M. le président. L'amendement n° 4 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Au 4 décembre 2013, la valeur des actions détenues par l’État dans des sociétés inscrites à la cote officielle de la Bourse de Paris, au titre de l’indice du CAC 40, atteignait exactement 79,679 millions d’euros, dont 28,135 millions d’euros sont susceptibles d’être cédés.

Douze entreprises sont ainsi concernées – EDF, GDF-Suez, Aéroports de Paris, Air France-KLM, Areva, la Caisse nationale de prévoyance, Dexia, EADS, Orange, Renault, Safran et Thales – dont trois – EDF, GDF-Suez et Aéroports de Paris – ont un statut fixé par la loi qui détermine un minimum de titres détenus par l’État.

En l’espèce, comme chacun le sait ici, l’État ne peut disposer de moins de 50 % du capital d’Aéroports de Paris, de 33,33 % du capital de GDF-Suez et de 70 % de celui d’EDF. Ces trois entreprises réunissent, soulignons-le, une capitalisation boursière de 60 024 millions d’euros, c’est-à-dire l’essentiel du patrimoine industriel détenu par l’État dans l’indice vedette de la Bourse.

Notons tout de même que, pour le reste, aucune règle législative ne fait obstacle, en tant que de besoin, à ce qu’Air France cesse d’être une compagnie publique et que nous abandonnions toute propriété publique dans le capital d’EADS ou de Safran, ce qui serait tout de même, de notre point de vue, une erreur stratégique grossière.

À la vérité, cet article 10 est bel et bien une sorte d’autorisation laissée pour privatiser tout ou partie de ce qui reste du secteur public, pour des motifs qu’il nous conviendrait de connaître.

Parce que le discours sur l’obsolescence des règles statutaires des entreprises ne nous convainc pas, nous devons nous demander quels objectifs sont ainsi visés.

Si l’on regarde le chiffre d’affaires des entreprises concernées – celles qui sont cotées au CAC 40 comme la soixantaine d’autres qui ne le sont pas –, on constate un volume cumulé de plus de 455 milliards d’euros, soit quelque chose entre le cinquième et le quart de notre produit intérieur brut !

La capitalisation boursière est une chose, les fonds propres peuvent en être une autre, et il en est de même de la réalité de l’activité desdites sociétés.

À la vérité, laisser en l’état l’article 10 reviendrait à priver sans aucun doute l’État de quelques-uns de ses outils de politique économique et industrielle et renverrait, à notre avis, le « redressement productif » aux oubliettes !

Les entreprises publiques se sont déjà suffisamment approchées des règles de fonctionnement du secteur privé, puisque cela doit bien faire trente ans qu’elles ne reçoivent aucun subside public et que leur activité est surtout appelée, en tant que de besoin, à dégager des dividendes pour l’État actionnaire ou, à défaut, à lui permettre de réaliser des plus-values de cession d’actifs.

Nous ne voulons pas de privatisation silencieuse, rampante ou dissimulée derrière ce dessaisissement du Parlement que prévoit l’article 10.

Nous ne pouvons donc qu’inviter le Sénat à voter la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Les auteurs de cet amendement souhaitent supprimer purement et simplement l’article 10, car ils considèrent que les textes relatifs aux entreprises dans lesquelles l’État détient une participation ne devraient pas faire l’objet d’ordonnances.

Le sens du travail de la commission a justement été de clarifier très précisément le champ de cette habilitation, au vu des réflexions conduites sur le rôle de l’État actionnaire. La rédaction initiale de l’article 10 était en effet trop peu précise, puisqu’il était uniquement question de « moderniser la gouvernance » des entreprises concernées.

Il s’agit de simplifier ces textes et de les rapprocher du droit commun, en supprimant les règles obsolètes ou devenues sans objet, sources d’une rigidité inutile au regard des enjeux actuels de la gestion des participations de l’État.

Il s’agit aussi de faire évoluer les règles de composition des conseils d’administration et les règles de désignation des dirigeants de ces entreprises et des représentants de l’État dans les conseils.

Il s’agit enfin de clarifier les règles relatives aux opérations en capital portant sur ces entreprises, en y associant de façon plus systématique la commission des participations et des transferts.

En complément des modifications que j’ai proposées la semaine dernière à la commission, M. le rapporteur de la commission des affaires économiques a, lui aussi, apporté d’utiles précisions, s’agissant en particulier des seuils de détention publique de certaines entreprises.

Je présenterai en outre dans un instant un amendement visant à préciser que les règles de représentation des salariés au sein des conseils de ces entreprises ne doivent pas être remises en cause à la faveur de l’adaptation des règles de composition de ces conseils.

Par conséquent, il me semble que cette habilitation comporte toutes les garanties nécessaires.

C’est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Le projet de loi d’habilitation présenté par le Gouvernement vise à modifier la législation portant sur la gouvernance et les opérations en capital des entreprises publiques, et ce dans un double souci de modernisation et de plus grande intelligibilité du droit.

En effet, aujourd’hui, ces législations sont sources de difficultés tant juridiques que pratiques, compte tenu notamment de l’existence de textes désuets qui complexifient inutilement la gouvernance des entreprises et participent ainsi à son manque d’efficacité.

Nous comprenons bien vos interrogations, mais la technicité de la matière requiert la réalisation d’un vaste chantier rédactionnel ; cela explique le recours aux ordonnances dès lors qu’il s’agit d’éviter au Parlement l’examen de nombreuses dispositions techniques qui entraînerait un encombrement excessif de l’agenda parlementaire. (Mme Nathalie Goulet s’exclame.)

Pour autant, le Parlement n’est bien sûr pas dépossédé de son droit de regard, puisque, en votant le projet de loi d’habilitation, il détermine le domaine et les finalités des ordonnances, et qu’il procédera, in fine, à leur ratification.

Nous vous confirmons que le projet maintiendra, sur le fond, tant la règle du tiers de représentants des salariés au sein des conseils qu’un contrôle très important sur les opérations en capital réalisées par l’État, notamment en l’étendant aux opérations d’acquisition.

Par conséquent, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Sans vouloir allonger inutilement le débat, je souligne que cet article, s’il est certes important, car il tend à supprimer tout archaïsme ou lourdeur dans la procédure concernant les participations de l’État, n’en instaure pas pour autant la transparence. D’ailleurs, nous n’avons pas pu étudier cette année le « jaune » budgétaire et le budget des participations de l’État. Or, nous le savons, dans ces matières, l’État est un peu schizophrène, puisque, quand il est actionnaire, il se conduit comme tel.

Je veux bien laisser à Mme la ministre le bénéfice de la bonne foi, mais très honnêtement, cet article introduit encore un peu plus d’opacité dans la gestion des participations de l’État, ce dont nous n’avons pas besoin !

Par ailleurs, madame le ministre, je vous rassure, le Sénat n’est absolument pas débordé ces temps-ci ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné dix amendements en quarante-cinq minutes. Je vous rends attentifs au fait qu’il nous reste donc encore environ une heure vingt de travaux. M. le ministre chargé des relations avec le Parlement nous rejoint à l’instant pour que, si vous en êtes d’accord, nous siégions en séance prolongée. Nous pourrions lever la séance vers vingt heures trente. (Assentiment.)

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 16, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

Simplifier et rapprocher du droit commun des sociétés

par les mots :

Moderniser, clarifier et, le cas échéant, adapter au regard du droit commun des sociétés

II. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Assouplir et adapter les règles de gouvernance de ces entreprises, notamment en ce qui concerne la composition, le rôle et le fonctionnement des conseils, la désignation, le mandat et le statut des personnes appelées à y siéger ainsi que des dirigeants, et élargir les conditions d’accès aux fonctions correspondantes ;

III. – Alinéa 4

Après le mot :

Clarifier

insérer les mots :

et rendre plus efficaces

après les mots :

ces entreprises

insérer les mots :

, y compris en adaptant les compétences de la commission des participations et des transferts,

IV. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

L'amendement n° 33, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Assouplir et adapter les règles relative à la composition, au rôle et au fonctionnement des conseils, à la désignation, au mandat et au statut des personnes appelées à y siéger, sans remettre en cause la représentation des salariés, ainsi qu’à la désignation des dirigeants ;

La parole est à Mme la ministre déléguée, pour défendre l’amendement n° 16.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Cet amendement vise à préciser le champ de l’habilitation tel qu’il résulte des travaux de votre commission des lois, en vue d’une réelle modernisation des textes.

L’article 10 tend à modifier la législation portant sur la gouvernance et les opérations en capital des entreprises à participation publique, nous venons de l’évoquer, dans un souci de modernisation et d’intelligibilité, l’objectif étant de rendre plus efficace la gestion des participations publiques par l’État.

C’est ce qu’indiquait l’article 10, tel que le Gouvernement l’avait initialement proposé. Nous avions d’ailleurs déjà donné un éclairage concernant certaines mesures à prendre par ordonnance, comme cela figurait dans l’exposé des motifs.

La commission a souhaité préciser encore davantage la rédaction de cet article, en excluant les seuils de détention du champ de l’habilitation et en précisant les types de modifications attendues en matière de règles de gouvernance et d’opérations en capital.

Le Gouvernement est très favorable à cette démarche. Il est normal que le Parlement fixe le cadre de l’habilitation. Cet amendement vise précisément à compléter les précisions apportées à l’article 10 dans le prolongement de la rédaction retenue par la commission des lois, et ce à deux égards.

D’une part, cet amendement tend à expliciter davantage les objectifs visés afin que l’habilitation permette bel et bien de moderniser l’ensemble des textes applicables, au-delà de leur simplification, de leur clarification ou, le cas échéant, d’un rapprochement avec le droit commun des sociétés, lorsque celui-ci se révèle pertinent.

D’autre part, cet amendement vise à élargir le champ des règles de gouvernance qui pourraient être modifiées au-delà des seules règles de composition des conseils et de désignation des dirigeants ou des personnes appelées à siéger au sein de ces instances. Concrètement, et à titre d’exemple, nous souhaitons pouvoir travailler sur le mandat, le vivier et le statut des administrateurs. C’est ce but que traduit la rédaction proposée par le Gouvernement.

Ces précisions sont essentielles pour définir un champ d’habilitation permettant de moderniser effectivement et efficacement les règles applicables aux entreprises à participation publique.

Par ailleurs, je constate que M. le rapporteur a déposé un amendement tendant à préciser encore le champ de cette habilitation. Il s’agit de l’amendement n° 33 qui, dans quelques instants, sera soumis au vote de la Haute Assemblée. Il a pour objet de bien préciser que l’habilitation ne visera pas à modifier la règle de représentation spécifique au sein des conseils d’administration régis par la loi relative aux délégations de service public, c’est-à-dire le tiers des administrateurs. J’indique d’ores et déjà que le Gouvernement est favorable à cette précision.

Aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, pour éviter d’écraser l’amendement du Gouvernement, je vous invite à en adopter une version rectifiée, comprenant, au deuxième paragraphe, après le verbe « siéger », les mots : « sans remettre en cause la règle du tiers de représentants des salariés au conseil des sociétés qui y sont soumises en vertu de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public ».

Je demande, en conséquence, à la commission de retirer l’amendement n° 33.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 16 rectifié, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

Simplifier et rapprocher du droit commun des sociétés

par les mots :

Moderniser, clarifier et, le cas échéant, adapter au regard du droit commun des sociétés

II. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Assouplir et adapter les règles de gouvernance de ces entreprises, notamment en ce qui concerne la composition, le rôle et le fonctionnement des conseils, la désignation, le mandat et le statut des personnes appelées à y siéger, sans remettre en cause la règle du tiers de représentants des salariés au conseil des sociétés qui y sont soumises en vertu de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, ainsi que des dirigeants, et élargir les conditions d’accès aux fonctions correspondantes ;

III. – Alinéa 4

Après le mot :

Clarifier

insérer les mots :

et rendre plus efficaces

après les mots :

ces entreprises

insérer les mots :

, y compris en adaptant les compétences de la commission des participations et des transferts,

IV. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 33 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 16 rectifié.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. L’amendement du Gouvernement vise à réécrire une large partie de l’habilitation contenue à l’article 10, déjà clarifiée et précisée en commission la semaine dernière. Je rappelle que le texte initial évoquait simplement l’objectif de « moderniser la gouvernance des entreprises dans lesquelles l’État détient une participation ».

Il est vrai que l’article 10 est une source de débats entre le Gouvernement et notre commission. Sauf erreur de ma part, la commission des finances est également sensible aux précisions que nous avons apportées.

Sur le fond, je ne suis pas convaincu que les paragraphes I, III et IV précisent réellement le champ de l’habilitation, d’autant qu’ils contiennent des expressions comme « moderniser » ou « rendre plus efficaces ». J’insiste sur le fait que la signification juridique de ces termes n’est justement pas très précise, raison pour laquelle la commission des finances commission la commission des lois ont proposé leur suppression, madame la ministre.

Cependant, j’entends la préoccupation du Gouvernement, qui m’a conduit à déposer cet amendement. Ce dernier vise à préciser davantage encore l’habilitation au sujet des règles relatives aux conseils d’administration, notamment quant à la désignation des représentants de l’État et des dirigeants.

J’invite la Haute Assemblée à adopter cette modification, et je demande au Gouvernement de bien vouloir retirer l’amendement n° 16 rectifié, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable sur ce dernier.

M. le président. Madame la ministre déléguée, l’amendement n° 16 rectifié est-il maintenu ?

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Il est difficile, pour le Gouvernement, de retirer cet amendement. En conséquence, je le maintiens, insistant sur le fait que nous l’avons rectifié, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Madame la ministre, je suis peiné de devoir le dire, cette rectification ne change rien aux réserves que j’ai formulées. De plus, les préoccupations que vous avez exprimées voilà quelques instants sont prises en compte dans l’amendement n° 33.

Suivant la logique adoptée par la commission des lois comme par les commissions saisies pour avis, je suis au regret de maintenir mon avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article 10
Dossier législatif : projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises
Article 12

Article 11

(Non modifié)

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnances :

1° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE, ainsi que les mesures d’adaptation de la législation applicable aux établissements de crédit, aux compagnies financières, aux compagnies financières holdings mixtes, aux compagnies mixtes et aux entreprises d’investissement ;

2° Les mesures relevant du domaine de la loi permettant de rendre applicables aux sociétés de financement, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, précitée ;

3° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la mise en conformité de la législation française au règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 ;

4° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive 2011/89/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2011, modifiant les directives 98/78/CE, 2002/87/CE, 2006/48/CE et 2009/138/CE en ce qui concerne la surveillance complémentaire des entités financières des conglomérats financiers ;

5° Les mesures relevant du domaine de la loi permettant, d’une part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions mentionnées aux 1° à 3° en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et, d’autre part, de procéder aux adaptations nécessaires, le cas échéant, en ce qui concerne les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

6° Les mesures permettant de modifier les articles L. 313-2 et L. 313-3 du code monétaire et financier relatifs aux modalités de calcul et d’application du taux d’intérêt légal. – (Adopté.)

Article 11
Dossier législatif : projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises
Article 13

Article 12

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnances :

1° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la mise en conformité de la législation française au règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit, ainsi que les éventuelles mesures nécessaires d’adaptation de la législation applicable aux établissements de crédit, aux compagnies financières et aux compagnies financières holdings mixtes ;

2° Les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la mise en conformité de la législation française au règlement (UE) n° 1022/2013 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013, modifiant le règlement (UE) n° 1093/2010 instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) en ce qui concerne des missions spécifiques confiées à la Banque centrale européenne ;

3° Les mesures relevant du domaine de la loi, issues des dispositions mentionnées aux 1° et 2°, nécessaires à la mise en conformité de la législation applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, et permettant de procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l'article.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, cette intervention vaudra défense de l’amendement n° 5 rectifié, ce qui nous permettra de gagner un peu de temps !

Avec l’article 12, le Gouvernement nous demande de donner compétence à la Banque centrale européenne, d’une part, pour assurer le bon fonctionnement du secteur financier en Europe – et, bien sûr, en France particulièrement – en veillant à ce que nos banques respectent les normes prudentielles contenues dans les fameux accords de Bâle III, et, de l’autre, pour garantir la liquidité des marchés.

Dans les faits, il s’agit d’achever l’union bancaire, dont certains sont convaincus qu’elle est la seule à même d’éviter à notre pays de connaître de nouveau les affres qu’il a subies en 2008.

Mes chers collègues, un problème ne s’en pose pas moins : il y a de fortes chances pour que l’union bancaire conduise à structurer encore un peu plus un secteur déjà largement marqué par les alliances et les regroupements, comme l’a montré, par exemple, la campagne de privatisations des banques dans notre pays.

Nombre des établissements qui se sont vu appliquer les lois de 1986 et 1993 ont disparu. Faut-il rappeler ici le cas du Crédit lyonnais, qui a depuis été rebaptisé « LCL » et qui, comme d’autres banques, a été rétrogradé en sous-réseau de réseaux plus importants ? Souvenez-vous également de Dexia, ancienne Caisse d’équipement des collectivités locales, ex-Crédit local de France, dont la privatisation a été des plus désastreuses. Il est d’ailleurs probable que le coût final de cette opération se révélera au total plus élevé que le montant constaté pour l’opération de défaisance du Lyonnais, que nous allons prochainement solder.

Toutefois, l’union bancaire par ordonnance, que l’on nous propose en quelque sorte via le présent texte, ne résout pas l’essentiel du problème. Les établissements de crédit en Europe n’ont pas tous les mêmes finalités, la même culture et la même influence systémique. Pour l’heure, ce que l’on nous propose, c’est une forme de modélisation qui risque, une fois de plus, de favoriser les visées et les orientations purement financières au détriment de l’intermédiation utile à l’économie.

Quand on voit, en particulier, ce que les banques françaises ont pu faire des ressources que la BCE leur a accordées au titre de leur refinancement, on se dit qu’il aurait fallu, à tout le moins, débattre concurremment de l’union bancaire et de la place réelle des banques dans l’économie, en accordant la même importance à chacun de ces deux enjeux.

La simple lecture du rapport de la commission d’enquête sur le rôle des banques dans les circuits de la fraude et de l’évasion fiscales montre assez que, derrière les belles intentions affichées à l’article 12, demeurent bien des zones d’ombre et des interrogations en suspens. Et pouvons-nous continuer à déplorer que de nouvelles entreprises fassent chaque jour faillite, faute d’avoir pu accéder à des crédits bancaires au moment où elles en avaient besoin ?

Pour toutes ces raisons, et compte tenu du nécessaire débat que notre pays doit consacrer à la finance et à la banque, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à supprimer cet article.

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement a été précédemment défendu.

Quel est l’avis de la commission des finances ?

M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission des finances. La commission est défavorable à cet amendement, et ce pour deux raisons.

Mme Assassi a invoqué, d’une part, l’imprécision du présent article et, de l’autre, l’absence d’urgence que revêt son adoption.

Premièrement, je constate que, sur l’initiative de la commission des finances, la rédaction de l’article 12 a été précisée : désormais, y sont bien indiqués les deux textes européens précisément visés.

Deuxièmement, nous sommes convaincus qu’il y a urgence,…

M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission des finances. … à garantir la solidité du système financier de la zone euro.

Il est essentiel que la France, qui sera la première concernée par le nouveau Mécanisme, adapte immédiatement son droit bancaire en la matière. À cet égard, la nomination prochaine de la française Danielle Nouy, secrétaire générale de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, à la présidence du conseil de surveillance du Mécanisme de supervision unique, le MSU, est significative : la mise en œuvre opérationnelle de ce dispositif est bel et bien engagée, et la France est très attendue sur ce terrain !

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Cet article habilite le Gouvernement à adopter par voie d’ordonnances les modifications rendues nécessaires par les évolutions du droit communautaire consécutives à la mise en œuvre de l’union bancaire.

Comme chacun sait, la création d’un superviseur européen est une priorité politique pour la France et pour la zone euro tout entière, afin de restaurer la confiance dans le secteur bancaire de la zone euro et, ce faisant, d’améliorer le financement de la croissance. À cet égard, cette habilitation permettra d’assurer une coopération efficace entre l’autorité française de supervision – à savoir l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – et la BCE, qui deviendra compétente pour la supervision de toutes les grandes banques françaises.

En conséquence, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.