Mme la présidente. La parole est à M. Christian Bourquin.

M. Christian Bourquin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques semaines seulement, lors de l’examen de la loi de règlement par l’Assemblée nationale puis par le Sénat, le bilan de la situation de nos finances publiques a été dressé. Le diagnostic est sombre.

Un sénateur de l’UMP. Oh !

M. Christian Bourquin. En effet, les dettes accumulées par l’État, qui représentent 86 % de notre PIB, se rapprochent de la barre fatidique des 90 %, taux au-delà duquel les économistes sérieux s’accordent pour dire que le potentiel de croissance économique est fortement émoussé.

Monsieur le ministre, le Gouvernement hérite de surcroît d’une situation plus dégradée que celle qui avait été annoncée. Pour l’année 2012, il doit combler un manque à gagner en recettes et honorer les dépenses non financées inscrites dans le budget initial. Dans le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques qu’elle a rendu au début du mois, la Cour des comptes – elle a beaucoup été évoquée – évalue le manque à gagner entre 6 milliards et 10 milliards d’euros et les dépenses non financées entre 1 milliard et 2 milliards d’euros.

C’est pourtant à partir de cette situation existante que le Gouvernement doit agir. Le recours à une simple intervention esthétique sur les comptes publics – M. le ministre chargé du budget le sait bien – ne suffira pas. L’état du malade requiert une opération lourde, suivie d’une période de rééducation que nous souhaitons tous, évidemment, la plus brève possible.

D’ores et déjà, je constate un changement de méthode dans la construction du collectif budgétaire qui nous est soumis aujourd’hui. Il témoigne de la volonté de prudence du Gouvernement et marque une nouvelle appréhension de ce que doit être le dialogue social.

Tout d’abord, il fait œuvre de sagesse en supprimant une disposition qui avait été créée par le gouvernement précédent alors même – ce point n’a pas été évoqué ici tout à l'heure – que ses propres experts l’avaient jugée aléatoire. Je veux parler de la « TVA sociale », qui aurait dû rester dans les cartons de la Fondation pour l’innovation politique après la publication d’un rapport dit « Besson » en 2007 et des analyses de la Direction générale du trésor et de la politique économique réalisées à la demande de la ministre de l’époque, Mme Lagarde. Le rapport soulignait le risque de voir les entreprises profiter de la mesure pour augmenter leurs marges et donc leurs prix ; les analyses alertaient les décideurs publics sur son effet inflationniste et le faible nombre de créations d’emplois que l’on pouvait en attendre.

Il est regrettable que le gouvernement Fillon ait inscrit envers et contre tous, des années après, cette mesure dans le projet de collectif budgétaire présenté à la mi-février 2012. Il le faisait au nom du courage, prétendiez-vous à l’époque, chers collègues de l’opposition. En réalité, il ne s’agissait là que d’un activisme électoral, d’un affichage déboussolé !

Ensuite, le gouvernement Ayrault rompt avec la frénésie de réformes en matière fiscale qui a marqué le précédent quinquennat. Je ne prendrai ici qu’un exemple, celui de la politique fiscale à destination des plus fortunés, lesquels ont alors fait l’objet d’un traitement de faveur ; vous le niez, sur les travées de la droite dans cet hémicycle, mais telle est bien la réalité, en raison du bouclier fiscal. En 2007, alors que ce dispositif était renforcé, des niches fiscales étaient également consolidées. Aussi, le Conseil des prélèvements obligatoires a relevé que le produit de l’impôt sur la fortune baissait régulièrement depuis 2007 tandis que le patrimoine de ceux qui y étaient assujettis augmentait !

On aurait pu penser que la décision brutale du précédent gouvernement de renoncer au bouclier fiscal procédait d’une prise de conscience, certes tardive, mais non moins salutaire. Il n’en a rien été, puisque cette suppression devait prendre effet non pas en 2012, mais l’année suivante.

En outre, cette décision était assortie d’une contrepartie : un allégement de l’impôt sur la fortune. Ce dernier est devenu particulièrement avantageux pour les patrimoines les plus importants. La simulation présentée dans le rapport du 26 octobre 2011 de la commission des finances du Sénat en atteste : toutes ces réformes et contre-réformes ont abouti au final à rendre l’impôt sur la fortune plus dégressif que jamais.

Mes chers collègues, vous comprendrez que, de même que beaucoup d’autres, j’ai accueilli avec le plus grand soulagement l’engagement du Président de la République de stabiliser les règles budgétaires. C’est là un gage de lisibilité, donc d’honnêteté élémentaire de la part de l’État. Je m’en félicite d’autant plus que je sais votre volonté, monsieur le ministre, de faire tendre vos réformes vers plus de justice fiscale. Nous savons les Français très attachés à cette valeur de justice, comme ils l’ont manifesté lors des deux derniers scrutins nationaux. Nous devons être justes, pour eux !

Je tiens aussi à saluer le choix du Gouvernement de supprimer, dès le premier collectif budgétaire qu’il a proposé, le ticket d’accès aux soins dont s’acquittent les bénéficiaires de l’aide médicale d’État depuis l’année dernière. Ces derniers sont des patients dépourvus de titres de séjour. Or, nous le savons, – les avertissements des personnels hospitaliers tout comme ceux des auteurs du rapport commun à l’IGAS et à l’IGF rendu public en novembre 2011 ont été très clairs à cet égard – l’existence d’une somme à verser pour l’ouverture du droit à la gratuité de la prise en charge médicale conduit à des renoncements aux soins. Ces pratiques sont non seulement porteuses de risques en matière de santé publique, mais aussi plus coûteuses au final pour la sécurité sociale.

Je me réjouis également de voir notre dispositif d’aide médicale d’État revenir à l’esprit de la loi éclairée du 24 vendémiaire an II. (Exclamations amusées sur plusieurs travées du groupe UMP.)

M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. Très juste !

M. Christian Bourquin. C’était il y a deux cent dix-neuf ans ! Ce texte disposait que « tout malade, domicilié de droit ou non, qui sera sans ressources, sera secouru […] ». En fait, nous voulons secourir des êtres humains ! Quoi de plus normal ? (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat approuve.)

Pour conclure, je note avec satisfaction le rétablissement du « 1 % formation » versé par les collectivités locales au Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, au sein duquel je me suis engagé durant plus de vingt ans. J’étais intervenu sur ce sujet à cette même tribune à la fin de novembre 2011, à l'occasion de la lecture du budget initial pour 2012, mais c’était peine perdue à l’époque, tant la notion de service public était étrangère à vos récents prédécesseurs, monsieur le ministre, voire honnie par eux.

Cette mesure de rétablissement du 1 % procède tout d’abord d’une bonne gestion publique : les collectivités, soucieuses de maintenir le droit à la formation de leurs fonctionnaires, car celle-ci est tout à fait nécessaire, s’apprêtaient à faire appel à des prestataires privés, qui pratiquent à l’évidence des prix bien plus élevés. Cette décision est aussi une mesure d’avenir, puisqu’elle permettra aux collectivités, le moment venu, de bien gérer les nouvelles compétences qui pourraient leur être conférées dès la fin de cette année. Enfin, elle touche, pour la fonction publique territoriale, 1,6 million d’agents. Elle est donc une respiration pour nos collectivités, monsieur le ministre.

Cette méthode de gouvernance et de discussion témoigne, je le répète, de la nouvelle pratique du dialogue social mise en œuvre par le Gouvernement. Celui-ci a su entendre une demande qui lui a été soumise lors de la grande conférence sociale organisée voilà deux semaines, et lui répondre rapidement.

Mes chers collègues, comme beaucoup d’entre vous ici, je suis conscient de la gravité de la situation, mais je crois aux effets d’une nouvelle gouvernance. C’est sur ce point que je voulais insister lors de cette intervention. Et c’est pourquoi j’apporterai, ainsi que la très grande majorité des membres du groupe RDSE, mon soutien à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

M. Jean Besson. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Madame la présidente, mes chers collègues, je suis gêné car je destinais mon propos à notre nouveau rapporteur général de la commission des finances, M. François Marc, qui examine pour la première fois un projet de loi de finances rectificative depuis qu’il a pris ses fonctions. Sans doute nous rejoindra-t-il plus tard…

Je suis également gêné vis-à-vis de vous, monsieur le ministre : en tant que parlementaire, c’est la première fois que, s'agissant d’une loi de finances, je n’ai pas l’occasion de m’adresser à un responsable de Bercy ! C’est tout à fait étonnant. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est le signe du peu de considération du Gouvernement pour le Sénat !

M. Philippe Dominati. L’examen du texte devait commencer par une intervention du ministre de l’économie et des finances, M. Pierre Moscovici. Finalement, celui-ci n’était pas présent.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Des arbitrages budgétaires difficiles sont en cours.

M. Philippe Dominati. Du coup, le ministre délégué chargé du budget s’est exprimé à sa place, puis il est parti.

Or au Parlement l’usage veut que, quand ni le ministre de l’économie et des finances ni le ministre du budget ne sont présents, un membre du Gouvernement lié directement à l’économie et aux finances assiste à notre séance. Nous aurions pu entendre Mme Bricq, par exemple.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela nous ferait plaisir de la revoir !

M. Philippe Dominati. J’ai le sentiment que nous vivons une autre époque que lors de la précédente alternance politique.

M. Michel Delebarre. Venez-en au sujet !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Le Sénat est maltraité depuis le début de la mandature !

M. David Assouline. Vous nous faites perdre du temps !

M. Philippe Dominati. Comment s’était passée alors la session extraordinaire ? D’une autre manière ! Nous avions examiné des sujets de fond, comme la réforme des universités,…

M. Philippe Dominati. … le service public minimum, la loi sur la récidive et la loi TEPA. Le Parlement avait eu l’occasion d’aborder des questions politiques importantes.

La présente session extraordinaire est presque vide. À l’ordre du jour n’est inscrite que la loi de finances rectificative, et personne ne s’intéresse à l’économie ! Monsieur le ministre, le Gouvernement est-il déjà en vacances ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Un sénateur du groupe socialiste. Oh là là !

M. David Assouline. Personne ne croit que le Gouvernement est en vacances !

M. Philippe Dominati. Êtes-vous là pour expédier les affaires courantes ? L’économie intéresse-t-elle le Gouvernement ? J’aimerais avoir une réponse à ces questions ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Les mesures emblématiques seront prises à l’automne, nous dites-vous. Soit ! Nous attendrons. Il n'y aura même pas de session extraordinaire au mois de septembre !

Je comprends la gêne du Gouvernement. Tout à l'heure, le ministre du budget avait presque l’air de s’excuser. Il disait que c’était le contexte international qui l’obligeait à présenter une loi de finances rectificative, car il fallait tenir la parole de la France... C’est à croire que ce texte composé d’une trentaine d’articles n'a pas de véritable inspirateur. Mais en réalité, il en a un : l’ancien Président de la République. (M. Henri de Raincourt opine.)

En effet, sur les quelque trente articles, sur les douze mesures de justice et les six qui concernent l’investissement, plus de vingt-deux sont destinés à corriger ou à modifier la politique menée par l’ancien Président de la République et son Gouvernement.

M. David Assouline. C’est cela, le changement !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ils ont de la chance d’avoir Sarkozy !

M. Philippe Dominati. Vous n’avez pas d’inspiration. Vous n’avez pas de projet ! Nous attendrons donc l’automne.

La méthode est simple : pour trouver 7 milliards d'euros, vous augmentez d’autant les impôts. Vous prévoyez des dépenses supplémentaires et presque aucune économie, hormis l’abattement sur le salaire du Président de la République et du Premier ministre. Ces 7 milliards d'euros d’impôts deviendront 11 ou 13 lors du prochain projet de loi de finances. Où sont les engagements qui ont été pris ? En effet, monsieur Marc, votre prédécesseur Nicole Bricq et vous-même nous avez expliqué que l’effort serait partagé entre des économies et des recettes nouvelles. Or, dès ce premier projet de loi de finances rectificative, cet engagement n’est pas tenu ; il est bafoué ! Cette réalité est peut-être dure à entendre, mais elle est incontestable.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Caricature !

M. Philippe Dominati. Telle est votre méthode. Vous faites fi de la position de la Cour des comptes. Vous faites fi de la position de l’Inspection générale des finances. Vous faites fi de la position de la Commission européenne. Voilà la loi de finances rectificative que vous nous proposez !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est votre déficit !

M. Philippe Dominati. Avez-vous des cibles ? Il y en a une qui apparaît à l’évidence : le monde de l’économie réelle, celui de l’entreprise. Vous l’avez reconnu devant la commission des finances : quelque 42 % de l’effort seront supportés par l’entreprise, dont vous interpellez tous les acteurs, de la base jusqu’au sommet.

L’entreprise, c’est tout d'abord du capital, qui permet de mettre en œuvre des investissements et de réaliser des exportations. Or nombreuses sont les mesures de ce texte qui portent atteinte au capital.

L’entreprise, ce sont ensuite des cadres et des ouvriers. Or, on l’a vu pour les heures supplémentaires, on le voit à présent avec le forfait social, vous ne leur faites pas de cadeau, prétendument au nom d’une certaine compétitivité. Dans le monde de l’entreprise, celui de l’économie réelle, vous tapez à tous les étages ! Cela traduit votre absence de projet.

M. David Assouline. Et le vôtre ?

M. Philippe Dominati. Nous attendrons l’automne pour connaître votre projet. À l’occasion de l’alternance politique, vous auriez pu faire ce qu’on fait les socialistes dans d’autres pays – je pense à Tony Blair, à Gerhard Schröder –, c'est-à-dire une sorte de révolution intellectuelle d’inspiration libérale. On aurait pu imaginer que la gauche française se modernise. Or il n’en est rien ! Vous en êtes restés au colbertisme le plus élémentaire.

M. Philippe Dominati. On le voit dans le dossier PSA : au lieu d’aider une entreprise en difficulté, vous voulez imposer l’interventionnisme étatique.

M. David Assouline. N’importe quoi !

M. Philippe Dominati. Voilà une entreprise qui produit deux fois plus de véhicules sur le territoire national qu’elle n’en vend sur ledit territoire. Or, au lieu de l’aider, vous lui créez des problèmes !

On le voit également avec la création des nouveaux emplois publics, qui ne sont pas budgétés, comme l’a souligné le président de la commission des finances.

M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !

M. Philippe Dominati. Enfin, on le voit dans cette inscription symbolique dans la loi de finances du salaire du Président de la République et du Premier ministre, qui permettra de réaliser une économie de 96 000 euros, je crois. Mais pour atteindre cet objectif, le présent gouvernement compte cinq ministres de plus que le précédent !

Vous ne nous parlez pas du périmètre de l’État, qui reste identique et qui va même sans doute encore s’agrandir.

M. David Assouline. Quel mensonge !

M. Philippe Dominati. Pourtant, tout le monde le sait, les engagements de la France qu’évoquait tout à l'heure le ministre du budget consistent à faire en sorte que notre pays soit plus compétitif en ce qui concerne les prélèvements obligatoires.

Aux termes du rapport que nous avons rendu ce matin, la France est, en Europe, l’économie qui connaît les prélèvements obligatoires les plus élevés.

Vous pourriez faire un effort en matière de flexibilité du travail, car la compétitivité en dépend. Mais vous en êtes bien éloignés, allant jusqu’à refuser d’aborder le sujet.

Comme M. le président de la commission des finances, je vous suivrai cependant sur une mesure, et une seule, mais non des moindres, à savoir l’abrogation de la TVA sociale, à l’article 1er. Mes propos risquent néanmoins de choquer les membres de la majorité présidentielle, car, selon moi, cette mesure va dans le sens du libéralisme.

Je ne suis pas un dogmatique de la TVA sociale. Cette mesure a soulevé des problèmes sur toutes les travées. Elle a été étudiée lors de l’examen de cinq lois de finances sous l’ancienne majorité, sans être toutefois mise à l’ordre du jour. Pour ma part, je ne l’ai pas votée.

M. David Assouline. Vous avez dépassé votre temps de parole !

M. Philippe Dominati. Je ne suis pas le seul, mon cher collègue. Je constate que vous vous montrez bien rigoureux lorsque le propos vous gêne !

Certains ministres actuels ont eux-mêmes proposé la TVA sociale.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Notamment Manuel Valls !

M. Philippe Dominati. Même si le concept était et reste bon, puisqu’il s’est agi de trouver le moyen de diminuer le coût du travail, ce qui, on le comprend, a pu intéresser un certain nombre de mes collègues et de mes confrères, pour autant, alors que les prélèvements obligatoires ont été relevés de 2,5 %, je considère que la mesure proposée va dans le bon sens.

Parce que je suis favorable à une politique qui consiste à diminuer les prélèvements obligatoires et qui va dans le sens du libéralisme, ce mot que vous auriez tort de prendre pour une insulte, chers collègues de la majorité, je vous soutiendrai sur ce point, mais sur ce point seulement ! (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

Mme Corinne Bouchoux. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, mon intervention portera sur trois articles de ce collectif budgétaire qui concernent la mission « Culture », mais qui sont d’intérêt général, je veux parler de l’éducation, de la scolarité des élèves français à l’étranger et de la TVA à 5,5 %.

Voyons, en premier lieu, l’éducation.

Pour nous, écologistes, la politique dite du « non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux » n’a pas pris en compte la spécificité du service public important que constitue l’éducation nationale, elle qui est chargée de former les citoyens du monde de demain et de forger le « vivre ensemble » pour tous.

Depuis 2008, vous le savez, 70 600 postes ont été supprimés dans l’éducation. Les coupes budgétaires n’ont épargné ni les zones rurales ni les quartiers les plus sensibles. Manifestement, les recteurs ont aussi reçu la directive de fermer les établissements de petite taille, lesquels jouent pourtant un rôle fondamental dans l’animation des espaces isolés.

Par ailleurs, la fermeture de certaines classes a obligé des parents à scolariser leurs enfants d’âge voisin dans plusieurs écoles différentes.

À titre d’exemple, en Maine-et-Loire, quarante-quatre classes auraient dû être fermées si des mesures n’avaient pas été prises, ce dont nous nous réjouissons.

L’école ne peut constituer une simple variable d’ajustement budgétaire, sans que soit menée une réflexion sur l’échec scolaire, l’encadrement, les rythmes scolaires, les modalités des enseignements et les relations pédagogiques.

Le Président François Hollande a fait campagne sur l’importance de la jeunesse, d’ailleurs insuffisamment représentée dans cette enceinte. Nous, écologistes, appelons depuis longtemps à la prise en compte des générations futures. Nous ne pouvons donc que soutenir la démarche tendant au renforcement du rôle de la jeunesse. Nous partageons également le constat d’urgence suscité par la casse du système éducatif telle qu’elle a été mise en place et telle que nous la condamnons.

Pour les écologistes, une école tournée vers le futur doit être fondée sur quatre piliers fondamentaux : la famille et la place des parents, l’école et les institutions scolaires – rappelons le manque de 400 000 places en crèche relevé chaque année –, le tissu associatif et culturel, au premier rang duquel figure l’éducation populaire, enfin, les médias, les écrans et l’éducation à la culture qui vont de pair.

J’évoquerai, en deuxième lieu, la scolarité des élèves français à l’étranger.

Promesse médiatique de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, la prise en charge des frais de scolarité pour les lycéens français à l’étranger a été critiquée, depuis sa mise en place, tant pour son coût déraisonnable que pour la rupture d’égalité entre les élèves qu’elle engendre. Nous l’avons trop peu ici relevé, les sommes correspondantes ont été prélevées sur le budget de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, et nous le regrettons vivement.

La couverture des frais de scolarité, outre d’autres effets pervers comme l’arrêt de la prise en charge par les entreprises privées, méritait-elle à ce point de mobiliser le budget social et la solidarité d’un État endetté ? Nous ne le pensons pas.

En troisième et dernier lieu, j’évoquerai l’abaissement du taux de TVA de 7 % à 5,5 % sur le livre et le spectacle vivant. Selon nous, cette mesure de bon sens est positive. Nous tenons particulièrement à rappeler notre attachement au prix unique du livre et à ce précieux maillon de la chaîne de la diffusion de la culture que sont les librairies.

Dans l’attente des propositions de la Commission européenne sur la TVA, travailler afin de rendre la culture accessible à tous et à toutes, à tous les niveaux – livres, livres numériques, spectacle vivant – est indispensable et correspond à un bien meilleur choix politique que le développement des niches et boucliers fiscaux, que nous sommes en train de supprimer, d’ailleurs.

Nous, écologistes, souhaitons étudier plus en profondeur, et aux côtés de la majorité, les taux de TVA appliqués à la culture. Nous nous attachons dès aujourd’hui à faire en sorte que le budget ainsi mobilisé soit redéployé au profit de l’accès de tous à la culture et du développement de la culture par et pour tous. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le présent projet de loi de finances rectificative me fournit l’occasion de dresser le bilan des choix effectués par la droite pendant dix ans et de rétablir la vérité sur la situation de notre pays. (Murmures sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)

M. Henri de Raincourt. Ça démarre mal !

Mme Christiane Demontès. Attendez la suite !

Cela ne vous étonnera pas, j’axerai particulièrement mon intervention sur l’état des comptes sociaux et m’appuierai sur les derniers travaux de la Cour des comptes et de la Commission des comptes de la sécurité sociale.

La situation générale de nos comptes sociaux est extrêmement dégradée. Après quatre années consécutives de déficits très élevés - je pense notamment au record de 28 milliards d’euros atteint en 2010 -, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse s’est élevé à 20,8 milliards d’euros pour l’année 2011.

Toutes les branches sont dans le rouge. Le déficit s’établit à 8,6 milliards d’euros pour la branche maladie, à 2,6 milliards d’euros pour la branche famille, à 200 millions d’euros pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles et à 2,6 milliards d’euros pour la branche vieillesse, somme à laquelle il faut ajouter les 3,5 milliards d’euros de déficit du Fonds de solidarité vieillesse.

En élisant Président de la République François Mitterrand… (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Albéric de Montgolfier. Vous n’êtes plus en 1981 !

Mme Christiane Demontès. Vous ne commettez jamais de lapsus, chers collègues ?...

En élisant Président de la République François Hollande, la majorité des Français a choisi le changement.

M. Henri de Raincourt. À une petite majorité !

Mme Christiane Demontès. Ainsi que l’a annoncé le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, le redressement de notre pays est une impérieuse nécessité et il nous faut retrouver l’équilibre de nos comptes publics à l’horizon 2017.

Le présent projet de loi de finances rectificative constitue donc la première étape de la politique économique de redressement dans la justice et illustre cette volonté de changement tant attendue par nos concitoyens et exprimée par le Président de la République.

Ce collectif budgétaire impacte la structuration des recettes et des dépenses.

Pour le régime général de la sécurité sociale, plusieurs dispositions se traduiront par des ressources supplémentaires supérieures à 5 milliards d’euros en année pleine à compter de 2013 et à 1,5 milliard d’euros dès cette année.

La première mesure que je souhaite évoquer à mon tour tant elle est importante concerne l’abrogation du mécanisme de « TVA sociale ». Qu’elle soit dénommée par certains collègues siégeant à droite de cet hémicycle « TVA compétitivité » ou encore « TVA anti-délocalisation », toujours est-il que la hausse de 1,6 % du taux de TVA constituait un transfert des cotisations patronales à la branche famille sur les ménages.

Cette disposition aurait été préjudiciable au pouvoir d’achat des Français. Je pense notamment à nos concitoyens les plus fragiles, à ces ménages modestes peu évoqués sur vos travées, chers collègues de l’opposition,…

Mme Christiane Demontès. … à ceux qui ont du mal à « joindre les deux bouts », qui connaissent des fins de mois difficiles. Voilà ceux dont nous parlons ici.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Précisément ! Et pour qui étaient les heures supplémentaires ?

Mme Christiane Demontès. Mécaniquement, la consommation aurait diminué, avec le risque de contracter le peu de croissance qu’enregistre notre pays et d’accentuer les injustices.

En outre, nous le savons tous et M. Dominati l’a évoqué, l’« effet prix » aurait été totalement marginal et n’aurait pas modifié la compétitivité de nos entreprises.

Je veux rappeler en cet instant que, voilà quelques mois, la commission des affaires sociales, dont je suis membre, a reçu notre collègue Jean Arthuis, qui nous a expliqué, tout comme aujourd'hui, que, pour améliorer la compétitivité des entreprises françaises, l’augmentation de la TVA devrait être bien supérieure à 1,6 %.