

Par ailleurs, à l’occasion de l’examen de la loi Mallié sur le repos dominical, votre collègue Mme Le Texier avait déposé un amendement visant le même objet, que vous n’aviez pas alors, me semble-t-il, traité de « cavalier » : ce texte visait à insérer dans l’article L.1 du code du travail la consultation préalable des partenaires sociaux pour les propositions de loi.

Mme Le Texier déclarait alors, concernant le texte de 2009, qu’une « négociation nationale et interprofessionnelle s’imposait sur le thème du travail dominical ».

C’est pourquoi, suivant les souhaits de certains de vos collègues de gauche, nous proposons d’inscrire dès à présent dans le code du travail la formalisation de la consultation des partenaires sociaux, qu’il s’agisse d’un projet ou d’une proposition de loi. L’opportunité, mes chers collègues, vous en est donnée aujourd’hui !

Cela permettrait à la gauche de mieux respecter les partenaires sociaux qu’elle ne l’a fait sur ce texte... En effet, je voudrais souligner de nouveau que le protocole Larcher n’a pas été appliqué pour l’inscription de ce texte à l’ordre du jour.

En conférence des présidents, rappelant que ce protocole était expérimental, Mme David a demandé : « Ne peut-on pas faire évoluer cette expérimentation pour que les groupes ne soient pas dans l’impossibilité d’inscrire un texte à l’ordre du jour d’un espace qui leur est réservé ? ». Dont acte.

Devant une telle désinvolture et considérant que ce sujet revêt un caractère indispensable, le groupe UMP souhaite donner une assise parlementaire à ce protocole expérimental et votera cet amendement afin qu’en matière d’emploi, de travail et de formation professionnelle les partenaires sociaux soient saisis pour les propositions de loi, comme ils le sont pour les projets de loi, et dans les mêmes conditions. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Cet amendement portant article additionnel a pour objet d’étendre aux propositions de loi le principe de concertation préalable des partenaires sociaux inscrit à l’article L.1 du code du travail pour l’examen des projets de loi.

Cet article, issu de la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, a en effet inscrit en ouverture du code du travail l’obligation pour le Gouvernement de consulter les partenaires sociaux préalablement à tout projet de loi portant sur « les relations individuelles et collectives de travail, l’emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle […] en vue de l’ouverture éventuelle d’une négociation ».

Sont concernées par cette concertation les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel.

Au-delà du symbole que représente l’inscription d’un tel principe en ouverture du code du travail, il s’agit d’une véritable avancée pour la qualité des textes législatifs que nous produisons.

Les propositions de loi que nous sommes amenés à présenter en tant que parlementaires peuvent, si elles aboutissent, conduire à modifier en profondeur le droit du travail. C’est pourquoi la concertation préalable des syndicats et la possibilité d’une négociation sont très importantes dans le cadre des textes d’origine parlementaire.

Le dispositif introduit par la loi du 31 janvier 2007 a été accueilli positivement par les partenaires sociaux. Nul doute qu’en renforçant davantage leur participation en amont de l’adoption de propositions de lois nous susciterons le même sentiment.

Je vous rappelle que le dispositif de la loi de 2007 a permis d’aboutir, en totale concertation avec les partenaires sociaux, à de grandes réformes indispensables, et ce dans des conditions efficientes.

Nous avons pu, Gouvernement et Parlement, avec les syndicats, modifier en profondeur les règles de la représentativité syndicale à travers la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail du 20 août 2008. De même, nous avons pu organiser la rupture conventionnelle du contrat de travail, qui connaît depuis un vif succès avec plus de 200 000 procédures par an.

Mme Annie David, rapporteure. Bien sûr, ce sont des licenciements déguisés !

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Nous pensons que ce travail en équipe, soudant les représentants des salariés et des citoyens, permettra d’édifier des lois plus en accord avec le quotidien de chacun d’entre nous, respectant, même à la plus petite échelle, les besoins de chacun de nos concitoyens, mais aussi les nécessités de l’État, car les intérêts privés ne sauraient remplacer les prérogatives de la collectivité.

Notre volonté d’un dialogue social nourri traduit notre profond attachement aux valeurs démocratiques d’échange, d’écoute et de respect mutuel.

Je rappelle que, dès juillet 2009, la volonté d’étendre la concertation des partenaires sociaux aux propositions de loi avait été exprimée par le Premier ministre. En effet, M. François Fillon avait demandé aux présidents des deux assemblées de créer des protocoles expérimentaux permettant d’appliquer le mode opératoire prévu par la loi du 31 janvier 2007 aux textes d’origine parlementaire lorsque leur inscription à l’ordre du jour était envisagée. Aujourd’hui, ce sont ces deux protocoles que nous souhaitons remplacer par une disposition législative.

Ne nous y trompons pas, la proposition qui vous est faite aujourd’hui n’est pas une initiative de l’opposition.

Mme Annie David, rapporteure. Que ne déposez-vous une proposition de loi !

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Et cela n’est pas étonnant au regard de votre pratique du dialogue social, chers collègues de la majorité sénatoriale. Dès la réforme des 35 heures, vous avez fait la preuve de votre peu d’égard pour la concertation des partenaires sociaux.

Permettez-moi, mes chers collègues, de rappeler les propos du Président Jacques Chirac qui déclarait, à Marseille en mars 2002, que la mise en place des 35 heures avait été « imposée d’en haut, par la loi, sans dialogue et de manière uniforme ».

C’est ce que vous avez fait de nouveau en inscrivant prématurément cette proposition de loi à l’ordre du jour.

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, nous souhaitons vivement l’adoption de l’amendement n° 3. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que l’avis du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 67 :

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 310
Majorité absolue des suffrages exprimés 156
Pour l’adoption 134
Contre 176

Le Sénat n'a pas adopté.