compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

Secrétaires :

Mme Odette Herviaux,

Mme Marie-Noëlle Lienemann.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

transfert des ouvrages d'art vers les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, auteur de la question n° 588, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de nombreuses communes ont vu leur développement économique et démographique s’engager avec la création d’infrastructures routières et ferroviaires. Cette politique des grands travaux, mise en œuvre après la Seconde Guerre mondiale, avait pour finalité de désenclaver les territoires. Des routes, des ponts, des tunnels – ce que l’on désigne globalement sous le nom « ouvrages d’art » – ont alors été construits.

L’État a longtemps assumé l’entretien de ces ouvrages, tels les ponts qui surplombent des voies rapides, au regard de l’expertise nécessaire et du coût des travaux. Aujourd’hui, l’émergence de la problématique en cause est liée à un double mouvement : d’une part, le transfert de la gestion des routes nationales aux collectivités territoriales, en particulier aux départements et, de l’autre, l’évolution des statuts de la SNCF ou de Voies navigables de France, dont le fonctionnement s’apparente de plus en plus à celui de sociétés privées.

Faute de règles juridiques précises et incontestables, les principes régissant cette question ont été définis via une jurisprudence ancienne et constante du Conseil d’État, selon laquelle les ouvrages d’art de rétablissement de voies interrompues par la construction d’une nouvelle infrastructure de transports sont incorporés à l’infrastructure dont ils relient les deux parties. Ce principe est valable alors même que l’ouvrage d’art a été construit par une autre personne morale que celle qui assure l’entretien de la voie portée.

De nombreuses collectivités territoriales ignorent les obligations qui leur incombent : or la collectivité est responsable de la surveillance, de l’entretien, de la rénovation et du renouvellement éventuel de l’ouvrage d’art !

Plusieurs communes et départements ont récemment reçu une information officielle leur détaillant leurs obligations d’entretien et de mise aux normes de ces ouvrages. À cet égard, une polémique a éclaté l’été dernier. Dans mon département, les communes de Saint-Ivy et de Rédéné m’ont alerté sur ce sujet.

Madame la ministre, il faut le rappeler, les projets de réalisation d’une infrastructure de transports coupant une voirie déjà existante comme les projets de rétablissement, sont, la plupart du temps, imposés par l’État à la collectivité territoriale. Celle-ci ne dispose d’aucun pouvoir de décision mais elle doit en payer la facture !

Le Sénat s’est penché sur cette grave question. Au mois de mars 2012, il a adopté une proposition de loi, présentée par notre collègue Mme Evelyne Didier, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies. Ce texte était destiné à définir un cadre protecteur pour les collectivités territoriales. Il bénéficiait du soutien de l’Association des maires de France et de l’Association des départements de France. Las, l’Assemblée nationale ne s’est pas saisie à son tour de cette question essentielle.

Pourtant, le poids financier qui résulte de l’application des principes jurisprudentiels en la matière est si important que les collectivités ne peuvent faire face de manière satisfaisante à leurs obligations, même si elles s’exposent à voir leur responsabilité pénale engagée.

Faute de moyens financiers mobilisables, certaines collectivités sont contraintes de réduire le service rendu par leur voie, voire d’en interdire l’utilisation pour des raisons de sécurité. À ce titre, le Gouvernement a-t-il prévu un dispositif particulier permettant d’accompagner les plus petites collectivités territoriales dans cette nouvelle gestion, qu’il est difficile de laisser à leur seule charge ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie avant tout d’excuser l’absence de Frédéric Cuvillier, qui est actuellement à Bruxelles, dans le cadre du conseil des ministres européens de la pêche.

Comme mon collègue vous l’a indiqué en réponse à la question écrite que vous avez consacrée à ce sujet, « en matière d’ouvrages de franchissement, la solution dégagée par la jurisprudence, de portée constante, impose au propriétaire de la voie portée d’entretenir l’ouvrage, sauf convention contraire. Ce principe s’applique à toutes les catégories d’infrastructures de transport – routes, chemins de fer, canaux – quel que soit le schéma de superposition entre deux voies et quels que soient les maîtres d’ouvrage de l’infrastructure nouvelle : l’État et ses concessionnaires, les établissements publics et leurs concessionnaires, ou les collectivités territoriales. »

C’est dans ce cadre que la direction interdépartementale des routes de l’Ouest a sollicité par courrier les communes et départements pour lesquels elle assure encore aujourd’hui la surveillance et l’entretien de certains ouvrages supportant les voies de ces territoires. Il s’agit de la mise en application des dispositions législatives actuelles.

À la suite de ce courrier, les élus des communes de Rédéné et de Saint-Yvi, dans le Finistère, qui comptent chacune moins de 3 000 habitants, ont interpellé le ministre des transports. À Rédéné, les ponts de Sainte-Marguerite et Kerdudal permettent le franchissement de la nationale 165 et des voies ferrées, avec des ouvrages longs de soixante-dix mètres. Il en va de même pour la commune de Saint-Yvi, où trois ouvrages permettent de franchir cette même route.

Par ailleurs, au mois de mars 2012, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières relatives aux ouvrages d’art de rétablissement de voies.

Sensible aux difficultés des petites communes, Frédéric Cuvillier a demandé à ses services d’examiner les évolutions législatives et réglementaires envisageables, sur la base de cette proposition de loi et dans le respect du principe jurisprudentiel exigeant que la propriété de l’ouvrage revienne au propriétaire de la voie qu’il porte.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Merci, madame la ministre, de votre réponse. Je le sais, M. Cuvillier est pleinement conscient que les petites collectivités doivent tout d’un coup supporter une charge financière qu’elles n’avaient absolument pas anticipée, et qui est très lourde ! De fait, les ouvrages d’art mobilisent nombre d’experts et d’entreprises spécialisées, et le coût de chaque opération se révèle faramineux.

Je le répète, ces communes n’ont la capacité ni de conduire les travaux ni d’en assurer le financement. C’est pourquoi il importe qu’une nouvelle législation émerge prochainement, afin de les sécuriser et de répartir la charge entre les collectivités et l’État. Enfin, ce dernier doit éventuellement être en mesure d’assurer l’assistance technique. En effet, l’assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, qui ressort de l’échelon départemental, ne joue plus son rôle d’accompagnement des petites communes. Cela étant, celles-ci doivent être soulagées de cette charge, qui, je le répète, est très lourde !

contraintes qui pèsent sur les zones de captage d'eau

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 521, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Hervé Maurey. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les contraintes pesant sur les zones de captage d’eau et les difficultés qui en résultent pour les communes concernées.

L’alimentation de nos concitoyens en eau potable est assurée par plus de 30 000 points de captage d’eau. Depuis la loi sur l’eau de 1992, ces points de captage d’eau potable doivent faire l’objet de plusieurs périmètres de protection – immédiate, rapprochée et éloignée – assortis de restrictions importantes, afin d’éviter les pollutions.

Si la loi garantit l’indemnisation des propriétaires de terrains privés en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, ou de l’exploitant des terrains, elle n’assure pas, en revanche, de compensation pour les communes affectées par l’existence des périmètres de protection. Pourtant, la délimitation de périmètres de captage engendre des contraintes importantes, notamment en matière d’urbanisme.

Cette absence de contrepartie est souvent jugée inéquitable par les communes qui subissent ces contraintes, quand les collectivités voisines bénéficient de ces captages sans aucune contrainte.

Conscient des difficultés, au mois de janvier 2011, le Sénat a consacré un débat à la question de l’indemnisation des communes au titre du périmètre de protection de l’eau. Au cours de ces discussions, le gouvernement de l’époque s’était engagé, par la voix de son ministre chargé de l’écologie, à réfléchir aux conditions de mise en œuvre d’une solidarité financière en concertation avec les différents ministères concernés.

Depuis, le Conseil général de l’environnement et du développement durable, ou CGEDD, a rendu public, au mois d’août 2012, un rapport qui conclut à l’urgence de ne rien faire ! Rappelant la règle de non-indemnisation des servitudes d’urbanisme et environnementales, il a jugé « superfétatoire de prévoir une quelconque réglementation nouvelle » en la matière.

Face à cette situation, des parlementaires ont pris des initiatives. Je songe, notamment, à la proposition de loi du mois de juillet dernier visant à permettre aux communes d’obtenir une compensation financière en contrepartie des servitudes créées par l’instauration de périmètres de protection de la ressource en eau. Ce texte permet aux communes affectées par les périmètres de protection de bénéficier de la surtaxe perçue dans les communes sur le territoire desquelles sont situées des sources d’eau minérale.

Madame la ministre, quel est l’avis du Gouvernement sur cette proposition de loi ?

Par ailleurs, ces périmètres et les servitudes qu’ils suscitent sont des sources perpétuelles de tracasseries pour les collectivités concernées et leurs habitants, principalement en matière d’autorisation d’urbanisme. Ainsi, plusieurs communes de mon département sont empêchées de mener leurs projets de construction, ou abritent des entreprises qui pourraient être contraintes de fermer.

Par conséquent, au-delà de la question de l’indemnisation, comment les services déconcentrés de l’État pourront accompagner de manière particulière les communes qui doivent faire face à la très grande complexité des normes liées à ces périmètres ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, permettez-moi d’excuser le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Retenu ce matin à la présidence de la République par une réunion consacrée à la conférence Climat 2015, il m’a priée de vous adresser la réponse suivante.

La qualité de l’eau est un bien commun de la nation, et la protection des sources d’eau potable est par conséquent un enjeu majeur pour le Gouvernement.

Vous l’avez rappelé avec raison, le Conseil général de l’environnement et du développement durable a été saisi du sujet de l’indemnisation des communes au titre des périmètres de protection de captages d’eau. Il a remis ses conclusions au mois d’août 2012.

Le CGEDD a rappelé les grands principes s’opposant à une indemnisation spécifique des communes lieux de prélèvement, au-delà des préjudices matériels, directs ou parfois subis. L’eau est un bien commun et n’appartient pas à une quelconque collectivité. Ainsi, le principe qui s’applique est la non-indemnisation des servitudes d’urbanisme.

Selon ce rapport, la réglementation en vigueur, la jurisprudence et le pragmatisme des acteurs de terrain permettent de résoudre de manière apparemment satisfaisante la plupart des problèmes constatés concrètement.

Par ailleurs, le CGEDD a relevé que les difficultés demeurant sont essentiellement dues à des problèmes relationnels entre les grandes agglomérations et certaines communes rurales périurbaines. Ces obstacles sont en grande partie liés au morcellement communal propre à la France.

En conclusion, le CGEDD suggère d’explorer en priorité la voie de l’amélioration de la collaboration et de la compréhension mutuelle entre les communes où ont lieu les prélèvements d’eau et celles qui en bénéficient. De telles solidarités existent d’ailleurs déjà, notamment dans le cadre des syndicats de l’eau. Dans de nombreuses agglomérations, le syndicat d’alimentation en eau voire la société responsable des transferts d’eau ont d’ores et déjà mis en œuvre des compensations sous des formes variées. Je citerai, à titre d’exemple, les accords conclus entre plusieurs collectivités se traduisant par un prix de l’eau plus avantageux pour la commune du lieu de prélèvement.

Globalement, le Gouvernement a bien pris conscience des difficultés de mise en œuvre des périmètres de protection – immédiate, rapprochée et éloignée – des captages d’eau potable. Ce sujet a du reste été évoqué à la table ronde sur l’eau organisée lors de la conférence environnementale de cette année. Dans le cadre de la feuille de route issue de ces discussions, une mission a précisément été confiée au CGEDD, afin d’étudier les pistes de rapprochement et d’harmonisation de ces différents types de périmètres.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, vous nous avez rappelé que l’eau était un bien commun, ce que je ne remets nullement en cause. Par ailleurs, vous avez souligné que cette ressource ne peut appartenir à une commune, quelle qu’elle soit. Sur ce point également, je suis bien sûr tout à fait d’accord avec vous !

Toutefois, si l’eau n’appartient pas à une commune en particulier, pourquoi les contraintes inhérentes à son captage reviendraient à cette dernière et à elle seule ? Sur ce point, je prends quelques distances avec vos propos et avec le rapport remis par le CGEDD, auquel vous vous référez. En particulier, il ne me semble pas que le problème se cantonne dans les relations entre les grandes agglomérations et les communes rurales.

Je le répète, je regrette la tonalité de ce rapport. Or vous en reprenez les conclusions pour dire, finalement : « Tout va très bien, madame la marquise, circulez, il n’y a rien à voir ! »

Vous l’avez indiqué vous-même, certains accords contractuels ont été conclus entre communes. À mon sens, ces pistes sont extrêmement intéressantes. Il faut se fonder sur de telles démarches, les étendre, voire les généraliser ! Alors que l’on parle beaucoup de solidarité et de péréquation entre les communes et entre les territoires, il est urgent d’intervenir : certaines communes subissent des contraintes colossales, notamment en matière d’urbanisme, parce qu’elles abritent un point de captage d’eau, sans bénéficier, pour l’heure, de la moindre compensation.

risques d'exploitation et d'exploration des gaz de schiste dans le département de l'essonne

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, auteur de la question n° 603, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le problème majeur des recherches de gaz et pétrole de schiste dans le département de l’Essonne.

Au mois de décembre 2011, une société canadienne, Vermilion Energy, spécialisée dans l’exploitation des gaz et pétrole de schiste par fracturation hydraulique, a obtenu des concessions de mines d’hydrocarbures situées sur les communes d’Itteville, de Vert-le-Grand, de Vert-le-Petit et du Plessis-Pâté.

Bien que l’entreprise se défende de vouloir procéder à une production de gaz et pétrole de schiste, divers aménagements ont été remarqués à l’intérieur des concessions. Ainsi, pendant le mois d’août, une très haute tour a été discrètement installée dans la concession d’Itteville.

Parce que cette tour ressemble à celles qui sont utilisées dans les recherches de pétrole de schiste, nombre d’observateurs ont craint un repérage. De surcroît, les préconisations du rapport de l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur ce sujet, dont les auteurs appellent à l’autorisation de forages expérimentaux, ont renforcé la méfiance, le terrain étant tout à fait approprié pour ce genre d’expérimentation.

Depuis lors, la contestation s’est progressivement mise en place. De nombreuses réunions publiques et manifestations ont été organisées et beaucoup d’élus ont marqué leur désapprobation au projet. Le 4 novembre dernier, le conseil général de l’Essonne a notamment adopté, à une très large majorité, toutes sensibilités politiques confondues, une motion visant à rappeler son opposition à l’exploitation et à l’exploration des gaz et pétrole de schiste par cette industrie pétrolière.

À ce titre, je tiens à évoquer la pugnacité du maire de Plessis-Pâté, mon ami Sylvain Tanguy, qui se bat avec courage pour préserver sa commune des nombreuses nuisances et pollutions liées à la fracturation hydraulique.

Fort heureusement, la décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre dernier a permis d’apaiser une partie des craintes des riverains. Les Sages ont en effet entériné la loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique, en la déclarant conforme à la Constitution. La position ferme du Président de la République et du Gouvernement se voit donc confirmée.

Madame la ministre, les Essonniens et Essonniennes demandent à être rassurés encore davantage, car ils tiennent ardemment à la protection de l’environnement dans leur département et au respect de leur bassin de vie.

C’est pour cette raison que je me permets de vous demander de réaffirmer la position du Gouvernement sur ce dossier, pour ce qui concerne tant l’échelon national que mon département de l’Essonne.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, qui m’a demandé de répondre à sa place.

Sur un plan général, votre intervention traduit bien la profonde crise de confiance qui opacifie aujourd’hui toutes les questions minières dans notre pays et sape les relations entre les industriels, l’État, les élus et l’ensemble de nos concitoyens.

Face à cette méfiance, une seule méthode peut être retenue : celle que le Gouvernement a mise en œuvre, lorsqu’il a repris en main l’examen des demandes de mutation de plusieurs permis de recherches en Île-de-France présentées par la société Hess Oil, à savoir la concertation, la transparence et le respect des expertises, y compris celle des citoyens.

Le Gouvernement a ainsi demandé à un conseiller d’État de formuler, dans la concertation, avec l’ensemble des parties prenantes, et en toute autonomie, des propositions de réforme du code minier.

Ces propositions lui ont été remises le 10 décembre dernier. Leur ambition est double : réconcilier économie et écologie et permettre une véritable participation des citoyens à l’élaboration des décisions minières ayant une incidence sur l’environnement, pour sortir de l’opacité et de la méfiance.

Pour le cas qui vous préoccupe, monsieur le sénateur, le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a souhaité faire une réponse précise. La société Vermilion REP est la filiale française d’un groupe canadien. Premier producteur français de pétrole, elle exploite des concessions, notamment en Aquitaine, où elle a son siège depuis plus de quinze ans. À ce titre, ses activités engendrent directement ou indirectement 600 emplois. En 2012, elle s’est acquittée de 65 millions d’euros d’impôts et de 10 millions d’euros de redevances locales sur ses activités minières.

Les concessions qu’elle exploite en Île-de-France, notamment celle d’Itteville dans l’Essonne, dont vous parliez à l’instant, sont anciennes et ont été délivrées à une époque où il n’était pas question de gaz de schiste. Ces exploitations ne concernent que du pétrole conventionnel.

La haute tour que vous évoquez est un rig permettant de forer des puits pour récupérer les hydrocarbures. Il est inconcevable qu’un exploitant minier puisse procéder en catimini à l’exploration, à l’exploitation ou à la recherche de gaz de schiste par fracturation hydraulique. Les équipements nécessaires sont lourds, typiques, notamment en raison de leurs besoins en eau, et aisément repérables par les services du ministère chargés de la police des mines.

Par ailleurs – ce sera mon dernier point –, le Conseil constitutionnel, lorsqu’il a, le 10 octobre dernier, validé sans réserve la loi du 13 juillet 2011, a précisé que l’interdiction de recourir à la fracturation était « générale et absolue ». Cela signifie que celle-ci s’applique à tous les travaux et à toutes les substances, aux demandes de permis mentionnant les gaz de schiste comme aux autorisations anciennes qui n’évoquent que des objectifs conventionnels.

Tous les préfets et les services déconcentrés du ministère ont reçu instruction, le 19 septembre 2012, d’inspecter régulièrement les ouvrages miniers, les opérateurs devant faire un rapport de leurs activités.

S’agissant de la concession d’Itteville, ces contrôles n’ont pas révélé d’utilisation de la fracturation hydraulique.

Tout comme vous, monsieur le sénateur, le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie reste vigilant concernant l’application de la loi du 13 juillet 2011. La position du Gouvernement, fixée par le Président de la République, est donc claire : il n’y aura ni exploration ni exploitation d’hydrocarbures de roche mère par fracturation hydraulique en France. (M. Jean-Vincent Placé applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Je vous remercie sincèrement, madame la ministre, de cette réponse complète et précise. Je tiens à saluer, sur ce sujet, la constance du Gouvernement, dont je ne doutais d’ailleurs pas. Il défend avec ténacité ses positions, malgré les nombreux obstacles placés sur sa route par les lobbyistes, invoquant des intérêts économiques singulièrement dans la presse.

Je tiens à saluer plus particulièrement le travail de Philippe Martin, qui, avec Pascal Canfin, se trouve en ce moment même à la présidence de la République pour évoquer la conférence Climat 2015.

Le message très clair que vous venez de transmettre avait déjà été diffusé le 28 novembre dernier : le Gouvernement avait en effet refusé de valider le transfert à la compagnie pétrolière Hess Oil de sept permis pétroliers situés en Seine-et-Marne et dans l’Aisne.

Votre réponse me satisfait totalement, madame la ministre. Dans la mesure où le procédé de fracturation hydraulique rend les choses irréversibles sur le plan environnemental, en particulier pour ce qui concerne les nappes phréatiques, votre positionnement me paraît particulièrement important pour notre environnement, nos espaces naturels et notre biodiversité.

inquiétudes des maires quant à l'avenir de leurs compétences territoriales en matière de droit des sols

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 455, adressée à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.

M. Martial Bourquin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2013 a été une année de réformes importantes, qui ont fait évoluer l’organisation territoriale de notre pays.

Le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, tout d’abord, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dit « projet de loi ALUR », ensuite, et la réforme de la politique de la ville, enfin, prévoient de renforcer le rôle des intercommunalités et des métropoles pour favoriser la construction, le logement et l’initiative économique. Ces réformes – je pense notamment au projet de loi ALUR – ont suscité parfois de très vives inquiétudes parmi les maires et nos concitoyens, lesquels, dans un contexte de crise économique, ont plus que jamais besoin de savoir qui fait quoi. Les maires, notamment les maires ruraux, ont ainsi très peur que la compétence relative au droit des sols ne soit, dans un futur proche, sous couvert d’économies de bouts de chandelle et d’efficacité supposée, transférée d’autorité à l’intercommunalité.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Martial Bourquin. Or, dans notre assemblée, chacun sait, quelles que soient les travées sur lesquelles il siège, qu’une ville ou un village ne disposant plus de cette compétence et de la capacité à la transférer ou non est une commune sans moyens d’agir.

M. Martial Bourquin. Dans cette enceinte, nous le savons également tous, pour être efficace, l’intercommunalité doit être choisie et non subie.

J’en parle d’autant plus librement que je suis maire d’une ville de 15 000 habitants qui aménage, construit et bâtit, y compris des logements sociaux.

J’en parle encore plus librement que cette commune a délégué à son intercommunalité des compétences en termes d’aménagements et de déplacements urbains et que ces transferts consentis sont une réussite.

François Lamy, ministre délégué chargé de la ville, à qui je faisais part mardi dernier en commission de ces inquiétudes, m’indiquait que la commune et l’intercommunalité devaient œuvrer ensemble, en complémentarité et non en subsidiarité. La complémentarité, c’est le respect et le volontariat.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Martial Bourquin. Madame la ministre, notre attachement à la commune n’est pas un réflexe passéiste. Nous pensons que celle-ci est le pilier de la République. L’éloignement des pouvoirs – je pense notamment au droit des sols – serait un coup dur porté à la démocratie de proximité. Nous estimons que la commune est moderne, et qu’elle est le socle incontournable de la République.

Pour l’ensemble du Gouvernement, le droit des sols continue-t-il à être une compétence propre aux communes ? Pouvez-vous nous assurer ici-même qu’il le restera ?