compte rendu intégral

Présidence de Mme Bariza Khiari

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx,

Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures cinq.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, ce rappel au règlement se fonde sur l’article 29 de notre règlement.

Depuis hier soir, depuis l’annonce de la mise en examen de Nicolas Sarkozy, nous assistons à un ballet absolument insupportable et, surtout, à une instruction médiatique tout à fait intolérable. Pour avoir moi-même déjà vécu ce genre de situation, je puis vous dire qu’aucun justiciable ne mérite ce type de traitement. C’est pourquoi je souhaite rappeler à Mme le garde des sceaux qu’elle doit absolument, et de la façon la plus formelle, faire respecter le secret de l’instruction. Ces instructions médiatiques sont en effet intolérables.

Il est grand temps, ainsi que je l’ai réclamé à de très nombreuses reprises, que nous ayons au Sénat un vrai débat sur la justice, sur le respect du secret de l’instruction, sur la situation des justiciables face à ces nouveaux médias.

Le juge d’instruction qui est saisi de ce dossier mérite tout notre respect et n’a pas à être attaqué comme il l’a été. Tant M. Cahuzac que M. Sarkozy, comme n’importe quel autre justiciable, méritent de bénéficier de toutes les dispositions légales et constitutionnelles en vigueur, au premier rang desquelles le secret de l’instruction.

Mme la présidente. Acte vous est donné de ce rappel au règlement, ma chère collègue.

3

Articles additionnels après l’article 17 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires
Article 17 bis A (Texte non modifié par la commission)

Séparation et régulation des activités bancaires

Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de séparation et de régulation des activités bancaires (projet n° 365, texte de la commission n° 423, rapport n° 422, avis nos 427 et 428).

Nous poursuivons la discussion des articles.

Mes chers collègues, il nous reste 88 amendements à examiner. J’appelle donc chacun d’entre vous à s’exprimer avec un minimum de concision afin que nous puissions conclure nos débats à une heure raisonnable.

TITRE VI (suite)

PROTECTION DES CONSOMMATEURS ET ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

Chapitre Ier (suite)

Plafonnement des frais d’incident et offre de services bancaires pour la clientèle en situation de fragilité

Mme la présidente. Dans la suite de la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre VI, à l’article 17 bis A

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires
Article 17 bis B

Article 17 bis A

(Non modifié)

Après la sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III du code monétaire et financier, est insérée une sous-section 1 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 1 bis

« Inclusion bancaire et lutte contre le surendettement

« Art. L. 312-1-1 A. – L’association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, mentionnée à l’article L. 511-29, adopte une charte d’inclusion bancaire et de prévention du surendettement homologuée par arrêté du ministre chargé de l’économie, après avis du Comité consultatif du secteur financier et du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières. Cette charte est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et relève de la procédure prévue à l’article L. 612-31.

« Cette charte a pour objet de renforcer l’accès aux services bancaires et de faciliter l’usage de ces services, en particulier en ce qui concerne les moyens de paiement, pour les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels. Elle a également pour objet de mieux prévenir le surendettement de ces personnes.

« Cette charte précise notamment les modalités d’information des clientèles concernées par les offres mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 312-1-3. Elle précise également les actions de formation et de sensibilisation réalisées par les établissements de crédit afin de favoriser la diffusion de ces offres auprès des personnes concernées.

« Cette charte définit également les conditions dans lesquelles chaque établissement de crédit se dote d’un dispositif de détection précoce des situations de fragilité financière de ses clients et apporte à ces situations des réponses adaptées, en concertation avec le client concerné. »

Mme la présidente. L'amendement n° 276, présenté par M. Yung, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

lutte contre le

par les mots :

prévention du

La parole est à M. le rapporteur.

M. Richard Yung, rapporteur de la commission des finances. Madame la présidente, pour répondre à votre recommandation de concision, j’indiquerai simplement qu’il s’agit d’un amendement de précision technique et de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 276.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 17 bis A, modifié.

(L'article 17 bis A est adopté.)

Article 17 bis A (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires
Articles additionnels après l'article 17 bis B

Article 17 bis B

La sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III du code monétaire et financier, telle qu’elle résulte de l’article 17 bis A, est complétée par un article L. 312-1-1 B ainsi rédigé :

« Art. L. 312-1-1 B. – Il est créé, auprès de la Banque de France, un observatoire de l’inclusion bancaire chargé de collecter des informations sur l’accès aux services bancaires des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels, sur l’usage que ces personnes font de ces services bancaires et sur les initiatives des établissements de crédit en la matière. Cet observatoire est également chargé de définir, de produire et d’analyser des indicateurs relatifs à l’inclusion bancaire visant notamment à évaluer l’évolution des pratiques des établissements de crédit dans ce domaine.

« Les établissements de crédit fournissent à l’observatoire les informations nécessaires à l’exercice de sa mission.

« Un décret en Conseil d’État précise l’organisation et le fonctionnement de l’observatoire.

« L’observatoire de l’inclusion bancaire publie un rapport annuel sur la mise en œuvre de ses missions. »

Mme la présidente. L'amendement n° 248, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ces informations incluent notamment la nature des services, le nombre, le type et les montants des crédits accordés à des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels, ainsi que le nombre et les montants des frais d’incidents éventuels concernant ces personnes.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Madame la présidente, j’essaierai moi aussi de m'inscrire dans l'objectif de concision auquel vous nous avez invités.

Il est créé, à l’article 17 bis B, un observatoire de l'inclusion bancaire, jolie expression signifiant que tout le monde doit pouvoir avoir accès aux services bancaires. Cet amendement vise à préciser les informations qui devront être transmises à cet observatoire. Celles-ci sont nécessaires pour mesurer les efforts fournis par les établissements bancaires à l’égard des personnes en situation de fragilité avérée ou en cours de fragilisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Richard Yung, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les informations qui devront être transmises par les banques à l'observatoire de l'inclusion bancaire placé auprès de la Banque de France.

La commission souscrit à votre amendement sur le fond, mon cher collègue, mais le véhicule que vous proposez n'est pas le bon. En effet, ces précisions relèvent des modalités d’organisation de l’observatoire, définies par décret. Aussi, la commission sollicite le retrait de votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Je souscris aux arguments avancés par M. le rapporteur.

Cet amendement a pour objet de préciser les informations que les établissements de crédit devront fournir à l’observatoire de l'inclusion bancaire. Ces informations ayant vocation à être extrêmement nombreuses et détaillées, il convient de se donner le temps de définir, en concertation avec l'ensemble des parties prenantes, les informations pertinentes, leur périodicité et leur niveau de détail. De fait, il nous paraît plus légitime de procéder par la voie réglementaire.

Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 248 est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Madame la présidente, comment pourrais-je faire autrement que de le retirer ? (Sourires.)

Mme la présidente. L'amendement n° 248 est retiré.

L'amendement n° 246, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Chaque année, les établissements de crédit notifient à l’observatoire de l’inclusion bancaire le montant total des sommes perçues au titre des frais d’incidents, les marges réalisées et le pourcentage que ce montant représente dans le chiffre d’affaires de l’établissement.

L'amendement n° 247, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Chaque année, les établissements de crédit notifient à la Banque de France le montant total des sommes perçues au titre des frais d’incidents, les marges réalisées et le pourcentage que ce montant représente dans le chiffre d’affaires de l’établissement.

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter ces deux amendements.

M. Jean Desessard. La création d’un observatoire de l’inclusion bancaire prévue par le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, adopté en janvier dernier, répond aux attentes de tous ceux qui se mobilisent en faveur de l’accessibilité bancaire.

Le nombre de personnes en situation d’exclusion bancaire est estimé à près de 6 millions. En effet, aux interdits bancaires, aux personnes en situation de surendettement, il faut ajouter toutes celles et tous ceux et qui ont des difficultés d’usage de leur compte.

Ces difficultés sont liées par exemple à une mauvaise compréhension des crédits renouvelables, lesquels peuvent conduire au surendettement. Ainsi, 82 % des dossiers de surendettement déposés en 2010 contiennent des crédits renouvelables. Multiplication des frais d’incidents du fait d’une disponibilité financière faible, d’une baisse de revenus, etc., nous connaissons tous ces situations. Ces difficultés empêchent de mener une vie normale et se traduisent par un mal-être personnel, familial, social…

Pour autant, caractériser les personnes en situation de fragilité ou en cours de fragilisation ne saurait être efficace sans une analyse fine des pratiques bancaires. Quelle politique des banques en matière de frais d’incidents ? Telle ou telle banque va-t-elle être encline à échelonner les prélèvements sur compte pour permettre à un client de ne pas se trouver systématiquement en découvert ou plutôt s’abstenir, parce que les frais d’incidents lui rapportent ? Quelle politique des banques en matière d’accueil et de services aux personnes les moins dotées financièrement ? Telle ou telle banque va-t-elle proposer un crédit amortissable à taux modéré ou un crédit renouvelable au risque d’engager son client dans la spirale du surendettement ?

Pour favoriser l’inclusion bancaire, la transparence sur les pratiques bancaires en termes d’accès et d’usage est indispensable. Si une banque dégage des marges substantielles des frais d’incidents, c’est que, potentiellement, elle n’a pas mis en place des dispositifs susceptibles d’accompagner ses clients fragiles.

C’est pourquoi nous souhaitons que les établissements de crédit notifient chaque année les résultats dégagés par ces frais d’incidents et la proportion qu’ils représentent dans le chiffre d’affaires global. Cette donnée est essentielle à la mission d’évaluation confiée à l’observatoire.

L’amendement n° 246 vise à ce que ces données soient transmises à l'observatoire de l’inclusion bancaire, cependant que l’amendement de repli n° 247 tend à ce qu’elles le soient à la Banque de France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Richard Yung, rapporteur. Ces deux amendements ont le même objet, mais M. Desessard propose, avec chacun d’entre eux, des voies différentes.

L’amendement n° 246 vise à faire figurer, parmi les informations à transmettre par les banques à l'observatoire de l'inclusion bancaire, le total des frais bancaires et des marges.

Mon cher collègue, je comprends votre objectif de mieux appréhender ce point, dont nous avons à plusieurs reprises débattu. De fait, on peut se poser des questions sur l'architecture d'un système bancaire aux termes duquel une partie non négligeable du produit net bancaire provient des frais d’incidents de paiement acquittés par sa clientèle fragile.

M. Jean Desessard. Vous m’avez compris !

M. Richard Yung, rapporteur. Cela mérite débat. Toutefois, l'observatoire n'est pas le bon véhicule. L’inclusion bancaire vise les conditions d'accès aux services bancaires et l'utilisation qu’en font les populations les plus fragiles. La mesure que vous proposez, mon cher collègue, ne me semble donc pas entrer dans le cadre des attributions de l'observatoire. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement.

Par l’amendement n° 247, vous proposez que ces informations relatives aux frais bancaires et aux marges soient transmises non plus à l’observatoire, mais à la Banque de France. Cette disposition ne nous paraît pas utile.

Il faudrait une garantie de confidentialité, mais elle n’existerait que si la Banque de France gardait ces informations secrètes. Or, le rôle de l’observatoire est précisément de publier des informations qui alimenteront les études, les réflexions, les prises de position, notamment celles des sénateurs du groupe écologiste… Je souhaite donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Pour des raisons identiques à celles que vient d’exposer M. le rapporteur, le Gouvernement souhaite lui aussi le retrait de ces deux amendements.

J’ajoute, monsieur le sénateur, que nombre des observations que vous mentionnez relèvent du modèle économique de chaque banque et du secret des affaires. Il nous paraît donc compliqué – en particulier au sujet des marges – que ces informations soient divulguées à l’observatoire. Celui-ci comprendra en effet des représentants des banques, ce qui poserait un problème en termes de concurrence.

Par ailleurs, comme vient de l’indiquer M. le rapporteur, ces informations ne nous semblent pas pertinentes en termes d’évaluation des pratiques en matière d’inclusion bancaire. Là encore, nous souhaitons pouvoir prendre le temps de définir avec les parties prenantes les informations qu’il sera pertinent de communiquer à l’observatoire de l’inclusion bancaire.

Enfin, la transmission de ces informations à la Banque de France ne nous semble pas de nature à modifier profondément la situation. La Banque de France n’a par ailleurs pas vocation à traiter ce genre d’informations.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, les amendements nos 246 et 247 sont-ils maintenus ?

M. Jean Desessard. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 246.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 247.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 149 rectifié ter, présenté par Mme Rossignol, M. Dilain, Mmes Lienemann et Lepage, MM. Madec, Madrelle, Fauconnier, Chastan, Antoinette, Leconte et Teston, Mmes Alquier et Claireaux, MM. J.C. Leroy, Eblé, Rainaud, Vincent, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Sont notamment représentées au sein de cet observatoire les associations de défense des droits des consommateurs et de lutte contre les exclusions.

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Cet amendement, j’en ai bien conscience, ne relève pas du domaine législatif. Son objet est simplement d’obtenir l’engagement que les associations de défense des droits des consommateurs et de lutte contre les exclusions seront représentées au sein de l’observatoire.

Cela ne soulève, me semble-t-il, aucune difficulté. Toutefois, mieux vaut que les choses soient dites. Je retirerai donc cet amendement après avoir entendu les avis de M. le rapporteur et de Mme la ministre.

Mme la présidente. L'amendement n° 250, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

« Sont notamment représentés au sein de l'observatoire :

« a) la Direction générale du Trésor ;

« b) la Direction générale de la cohésion sociale ;

« c) la Banque de France ;

« d) les établissements de crédit ;

« e) les associations de consommateurs et de lutte contre les exclusions.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Le ministère de l’économie et des finances a proposé, dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre les exclusions, la création de l’observatoire de l’inclusion bancaire. Mais si la direction générale du Trésor doit préparer les textes d’application, en lien avec la direction générale de la cohésion sociale, la Banque de France et l’ensemble des parties prenantes – établissements de crédit, associations de consommateurs et de lutte contre les exclusions –, il est important de préciser que l’observatoire aura une double tutelle : d’une part, le ministère de l’économie et des finances et, d’autre part, le ministère des affaires sociales et de la santé. En effet, le prisme technique, les statistiques et autres données chiffrées sur les activités des établissements de crédit ne sauraient être suffisants.

L’inclusion bancaire est non pas un problème technique, mais une question politique, renvoyant au rôle des banques dans l’économie. L’économiste Georges Gloukoviezoff le souligne :« L’une des causes essentielles du processus d’exclusion bancaire tient au fait que les établissements bancaires sont soumis à des contraintes croissantes de rentabilité et de compétitivité. Exclusion, accès limité ou surendettement sont alors le destin des personnes jugées insuffisamment profitables pour disposer d’un accès de qualité aux services bancaires. »

C’est pourquoi nous devons établir dès le départ que l’Observatoire sera copiloté par les deux ministères : d’une part, le ministère de l’économie et des finances, d’autre part, le ministère des affaires sociales et de la santé. Ce dernier doit être impliqué aussi bien dans la construction des indicateurs sur la situation comparée des femmes et des hommes à l’égard de l’offre de services aux personnes en situation de fragilité financière, sur les pratiques des banques, que dans l’utilisation de ces indicateurs pour l’analyse et les préconisations.

De la même manière, s’il paraît évident que les parties prenantes tels que les établissements de crédit et les associations de lutte contre les exclusions doivent être associées à la définition des missions de l’observatoire, elles doivent l’être également à la conduite de l’observatoire.

Le préciser dès aujourd’hui, sans pour autant exclure d’autres membres, permet de lever certaines zones d’ombre et de s’assurer ainsi que l’observatoire sera le reflet de notre volonté de contrer la financiarisation de la relation bancaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Richard Yung, rapporteur. Ces deux amendements visent à préciser la composition de l’observatoire de l’inclusion bancaire.

L’amendement n° 149 rectifié ter de Mme Rossignol prévoit que soient représentées les associations de défense des droits de consommateurs.

L’amendement n° 250 de M. Desessard est plus ambitieux…

Mme Nathalie Goulet. Il a plus d’énergie !

M. Richard Yung, rapporteur. … puisqu’il prévoit que siègent au sein de l’observatoire des représentants de la direction générale du Trésor, de la Banque de France et d’un certain nombre d’autres organismes très nobles. Il vise également à un copilotage par deux ministères.

Je n’entrerai pas dans le détail, car, comme l’a laissé entendre Mme Rossignol, il s’agit d’amendements d’appel. Il fallait que ces choses-là soient dites. Ainsi, lorsque le Gouvernement se penchera, avec toute sa sagesse, sur la préparation des décrets d’application, il aura nos débats pour référence et il saura que nous souhaitons la représentation des organisations de défense des droits des consommateurs.

En ce qui concerne le copilotage par deux ministères, il ne me revient pas de trancher. Toutefois, mon expérience m’a prouvé que ce n’était pas toujours une bonne idée. Mais tel n’est pas l’objet de notre débat.

Ces deux amendements ayant été exposés, il convient maintenant, me semble-t-il, de les retirer. Tel est l’avis de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Il est bien évident que les associations de défense des droits des consommateurs et les associations de lutte contre les exclusions seront représentées au sein de l’observatoire. Le Gouvernement est convaincu qu’il faut prévoir pour cet observatoire une représentation de l’ensemble des parties concernées, à savoir des administrations, bien entendu, mais également des établissements de crédit, des personnalités qualifiées, probablement aussi des chercheurs spécialisés dans ce domaine.

Certes, et vous l’avez tous admis, il n’est pas possible de prévoir dans la loi la composition précise de l’observatoire. C’est bien la raison pour laquelle la loi renvoie à un décret. Mais sachez que le Gouvernement a bien entendu vos préoccupations et qu’il veillera à ce que celles-ci soient fidèlement retranscrites dans les décrets qui seront pris pour fixer la composition de l’observatoire.

Mme la présidente. Madame Rossignol, l’amendement n° 149 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Laurence Rossignol. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement no 149 rectifié ter est retiré.

Monsieur Desessard, l’amendement n° 250 est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. M. le rapporteur a indiqué que le Gouvernement allait se pencher avec sagesse sur le sujet. Mme la ministre a ensuite confirmé que les associations de lutte contre les exclusions seraient représentées au sein de l’observatoire. Dans l’attente du résultat de ses travaux, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement no 250 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 148 rectifié ter, présenté par Mme Rossignol, M. Dilain, Mmes Lienemann et Lepage, M. Caffet, Mme M. André, MM. Berson et Botrel, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Marc, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini, Yung, Madec, Madrelle, Fauconnier, Chastan, Antoinette, Leconte et Teston, Mmes Alquier et Claireaux, MM. J.C. Leroy, Eblé, Rainaud, Vincent, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Ce rapport comporte notamment une analyse des indicateurs d’inclusion bancaire et de leur évolution, une évaluation des pratiques des établissements de crédit, ainsi que les préconisations éventuelles de l’observatoire afin d’améliorer l’inclusion bancaire. Il pourra également décrire et analyser les exemples de bonnes ou de mauvaises pratiques individuelles de certains établissements de crédit.

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Cet amendement vise à préciser les informations qui doivent figurer dans le rapport de l’observatoire de l’inclusion bancaire. Mais une réponse ayant en partie été apportée, je retirerai éventuellement cet amendement après avoir entendu les avis de la commission et du Gouvernement.

Mme la présidente. L'amendement n° 249, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il comprend notamment, pour chaque établissement de crédit, les données mentionnées au premier alinéa du présent article.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise les informations transmises par les établissements bancaires à l’observatoire.

En rendant publiques les données obtenues et leur analyse, l’observatoire permettra à tout un chacun de pouvoir comparer les pratiques des banques.

Ainsi, celles qui « jouent le jeu », qui ont une réelle politique d’accessibilité bancaire, et pas seulement une politique de communication, pourront tirer leur épingle du jeu et se mettre en valeur.

Cette publicité sera à notre sens beaucoup plus efficace que de savoir que ledit établissement a signé la charte de l’inclusion bancaire.

Nous précisons également que ces informations doivent être «nominatives », c’est-à-dire établissement de crédit par établissement de crédit, pour permettre cette comparabilité.

Cette démarche de transparence pourrait être utilement complétée par un processus de certification publique pour les établissements qui mènent une réelle politique d’inclusion bancaire.

C’est ce que proposent plusieurs organisations reconnues comme la Croix-Rouge, le Secours Catholique et l’union des centres communaux d’action sociale, les CCAS.

Il s’agit non pas de créer une distorsion de concurrence mais, au contraire, de reconnaître la plus-value apportée par ces établissements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Richard Yung, rapporteur. Je tiens à dire tout le bien que je pense de l’amendement no 148 rectifié ter : il nous semble aller dans le bon sens et la commission est prête à le soutenir. Je regrette donc que Mme Rossignol songe à le retirer.

Mme Laurence Rossignol. Alors, je le maintiens ! Il ne faut jamais trop anticiper les réponses que l’on attend !

M. Richard Yung, rapporteur. Cela s’appelle un coup de théâtre ! (Sourires.)

Cet amendement permet de préciser le résultat du travail de l’observatoire, ce qui s’inscrit tout à fait dans la vocation du conseil. La commission y est donc favorable.

La commission comprend l’objectif recherché par M. Desessard dans son amendement no 249, mais elle préfère la rédaction de l’amendement no 148 rectifié ter.