liaisons maritimes en direction des îles du Morbihan

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 863, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Michel Le Scouarnec. Je commencerai par citer un quatrain :

Ô cœur des îles

Sur fond de peine,

La joie est une soie

Sur fond de laine. 

Quant aux îliens du Morbihan et à leurs élus, leur peine est grande et se mue en une colère qu’ils ont exprimée avec force ces derniers jours !

S’il est habituel que le vent souffle sur ces îles, la nouvelle délégation de service public pour la desserte de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic intensifie les rafales. Afin de répondre à un rapport de la cour régionale des comptes, le conseil général et la compagnie Océane, filiale de Veolia Transport, actuelle titulaire de la délégation de service public, envisagent, entre autres mesures, de supprimer le « tarif morbihannais », d’augmenter les tarifs des résidents secondaires, de doubler le tarif camion pour le transport des marchandises et de diminuer de 7 % le nombre de rotations annuelles. Autrement dit, il s’agira de payer beaucoup plus pour moins de services !

Le conseil général ne se cache-t-il pas derrière les recommandations du rapport en question ? En effet, si la cour régionale des comptes informe les élus et émet un avis, son rapport n’oblige pas mécaniquement ces derniers à prendre des décisions. Certes, il pointe l’existence de tarifs illégaux, comme ceux dont bénéficient les parents d’insulaires ou ceux du fret pour les entreprises implantées sur les îles, mais il ne demande pas, par exemple, d’instaurer deux tarifs différenciés en hausse – un pour la semaine et un pour le week-end – pour les insulaires. Et que dire de l’augmentation du prix de l’aller-retour pour les enfants d’insulaires, qui passerait de 12,30 euros à 16 euros, soit une hausse de 30 % ? Je rappelle que la création de ces tarifs reposait sur le fait que, par leurs impôts, les Morbihannais – entreprises comme particuliers – participent au financement des investissements en matière de liaisons maritimes.

Les mesures envisagées inquiètent légitimement les insulaires et leurs élus. Elles semblent être le résultat d’une analyse purement technocratique et mathématique des liaisons vers les îles. Lors de la signature de la délégation de service public, en 2008, des doutes avaient d'ailleurs été émis sur la capacité de Veolia Transport à assurer la gestion commerciale et maritime des liaisons et leur marketing.

Devant ce constat, plusieurs choix peuvent être opérés, dont celui du développement des liaisons maritimes ou, à l’inverse, celui de leur réduction. Il semblerait que cette dernière option soit privilégiée, au détriment de l’insularité morbihannaise. Je le regrette vivement, tant ce projet est loin de répondre aux besoins des habitants et des commerçants des îles. Tous craignent la répercussion sur la vie économique et quotidienne des nouvelles dispositions, avec des horaires totalement inadaptés au commerce et au maintien de l’attractivité des îles. Les produits du quotidien, déjà chers, vont devenir inaccessibles, car la hausse du coût des traversées pour le fret se répercutera inévitablement sur le prix des marchandises. Continuer dans ce sens, c’est appauvrir encore plus ces îles, dont la fréquentation a baissé de 20 % en six ans.

Afin de garantir un égal accès au service public du transport que représentent les liaisons avec le continent, il est impératif de venir en aide aux collectivités locales confrontées au déficit de fonctionnement des navettes et d’assurer une offre de rotations qui soit acceptable pour tous. Monsieur le ministre, qu’allez-vous faire en ce sens ? Agir est d’autant plus urgent que, malheureusement, la crise frappe durement nos îles.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. Alain Vidalies, actuellement retenu par une réunion avec le Premier ministre. Je suis bien sûr l’actualité et j’ai entendu parler du problème que vous soulevez.

Le conseil général du Morbihan a effectivement décidé de réduire le nombre de rotations lors du renouvellement de la délégation de service public pour la desserte passagers des îles de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic à la fin de l’année 2014.

Le Gouvernement comprend la préoccupation des élus, des habitants et des commerçants de ces îles. Néanmoins, comme vous le savez, la desserte des îles est encadrée par les articles L. 5431-1 et suivants du code des transports, aux termes desquels les transports maritimes réguliers publics de personnes et de biens sont organisés par le département. Ainsi, l’organisation du transport maritime pour la desserte des îles de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic relève de la compétence exclusive du conseil général du Morbihan. Eu égard au principe de libre administration des collectivités territoriales, le Gouvernement ne me permettrait pas de répondre en lieu et place du conseil général, auquel je fais pleinement confiance pour répondre aux besoins du territoire.

Pour autant, sensibilisé sur ce sujet par le député Gwendal Rouillard la semaine dernière et par vous-même ce matin, le secrétaire d’État chargé des transports, Alain Vidalies, a fait en sorte que son cabinet reçoive cet après-midi, à leur demande, une délégation d’élus du Morbihan, afin d’échanger sur le dossier et, plus largement, sur l’avenir des délégations de service public maritime.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le ministre, je me doutais un peu que le conseil général était compétent en la matière…

Pour Belle-Île-en-Mer, le nombre de rotations quotidiennes assurées par la compagnie Océane devrait passer de sept à six, voire à cinq le week-end. Deux retours seulement seraient prévus assez tôt dans la journée. Cette configuration augure d’une nouvelle organisation des transports marquée par une baisse du nombre de rotations et complètement inadaptée.

Depuis des années, les élus des territoires concernés travaillent à un modèle économique viable, qui passe évidemment par le transport maritime. Si les annonces qui ont été faites se confirment, des îles seront en grande difficulté.

Il semble incroyable qu’une délégation de service public d’une durée de six ans soit votée sans la moindre concertation avec les premiers concernés, à savoir les habitants et leurs élus. Tous ont été mis devant le fait accompli et sont abasourdis. Je pense qu’il y a des progrès à faire sur le plan de la démocratie participative ou de la citoyenneté !

Devant l’augmentation du coût du transport maritime, il serait opportun d’envisager la mise en place d’un fonds exceptionnel de solidarité pour venir en aide aux collectivités locales confrontées au déficit de fonctionnement des liaisons entre les îles et le continent. Aujourd'hui, dans les îles, le coût de construction des logements, y compris les logements sociaux, est déjà supérieur de 30 % à la moyenne nationale, à cause du coût du transport. Nous sommes donc loin de l’égalité de tous les citoyens devant le service public. J’espère que l’on réussira à faire bouger les choses.

M. François Rebsamen, ministre. Je l’espère aussi, monsieur le sénateur.

algues des Sargasses

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, auteur de la question n° 864, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Maurice Antiste. Ma question porte sur le désastre environnemental, économique et sanitaire que subit la Martinique du fait de l’invasion durable d’algues jaunes en provenance de la mer des Sargasses.

La présence d’un tapis dense d’algues sur les côtes et dans toutes les baies du pays constitue en premier lieu une atteinte grave à l’environnement maritime et naturel, ainsi qu’aux ressources halieutiques et à la sauvegarde de la biodiversité.

De plus, elle engendre un important préjudice économique pour les professionnels du tourisme et de la mer –pêcheurs, aquaculteurs, etc. –, qui voient leurs outils de travail détériorés : difficultés à démarrer les moteurs, les algues obstruant les systèmes de refroidissement, ou encore dérèglement des sondeurs et des GPS. Quant aux aquaculteurs, ils sont nombreux à avoir perdu la totalité de leur production.

J’appelle également votre attention sur un effet inattendu du dégagement d’hydrogène sulfuré lors de la putréfaction des algues. Ce gaz attaque les circuits électroniques d’appareils domestiques tels que les télévisions, les fours à micro-ondes, les climatiseurs et les micro-ordinateurs. De nombreuses familles habitant le littoral ont ainsi perdu la plupart de leurs équipements.

Quant aux effets éventuels sur la santé, ils suscitent beaucoup d’interrogations, voire d’inquiétudes. C’est un point sur lequel Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a déjà été interpellée.

Les importantes dépenses induites, pour les communes concernées, par l’enlèvement des algues sont en partie couvertes par des aides exceptionnelles décidées en urgence par le conseil général – 340 000 euros – et le conseil régional –350 000 euros –, en l’absence de soutien de l’État.

À ce jour, aucun mécanisme ne permet de compenser les préjudices subis. Je demande donc à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie quelles mesures elle envisage de prendre pour préserver nos côtes, ainsi que pour permettre et favoriser d’éventuelles démarches d’indemnisation. La prise d’un arrêté de catastrophe naturelle, par exemple, serait bienvenue.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, Ségolène Royal vous prie de l’excuser de ne pouvoir être présente ce matin ; elle m’a chargée de vous transmettre des éléments de réponse, sans doute parce que j’ai été confrontée, en tant qu’élue de Bretagne, à des phénomènes de cet ordre, même si les causes n’étaient pas du tout les mêmes.

Vous l’avez souligné, l’île de la Martinique est confrontée depuis plusieurs semaines à un phénomène d’échouage massif d’algues « sargasses ». Dès les premiers échouages, les services de l’État à la Martinique se sont mobilisés pour apporter une aide opérationnelle aux communes, afin que celles-ci puissent procéder à l’indispensable ramassage des algues, mission qui est de leur responsabilité.

Une instance spéciale a été mise en place à l’échelon local pour suivre l’évolution de la situation en temps réel.

Plusieurs réunions d’information ont été organisées dès le mois d’août en présence des maires concernés. Les hélicoptères de la sécurité civile effectuent régulièrement des missions de reconnaissance aérienne afin d’anticiper l’arrivée des sargasses et de permettre au dispositif d’être le plus efficace possible.

Ce soutien a été renforcé au fur et à mesure que le phénomène prenait de l’ampleur. Des mesures exceptionnelles ont ainsi été mises en œuvre : plusieurs dizaines de militaires du service militaire adapté et du détachement Terre Antilles sont mobilisés depuis une semaine pour aider les personnels communaux à nettoyer les secteurs les plus touchés ; la ministre de l’écologie a mobilisé l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, pour mettre à disposition des crédits exceptionnels d’investissement pour les équipements permettant une meilleure valorisation de ces algues ; de plus, l’agence régionale de santé procède, à la suite de vos interpellations, à des mesures régulières pour assurer le suivi sanitaire de la situation.

L’État a donc pleinement pris la mesure des problèmes causés par la présence des algues sargasses dans les eaux marines et sur le littoral martiniquais. Tous les services de l’État sont mobilisés aux côtés des collectivités pour faire face à ce qui est une véritable crise.

Par ailleurs, le préfet a mis en place des groupes de travail pour étudier des solutions de valorisation des algues pour l’agriculture ou la production d’énergie.

Le ministère chargé de l’écologie s’engage à suivre de très près l’évolution de la situation et à missionner les expertises nationales dont vous avez besoin pour mieux connaître le phénomène des sargasses et mieux anticiper les nouvelles arrivées d’algues.

Enfin, concernant la qualification de catastrophe naturelle, une expertise de l’article L. 125-1 du code des assurances est à conduire pour éclairer la notion d’agent naturel ayant une intensité naturelle, en lien avec les ministères de l’intérieur et des finances. Cette étude est en cours.

Sachez, monsieur le sénateur, que nous restons pleinement mobilisés pour suivre avec attention l’évolution de cette situation et que, quoi qu’il arrive dans les heures et les jours qui viennent, nous nous tiendrons à votre disposition pour entendre les témoignages et faire face à la situation. Vous pouvez en faire part aux maires et aux habitants des communes concernées.

Mme la ministre chargée de l’environnement a insisté sur la valorisation des algues, parce que nous pensons qu’il faut essayer de tirer pour demain un bénéfice d’une situation aujourd’hui catastrophique.

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Madame la ministre, je me réjouis de la mobilisation croissante des services de l’État, mais je voudrais que mes collègues prennent bien conscience de l’ampleur d’un phénomène qui concerne non pas seulement la Martinique, mais l’ensemble de la Caraïbe.

C’est la raison pour laquelle j’ose proposer que le ministère de l’environnement prenne l’initiative d’organiser une conférence internationale sur le sujet. Cuba et la République dominicaine, en particulier, ont l’habitude d’affronter ce problème, qui n’est apparu chez nous que depuis deux ans. Il importe donc que nous ne restions pas refermés sur nous-mêmes.

Pour finir, je voudrais attirer de nouveau l’attention sur les éventuels problèmes de santé liés à ce phénomène : de fines particules se déposent sur les murs des édifices, des habitations, et il existe un doute quant aux conséquences sanitaires de leur inhalation.

inadaptation du plan de prévention des risques de submersion pour la baie du Mont-Saint-Michel

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, auteur de la question n° 853, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Dominique de Legge. Madame le ministre, la tempête Xynthia a été une tragédie. Les enseignements de ce drame, tout à la fois sur ses causes, l’alerte et le fonctionnement des secours, doivent sans conteste servir à l’élaboration des plans de prévention des risques de submersion marine. J’ai pu le constater moi-même en participant à la mission commune d’information sur les conséquences de la tempête Xynthia.

Pour autant, une application uniforme de ces enseignements qui ferait fi des particularismes locaux conduirait à deux écueils, tant le littoral méditerranéen est différent de ceux de l’Atlantique ou de la Manche : d’une part, imposer des contraintes et prescriptions injustifiées et inutiles ; d’autre part, s’exposer à ne pas couvrir des risques liés à des situations particulières.

Le plan de prévention des risques de submersion marine de la baie du Mont-Saint-Michel est l’illustration de cette situation : toutes les études font apparaître que les vents dominants sont d’Ouest, mais, à la différence de ce que nous avons connu avec Xynthia, le site est protégé par les pointes du Grouin et de Cancale ; de plus, la hauteur de l’eau dans la baie ne dépasse pas le mètre et le désensablement du Mont-Saint-Michel conduit mécaniquement à l’ensablement de la baie, mettant d’ailleurs en péril l’activité conchylicole ; enfin, le fonctionnement de la digue et le réseau des canaux en aval ne peuvent être assimilés à ce que l’on observe sur la côte atlantique.

Une application stricte du plan de prévention des risques de submersion marine en l’état conduit à quelques aberrations, une prescription allant jusqu’à demander la suppression des chambres à coucher en rez-de-chaussée, ce qui est assez difficile pour des maisons sans étage ! Et si par hasard un propriétaire envisage de surélever sa maison, il tombe alors sous le coup de la loi Littoral ou se heurte aux architectes des Bâtiments de France, ce qui laisse peu de solutions.

C’est pourquoi, me faisant le porte-parole des nombreux élus qui m’ont alerté sur le risque que ferait courir à leur territoire, tant sur le plan économique que sur le plan social, une application uniforme et sans discernement de plans de prévention, je vous prie de bien vouloir m’indiquer quelles dispositions le Gouvernement entend prendre pour adapter les prescriptions nationales aux spécificités géographiques de la baie du Mont-Saint-Michel, afin de protéger les populations tout en garantissant le maintien d’une activité sociale et économique.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur de Legge, je vous remercie de votre question, qui met en exergue les difficultés que rencontrent certaines communes de la baie du Mont-Saint-Michel dans l’application des plans de prévention des risques de submersion marine. L’université de Rennes a travaillé sur ce sujet et il pourrait être intéressant de se référer à ces travaux.

La baie du Mont-Saint-Michel est un site remarquable, auquel l’État et les collectivités territoriales ont consacré des efforts extrêmement importants. Pour autant, comme d’autres sites littoraux, il est exposé au risque de submersion marine, et les caractéristiques mêmes de la géographie de la baie ne garantissent pas l’atténuation de ce risque en toutes circonstances.

De surcroît, aucun ouvrage de protection ne peut être considéré comme totalement infaillible, quelles que soient ses caractéristiques et sa résistance présumée. C’est ainsi que les territoires les plus bas, situés au sud de la baie, ont été inclus dans une zone à risque important d’inondation, faisant partie de la liste arrêtée le 26 novembre 2012 par le préfet coordonnateur de bassin Loire-Bretagne.

Par ailleurs, Mme Royal tient à souligner que la tempête Xynthia ne représente pas – nous partageons votre analyse sur ce point – un élément de référence uniforme présidant à l’établissement de ces plans. C’est bien l’adaptation au contexte local qui est recherchée lors de leur élaboration, notamment par le choix de l’événement de référence – avec une période de retour de 100 ans – ou de l’événement historique, si sa période de retour est plus importante.

En matière de mise aux normes de l’habitat ancien, la survenue de phénomènes rapides, tels que les submersions, peut nécessiter de mettre en place une zone refuge dans l’habitation, susceptible de protéger ses occupants en cas de montée des eaux.

Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs permet d’accompagner les particuliers dans ce type de démarches d’aménagement à hauteur de 40 %, les collectivités pouvant bien entendu apporter également leur concours. Suite à votre intervention, monsieur le sénateur, nous reverrons de plus près le cas de ceux qui sont concernés par la loi Littoral ou d’autres types de prescriptions.

Mme Royal a conscience que l’effort demandé est ambitieux. Il convient néanmoins de garder à l’esprit que ces plans n’ont qu’un seul objectif fondamental, celui d’accroître la protection des populations littorales.

En ce sens, le territoire en question vient d’être retenu au titre de l’atelier national des « territoires en mutation exposés aux risques » pour 2015, conduit en lien avec le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité afin d’assurer la nécessaire conjugaison entre projets de développement et prise en compte des risques. Vous pourriez d’ailleurs fort opportunément être associé à ce travail, qui va permettre de délimiter les zones où se rencontrent les impossibilités que vous avez relevées.

La coopération de l’ensemble des collectivités territoriales concernées à des échelles cohérentes est donc indispensable pour assurer à terme la sécurité de nos concitoyens sur ces territoires exposés à des risques importants. C’est à cette fin qu’a été créée la compétence obligatoire de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, confiée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétents par ailleurs en matière d’aménagement. En outre, l’organisation mise en place par les collectivités locales pour entretenir et surveiller les digues constitue également un élément clé. Il est donc possible, à l’échelle de l’intercommunalité, de mieux se protéger.

J’ajouterai que le procès qui se déroule en ce moment montre dans quelles difficultés peuvent se trouver placés les maires. Il nous incite à faire preuve de beaucoup de prudence en matière de dérogations. Lorsqu’une catastrophe survient, les maires sont en première ligne. Nous devons les accompagner non seulement pour protéger leur population, mais aussi pour les protéger eux-mêmes contre des recours judiciaires dont les conséquences, en sus du préjudice personnel subi, peuvent être très lourdes pour la collectivité.

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.

M. Dominique de Legge. Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre.

Je crois que la liste des communes concernées ne pose pas de problème et qu’il n’y a pas lieu d’y revenir.

Toutefois, la réponse que vous avez faite soulève une difficulté : tant le préfet que les élus demandent non pas une dérogation, mais une adaptation. Je suis quelque peu inquiet de vous entendre nous renvoyer à des ateliers dont je n’ai pas bien compris quel était leur objectif et qui pourraient se tenir en 2015 : le traitement du problème risque d’être encore durablement ajourné, alors que la situation est figée depuis maintenant deux ou trois ans.

Le préfet avait demandé une adaptation. La réponse du ministère, qui est arrivée il y a quelques jours, est une fin de non-recevoir. J’entends, dans votre réponse, qu’il y a peut-être une ouverture. Je voudrais me faire auprès de vous, madame le ministre, l’interprète des maires et relayer la demande de mes collègues Gilles Lurton et Thierry Benoit que Mme Royal se rende en personne sur place ; je sais qu’elle n’y était pas hostile et que le principe d’une telle visite avait été entériné.

Je vous prie de bien vouloir lui transmettre notre demande renouvelée, de telle sorte qu’elle puisse, dans l’esprit de dialogue que vous venez d’évoquer, se rendre compte par elle-même de la réalité des situations et entendre les arguments des acteurs économiques et des élus. Il importe de débloquer rapidement la situation. (Mme la ministre acquiesce.)

avenir des départements

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 857, transmise à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

M. Jean Boyer. Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur l’avenir des départements. Il semblerait que les dernières réflexions gouvernementales s’orientent vers le maintien d’un certain nombre d’entre eux, qualifiés de « ruraux ».

En tant qu’élu d’un tel département, je me réjouis, et avec moi nombre de mes collègues, que le Premier ministre ait décidé le maintien de certains départements ruraux : cette décision était indispensable au regard de l’aménagement du territoire.

En effet, nous le savons tous, il y a plusieurs catégories de départements. Dans le mien, par exemple, l’habitat moyen est parmi les plus élevés de France et les zones de revitalisation rurale, les ZRR, couvrent vingt-deux cantons sur trente-cinq. Dans de tels départements, la faible densité de population et l’étendue de l’espace à gérer nécessitent le recours à une solidarité nationale.

Cette décision du Premier ministre devrait permettre de garder une proximité indispensable à la vie de nos communes. Un département rural doit avoir une identité, une complémentarité, une spécificité.

Cette décision positive me donne l’occasion de dire que si les communes n’existaient pas, il faudrait aujourd’hui les créer, les mettre en place. La population d’une commune rurale, comme je le dis régulièrement ici depuis treize ans, pourrait être accueillie dans un seul immeuble, dans une seule copropriété, dont il suffirait alors d’entretenir les équipements, l’environnement. Mais une commune de 200 habitants a des dizaines de kilomètres de chemins à entretenir, ainsi que les différents réseaux nécessaires à la vie quotidienne.

Dans le prolongement de cette analyse communale, je ferai remarquer que la population d’un département comme la Haute-Loire – beaucoup d’autres sont dans le même cas – pourrait tenir dans une banlieue ou dans une ville, où elle pourrait jouir de certaines richesses naturelles et économiques, sans avoir à gérer tous les espaces.

Oui, le département doit demeurer. Or, madame la ministre, je vous le dis très franchement et sans aucune démagogie : les départements ruraux s’interrogent sur leur avenir. On le souligne souvent, un département rural a un espace à gérer, sa population est en moyenne beaucoup plus âgée que celle d’autres départements. Mes chers collègues, n’opposons pas la France urbaine et la France rurale : elles sont complémentaires ; elles ont toutes les deux leur vocation.

Dès lors, madame la ministre, quels seront les critères retenus pour définir l’identité des départements ruraux ? Surtout, quelles compétences et quels moyens seront affectés à ces derniers ?

Depuis 1789 et la naissance de notre République, notre pays a connu bien des vicissitudes. Aujourd’hui, c’est la loi de la jungle économique mondiale qui alimente les inquiétudes, particulièrement dans les départements ruraux. La réforme projetée des structures communales, intercommunales ou départementales nous dissimule l’essentiel. Cela étant, je sais que les choses ne sont pas faciles : je n’ai jamais été un partisan du « y a qu’à, faut qu’on ».

Répondez-nous simplement, sans langue de bois, sur l’avenir des départements ruraux, madame la ministre : je suis Auvergnat, et je sais que vous n’êtes pas Normande !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.