M. Yvon Collin. Très bien !

M. Jean-Claude Requier. C’est d’ailleurs ce que préconise l’Observatoire interministériel de l’accessibilité en contrepartie de la possibilité pour les personnes à mobilité réduite de stationner gratuitement sur tout emplacement.

Pour lutter contre ces usages abusifs, le modèle de la rigueur viendra peut-être de la Corse ! (Exclamations amusées.) L’association Stella Zitellina, en partenariat avec l’Association des paralysés de France, a eu une idée assez intéressante : elle propose notamment que la liste des détenteurs de carte de stationnement soit communiquée aux gendarmeries et commissariats de police des principales villes de Corse, afin que les forces de l’ordre puissent la croiser avec le fichier des immatriculations de véhicule.

L’objectif de la proposition de loi présentée par le groupe socialiste est légitime, et nous ne le contestons pas. On peut toutefois regretter que celle-ci soit débattue alors que le Premier ministre a annoncé en septembre dernier la mise en place d’une large concertation sur le thème de l’accessibilité, dont la présidence a été confiée à notre collègue Claire-Lise Campion. Ses conclusions devraient justement permettre de compléter et d’améliorer les dispositifs législatifs et réglementaires existants, de faciliter la mise en accessibilité des établissements recevant du public, de la voirie et des transports publics.

Nous aurions pu mener une réflexion de grande ampleur, aborder cette question dans le cadre d’une politique globale, transversale et cohérente. La question de l’accessibilité, facteur déterminant de l’amélioration de la qualité de vie des personnes handicapées, est au cœur de notre pacte républicain et doit le rester.

Au-delà de ces considérations, le groupe du RDSE votera en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste. – Mme Muguette Dini applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a fait, depuis sa promulgation, l’objet d’observations, de bilans et de rapports visant à évaluer et à contrôler son application.

L’auteur du texte que nous examinons, Didier Guillaume, a sans nul doute suivi ces travaux, en particulier ceux de nos collègues Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, qui ont rédigé un rapport sénatorial sur l’application de cette loi, en date de juillet 2012. Elles y rappellent les quatre piliers sur lesquels repose l’égalité des droits et des chances : une définition du handicap qui intègre toutes les formes de déficience ; l’instauration d’un droit à la compensation des conséquences du handicap ; la mise en place d’une nouvelle gouvernance associant plus étroitement les personnes handicapées et leurs représentants ; l’accès des personnes handicapées à tous les droits fondamentaux reconnus aux citoyens, avec la question primordiale de l’accessibilité. C’est cet aspect qui nous réunit aujourd’hui.

Les conclusions de ce rapport sont sans appel : une nouvelle dynamique en faveur de l’accessibilité se doit d’être enclenchée. En parallèle des négociations que mène actuellement Claire-Lise Campion, la proposition de loi de Didier Guillaume participe de cette nouvelle impulsion, certes modestement, mais concrètement.

L’accessibilité est la condition sine qua non de l’égalité et, à ce titre, une priorité du Gouvernement, qui doit appeler une mobilisation collective inédite. Le concept d’« accessibilité universelle » veut garantir l’accès de tout à tous, et cela commence par pouvoir se garer facilement pour ceux qui possèdent une voiture qu’ils peuvent conduire ou faire conduire par leur accompagnant. Le fait d’aller à son travail, au cinéma, au restaurant, voir une exposition, de se rendre à la mairie, à la pharmacie ou au supermarché doit être suffisamment simple pour qu’on n’y renonce pas en anticipant les contraintes qui peuvent être liées au stationnement.

La vie quotidienne est compliquée pour les personnes en situation de handicap. C’est pourquoi nous entendons la simplifier en supprimant les déplacements nécessaires au paiement de la redevance de stationnement. En ce sens, l’accès gratuit au stationnement doit être considéré comme une étape vers plus d’autonomie et s’inscrit bien dans la démarche volontariste du Gouvernement pour une nouvelle dynamique de la politique du handicap.

Le 25 septembre 2013, le comité interministériel du handicap, installé par décret en 2009 mais qui ne s’était jamais réuni depuis lors, a instauré un pilotage interministériel au plus haut niveau de l’État à travers la mobilisation de l’ensemble des membres du Gouvernement. L’objectif commun est de développer une société plus inclusive, une citoyenneté effective pour les personnes porteuses de handicap. La volonté est commune de lutter contre toutes les formes de discrimination et de faire advenir une égalité réelle et concrète. Ce sont les orientations voulues par le Gouvernement pour que chaque politique ministérielle prenne en compte l’enjeu du handicap, que ce soit en matière de logement, d’éducation nationale, de santé ou dans tout autre domaine.

L’une des mesures préconisées est de réévaluer les critères d’attribution des cartes de stationnement, qui sont aujourd’hui délivrées par le préfet pour une durée déterminée d’un an minimum ou à titre définitif, après instruction de la demande par le médecin de l’équipe pluridisciplinaire de la maison départementale des personnes handicapées. Ces cartes permettent aujourd’hui à leurs titulaires ou à leurs accompagnants d’utiliser les places aménagées selon une politique de stationnement qui relève de la compétence des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI. Le quota de 2 % de places réservées aux titulaires de la carte de stationnement, qu’elles soient sur les voies ouvertes à la circulation publique ou dans les parcs de stationnement recevant du public, est d’ailleurs presque atteint au niveau national.

C’est également aux communes ou aux EPCI de mettre en place la politique tarifaire du stationnement. Le principe de libre administration des collectivités locales s’appliquant, ils ont autorité pour moduler le tarif en fonction de la durée de stationnement, pour définir des tranches horaires gratuites et pour accorder des tarifications spéciales pour certaines catégories d’usagers. Ainsi, certaines villes ont d’ores et déjà instauré, par une politique volontariste et citoyenne, la gratuité du stationnement sur les emplacements réservés aux personnes en situation de handicap. Citons, par exemple, Paris, Lille, Lyon, Bordeaux, Dijon, Saint-Étienne – depuis 1988 ! –, Cherbourg, Nice, Clermont-Ferrand, Lens, Perpignan,… Plusieurs de ces villes, Paris et Saint-Étienne notamment, ont même étendu la gratuité à l’ensemble des places de stationnement sur la voirie. En outre, il existe des villes qui, bien que maintenant officiellement le paiement de la redevance pour les titulaires de la carte de stationnement, ont donné des consignes de « tolérance » pour les dépassements horaires, par exemple Metz, Nîmes ou Uzès.

Ce texte s’inscrit dans cette tendance de fond et propose de généraliser l’accès gratuit à l’ensemble des places de stationnement, afin de ne pas soumettre les personnes en situation de handicap aux mêmes contraintes de déplacements que les autres automobilistes. Pour que cette disposition n’ait pas une incidence trop importante sur les finances publiques, impact extrêmement difficile à chiffrer comme l’ont expliqué le rapporteur et la ministre, les pratiques abusives devront cependant être anticipées. C’est pourquoi nous proposons de fixer une durée maximale de stationnement qui ne pourra cependant pas être inférieure à douze heures. Dans le cas des parkings gérés dans le cadre d’une délégation de service public, il est préconisé de n’appliquer ce principe de gratuité qu’à compter du renouvellement des contrats afin d’éviter tous risques de contentieux juridiques liés à la jurisprudence sur les avenants.

Cette proposition de loi, comme je le disais au début de mon propos, n’a évidemment pas la prétention de résoudre l’ensemble des difficultés liées à la carte de stationnement. Claire-Lise Campion travaille toujours activement sur le dossier de l’accessibilité, et les consultations qu’elle mène à ce propos devraient notamment lui permettre d’aborder la question sensible du quota de places réservées. C’est pour ne pas interférer dans ces négociations que cette question n’a pas été directement abordée dans le texte. Il nous semble que c’est une sage décision.

Parallèlement, la réflexion menée dans le cadre de la modernisation de l’action publique devrait aboutir à sécuriser l’utilisation de la carte de stationnement. En effet, 1 500 000 cartes sont actuellement en circulation, et, la demande étant toujours croissante – on observe une augmentation de 11 % par an ces dernières années –, certaines pratiques frauduleuses ont pu être relevées par les maisons départementales des personnes handicapées.

Au-delà de la question du stationnement, l’accessibilité apparaît comme un domaine que le nombre de règles techniques induites et la multiplicité des acteurs qui interviennent rendent complexe. Mais c’est aussi un secteur de développement et potentiellement porteur d’emplois nouveaux.

Si les délais fixés par la loi de 2005 ne sont pas respectés, le projet doit se poursuivre par d’autres moyens. Parmi ceux-ci, les agendas d’accessibilité programmée, que j’évoquais il y a un instant, « vont permettre d’affirmer un engagement et de partager des objectifs clairs, programmés et financés », comme l’explique Claire-Lise Campion dans la conclusion de son rapport Réussir 2015.

Aujourd’hui, nous sommes là, avec cette proposition de loi, au début de la mise en œuvre d’une solidarité ambitieuse qui nécessite la mobilisation de tous. Il me semble que nous pouvons tous souscrire à une disposition très concrète pour poursuivre, avec nos concitoyens ayant une mobilité réduite, le chemin vers l’accessibilité universelle. Je remercie donc Didier Guillaume de son initiative, et je vous encourage, chers collègues, à adopter le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Le Sénat nous bouscule. (Sourires.) Puisque vous nous invitez à débattre des places de stationnement, mesdames, messieurs les sénateurs, il me semble nécessaire de vous faire part du travail que nous effectuons concernant les cartes de stationnement, dont le nombre est estimé à 1,5 million, pour 38 millions de permis de conduire. Sachez que nous entreprenons de les simplifier, de les moderniser, de les dématérialiser dans le cadre de la modernisation de l’action publique.

La dématérialisation apporterait beaucoup plus de fluidité. Qui délivre ces cartes ? Ce sont les MDPH. Qui les édite ? Là, la réponse n’est pas claire. C’est pourquoi nous devons poser les choses sur la table.

Nous avons également besoin d’une simplification. La validité d’une carte est au minimum d’un an. En moyenne, la délivrance vaut pour cinq ans, voire même pour toute la vie pour certaines personnes. Or il nous faut faire en sorte que le rythme de renouvellement de la carte de stationnement ne soit pas trop contraignant pour les personnes en situation de handicap.

Enfin, comme vous l’avez mentionné, monsieur Desessard, nous devons améliorer les contrôles et mieux mesurer l’ampleur de la fraude. Je précise d’ailleurs que la police a reçu pour instruction de verbaliser plus systématiquement les personnes qui manquent de citoyenneté en se garant sur ces emplacements réservés. D’après les chiffres – je ne dispose au moment où je vous parle que de ceux de 2012 –, 174 826 contraventions concernant l’occupation illégale des places de stationnement ont été dressées, soit 14 % de plus que l’année précédente. Cela marque une véritable volonté de sanctionner ces comportements.

Cela étant, le travail concernant les cartes de stationnement étant en cours, je ne serai pas en mesure de vous présenter le dispositif avant six mois.

Je tiens à préciser que la proposition de loi ne vient pas doublonner le travail de Claire-Lise Campion. Au contraire, elle le complète, voire l’anticipe. Je peux d’ailleurs vous dire qu’elle aura besoin de tout notre soutien, car simplifier les procédures, concilier des intérêts différents, répondre aux attentes des collectivités territoriales – qu’il ne faut pas étouffer – est extrêmement compliqué.

Sans revenir sur une grande loi de la République, nous devons faire en sorte que toute la société soutienne l’objectif d’accessibilité et éviter que cette question ne devienne une source de conflit. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement
Article additionnel après l'article 1er

Article 1er

I. – L’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° La première phrase du troisième alinéa est remplacée par une phrase ainsi rédigée :

« La carte de stationnement pour personnes handicapées permet à son titulaire ou à la tierce personne l’accompagnant d’utiliser, à titre gratuit et sans limitation de la durée du stationnement, toutes les places de stationnement ouvertes au public. » ;

2° Après la première phrase du troisième alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, les autorités compétentes en matière de circulation et de stationnement peuvent fixer une durée maximale de stationnement qui ne peut être inférieure à douze heures. »

II (nouveau). – Le I entre en vigueur deux mois après la date de promulgation de la loi n° … du … visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement et, pour les conventions de délégation de service public relatives à la gestion des parcs de stationnement affectés à un usage public en cours à cette date d’entrée en vigueur, à compter de leur renouvellement.

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

mentionnées à l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ainsi que celles, intérieures ou extérieures d’un établissement mentionné à l’article R. 123-2 du code de la construction et de l’habitation

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Lors de la discussion générale, j’ai eu l’occasion d’indiquer que notre groupe soutenait la proposition de loi. Pour autant, elle ne doit pas se traduire dans les faits par un relâchement des maires en matière d’accessibilité, de création de places adaptées et de contrôle quant à l’utilisation frauduleuse de ces places.

Lors de l’examen de la proposition de loi en commission, certains de nos collègues sont intervenus pour exprimer leurs inquiétudes sur le fait que celle-ci pouvait ne pas concerner les stationnements privés des établissements recevant du public, qui sont des voies privées ouvertes à la circulation du public. Or, nous le savons, de nombreux établissements publics, qui sont soumis aux règles en vigueur en matière de création de places réservées pour les personnes en situation de handicap, ont rendu payant l’accès à leur parc de stationnement.

Afin de s’assurer que ces places sont visées par la proposition de loi et que les personnes en situation de handicap peuvent bénéficier de la gratuité de la même manière que si elles stationnaient dans des parcs de stationnement attenant à la voirie ou faisant l’objet d’une délégation de service public, nous proposons cet amendement de précision et de clarification. Nous savons que la jurisprudence prévoit déjà une telle mesure, mais il serait préférable de l’inscrire dans la loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Je comprends l’optique dans laquelle nos collègues du groupe CRC ont déposé cet amendement, d’autant qu’il fait référence à une discussion que nous avons eue en commission des affaires sociales, sur l’initiative de Jean-Pierre Godefroy, qui avait évoqué les parkings des hôpitaux et des gares SNCF.

Cependant, depuis lors, nous avons effectué une longue recherche, un vrai travail de fourmi. Il en est ressorti que cet amendement, qui vise à inclure dans le champ de la proposition de loi les parcs de stationnement desservant des établissements recevant du public, des ERP, est déjà satisfait. En effet, selon la jurisprudence, notamment l’arrêt de la Cour de cassation du 8 décembre 1982 – c’était au siècle dernier, je vous l’accorde, cher Didier Guillaume –, les voies et les parkings desservant les ERP font partie des lieux de stationnement ouverts au public pour lesquels les autorités compétentes peuvent réserver et aménager des emplacements destinés aux personnes titulaires de la carte de stationnement. Par conséquent, ces voies et parkings sont bien concernés par l’application du principe de gratuité et de non-limitation de la durée du stationnement.

La commission demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Je partage l’avis du rapporteur : votre amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur et la jurisprudence, madame Pasquet.

La proposition de loi vise les « places de stationnement ouvertes au public ». Cette formulation est très proche de celle figurant dans le code de l’action sociale et des familles, qui évoque les « lieux de stationnement ouverts au public », et la jurisprudence confirme cette règle.

M. le président. Madame Pasquet, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?

Mme Isabelle Pasquet. Oui, monsieur le président. Il est préférable d’inscrire cette précision dans la loi. Cela permettrait d’éviter les recherches que vient d’effectuer le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mmes Deroche, Boog, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, MM. Dériot, Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Milon et Pinton, Mme Procaccia et MM. de Raincourt, Savary et Bas, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette gratuité ne s’applique pas aux parcs de stationnement équipés de distributeurs et de bornes de péage situés aux sorties accessibles aux personnes handicapées.

La parole est à Mme Catherine Deroche.

Mme Catherine Deroche. Je serai brève, car j’ai déjà abordé cette question lors de la discussion générale.

Nous souhaitons que la gratuité ne s’applique pas aux parcs de stationnement équipés de distributeurs et de bornes de péage situés aux sorties accessibles aux personnes handicapées.

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié bis, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elles peuvent également prévoir que, pour les parcs de stationnement disposant de bornes d'entrée et de sortie accessibles par les personnes handicapées de leur véhicule, les titulaires de cette carte soient soumis au paiement de la redevance de stationnement en vigueur. »

La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. J’ai moi aussi abordé cette question lors de la discussion générale. Il me semble tout à fait normal – j’y insiste – que le stationnement soit gratuit pour les personnes handicapées sur toutes les parties de la voie publique dépendant directement des communes et dotées d’une borne extérieure qui nécessite que le conducteur sorte de son véhicule. Il convient en effet de simplifier la vie des personnes handicapées.

En revanche, il me semble totalement inutile d’imposer la gratuité du stationnement des personnes handicapées dans les parkings disposant de bornes d’entrée et de sortie accessibles du véhicule, que ces parkings soient privés ou gérés dans le cadre d’une délégation de service public. Il appartient aux autorités compétentes de passer des contrats avec les délégataires. N’imposons pas une gratuité qui impliquerait des installations supplémentaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Ronan Kerdraon, rapporteur. L’amendement n° 6 rectifié bis vise à introduire une exception – déjà ! – au principe nouveau posé à l’alinéa 3 de l’article 1er.

L’amendement n° 5 rectifié bis me semble en revanche mieux formulé. Il constitue en outre un excellent compromis puisqu’il laisse aux maires la possibilité de soumettre ou non les titulaires de la carte de stationnement au paiement de la redevance en vigueur.

Nous invitons Catherine Deroche à retirer son amendement au profit de celui de Muguette Dini, qui procède du même esprit tout en respectant le principe de libre administration des collectivités territoriales, ce qui est important pour nous.

J’indique par ailleurs que la commission demande la priorité de mise aux voix de l'amendement n° 5 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Je ne peux être favorable à l’amendement de Catherine Deroche, dans la mesure où il ne donne pas le choix aux maires.

Je comprends l’objet de l’amendement de Muguette Dini. J’appelle cependant votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur la difficulté de rendre accessibles les bornes d’entrée et de sortie des parcs de stationnement, qui sont souvent plus grandes que les parcmètres en général. Je sais que le maire peut choisir d’exclure un parking de la gratuité s’il le juge nécessaire, mais il faut définir des critères lui permettant de décider. C'est pourquoi je m’en remets à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 5 rectifié bis.

M. le président. M. le rapporteur a demandé, au nom de la commission, la priorité de mise aux voix de l’amendement n° 5 rectifié bis.

Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Favorable.

M. le président. La priorité est de droit.

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l'amendement n° 5 rectifié bis.

M. René-Paul Savary. L’amendement de Catherine Deroche soulève une vraie question ; c'est la raison pour laquelle je l’ai soutenu. Cette proposition de loi très simple, qui part d’un bon sentiment – il ne pouvait en être autrement, puisque son auteur est Didier Guillaume –, pose en effet un certain nombre de problèmes. C'est pourquoi j’ai émis des réserves lors de nos débats en commission.

Ici, la question du libre exercice des compétences communales est soulevée. C’est le principe de libre administration des collectivités territoriales qui est en jeu. Or certaines villes ont élaboré des plans exemplaires en matière de stationnement des personnes en situation de handicap ; je pense par exemple à Châlons-en-Champagne, dans mon département de la Marne, qui fait des efforts significatifs depuis des années pour améliorer l’accessibilité. Laissons aux maires leur liberté ! C’est à eux de mettre sur pied une politique de stationnement pour les personnes handicapées.

La proposition de loi nous amène à revoir la loi de 2005, mais par le petit bout de la lorgnette. S’agit-il de concevoir la gratuité du stationnement des personnes handicapées comme un droit connexe aux prestations qui leur sont délivrées au titre de la compensation de leur handicap ? Il existe un vrai problème d’accessibilité des bornes et horodateurs des parkings payants. Il faut donc mettre en place une politique incitative pour que ces bornes et horodateurs soient accessibles. Mais de quel handicap parle-t-on ? Il n’y a pas que le handicap moteur, il y en a d’autres, comme le handicap sensoriel. Tous ces éléments doivent s’intégrer dans une véritable politique d’accessibilité, dont la définition pourrait s’appuyer sur le rapport de Claire-Lise Campion, qui est le fruit de l’expérience de la loi de 2005.

On ne peut pas aborder touche par touche ces problèmes d’accessibilité, d’autant qu’il faut également prendre en compte les problèmes de revenu des personnes handicapées. La gratuité ne vise pas à compenser le handicap ; cette mesure a une connotation sociale. Les deux aspects sont complémentaires. Madame la ministre, nous avons déjà eu une discussion similaire à propos du revenu de solidarité active, du RSA, de l’allocation de rentrée scolaire, l’ARS, ou encore de la prime pour l’emploi, la PPE. L’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, est une allocation visant à garantir un revenu minimum aux personnes en situation de handicap. Il faudra examiner cette question dans le cadre global de l’aide aux personnes en difficulté, afin d’harmoniser l’ensemble de ces dispositifs. On voit bien que les choses doivent évoluer.

Quand on ajoute une touche particulière à une politique, on la modifie complètement. La gratuité du stationnement pour les personnes handicapées a certes des vertus incitatives, mais ne risque-t-elle pas d’avoir également des effets contre-productifs sur les politiques communales d’adaptation des transports collectifs ? En effet, la gratuité favorise le recours à la voiture au moment même où de nombreuses communes modernisent leurs transports collectifs. Il faut mener une politique globale à l’échelon communal ou intercommunal – l’échelon communal me semble le bon niveau, car cette politique relève des prérogatives des maires – pour trouver un juste milieu adapté à la ville et à sa population. Certaines villes comptent davantage de personnes handicapées parce qu’elles accueillent un institut médico-éducatif ou tout autre équipement destiné aux personnes handicapées.

Je le répète, il faut respecter la liberté d’action de nos maires. C'est la raison pour laquelle nous sommes réservés au sujet de cette proposition de loi, même si elle part incontestablement d’un bon sentiment. À travers l’amendement de Catherine Deroche, nous voulions donc montrer que le texte pose un certain nombre de problèmes.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, pour explication de vote.

Mme Muguette Dini. Madame la ministre, j’avoue que je n’ai pas compris votre remarque au sujet des bornes d’entrée et de sortie des parkings. Quand on entre dans un parking, on baisse sa vitre et on prend le ticket. Toutes les voitures ayant à peu près la même hauteur de portière, je ne vois pas quel problème pourraient rencontrer les personnes handicapées. Si on conduit, c’est probablement qu’on a l’usage de ses deux bras. Par conséquent, on peut tout à fait tendre le bras pour attraper un ticket.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.

M. Didier Guillaume. Il est regrettable que les deux amendements n’aient pas pu être réunis en un seul. Pour ma part, je suis très favorable à celui de Mme Deroche. Initialement, j’avais même l’intention d’inscrire un tel dispositif dans ma proposition de loi. Cependant, on m’a expliqué que ce n’était pas possible et qu’une mesure comme celle présentée par Mme Dini, que j’aurais également pu intégrer dans ma proposition de loi, était bien meilleure.

Notre collègue Savary vient en fait de démontrer pourquoi il faut voter l’amendement de Mme Dini et non celui de Mme Deroche : il faut respecter la liberté d’action des maires.