M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie. Monsieur le sénateur, le classement en forêt de protection constitue actuellement l’outil juridique le plus solide pour la protection des forêts menacées. La procédure est centralisée, le classement comme forêt de protection étant prononcé obligatoirement par décret en Conseil d’État. Le projet est soumis à une enquête publique et le dossier doit préciser les motifs du classement et la nature des sujétions et interdictions susceptibles d’être entraînées par le régime forestier spécial.

Les effets principaux du classement sont d’interdire le défrichement, de soumettre la gestion forestière à des règles techniques particulières, de contrôler les droits d’usage et de réglementer l’accès du public. Cette procédure permet d’apporter toute garantie, tant quant à la prise en compte de l’expression de toutes les parties prenantes que relativement à l’intérêt du classement de chacune des parcelles, sous la surveillance du Conseil d’État.

Toute modification est prise par décret en Conseil d’État, suivant donc la procédure du classement. Je tiens à vous préciser que la réglementation ne prévoit pas de déclassement, le statut de forêt de protection étant par nature définitif, puisque l’objectif premier est justement la conservation des forêts.

Le classement comme forêt de protection interdit en effet tout changement d’affectation ou tout mode d’occupation du sol de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements.

Par exemple, en 1995, lorsque le ministre de l’industrie a sollicité une dérogation pour permettre la recherche d’hydrocarbures en forêt de Fontainebleau, le Conseil d’État s’est prononcé défavorablement, en indiquant que les puits de forage devaient être établis hors du périmètre de protection.

En créant le statut de forêt de protection, le législateur a voulu accorder une protection extrêmement forte à des forêts dont la préservation présente un intérêt exceptionnel. Cette procédure, qui ne couvre qu’une infime partie des espaces forestiers nationaux, doit, pour conserver tout son sens, rester strictement appliquée.

Le Gouvernement n’envisage pas de modification de cette procédure.

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Madame la ministre, vous vous doutez bien que cette réponse ne me satisfait pas du tout, elle n’est d’ailleurs pas acceptable.

Je comprends bien qu’il faut garantir la protection de nos forêts, nous y sommes tous favorables, mais ma question était ciblée.

Nous représentons tous des collectivités et nous avons quelquefois besoin, à la marge, dans certains cas précis comme le passage d’une route ou d’une infrastructure, de quelques mètres carrés qui pourraient faire l’objet d’une dérogation. Je connais justement cette situation en Charente-Maritime. Nous pourrions ainsi facilement économiser beaucoup d’argent public. Nous sommes en effet conduits à procéder à des acquisitions de quelques centaines de mètres carrés de terrains souvent constructibles ou habités, très onéreux sur les côtes et le littoral.

Je demande simplement un peu de bon sens en la matière. Tout en préservant, bien sûr, nos belles forêts, nous souhaitons que le Gouvernement réfléchisse à cette possibilité qui pourrait être offerte aux représentants des collectivités que nous sommes.

sapeurs-pompiers et dérogation aux dispositions du permis probatoire

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, auteur de la question n° 456, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Claude Peyronnet. Ma question était adressée au ministre de l’intérieur, mais je vois que c’est Mme la ministre déléguée chargée de la décentralisation qui va me répondre, avec toute la compétence qu’on lui connaît dans cette maison.

Que penseriez-vous, madame la ministre, d’une situation dans laquelle on dirait à un jeune conducteur qui vient de passer son permis de conduire : « Vous avez désormais un permis probatoire pour parfaire votre façon de conduire avant de recevoir, dans trois ans, votre permis définitif, mais, pendant cette période, vous n’aurez pas le droit de conduire une voiture » ? Devra-t-on lui demander de faire ses preuves en bicyclette ou en trottinette ?...

Avec votre sagesse bien connue, vous diriez, madame la ministre, que c’est amusant mais stupide et digne du royaume du père Ubu. C’est pourtant à peu près la situation dans laquelle se trouvent les jeunes pompiers qui, ayant leur permis de catégorie B, se voient opposer de fait l’interdiction de conduire des véhicules de secours, en intervention et hors intervention, pendant les trois années de leur probation.

Le permis probatoire a été instauré par la loi du 12 juin 2003 dans le but de renforcer la lutte contre la violence routière, et nul ne peut nier qu’il a produit des effets. L’article R. 413-5 du code de la route impose ainsi un certain nombre de contraintes, notamment un capital de six points seulement, un disque A apposé à l’arrière du véhicule, une vitesse limitée.

Il n’est pas question de remettre en cause ces obligations, mais il faut constater qu’une combinaison des articles R. 413-5 du code de la route et R. 6312-8 du code de la santé publique peut aboutir à interdire aux pompiers la conduite d’un véhicule de secours et d’assistance aux victimes, ou VSAV, en intervention comme hors intervention.

L’article R. 413-6 du code de la route fixe une liste de dérogations et notamment exonère les conducteurs des véhicules des unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile, qui pilotent pourtant les mêmes engins de secours que les pompiers civils.

Le ministre de l’intérieur, qui a la responsabilité des sapeurs-pompiers, a-t-il l’intention de préciser que, si l’article R. 6312-8 du code de la santé publique prévoit que des normes minimales applicables aux véhicules de catégorie B sont bien déterminées par arrêté du ministre de l’intérieur, les dispositions dérogatoires de l’article R. 413-5 du code de la route sont applicables aux sapeurs-pompiers, qui seraient ainsi exonérés par le troisième alinéa de l’article R. 413-6 du code de la route, au même titre que les conducteurs d’unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile.

Ce n’est sans doute pas l’affaire du siècle, madame la ministre, mais ce traitement apparaît discriminatoire et en sont victimes non seulement les sapeurs-pompiers de la fonction publique territoriale, mais aussi les volontaires, dont vous connaissez le rôle dans le maillage et l’efficacité des secours sur l’ensemble du territoire, en particulier pour les petits centres en milieu rural.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le président, la ministre déléguée que je suis va donc suppléer successivement le ministre de l’intérieur, M. Manuel Valls, la ministre des affaires sociales et de la santé, Mme Marisol Touraine, le ministre chargé du budget, M. Bernard Cazeneuve, et la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira, retenus par d’autres responsabilités et d’autres charges !

Merci donc de bien vouloir me supporter, monsieur le président, et merci à mes anciens collègues sénateurs et sénatrices d’accepter les réponses que je leur ferai en lieu et place des ministres qui n’ont pu être présents ce matin. (Sourires.)

M. le président. Chacun connaît votre universalité, madame la ministre ! (Nouveaux sourires.)

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Merci, monsieur le président.

Monsieur Peyronnet, Ubu n’est jamais loin de nous, mais le ministre de l’intérieur s’est très sérieusement attaché à cette problématique et je vais développer les éléments de réponse qu’il m’a chargée de vous transmettre.

Institué, comme vous l’avez rappelé, par la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, et entré en vigueur en mars 2004, le permis probatoire a une durée variable : deux ans si le conducteur a suivi la filière de l’apprentissage anticipé de la conduite ; trois ans pour les conducteurs issus de la filière classique.

Il s’agit exclusivement d’un instrument de prévention visant à diminuer le nombre de points sur le permis de conduire afin d’inciter les jeunes conducteurs à être le plus prudents possible et – surtout – respectueux du code de la route. Il s’inscrit dans une démarche de prévention des accidents de la route dont sont victimes chaque année de très nombreux jeunes.

Le Gouvernement, très attentif à cette question, a donc mis en place une politique volontariste de prévention des accidents de la circulation routière.

Dans cette logique, les dérogations aux dispositifs préventifs tels que le permis probatoire ont été restreintes. Vous l’avez rappelé, les véhicules militaires bénéficient d’une dérogation ; elle est essentiellement liée à la mission militaire. L’armée dispose en effet de structures de formation et d’accompagnement spécifiques, ainsi que de règles propres visant à suivre les jeunes conducteurs incorporés au sein de ses unités.

Les services départementaux d’incendie et de secours sont confrontés à une réalité différente. À l’occasion de leurs 11 600 interventions quotidiennes, les SDIS sont amenés à conduire en situation d’urgence et de stress, ce qui requiert une grande expérience de la conduite automobile afin de limiter les risques.

Les formations dispensées aux sapeurs-pompiers leur rappellent déjà la nécessité impérieuse, pour réussir leur mission, d’arriver d’abord sur les lieux et donc de se montrer particulièrement vigilants aux risques routiers.

Le ministre de l’intérieur a demandé à la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises de procéder à une refonte des programmes de la filière « conduite », afin de prendre mieux en compte la prévention des accidents de circulation.

Par ailleurs, les services départementaux d’incendie et de secours développent également des plans de prévention des risques routiers afin de sensibiliser leurs sapeurs-pompiers à de tels risques. Les jeunes qui s’engagent en qualité de sapeurs-pompiers ont déjà de nombreuses compétences à acquérir afin de mener en toute sécurité les opérations pour lesquelles ils sont sollicités.

Le ministre de l’intérieur, ainsi que le Président de la République qu’il accompagnait à Chambéry à l’occasion du 120e congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, se sont clairement engagés pour le volontariat en le définissant comme une priorité nationale.

Un ensemble de mesures destinées à lever les différents freins au recrutement de sapeurs-pompiers volontaires a été arrêté par les grands donneurs d’ordre du monde pompier. L’État, les collectivités territoriales et la profession se sont fixé comme objectif d’accroître le nombre de sapeurs-pompiers volontaires dans les SDIS.

Au risque de vous décevoir, monsieur le sénateur, il n’est donc pas envisagé, dans le cadre de ces mesures, qu’il faut concilier avec l’apprentissage des règles de sécurité au travail et la politique publique nationale en matière de sécurité routière, de permettre aux jeunes qui souscrivent un engagement de sapeurs-pompiers de conduire un engin de secours en situation opérationnelle en dehors des règles de droit commun.

Nous ne sommes pas tout à fait chez Ubu ; il va falloir s’en tenir là. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Votre réponse ne me satisfait effectivement pas, madame la ministre, vraiment pas du tout !

Nous ne sommes certes pas chez Ubu, mais nous n’en sommes pas très loin. Voilà des gens qui, ayant leur permis, ne pourront pas s’en servir pour conduire des véhicules de secours pendant trois ans ! Où donc vont-ils apprendre ce qui, dans leur métier, concerne la conduite ? Et, au bout de trois ans, d’un seul coup, on leur dira qu’ils ont le droit de conduire tel ou tel véhicule !

Je ne vois pas vraiment l’intérêt de ce dispositif. Il vaudrait mieux leur permettre de conduire ces véhicules lors des retours d’intervention, accompagnés par un collègue expérimenté. Ils éviteraient ainsi les situations de stress auxquelles vous faites allusion et pourraient s’entraîner à cette conduite.

J’ajoute que, dans le milieu rural que vous connaissez bien, cela pose un véritable problème. Vous avez indiqué que le Président de la République s’était engagé en faveur du volontariat. À Chambéry, il a annoncé des mesures tout à fait favorables, je les salue. Toutefois, le gros problème qui se pose, en particulier en milieu rural, est de disposer d’un nombre suffisant de pompiers, notamment de conducteurs.

Comment va-t-on procéder ? Devra-t-on faire appel fréquemment, sinon à chaque intervention, aux services d’un centre voisin parce que tel ou tel jeune, bien que titulaire d’un permis de conduire, ne pourra utiliser le véhicule de secours ? Cette situation n’est pas satisfaisante.

J’ajoute qu’elle est également fort discriminatoire. En effet, si j’ai bien compris, les pompiers militaires – à Paris ou à Marseille – ont le droit, eux, de conduire. Je ne vois pas en quoi ils seraient moins stressés dans les rues de Paris que dans votre campagne ou dans la mienne !

crédit-bail pour les collectivités locales

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteur de la question n° 522, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Mme Catherine Deroche. Je souhaiterais attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur l’utilisation de la technique du crédit-bail par les collectivités territoriales, dans l’intervention publique locale de l’immobilier d’entreprise.

Les intercommunalités, en particulier, mettent à disposition des entreprises désireuses de s’installer dans les zones artisanales intercommunales des bâtiments industriels au moyen du crédit-bail, cette formule apparaissant comme l’une des formes juridiques les plus appropriées.

Or les conditions réglementaires encadrant l’établissement des crédits-bails immobiliers se révèlent aujourd’hui assez restrictives. Ainsi l’article L. 511-5 du code monétaire et financier précise-t-il que la pratique du crédit-bail immobilier ne doit pas revêtir un caractère habituel pour toute personne autre qu’un établissement de crédit.

La jurisprudence, quant à elle, considère que l’habitude commence dès la première répétition.

En conséquence, si les collectivités locales peuvent mettre en œuvre des opérations d’immobilier d’entreprise en crédit-bail dans le cadre de leur pouvoir économique, ces opérations ne peuvent avoir un caractère « habituel » et doivent donc être pratiquées de manière occasionnelle.

Au nombre des sanctions figure notamment la nullité du contrat qui peut être invoquée par le crédit-preneur. C’est ce qui est arrivé dans mon département, le Maine-et-Loire : la communauté de communes Loir-et-Sarthe, propriétaire de douze ateliers relais, dont huit loués en crédit-bail et deux en baux courte durée à transformer, à l’échéance, soit en crédit-bail, soit en bail commercial, s’est vu opposer la nullité de plusieurs contrats en raison du caractère répétitif de cette pratique. Les crédits-preneurs ont ainsi pu éviter de payer les préavis et les indemnités dus en cas de résiliation anticipée.

Il en résulte une véritable insécurité juridique pour les collectivités locales, alors même que ces opérations ont fait l’objet de délibérations et n’ont pas suscité la moindre observation de la part des services de l’État.

Aussi, j’aimerais savoir si le Gouvernement entend prendre des mesures pour aménager la pratique du crédit-bail immobilier.

Cette piste mérite en effet d’être explorée, tant pour permettre aux intercommunalités d’exercer plus sereinement leur compétence en matière de développement économique que pour répondre à la carence des opérateurs privés, qui n’investissent pas forcément dans le milieu rural.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Madame la sénatrice, voilà une question qui relève autant de Manuel Valls que de la ministre déléguée chargée de la décentralisation !

Le contrat de crédit-bail immobilier est défini par l’article L.313-7, alinéa 2, du code monétaire et financier comme une opération par laquelle le crédit-bailleur donne en location, pour une certaine durée, un bien immobilier à un crédit-preneur, l’entreprise, qui aura la faculté de devenir propriétaire de ce bien à l’expiration du contrat de crédit-bail ou par une levée de l’option d’achat, pour un prix fixé contractuellement.

Le crédit-bail consiste donc en une location assortie d’une promesse unilatérale de vente.

Ce mode de financement des investissements à moyen ou long terme est assimilé à une opération de crédit par l’article L. 313-1 du code monétaire et financier et, à ce titre, ne peut être effectué à titre habituel que par des entreprises commerciales agréées en qualité d’établissement de crédit selon l’article L. 515-2 du même code.

À titre exceptionnel, et lorsque l’intérêt local l’exige, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent déroger au principe du monopole bancaire reconnu aux établissements de crédit et effectuer des opérations de crédit-bail en vue d’assurer le développement ou le maintien d’activités économiques.

Cette possibilité ne doit cependant pas revêtir un caractère habituel. Dans l’exemple du département de Maine-et-Loire que vous avez cité, vous avez vous-même mentionné l’existence de huit contrats de crédit-bail. La jurisprudence interprète cette notion de « caractère habituel » de manière très restrictive : il est en général considéré que l’habitude commence dès la première répétition, c’est-à-dire au deuxième contrat de crédit-bail.

Les collectivités territoriales et leurs groupements disposent toutefois, dans le cadre de l’article L. 1511-3 du code général des collectivités territoriales, de la faculté d’intervenir indirectement dans une opération de crédit-bail en accordant des aides à l’immobilier d’entreprise dans des conditions très précises, conformément à l’article R. 1511-4-1 du même code, qui permet d’attribuer des aides, par l’intermédiaire d’un tiers maître d’ouvrage habilité à effectuer des opérations de crédit à titre habituel. C’est à ce dernier qu’il revient de répercuter intégralement ces aides sous forme de rabais sur les annuités de crédit-bail payées par l’entreprise. L’aide donne alors lieu à l’établissement d’une convention.

Dans ces conditions, vous comprendrez, madame la sénatrice, que le respect de la loi s’impose.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche.

Mme Catherine Deroche. Loin de moi l’idée de ne pas respecter la loi ! Mon objectif était de vous sensibiliser aux difficultés que rencontrent les intercommunalités dans le cadre des opérations de crédit-bail. Je m’interrogeais sur la possibilité d’améliorer les textes, de façon à disposer d’un peu plus de souplesse.

Nous savons que la situation économique de la France est catastrophique. Elle inquiète au plus haut point non seulement les Français et les chefs d’entreprise, mais aussi les élus locaux. Dans la guerre que nous devons mener contre le chômage et contre la dégradation de l’emploi, avec toutes leurs conséquences sociales, voire sociétales, je pense qu’il nous faut imaginer des méthodes et des modifications réglementaires ou législatives permettant de libérer les énergies et de supprimer nombre des freins à la création d’emplois.

pérennité des taxes affectées au fonctionnement des comités professionnels de développement économique

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 543, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .

M. Philippe Kaltenbach. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement, et plus particulièrement celle du ministre chargé du budget, sur l’inquiétude des professionnels des industries de l’habillement après les propositions formulées cet été par le Conseil des prélèvements obligatoires, visant à supprimer ou plafonner les taxes affectées aux opérateurs parapublics.

En effet, les comités professionnels de développement économique et notamment, dans le secteur de l’habillement, le comité de développement et de promotion des industries de l’habillement, jouent un rôle crucial dans le soutien aux entreprises créatrices d’emplois et de ressources, au moment même où le Gouvernement s’emploie, par la politique qu’il conduit, à infléchir et, nous l’espérons tous, à inverser la courbe du chômage.

Pour mémoire, je veux rappeler que ces comités ont été créés par la loi du 22 juin 1978 pour des professions représentant environ 24 000 entreprises, majoritairement petites et moyennes.

Ces comités sont financés par des taxes affectées, votées par le Parlement en 2004, à la demande expresse des professions, pour remplacer les taxes parafiscales. Alors que ces dernières échappaient à son contrôle, les taxes affectées sont soumises au vote des assemblées dans les lois de finances.

Ces taxes payées par les entreprises pour le développement et la promotion de leur secteur ont permis à l’État, depuis cette date, de réaliser une économie de plus de 300 millions d’euros. Si elles venaient à être supprimées ou plafonnées, comme le préconise le Conseil des prélèvements obligatoires, le financement des précieuses missions que remplissent aujourd’hui les comités professionnels de développement économique incomberait directement au budget l’État.

Or, vous le savez, les efforts entrepris depuis dix-huit mois pour réduire les déficits colossaux légués par le précédent gouvernement seraient incompatibles avec cette nouvelle charge. Les actions actuellement menées par les comités professionnels de développement économique pourraient donc, à terme, se trouver menacées.

Aussi, je voudrais interroger le Gouvernement sur les orientations qui seront retenues par l’État à la suite de la récente publication des propositions formulées par le Conseil des prélèvements obligatoires relatives aux taxes affectées aux opérateurs parapublics, et sur leurs incidences éventuelles sur les comités professionnels de développement économique.

Les professionnels, bien sûr, sont inquiets et souhaiteraient être rassurés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, je vais tenter de rassurer ces professionnels en vous livrant la réponse que m’a transmise M. le ministre chargé du budget.

Le Gouvernement n’a certainement pas l’intention de supprimer le financement, par des taxes affectées, des centres techniques industriels, les CTI, ou des comités professionnels de développement économique, les CPDE, dont fait partie le comité de développement et de promotion de l’habillement, dénomination officielle du DEFI.

Ces taxes affectées avaient d’ores et déjà été plafonnées par la loi de finances pour 2012. L’instauration d’un plafond sur ces taxes ne vise pas à pénaliser le comité de développement et de promotion de l’habillement, dont nous savons le soutien majeur qu’il constitue pour la filière de la mode, en matière de développement international, de création et d’innovation. Il consiste plutôt à permettre la mise en œuvre d’économies globales auxquelles, compte tenu de notre situation économique, tous les organismes bénéficiaires d’un soutien de l’État doivent aujourd’hui contribuer.

Le rapport confié à MM. Queyranne, Demaël et Jurgensen, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, tout comme celui qu’a remis le Conseil des prélèvements obligatoires sur la fiscalité affectée, ont montré le surcalibrage des plafonds des taxes affectées aux CTI et CPDE.

De fait, en 2012, quatre plafonds étaient surévalués au regard de la collecte effective, y compris la taxe affectée au développement et à la promotion des industries de l’habillement, et n’ont pas donné lieu à des dépassements. Depuis 2007, l’exécution des taxes n’a jamais atteint le niveau du plafond global.

De plus, dans le contexte très dégradé de nos finances locales, il est aujourd’hui légitime de veiller à la bonne utilisation de l’argent public, et d’inciter les établissements financés par taxes affectées à plus d’efficience et d’efficacité dans la conduite des politiques dont ils ont la charge.

Conformément aux engagements du Gouvernement, il est donc décidé, pour 2014, d’associer les CTI et CPDE à cet effort. Dans le cadre de l’objectif général de réduction de 10 % des taxes affectées, le projet de loi de finances pour 2014 tient compte de l’importance des interventions, en appliquant un effort budgétaire mesuré et équitable – deux adjectifs importants –, nécessaire au redressement des finances publiques.

Il a été décidé de réduire les plafonds des taxes et des subventions affectées aux CTI et CPDE de cinq millions d’euros, faisant passer le plafond global de 139 millions d’euros à 134 millions d’euros.

La taxe pour le développement des industries de l’habillement, dont bénéficie le comité de développement et de promotion de l’habillement, plafonnée à 10 millions d’euros en 2013, passerait à 9,5 millions d’euros. Ce niveau de plafonnement a été calculé au plus juste, en fonction des dernières prévisions financières disponibles et des nouveaux objectifs d’économies à réaliser, de telle sorte que les actions que mène le DEFI auprès du secteur de l’habillement ne soient pas remises en cause.

C’est ce message qu’il faut retenir, monsieur le sénateur, même si, nous en sommes tous conscients, la période actuelle nous oblige, les uns et les autres, à faire des économies.

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse. Je crois qu’il est nécessaire de rassurer les professionnels, qui remplissent leurs missions de manière tout à fait efficiente. Il faut les encourager à poursuivre le développement, sur le territoire, d’une activité industrielle dont les produits peuvent être exportés et contribuer à faire connaître notre savoir-faire à l’étranger.

La crainte, exprimée à la suite de la publication du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, était de voir supprimer les taxes affectées. Je note que telle n’est pas l’intention du Gouvernement, et je tiens à l’en remercier.

La décision de plafonner les taxes affectées de manière limitée, prise afin que tout le monde contribue à l’effort sur la dépense publique, ne brouille pas le message essentiel, qui est d’encourager les professionnels à poursuivre leurs actions, et de leur garantir des montants qui leur permettent de continuer leur travail.

Je remercie le Gouvernement de ne pas envisager de suppression de ces taxes affectées.

distribution des courriers postaux dans les mairies

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 562, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique.