M. Yannick Botrel. À diverses reprises, nous parlementaires avons été alertés par les représentants des entreprises du bâtiment – en particulier par les confédérations de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, les CAPEB, et les chambres de métiers – sur les dérives potentielles de la mise en œuvre de la directive européenne relative aux travailleurs détachés.

Nous avons également été interpellés sur ce sujet par les industries agroalimentaires, même si le problème, dans ce secteur, tient aussi à l’absence de salaire minimal dans certains pays de l’Union européenne, qui se trouvent être nos concurrents directs. Pensez-vous, monsieur le ministre, que des avancées soient envisageables sur ce dernier point ? Quelle pourrait être l’action du Gouvernement en la matière ?

Il aura fallu la volonté politique très ferme de la France pour arracher un accord majoritaire lors de la réunion des ministres du travail de l’Union européenne. Disons-le nettement, la détermination de la France, confortée par le soutien de l’Allemagne et le ralliement de la Pologne, s’est révélée décisive face à une opposition conduite, en particulier, par le Royaume-Uni.

Il faut donc féliciter le Président de la République et les membres du Gouvernement, en particulier Michel Sapin et vous-même, monsieur le ministre, d’avoir réussi à imposer cette avancée significative. C’est un progrès majeur pour les travailleurs détachés, dont les droits seront désormais mieux garantis. C’est aussi une victoire pour les entreprises françaises du BTP, et partant pour l’emploi, car elles seront mieux protégées d’une concurrence sans doute libre, mais surtout entièrement faussée jusque-là !

Si le secteur du bâtiment et des travaux publics, qui représente 80 % des fraudes, est particulièrement concerné par l’accord, il est cependant essentiel que ce dernier s’applique à l’ensemble des secteurs de l’économie, en particulier aux industries agroalimentaires et aux transports. Là encore, quelle peut être l’action du Gouvernement ? Peut-on envisager une amélioration de l’accord qui vient d’être conclu sur le point que je viens d’évoquer ?

Enfin, je souhaitais également vous interroger, monsieur le ministre, sur le calendrier de la transcription de l’accord dans notre droit national.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Oui à la libre circulation des travailleurs, non à leur exploitation : tel est le principe qui a régi la position de la France au cours des négociations. Pendant plusieurs mois, nous nous sommes attachés à convaincre un à un nos partenaires européens, afin d’atteindre une majorité qualifiée.

Je vous confirme que nous avons travaillé de manière très étroite avec les acteurs du BTP. J’ai moi-même rencontré, il y a quelques semaines, le président de la Fédération française du bâtiment, M. Ridoret, qui partageait complètement nos positions, y compris sur la responsabilisation de ses propres mandants,…

M. Thierry Repentin, ministre délégué. … certaines entreprises pouvant recourir de manière astucieuse aux pratiques dénoncées.

Mme Annie David. Bien sûr !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. La Fédération française du bâtiment a d’ailleurs mené une campagne de communication sur le sujet et a demandé aux professionnels du BTP de se mobiliser pour soutenir la position française, sachant que c’est dans ce secteur que l’on constate le plus de distorsions de concurrence.

Un accord entre États a été conclu. Dans les jours qui viennent, des discussions vont s’engager entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen afin d’élaborer le texte définitif. Je n’exclus pas que des évolutions puissent intervenir, y compris afin d’élargir son champ d’application, conformément à vos souhaits, monsieur le sénateur.

Pour autant, il a vraiment été très difficile de trouver un accord entre États. Le Parlement européen parviendra peut-être à les convaincre d’aller un peu au-delà, mais le mieux est parfois l’ennemi du bien…

Nous avons environ deux mois de travail devant nous : le texte définitif devra être adopté avant le mois de mai prochain ; tel est l’objectif politique que nous avons fixé. Il pourra ensuite être procédé à la transposition dans le droit français.

La lutte contre les distorsions de concurrence pourra ultérieurement être élargie à la problématique du salaire minimal, notamment. Ce n’est pas facile mais, pas à pas, avec de la volonté, nous avançons !

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Monsieur le ministre, je comptais vous interroger sur l’union bancaire, dont l’instauration est un élément essentiel pour améliorer la gouvernance économique de l’Union européenne, limiter certains risques et rétablir la confiance et la croissance en Europe. Vous avez déjà répondu sur ce point, je n’y reviens donc pas.

En revanche, je regrette que vous ayez écarté d’un revers de main mes observations sur la dérive des finances publiques, en vous bornant à affirmer qu’il n’y aurait pas de dérapage. Je vous ai pourtant posé tout à l’heure des questions très précises sur la nécessité de réduire certaines dépenses sociales, de donner davantage de souplesse au marché du travail, de diminuer le coût du travail.

Je souhaite très sincèrement, pour la France et pour nous tous, que vous ayez raison, mais, personnellement, je suis inquiet, et la commission l’est plus encore que moi. Je vous donne rendez-vous en 2015, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Je pense qu’il s’agit là davantage d’une conclusion que d’une interpellation.

Vous aurez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’occasion de discuter plus amplement de ces sujets avec le ministre de l’économie et des finances ou le ministre chargé du budget, en particulier lors de l’élaboration des lois de finances pour 2014 et 2015 : il dépendra aussi des votes de l’Assemblée nationale et du Sénat qu’il n’y ait pas de dérapage budgétaire ! Vous aurez par exemple à examiner dans quelle mesure les dotations aux collectivités locales devront être diminuées…

M. Jean Bizet. Ce n’est pas du tout cette baisse des dépenses publiques que nous attendons !

M. Thierry Repentin, ministre délégué. … et la dépense publique réduite… Cela promet des discussions animées !

En tout cas, ce qui importe, c’est que la France retrouve peu à peu toute sa place dans le concert des nations européennes. Ces dernières années, sa crédibilité s’est quelque peu émoussée, les responsabilités étant à cet égard largement partagées, monsieur le sénateur…

M. le président. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre, la politique de sécurité et de défense commune implique notamment l’instauration d’une stratégie de coopération industrielle du plus haut niveau entre les entreprises de pointe du secteur de la défense. L’un des acteurs incontournables de ce dernier est le groupe EADS, qui réalise 56 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour 1 milliard d’euros de résultat net et dont le carnet de commandes représente une dizaine d’années de production. Sous couvert d’une restructuration de ses activités spatiales et de défense, EADS a annoncé un plan qui prévoit la suppression de 5 800 postes en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et en Espagne et risque d’avoir des conséquences désastreuses pour la sous-traitance, dont les entreprises sont moins médiatisées qu’Airbus.

L’État français, détenteur de 12 % du capital du groupe, pourvoyeur d’aides en tout genre et client majeur des entreprises concernées, a les moyens d’intervenir pour infléchir les choix stratégiques de cette industrie structurante pour les peuples européens et essentielle pour leur souveraineté et leur sécurité.

Monsieur le ministre, on ne peut appeler à un renforcement de la coopération, de la mutualisation pour structurer la défense européenne, affirmer une vision de long terme et, parallèlement, assister sans rien faire à cette catastrophe industrielle. Quelle sera donc l’action du Gouvernement en la matière ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. Monsieur le sénateur, mon collègue Arnaud Montebourg et le Premier ministre lui-même se sont saisis de ce dossier.

Cet après-midi même, le Premier ministre a indiqué à la représentation parlementaire que tout serait mis en œuvre par l’État pour qu’il n’y ait pas de suppressions d’emplois dans ce grand groupe, fleuron de l’économie européenne. Nous verrons quelles décisions seront prises à cet égard dans les semaines à venir.

J’ai indiqué tout à l’heure que nous étions favorables à une exemption de TVA pour les investissements, afin de soutenir la recherche et le développement dans le secteur de la défense. Cela peut aider les entreprises à concevoir et à mettre sur le marché de nouveaux matériels.

Par ailleurs, la France n’est pas défavorable à ce que les investissements en matière de défense, dès lors qu’ils présentent un intérêt européen, puissent être exclus du calcul des déficits publics. Ce serait là une autre forme de soutien à une activité essentielle pour l’économie française.

Quoi qu’il en soit, je transmettrai votre question à Arnaud Montebourg, qui ne manquera pas de lui apporter la réponse qu’elle mérite.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Nous en avons terminé avec le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 19 et 20 décembre 2013.

12

Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Jean-Pierre Sueur, René Vandierendonck, Gérard Collomb, Christian Favier, Jean-Jacques Hyest, François-Noël Buffet et Michel Mercier ;

Suppléants : MM. Pierre-Yves Collombat, Yves Détraigne, Claude Dilain, Jean-Jacques Filleul et Patrice Gélard, Mmes Hélène Lipietz et Catherine Troendle.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

13

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 12 décembre 2013 :

De neuf heures vingt à treize heures :

1. Proposition de loi visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement prévue à l’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale et des familles sur les places de stationnement adaptées lorsque l’accès est limité dans le temps (n° 8, 2013-2014) ;

Rapport de M. Ronan Kerdraon, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 191, 2013-2014) ;

Texte de la commission (n° 192, 2013-2014).

À quinze heures :

2. Questions d’actualité au Gouvernement.

De seize heures quinze à vingt heures quinze :

3. Proposition de loi visant à renforcer les sanctions prévues dans le cadre de la mise en œuvre de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et l’habitat des gens du voyage (n° 818, 2012-2013) ;

Rapport de M. Jean Yves Leconte, fait au nom de la commission des lois (n° 197, 2013-2014) ;

Texte de la commission (n° 198, 2013-2014) ;

Avis de M. Claude Dilain, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 193, 2013-2014).

4. Proposition de loi tendant à autoriser le vote par Internet pour les Français établis hors de France pour l’élection des représentants au Parlement européen (n° 48, 2013-2014) ;

Rapport de M. Antoine Lefèvre, fait au nom de la commission des lois (n° 203, 2013-2014) ;

Résultat des travaux de la commission (n° 204, 2013-2014).

À vingt-deux heures quinze :

5. Projet de loi de finances rectificative, adopté par l’Assemblée nationale, pour 2013 (n° 215, 2013-2014) ;

Rapport de M. François Marc, fait au nom de la commission des finances (n° 217, tomes I et II, 2013-2014).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 12 décembre 2013, à zéro heure vingt.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART