M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, j’espère que mon propos apportera quelques compléments aux réponses que vous avez déjà à l’esprit.

La réglementation actuelle de l’assurance chômage permet le cumul partiel d’une rémunération et de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, de façon à ne pas décourager les allocataires de reprendre un emploi.

Ce dispositif dit « d’activité réduite » autorise ce cumul dès lors que cette activité ne dépasse pas cent dix heures par mois – vous venez de le dire – et ne procure pas plus de 70 % des revenus antérieurs. En outre, la durée de ce cumul est limitée à quinze mois.

Ces plafonds peuvent parfois induire des effets de seuil qui interrogent.

Pour autant, la définition de la réglementation d’assurance chômage relève de l’entière responsabilité des partenaires sociaux, gestionnaires du régime, et la renégociation de la convention Unédic débutera dans les prochaines semaines.

Lors de la négociation de 2011, les signataires s’étaient entendus pour approfondir, au travers d’un groupe de travail, certains enjeux, au titre desquels figurait l’activité réduite. Aussi, il y a peu de doute que la réforme du dispositif sera l’un des points de la future convention afin d’en améliorer la lisibilité et de renforcer son caractère incitatif au retour à l’emploi.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Je vous remercie, monsieur le ministre des anciens combattants. Cette question ne relève pas de votre spécialité, mais je vois que vous avez travaillé le sujet, ce dont je vous remercie.

Effectivement, c’est l’effet de seuil qui est particulièrement pénalisant à chaque fois. Il serait donc intéressant que cette question soit étudiée au niveau gouvernemental et que des propositions puissent être faites aux partenaires sociaux. En effet, cet exemple montre bien que l’on pénalise véritablement ceux qui sont déterminés à s’engager davantage dans l’emploi.

Il nous appartient donc, à notre niveau, de prendre les mesures permettant à nos concitoyens de comprendre les lois et les mesures qui leur sont proposées.

plan de rattrapage pour l’éducation en seine-et-marne

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 557, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur l’état très préoccupant du service public d’éducation en Seine-et-Marne.

Depuis plus de dix ans, ce département est en constante évolution démographique, ce qui nécessite la création régulière de postes d’enseignant pour accompagner ce mouvement.

Tous les ans, à une exception près, le nombre d’élèves scolarisés à la rentrée est supérieur aux prévisions et le nombre de postes créés inférieur aux besoins. En ce qui concerne la seule école primaire, sur dix ans, le retard accumulé en nombre de postes d’enseignant par rapport à l’évolution démographique s’établit à 366 postes. Cet état de fait a imposé pendant plusieurs années aux inspecteurs d’académie puis aux directeurs académiques des services de l’éducation nationale successifs de procéder à ce que l’on pourrait appeler de la « cavalerie », en créant des postes non budgétés et générant un déséquilibre entre nombre de postes et nombre d’enseignants.

Cette année, les effectifs d’élèves ont encore augmenté : 270 731 élèves ont fait leur rentrée en Seine-et-Marne, soit 1 668 de plus que l’an dernier.

Malgré la dotation de 135 professeurs supplémentaires pour le secteur primaire et 65 pour les collèges, et bien que cela constitue une rupture positive avec les années précédentes, le retard cumulé est très loin d’être résorbé, la surcharge des classes restant réelle dans le département. De plus, les 134 postes du réseau d’aide spécialisée aux élèves en difficulté, ou RASED, dispositif supprimé depuis 2009, font toujours cruellement défaut et, faute de remplaçants en nombre suffisant, la formation continue des enseignants ne sera toujours pas assurée dans le département pour cette année.

La Seine-et-Marne compte encore aujourd’hui plus de 60 % de territoires ruraux. La taille des écoles de ces secteurs et la taille du secteur concerné en font des consommateurs de postes, tant pour les classes par effets de seuils que pour les postes « hors la classe » du fait des temps de trajets. Au niveau des dotations, le ministère de l’éducation nationale considère le département de Seine-et-Marne comme urbain à 99,4 %, du fait de son appartenance à la région d’Île-de-France. Il semble indispensable de revoir ce mode de calcul pour permettre à ce département de bénéficier de moyens d’enseignement à la hauteur des besoins lors des prochaines décisions budgétaires.

Dans ce contexte, je souhaiterais connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que la Seine-et-Marne soit enfin dotée de moyens qui tiennent compte de la spécificité de sa situation et que les réponses qualitatives et quantitatives nécessaires soient enfin mises en œuvre pour que les jeunes Seine-et-Marnais bénéficient des moyens indispensables à la réussite de leur parcours scolaire, moyens qui leur font durablement défaut.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur Billout, refonder l’école, c’est rétablir l’égalité des chances qui est au cœur du pacte républicain, pacte qui, au travers de mon histoire personnelle, m’est cher. En ce sens, la lutte contre la difficulté scolaire a été définie comme une priorité.

C’est pourquoi le Président de la République s’est engagé à refonder notre système scolaire et à recréer en cinq ans 60 000 postes d’enseignants et de personnels éducatifs, médico-sociaux, administratifs et techniques qui sont indispensables à la bonne marche d’un établissement scolaire.

Les postes nouveaux sont répartis dans les académies par les rectorats, dans le souci de l’intérêt général, selon une méthode transparente et juste reposant sur des critères objectifs.

Dans ce cadre, vous évoquez, monsieur le sénateur, la prise en charge de la difficulté scolaire, et plus particulièrement le travail remarquable des enseignants spécialisés des RASED.

Dès l’année 2012, une partie des moyens supplémentaires accordés en urgence pour la rentrée – c’est-à-dire 97 postes sur les 1 000 créés – est venue renforcer la place des RASED dans les écoles qui en avaient le plus besoin. Mais nous savons que cet effort n’a pas été suffisant pour remédier à toutes les situations difficiles.

C’est pourquoi, grâce à la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, nous avons décidé – cela apparaît dans le rapport annexé – d’ouvrir 7 000 nouveaux postes dans les secteurs les plus fragiles, de favoriser l’évolution des pratiques pédagogiques, notamment via le dispositif « plus de maîtres que de classes », de renforcer l’encadrement, d’accompagner les organisations pédagogiques innovantes et de renforcer l’action des RASED et celle des autres dispositifs de remédiation scolaire au service d’une amélioration significative des résultats scolaires.

À ce titre, la scolarisation des enfants de moins de trois ans doit être privilégiée dans les secteurs de l’éducation prioritaire, dans les secteurs ruraux et ceux de l’outre-mer sur la base d’un partenariat impliquant parents, enseignants, services académiques et collectivités territoriales. C’est un enjeu essentiel, vous le savez, de la lutte contre l’échec scolaire.

Enfin, concernant la situation de l’académie de Créteil et plus particulièrement des RASED en Seine-et-Marne, je souhaite, monsieur le sénateur, vous apporter les informations suivantes.

Pour votre académie, après 120 suppressions de poste dans le premier degré à la rentrée de l’année 2011-2012 et 179 à la rentrée de l’année 2012-2013, 405 postes supplémentaires ont été créés à la rentrée scolaire de l’année 2013-2014 dont 135 pour le département de Seine-et-Marne. Parmi ces créations, 11 sont dévolues au dispositif « plus de maîtres que de classes ».

Aujourd’hui, dans votre département, plus une seule école n’affiche le chiffre symbolique de 30 élèves en moyenne par classe.

Vous le voyez à travers ces chiffres, l’effort en la matière est considérable et à la hauteur, me semble-t-il, de vos légitimes attentes. Mais au-delà de cette création nécessaire de postes, il nous faut également nous interroger sur la fonction même des RASED.

Aussi, nous avons mis en place un groupe de travail copiloté par la direction générale de l’enseignement scolaire et l’inspection générale de l’éducation nationale. Celui-ci a réalisé un état des lieux et proposé les évolutions nécessaires dans le fonctionnement des RASED pour leur redonner toute leur place dans le système éducatif. Cette réflexion essentielle se poursuit maintenant dans le cadre du dialogue social avec les organisations représentatives des personnels.

Monsieur le sénateur, la politique du Gouvernement est de donner à la communauté éducative les justes moyens dont elle a besoin pour rétablir la promesse du pacte républicain que j’évoquais en introduction : l’égalité des chances pour tous les élèves. La lutte contre la difficulté scolaire est une ardente obligation pour l’avenir de notre pays. Ce contrat, nous le devons à nos enfants et à leur famille, mais aussi à notre société.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre, je suis bien conscient des efforts menés actuellement par le Gouvernement pour revenir à l’équilibre qui prévalait avant la suppression de 80 000 postes par le gouvernement précédent.

Cela étant, si la Seine-et-Marne a les mêmes difficultés que les autres départements de la France métropolitaine, elle a également une spécificité : une évolution démographique qui grève particulièrement la situation.

Par conséquent, la réponse que vous m’avez faite ne me rassure pas totalement : je ne suis en effet pas certain que le ministère de l’éducation nationale ait parfaitement intégré cette situation.

Ainsi, sur les 135 postes accordés à ce département à la rentrée, seulement 2 l’ont été en faveur de la scolarisation des enfants de deux ans. C’est extrêmement insuffisant. De même, seulement six postes ont été dédiés à l'expérimentation pédagogique « plus de maîtres que de classes ».

On voit bien que, aujourd'hui, tout est absorbé pour essayer de combler un retard qui existe depuis dix ans. Je suis persuadé que, sans un véritable plan de rattrapage pour ce département – comme cela a notamment été le cas voilà quelques années pour la Seine-Saint-Denis, dans l'académie de Créteil –, on ne pourra pas garantir aux jeunes Seine-et-Marnais la même égalité des chances que partout ailleurs, ce qui est un vrai problème.

D'après moi, il faut au moins maintenir au cours des trois prochaines années – on ne peut pas tout régler sur un seul exercice budgétaire – l'effort consenti cette année. Il conviendrait même, pour l'enseignement primaire, de porter l'effort à 150 créations de poste annuelles pour les trois prochaines années. À défaut, la Seine-et-Marne produira toujours les mêmes inégalités scolaires et sera toujours en retard par rapport à la moyenne nationale, quant à la réussite des élèves.

projet de restructuration de l'institut national de l'origine et de la qualité

M. le président. La parole est à M. Christian Bourquin, auteur de la question n° 539, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

M. Christian Bourquin. Madame la ministre, ma question s'adresse au ministre de la ruralité et, s'il était ici, je lui dirais la même chose que ce que je vais vous dire.

Le ministre de l’agriculture s'apprête à porter un sale coup à la ruralité dans les Pyrénées-Orientales, au sud du sud de la France. Ce sale coup, c'est de supprimer l'INAO – l’Institut national de l’origine et de la qualité – de Perpignan ! Le supprimer, c'est enlever des aides à tout ce monde de la production de qualité, du label, dans les secteurs de l'élevage, des fruits et légumes, de la viticulture…

Pourtant, grâce à l'INAO, le département des Pyrénées-Orientales est le premier département bio de France. Grâce à l'INAO, le département des Pyrénées-Orientales est l'un des départements qui contribuent le plus à la progression des exportations dans le secteur de de l'agroalimentaire… C'est ça, le sale coup qui est porté !

Supprimer six emplois à Perpignan, c'est en supprimer six cents à Paris : c'est le même impact ! Manifestement, monsieur le ministre de la ruralité, vous êtes embourbé dans un chemin où toute votre technocratie vous a conduit… Je vous propose d'en sortir, mais pas avec les arguments qui sont aujourd'hui les vôtres.

Me dire que c'est le conseil d'administration de l'INAO qui a décidé cette suppression, alors que c'est vous, le ministre de la ruralité, qui maîtrisez ce conseil à 75 %, et que l’État verse à cet institut plus de 16 millions d'euros par an !

Dans la vie, il faut savoir ce que l’on veut ; et il faut savoir si l’on veut une agriculture qui aille de l’avant : là est la question. Moi, en tout cas, je suis du côté des gueux, du côté des paysans, du côté de ceux qui font avancer l'économie de l'agriculture !

J'ai entendu dimanche dernier M. le ministre de l’agriculture dire sur les chaînes de télévision : « Moi, j’avance des propositions et, quand elles ne sont pas comprises par le peuple, je les retire ».

Eh bien, ma question est toute simple : monsieur le ministre, vous avez avancé sur un terrain miné, dans une direction opposée à celle du développement économique. Je vous propose de renoncer à ce projet et de ne pas toucher à ces six emplois de l’INAO qui font le développement de cette ruralité, dans le sud du sud de la France ; et ce n’est pas parce qu'il est éloigné de Paris qu'on doit l'oublier !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité interroger M. le ministre de l’agriculture. Il est, hélas ! retenu à une réunion à Matignon sur l’écotaxe, organisée à la suite de la mobilisation qui a eu lieu en Bretagne à ce sujet. C'est pourquoi l'on m'a demandé de vous répondre pour lui.

L’INAO a effectivement engagé un schéma de modernisation. Ce schéma est souhaité par la profession, approuvé par le conseil permanent de l’Institut et mis en œuvre par son directeur.

La réduction du nombre de sites de vingt-cinq à dix-huit, telle qu’elle est envisagée, traduit le choix d’un maillage du territoire national qui reste dense mais se compose de sites dont les effectifs sont adaptés aux missions d’aujourd’hui, à savoir les nouvelles compétences de l’INAO en matière d’agriculture biologique et de labels de qualité.

Si, historiquement, la présence physique au plus près des exploitations agricoles impliquées dans une agriculture sous signe de qualité était nécessaire, I’INAO a décidé, au regard du succès de cette politique et du bon développement des productions de qualité, de diversifier les compétences des agents et d’optimiser le fonctionnement de sites parmi les plus importants en taille.

À la suite de nombreux échanges avec les représentants des salariés et avec les élus sur le terrain, Stéphane Le Foll a souligné trois éléments qui lui semblent essentiels et sur lesquels il a de nouveau insisté auprès du directeur, dans une lettre qu’il lui a envoyée hier.

Premier élément, une antenne doit être maintenue sur trois sites dont la suppression est prévue mais où les enjeux locaux continuent de justifier une présence au plus près des exploitants : à Nantes, à Bergerac et, comme vous le savez, à Perpignan.

Deuxième élément, Stéphane Le Foll a demandé qu’aucune mobilité géographique ne soit imposée à des agents qui ne le souhaiteraient pas pour des raisons tenant à leur vie personnelle.

À cette fin – c'est le troisième élément –, il a demandé au directeur de mettre en place une commission de suivi de la réorganisation et d’accompagnement de la situation des agents, à laquelle les représentants du personnel participeront.

Pour la région Languedoc-Roussillon, l’unité territoriale de l’INAO sera composée du site de Montpellier et du site de Narbonne, ainsi que d’une antenne à Perpignan. La création d’antennes a été rendue possible à la suite de la demande expresse du ministre de l'agriculture et, comme je l'ai dit, elle ne concernera que trois sites touchés par la réorganisation. L'ensemble des agents seront placés sous l'autorité de la déléguée territoriale, basée à Montpellier.

Cette réorganisation s'inscrit dans la politique générale de l’État du maintien de services publics de qualité à des coûts optimisés. Le rôle de l'INAO vis-à-vis des organismes de défense et de gestion des Pyrénées-Orientales sera bien entendu maintenu auprès des filières viticoles et agricoles dont le dynamisme et la performance sont reconnus de tous et auxquels le Gouvernement – tout comme vous, monsieur le sénateur – est très attaché.

M. le président. La parole est à M. Christian Bourquin.

M. Christian Bourquin. Madame la ministre, ma réaction tiendra en trois points.

Premier point, votre réponse est technocratique et guidée par des techniciens. Or, ici, madame, on fait de la politique !

Deuxième point, vous me parlez d'un maillage en France… Alors, qu’on aille pêcher les anchois de Collioure à Dunkerque, qu’on produise le bon vin de Maury et de Collioure à Dijon ! Moi, je n’y peux rien si mon département est un producteur de qualité parce que nous y avons tous travaillé…

Troisième point, une antenne, je n’y crois pas deux instants ! Une plaque ne sera pas sitôt placée qu’un directeur l'enlèvera, et il n’y aura plus d'antenne ni de plaque !

Tout cela, ce ne sont que des mots. Vous ne faites pas de politique ici, et c'est dommage… Je comptais alerter le ministre ; je le ferai dans d'autres circonstances : je suis un tenace et je ne lâcherai rien là-dessus !

Pour l'élevage, si nous sommes parvenus au point où nous nous trouvons, c'est parce que moi et d'autres l'avons défendu, parce que nous avons travaillé ! C’est la même chose pour les fruits et légumes : c'est parce que des gens comme moi, par le passé, ont bossé, qu’ils les ont défendus bec et ongles, tout comme la viticulture, avec les bons Maury, les bons Rivesaltes, les bons Collioure – voilà des noms qui sonnent !

Eh on vient nous dire qu’il faut faire un maillage, que le nord de la France… Je m'arrête là, car je ne veux pas opposer les territoires ! Alors oui, c'est cela, excusez-moi d'avoir une bonne zone de production, qui a envie d'avoir des labels pour mieux vendre dans monde ! C'est évidemment cela qu’on est en train de sacrifier !

Je dirai que votre réponse, dictée par les technocrates du ministère de l'agriculture, est loin d'être satisfaisante. Elle est même vraiment décevante !

difficulté des agriculteurs à être couverts par un contrat d'assurance récolte

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, en remplacement de M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 546, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

M. Jean-Claude Peyronnet. Madame la ministre, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Didier Guillaume, qui reçoit aujourd’hui le ministre de l'intérieur dans la Drôme ; ce dernier rencontre les maires des communes qui ont été sinistrées dans le nord de ce département lors des inondations de la semaine dernière.

En l'occurrence, le hasard fait, hélas ! bien les choses, cette question orale portant précisément sur des épisodes climatiques dévastateurs pour la Drôme.

En effet, mon collègue souhaitait attirer votre attention sur un sujet particulièrement sensible pour les agriculteurs : l’assurance de leurs exploitations, et plus particulièrement la difficulté que rencontrent un grand nombre d’entre eux pour souscrire un contrat annuel d’assurance récolte.

Comme vous le savez, le département de la Drôme a été touché plusieurs années de suite par des épisodes de grêle très violents. Ces événements, dont les derniers se sont déroulés en juillet 2013, ont très lourdement sinistré les arboriculteurs et viticulteurs du département de la Drôme, certains ayant perdu la quasi-totalité de leur production annuelle.

Si la protection agricole contre les risques climatiques relève uniquement du secteur privé pour les risques assurables comme, par exemple, la grêle, le gel ou les inondations, et si les agriculteurs sont, régulièrement, fortement incités à s’assurer contre ces risques climatiques malgré les coûts élevés d'une telle adhésion – mon collègue indique une fourchette de 2 000 euros à 2 500 euros par hectare d'arboriculture –, de plus en plus d’exploitants n’y parviennent pas.

Quand de nombreux agriculteurs font l’effort d’être prévoyants et de se couvrir face aux risques et qu’ils se retrouvent dans l’incapacité de souscrire de nouveaux contrats d’assurance – ou alors à des tarifs prohibitifs –, ce sont les pouvoirs publics, et en particulier les collectivités locales, qui sont sollicités pour trouver des solutions face aux difficultés rencontrées.

Cette situation de refus des assurances privées d’assurer des exploitants considérés comme présentant un trop gros risque entraîne une grande instabilité chez ces agriculteurs qui courent chaque année le risque de voir leur production détruite par des événements climatiques de plus en plus fréquents : les terribles inondations que la Drôme et l’Ardèche ont connues il y a quelques jours en sont une nouvelle illustration.

Cette incapacité à se prémunir contre ce risque entraîne un grand découragement chez de nombreux exploitants et emporte des conséquences souvent très lourdes sur la pérennité même des exploitations.

La sélection des risques opérée par les assurances en excluant le climat fait donc supporter la responsabilité des événements liés à la météo aux seuls agriculteurs. Le raisonnement purement financier qui préside à cette sélection n’est pas acceptable.

La question de Didier Guillaume est donc la suivante : madame la ministre, quelles solutions peuvent-elles être envisagées avec les groupes d’assurance pour éviter la multiplication des résiliations ou des refus d’assurer ? Et, plus largement, n’est-il pas nécessaire, pour sortir de ces difficultés récurrentes, de mettre en place un système de généralisation de l’assurance récolte pour éviter non seulement la disparition de dizaines d’exploitations incapables de faire face aux aléas climatiques, mais aussi le découragement des jeunes ayant pour projet de s’installer ?

J’ajoute que beaucoup d'entre nous peuvent se sentir concernés ; ainsi, pour ce qui concerne mon département, la Haute-Vienne, les producteurs de pommes sont nombreux.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie. Monsieur le « sénateur, vous vous faites l’écho des interrogations de M. Guillaume concernant la difficulté que rencontrent des agriculteurs touchés à plusieurs reprises par des catastrophes climatiques pour trouver une compagnie d’assurance acceptant de couvrir leur exploitation.

M. Le Foll vous rappelle que, si les pertes de récolte liées à la grêle en particulier, considérées comme assurables, ne relèvent pas du régime des calamités agricoles, les pertes de fonds, elles, entrent dans le champ. Ainsi, les calamités agricoles peuvent indemniser une partie des pertes de fonds dont ont été victimes les arboriculteurs et les viticulteurs drômois à la suite d’un ou plusieurs épisodes de grêle.

Typiquement, si des ceps de vigne ou des arbres fruitiers ont dû être taillés après un épisode de grêle d’une manière qui affecte les récoltes suivantes, ces pertes de fonds sont éligibles.

L’assurance des récoltes contre les risques climatiques offre une meilleure couverture que les indemnisations du régime des calamités agricoles. Le soutien de l’État prend la forme d’une prise en charge partielle des primes ou cotisations d’assurance payées par les exploitants agricoles. Depuis 2010, cette aide s’insère dans le cadre du premier pilier de la politique agricole commune, la PAC, et bénéficie à ce titre d’un cofinancement européen. La réglementation européenne permet un taux de prise en charge publique plafonné à 65 % de la prime éligible.

L’enveloppe publique consacrée au développement de l’assurance récolte est passée de 37 millions d’euros en 2008 à 77,2 millions d’euros en 2013. À partir de 2015, dans le cadre de la future PAC, une enveloppe annuelle de 77 millions d’euros sera consacrée à l’assurance récolte au sein du deuxième pilier, ce qui traduit l’engagement renouvelé de l’État en faveur de l’assurance récolte.

Bien que la diffusion de l’assurance récolte soit en progression d’année en année grâce au soutien public, les résultats font apparaître des taux de diffusion hétérogènes entre les filières, encore limités en viticulture – 18 % – et trop faibles en arboriculture – moins de 3 %. Cette problématique est l’une des préoccupations majeures du ministre de l’agriculture, dans le cadre du groupe de travail qu’il a mis en place au sujet de la gestion des risques.

Ce groupe de travail a tenu quatre réunions depuis cet été, au cours desquelles les bilans de l’assurance récolte et du régime des calamités agricoles ont été dressés. Les réflexions de ce groupe, auxquelles sont associées les organisations professionnelles agricoles et les compagnies d’assurance, ont porté à la fois sur les objectifs des pouvoirs publics pour redéfinir leur intervention en matière de gestion des risques, mais également sur les améliorations pouvant être apportées par le secteur privé au contenu des produits d’assurance offerts aux agriculteurs.

L’objectif est de réussir à élargir la base du nombre d’assurés, pour définir un dispositif susceptible, à l’avenir, d’offrir à l’ensemble des productions la possibilité de disposer d’une couverture adaptée à leurs besoins spécifiques, en particulier dans les filières viticole et arboricole, afin de rendre ces produits d’assurance plus attractifs et de favoriser la poursuite de la diffusion de l’assurance récolte.

Les conclusions de ce groupe de travail seront présentées dans le courant du mois de novembre.

procédure de déclassement des massifs boisés en forêt de protection

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 570, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

M. Daniel Laurent. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur la mise en œuvre d’une procédure de déclassement des massifs boisés en forêt de protection pour cause d’utilité publique ou pour nécessité absolue de travaux.

En application des articles L. 411-1, L. 413-1, R. 411-1 et R. 413-4 du code forestier, peuvent être classés en « forêt de protection » des massifs boisés dont la conservation est nécessaire à la lutte contre l’érosion des sols pour des raisons écologiques ou pour le bien-être de la population.

Or le déclassement d’une partie de forêt de protection nécessite la mise en œuvre d’une procédure longue, complexe et à l’issue favorable incertaine.

Cette procédure, rarement utilisée, doit respecter le parallélisme des formes : enquête publique, avis du ou des conseils municipaux concernés ainsi que de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ; enfin, transmission du dossier au Conseil d’État qui entérinera, ou non, par voie de décret, la réduction de la servitude.

Ainsi, dans le cadre d’un simple projet d’urbanisme ou d’infrastructure en limite de massif ou sur des parcelles couvertes de quelques arbres et friches sans enjeu environnemental, une procédure de douze à dix-huit mois serait nécessaire, pénalisant les collectivités locales dans la conduite de leurs projets d’intérêt général.

Considérant que les études d’impact diligentées par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, la DREAL, garantissent la prise en compte de tous les risques et enjeux environnementaux liés aux projets des collectivités, ne serait-il pas envisageable de simplifier et d’harmoniser cette procédure, notamment par une déconcentration au niveau des préfets de région ?

En effet, une telle déconcentration de la décision du déclassement au niveau des préfets de région assurerait plus de souplesse tout en garantissant la préservation des objectifs fixés par le législateur

En conséquence, madame la ministre, pouvez-vous me faire part de vos observations sur cette problématique, ainsi que des propositions du Gouvernement en la matière, qui rendraient bien service aux collectivités ?