M. Dominique Watrin. Cet article prévoit la suppression de la prescription de trois ans pour permettre aux entreprises de demander le remboursement de cotisations en cas de révision à titre rétroactif du taux de cotisation accidents du travail et maladies professionnelles.

Selon nous, cette mesure ne peut s’analyser que comme une rupture d’égalité entre salariés et employeurs. Faut-il en effet rappeler les termes de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 en matière de contentieux et d’indemnisation lorsque les salariés sont à l’initiative de la demande ? L’ANI a plafonné le risque financier des litiges pour les entreprises et pour les patrons par une « barémisation » des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’ANI a rompu avec le principe de réparation intégrale des conséquences de la perte d’emploi et empêche le juge d’exercer son pouvoir d’appréciation sur l’étendue du préjudice réellement subi par le salarié. Auparavant, dans le cas d’une ancienneté supérieure à deux ans, l’indemnisation allait de six mois à deux ans de salaire, voire plus dans des cas particulièrement graves ou pour des salariés justifiant d’une ancienneté particulièrement importante. Or l’ANI a plafonné ces indemnisations en fonction de l’ancienneté, en instaurant un barème en complète rupture avec le principe de proportionnalité.

Faut-il également rappeler que vous avez réduit les délais de prescription pour les salariés ? Ainsi, en cas de licenciement économique collectif, le délai pour saisir le juge a été ramené de deux ans à un an. La portée des rappels de salaires ou d’heures supplémentaires a été limitée à une période de trois ans, au lieu de cinq ans auparavant. Ces choix sont bien évidemment la traduction de la volonté du patronat de se protéger, d’échapper à tout contrôle judiciaire et au risque de sanction grâce à des délais de prescription exceptionnellement brefs.

Enfin, à l’heure où le MEDEF refuse d’appliquer les dispositions relatives à la pénibilité prévues par l’ANI, cet article, qui simplifie les modalités de contestation en matière de cotisations accidents du travail et maladies professionnelles versées par les employeurs, semble injuste.

Eu égard à ces distorsions de traitement particulièrement défavorables aux salariés, les sénateurs du groupe CRC voteront contre cet article.

Mme la présidente. L'amendement n° 43, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au quatrième alinéa, le mot : « ci-dessus » est remplacé par les mots : « du I du présent article » ;

II. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le même dernier alinéa est complété par les mots : « du I du présent article ».

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à corriger une erreur de référence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis favorable !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 43.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 16, modifié.

(L'article 16 est adopté.)

Article 16
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Article 17

Article 16 bis (nouveau)

Au deuxième alinéa de l’article L. 651-6 du code de la sécurité sociale, la référence : « premier alinéa » est remplacée par la référence : « I ». – (Adopté.)

Article 16 bis (nouveau)
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Article 18

Article 17

I. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 723-35 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il statue sur les demandes de remise des pénalités et majorations de retard portant sur des montants supérieurs à un seuil fixé par arrêté des ministres chargés du budget, de la sécurité sociale et de l’agriculture. » ;

b) Le 3° et le b sont abrogés ;

2° Après l’article L. 731-13-1, il est inséré un article L. 731-13-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 731-13-2. – Les personnes mentionnées aux articles L. 722-4 et L. 731-23 sont tenues d’effectuer les déclarations pour le calcul de leurs cotisations et contributions sociales et de procéder au versement de celles-ci par voie dématérialisée.

« Les obligations prévues au premier alinéa du présent article s’imposent au-delà d’un seuil fixé par décret en fonction du montant des revenus professionnels définis aux articles L. 731-14 à L. 731-22.

« La méconnaissance de ces obligations entraîne l’application des majorations prévues au II de l’article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale. »

II. – Jusqu’à la publication de l’arrêté mentionné au premier alinéa de l’article L. 723-35 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant du présent article, les conseils d’administration des caisses de mutualité sociale agricole demeurent compétents pour statuer sur l’ensemble des demandes de remise des pénalités et majorations de retard. – (Adopté.)

Article 17
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Article 19

Article 18

I. – Au quatrième alinéa du II de l’article 35 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, la référence : « L. 212-3, » est supprimée.

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 136-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les personnes qui relèvent du régime spécial de sécurité sociale des marins, la contribution portant sur les revenus mentionnés aux articles L. 136-1 à L. 136-4 est recouvrée par l’organisme gestionnaire dudit régime, selon les dispositions mentionnées à l’article L. 241-6-2. » ;

2° Après l’article L. 241-6-1, il est rétabli un article L. 241-6-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 241-6-2. – Le recouvrement des cotisations d’allocations familiales dues au titre des personnes qui relèvent du régime spécial de sécurité sociale des marins, ainsi que le contrôle et le contentieux du recouvrement, sont assurés par l’organisme gestionnaire de ce régime.

« Un décret fixe les conditions dans lesquelles cette mission peut être en tout ou partie déléguée, par convention, à des organismes du régime général de la sécurité sociale. » ;

3° Au 6° de l’article L. 752-4, les mots : « mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° de l’article L. 212-3 du présent code qui sont exercées dans les départements d’outre-mer par la Caisse maritime d’allocations familiales » sont remplacés par les mots : « dévolues à l’organisme gestionnaire du régime spécial de sécurité sociale des marins » ;

4° La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre II est abrogée.

III. – Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le f de l’article L. 5427-1 est ainsi rédigé :

« f) Par l’organisme gestionnaire du régime spécial de sécurité sociale des marins lorsqu’elles sont dues au titre des salariés affiliés audit régime. » ;

2° Aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 6331-53, les mots : « la Caisse nationale d’allocations familiales des pêches maritimes » sont remplacés par les mots : « l’organisme gestionnaire du régime spécial de sécurité sociale des marins ».

IV. – La Caisse maritime d’allocations familiales est dissoute à la date du 1er janvier 2016.

Les droits et obligations afférents au service des prestations familiales des personnes affiliées au régime spécial de sécurité sociale des marins et assurés avant cette date par la Caisse maritime d’allocations familiales sont transférés aux caisses d’allocations familiales de leur lieu de résidence.

Les droits et obligations afférents au recouvrement des cotisations et contributions sociales dues par les employeurs et les travailleurs indépendants et assurés avant cette date par la Caisse maritime d’allocations familiales sont transférés à l’Établissement national des invalides de la marine.

Les contrats de travail des salariés de la Caisse maritime d’allocations familiales sont transférés à la caisse d’allocations familiales du département de leur lieu d’activité et à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Poitou-Charentes.

Les modalités relatives à ces transferts sont définies par des conventions conclues, en fonction de leur objet, entre le directeur de la Caisse maritime d’allocations familiales et le directeur de la Caisse nationale des allocations familiales ou celui de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

Ces conventions déterminent également les modalités de transfert, à compter du 1er janvier 2016, des biens meubles et immeubles de la Caisse maritime d’allocations familiales vers les caisses d’allocations familiales des départements et l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Poitou-Charentes.

V. – Les II et III du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2016.

Mme la présidente. L'amendement n° 237, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet article prévoit la suppression de la Caisse maritime d’allocations familiales, la CMAF. Les économies réalisées grâce à la disparition de cet organisme dédié aux gens de la mer et au transfert de ses missions à l’Établissement national des invalides de la marine ne nous paraissent pas évidentes.

Nous pensons au contraire que le transfert de la gestion des dossiers à des personnes non averties des spécificités du milieu maritime présente un risque important. Le recouvrement des cotisations et le versement des prestations familiales par des connaisseurs du milieu maritime sont à nos yeux un gage du bon fonctionnement du service et de la qualité de la gestion des affiliés.

La CMAF est un organisme du régime général qui mène une action en direction des familles du monde maritime, et non un organisme lié par convention. Elle poursuit son développement et inscrit de nouveaux allocataires – leur nombre a crû de 3 % entre 2010 et 2012 – et de nouveaux cotisants, ce qui contredit l’image d’une caisse en perte de vitesse.

La CMAF participe déjà à la démarche d’optimisation des coûts de fonctionnement imposée par l’évolution des finances publiques. La méthode du Gouvernement consistant à regarder uniquement le coût de gestion des dossiers des allocataires sans tenir compte de la complexité des situations ne nous semble pas pertinente. Nous avons par ailleurs le sentiment que ce transfert n’a pas été anticipé par les services de l’Établissement national des invalides de la marine, et nous relayons les craintes des bénéficiaires des allocations familiales maritimes de voir leurs relations avec leur caisse se détériorer.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous demandons le maintien de la Caisse maritime d’allocations familiales et, par conséquent, la suppression de l’article 18.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article 18 prévoit la suppression, à compter du 1er janvier 2016, de la Caisse maritime d’allocations familiales, dont les activités de recouvrement doivent être transférées à l’Établissement national des invalides de la marine et les activités de versement des prestations légales aux caisses d’allocations familiales.

La suppression de la CMAF correspond à un engagement pris par l’État dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion conclue avec la Caisse nationale d’allocations familiales pour la période 2013-2017. Elle s’inscrit dans une logique de simplification et de gain d’efficience par la création d’un guichet unique, les coûts unitaires de gestion de la CMAF étant plus élevés que la moyenne, ainsi que l’a exposé l’Inspection générale des affaires sociales dans son rapport d’évaluation de la convention d’objectifs et de gestion pour la période 2009-2013.

Au demeurant, la suppression de la CMAF n’aura pas d’incidence sur les prestations servies aux allocataires ni sur le service social maritime.

Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. La suppression de la CMAF au 1er janvier 2016 doit permettre d’instaurer un guichet unique pour les prestations versées aux gens de la mer, qui sont aujourd'hui obligés de s’adresser à différents interlocuteurs.

Par ailleurs, pour les prestations familiales, 70 % des marins relèvent d’ores et déjà de la caisse d’allocations familiales de leur lieu de résidence.

Enfin, cette mesure permettra de mettre en place un guichet unique du recouvrement des cotisations sociales des marins.

Il nous semble donc qu’il s’agit d’une disposition de simplification tant pour l’administration que pour les personnes concernées, qui n’auront plus qu’un seul interlocuteur et qu’une seule démarche à effectuer.

Par conséquent, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Nous avions été alertés par des personnes qui s’inquiétaient de la suppression de la CMAF. Cependant, compte tenu des explications apportées par le Gouvernement, je retire cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 237 est retiré.

Je mets aux voix l'article 18.

(L'article 18 est adopté.)

Chapitre III

Relations financières entre les régimes et entre ceux-ci et l’État

Article 18
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Article 20

Article 19

I. – L’article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 225-1-4. – Dans la limite des plafonds de ressources non permanentes fixés en application du e du 2° du C du I de l’article L.O. 111-3, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale peut :

« 1° Consentir, contre rémunération, des prêts et avances d’une durée inférieure à douze mois au régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles ;

« 2° À titre exceptionnel et contre rémunération, consentir des avances d’une durée inférieure à un mois aux régimes obligatoires de base autres que le régime général ainsi qu’aux organismes et fonds mentionnés au 8° du III de l’article L.O. 111-4, dans la limite du montant prévisionnel des flux financiers de l’année en cours entre l’agence et le régime, l’organisme ou le fonds concerné.

« Pour déterminer les conditions de chacune des avances mentionnées aux 1° et 2°, une convention est conclue entre l’agence et le régime, l’organisme ou le fonds concerné. La convention est soumise à l’approbation des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. »

II. – L’article L. 731-5 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le régime des exploitants agricoles peut recourir à des prêts et avances auprès de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans les conditions prévues à l’article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale. »

III. – Pour les exercices 2015, 2016 et 2017, les montants empruntés par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole auprès de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale en application de l’article L. 225-1-4 du code de la sécurité sociale ne peuvent excéder 3,8 milliards d’euros.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l'article.

M. Daniel Chasseing. Cet article a trait au financement des besoins de trésorerie de la Mutualité sociale agricole, la MSA, organisme dont nous connaissons l’importance pour nos concitoyens agriculteurs.

La trésorerie de la branche retraite des non-salariés agricoles accuse un déficit cumulé qui se montait, à la fin de l’année 2013, à 2,7 milliards d'euros. Les déficits prévisionnels pour 2014 – 270 millions d'euros – et pour 2015 – environ 200 millions d'euros – conduiront donc à un déficit cumulé prévisionnel de 3,3 milliards d'euros à la fin de l’année 2015.

L’article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a prévu la reprise des déficits annuels de la branche vieillesse du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse entre 2011 et 2018, dans la limite d’un plafond annuel de 10 milliards d'euros et d’un plafond global, sur huit années, de 62 milliards d'euros. Or l’article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a modifié cette mesure en réduisant sa durée d’application à la période 2011-2017, à plafonds inchangés, et en ajoutant la reprise des déficits des branches maladie et famille du régime général.

La MSA avait plaidé pour que l’extension du dispositif de 2011 porte prioritairement sur la branche retraite des non-salariés agricoles, ce dispositif ayant été initialement conçu au profit de la prise en charge du risque vieillesse. Cette demande n’a pas été satisfaite ; je le regrette. Je rappelle que les non-salariés agricoles contribuent au financement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, au même titre que les assurés du régime général.

Il se trouve que la CADES et l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, ont la possibilité d’emprunter directement sur les marchés financiers, et ce sur des périodes longues. Elles bénéficient à ce titre de taux de refinancement très faibles, parfois négatifs. À l’inverse, la MSA n’a pas la possibilité de se refinancer sur les marchés et ne peut emprunter que sur l’exercice courant. Dès lors, elle doit emprunter auprès du secteur bancaire, avec un différentiel de taux qui avoisine 1,3 point. Ce différentiel de taux a pour conséquence un surcoût de près de 40 millions d’euros annuels pour la protection sociale, au profit du secteur bancaire.

Les articles 19 et 27 ouvrent la possibilité de mettre en place une convention de trésorerie entre l’ACOSS et la MSA, qui permettrait à l’ACOSS d’emprunter au profit de la MSA la trésorerie dont celle-ci a besoin.

La mesure du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 doit donc être renforcée. Il faut prévoir le portage intégral du besoin de trésorerie de la MSA par l’ACOSS. Je rappelle que ce sera une opération blanche pour l’ACOSS.

Par ailleurs, la mise en place d’indemnités journalières maladie – elles représentent environ 960 euros par mois – pour les non-salariés agricoles depuis le 1er janvier 2014 a mis en évidence la nécessité de relever le montant de la pension d’invalidité de ces derniers. En effet, cette pension d’invalidité – qui s’élève à 363 euros mensuels pour inaptitude totale et à 282 euros mensuels pour inaptitude partielle – se situe au niveau le plus bas dans la protection sociale en France ; elle est, disons-le mot, ridicule. À titre de comparaison, la pension d’invalidité des commerçants, par exemple, s’élève à 1 500 euros pour inaptitude totale et à 980 euros pour inaptitude partielle.

Je rappelle que les risques de maladie ou d’accident encourus par les agriculteurs sont très élevés, plus élevés en tout cas que dans bien d’autres professions. Je crois pouvoir en témoigner.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Daniel Chasseing. Je termine, madame la présidente.

La mesure prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 est donc insuffisante. Cette situation est particulièrement désavantageuse pour les non-salariés agricoles. Il serait temps d’y remédier en prévoyant le portage intégral du besoin de trésorerie de la MSA par l’ACOSS. L’économie de 40 millions d’euros qui serait ainsi réalisée permettrait de revaloriser les pensions d’invalidité pour les non-salariés agricoles.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.

M. Dominique Watrin. L’article 19 met en lumière la situation très problématique de la Mutualité sociale agricole, dont les comptes présentent désormais, comme cela était prévisible, un déficit chronique, malgré la grande diversité des outils d’ores et déjà mobilisés, qu’il s’agisse de la compensation généralisée entre régimes, faisant du régime général de la sécurité sociale le principal recours pour assurer l’équilibre financier de la MSA, ou des attributions de produits fiscaux ou autres.

L’insuffisance des cotisations perçues auprès du monde agricole – n’oublions jamais qu’elles reposent sur le chiffre d’affaires déclaré des exploitations – et le nombre relativement élevé de pensionnés et d’ayants droit, au regard de celui des cotisants, créent en fait un déséquilibre qui se révèle aujourd’hui impossible à compenser.

Aussi, compte tenu de la qualité de la signature de l’ACOSS sur les marchés financiers où elle emprunte les ressources de trésorerie dont elle a besoin ponctuellement, il est aujourd’hui proposé que l’ACOSS lève sur ceux-ci des ressources afin de devenir le « banquier » de référence de la MSA.

Cette solution est un moindre mal. Sa pertinence est réelle, nous ne le nions pas, mais elle ne saurait régler de manière définitive les problèmes.

En effet, ce qui procède du déficit conjoncturel du régime ne doit pas nous faire oublier la nécessité d’agir sur les ressources structurelles de ce dernier.

La juste rémunération du travail des producteurs, revendication que le groupe communiste républicain et citoyen porte depuis plusieurs années, est une condition de l’amélioration des comptes du régime. Elle est en outre la condition sine qua non d’un recul du recours au travail non déclaré, encore trop fréquent dans ce secteur et qui se traduit par des pertes d’assiette importantes et des difficultés supportées ensuite par tous. Elle est aussi la seule voie, avec le développement d’une commande publique performante et de circuits courts, au plus près des régions de production, qui permette de libérer notre agriculture de la pression des grandes centrales d’achat, imposant leurs prix et, bien souvent, des produits importés pour faire pièce à la production française. Le déficit structurel de la MSA, ce sont en quelque sorte les profits d’Auchan, de Carrefour et des autres enseignes de la grande distribution alimentaire !

C’est donc aussi et surtout en repensant notre agriculture à l’aune de la transition énergétique, de la réduction de son empreinte écologique, de la juste rémunération de ses travailleurs, que nous pourrons concevoir l’avenir de la sécurité sociale agricole.

Il faut donc dès maintenant aller au-delà des mesures de l’article 19 afin de pouvoir décider demain en toute connaissance de cause.

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’article 19, je donne la parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

M. Francis Delattre. Il ne me paraît pas inutile de rappeler les chiffres relatifs à la dette sociale qui ont été cités lors de la discussion générale.

Aujourd'hui, la CADES, en dette pure, représente 160 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter 34 milliards d’euros au titre de la capacité d’emprunt de l’ACOSS, qui va être augmentée de 2 milliards d’euros environ cette année.

Ce serait à mon avis une folie de permettre à tous les régimes d’emprunter directement sur les marchés. Il est sage d’affirmer que tout doit être mutualisé et que l’ACOSS doit jouer son rôle, car sinon la situation deviendra incontrôlable.

On sait très bien que, en réalité, le problème de la MSA résulte notamment d’un lourd déséquilibre démographique. Il importe que des compensations soient assurées, mais la dette sociale atteint déjà aujourd’hui 194 milliards d’euros : recourir exclusivement à l’emprunt ne me semble pas de bonne méthode.

Ce sujet est extraordinairement difficile. Nous empruntons aujourd'hui à un taux d’environ 1 %, la Grèce au taux de 9 %. Les effets de la politique de restriction monétaire qui a été engagée par la Réserve fédérale américaine, la FED, commenceront à se faire sentir dans un an. On imagine sans mal la gravité des difficultés que nous rencontrerions pour boucler le budget de la sécurité sociale si les taux auxquels nous empruntons doublaient ou triplaient !

Maintenons donc les garde-fous. L’ACOSS en est un, même si l’on peut penser que sa vocation n’est pas d’emprunter sur les marchés : puisqu’elle bénéficie de conditions étonnantes, il faut qu’elle continue de jouer un rôle de mutualisation ; sinon, nous irons au devant de très graves difficultés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19.

(L'article 19 est adopté.)