Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 227 rectifié, 1069 et 1419 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1070, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Nous l’avons dit, nous sommes hostiles aux ordonnances, car elles confisquent totalement le débat parlementaire. Or l’article 20 – nous sommes gâtés ! – comporte deux demandes d’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance.

Nous nous interrogeons sur la pertinence, ici, de ces ordonnances. En quoi la situation est-elle urgente ? Pourquoi ne pas soumettre vos propositions au débat parlementaire, monsieur le ministre ? Quelles sont les finalités du regroupement de métiers que vous proposez ? Telles sont les questions que nous nous posons. Vous nous demandez de signer un chèque en blanc, alors que nous n’avons pas les précisions nécessaires sur ce projet.

J’en viens maintenant au fond, monsieur le ministre. J’ai lu et entendu vos réponses aux questions de nos collègues députés à l’Assemblée nationale. Ainsi, nous n’aurions pas affaire à une véritable fusion. L’affirmation est intéressante, sachant que l’article 20 prévoit de « créer une profession de commissaire de justice fusionnant les professions d’huissiers de justice et de commissaires-priseurs judiciaires ». Y aurait-il une subtilité qui nous aurait échappé ?

J’entends aussi l’argument selon lequel les deux professions ont une base commune et peuvent, lorsqu’elles travaillent en synergie, avoir une efficacité importante pour nos concitoyens. Pourtant, je reste persuadée, comme l’ensemble des membres du groupe CRC, que la création de grands cabinets interprofessionnels, à l’anglo-saxonne, provoquera de réels problèmes d’indépendance et d’impartialité.

Ce sujet mériterait un débat plus approfondi, mais vous souhaitez aller vite. Permettez-moi néanmoins d’évoquer les questions et les craintes qu’il suscite.

La création de ce nouveau métier commun conduira à une atomisation du marché et à une multiplication par dix des acteurs concernés. Cet état de fait est problématique. Comment certifier la qualité du service pour un citoyen ?

En outre, cette création pose aussi la question de la course à la réduction des coûts pour les professionnels devant affronter une grande concurrence. Le risque de voir les petites structures mourir petit à petit au profit des plus grosses est réel.

Par cet amendement, nous vous demandons donc, chers collègues, de supprimer l’alinéa 14, afin de ne pas aller dans le sens qui est proposé par le Gouvernement.

Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 564 rectifié est présenté par MM. A. Marc et Commeinhes.

L'amendement n° 602 est présenté par M. Hyest.

L'amendement n° 690 rectifié bis est présenté par Mme Gruny, M. Calvet, Mme Deromedi, M. B. Fournier, Mme Mélot et MM. Milon, Pierre, de Raincourt, Revet et Vasselle.

L'amendement n° 1347 est présenté par MM. Guerriau, Kern, Bonnecarrère et Longeot, Mme Morin-Desailly et M. Cadic.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

en cas de création ou de vacance d'offices

Les amendements nos 564 rectifié et 602 ne sont pas soutenus.

La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l'amendement n° 690 rectifié bis.

Mme Colette Mélot. L’article 20 du projet de loi autorise le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour améliorer le recrutement des greffiers des tribunaux de commerce par la voie du concours, en en fixant les conditions financières.

Le droit positif permet à toute personne remplissant les conditions d’aptitude et ayant accompli un stage professionnel dans un greffe de tribunal de commerce d’accéder à la profession de greffier de tribunal de commerce.

Tel qu’il est rédigé, l’article 20 n’apparaît pas compatible avec le statut d’officier public et ministériel des greffiers des tribunaux de commerce et le mode d’exercice libéral de leur profession, et ce pour plusieurs raisons.

D’une part, le terme « recrutement » fait référence à l’emploi de fonctionnaires alors que le greffier titulaire d’un office est un professionnel libéral. L’accès à la profession de greffier s’effectue, une fois les conditions de stage et d’examen remplies, par l’acquisition d’un greffe ou de parts sociales d’une personne morale titulaire d’un greffe.

Le mode d’accès préconisé par le Gouvernement se heurte donc aux principes de l’intuitu personae et de l’affectio societatis. Ces principes sont au cœur de toute cession, en particulier lorsque le greffe est géré par plusieurs greffiers.

D’autre part, la voie du concours est également critiquable, car elle conduirait l’État à fixer chaque année le nombre de lauréats devant être admis au concours et imposerait ainsi aux potentiels cédants un « vivier » de cessionnaires.

Cette disposition se heurte également au principe de l’affectio societatis et au libre choix du cessionnaire dont doit pouvoir bénéficier le cédant. Cette liberté ne fait d’ailleurs pas obstacle à l’égalité d’accès aux fonctions de greffier de tribunal de commerce dont l’examen d’aptitude constitue la garantie. L’accès à la profession par la voie du concours public n’est compatible avec ce statut qu’en l’absence de cessions.

Pour ces motifs, il existe un réel risque de censure par le Conseil constitutionnel. Compte tenu de ces éléments, la voie du concours ne peut se justifier qu’en cas de création ou de vacances d’offices.

Mme la présidente. L'amendement n° 1347 n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 1070 et 690 rectifié bis ?

M. François Pillet, corapporteur. L’amendement n° 1070 vise à supprimer l’habilitation à réformer le mode de recrutement des greffiers de tribunaux de commerce en privilégiant la voie du concours. La commission spéciale ayant considéré que le champ de cette habilitation était bien délimité – elle l’a d’ailleurs elle-même précisé –, elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.

La commission spéciale émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 690 rectifié bis, car elle souhaite privilégier la voie du concours.

La création d’un concours pour accéder aux fonctions de greffier de tribunal de commerce vise à remédier à certains défauts du système actuel, lequel aboutit à une concentration des greffes, comme cela est décrit dans le rapport de l’Inspection générale des finances, auquel je vous renvoie. L’Inspection fait des constatations assez désagréables pour qui pense que le mérite est le principal moyen de réussir dans notre société…

Il semble que, dans l’intention du Gouvernement, la mesure concernera non seulement la création ou la vacance d’offices, mais aussi, le cas échéant, l’association au sein d’offices existants, les candidats étant classés par ordre de mérite.

En effet, limiter la mesure aux seuls offices vacants ou à créer reviendrait en réalité à la supprimer car, compte tenu du très faible nombre d’offices – il ne peut y en avoir qu’un par tribunal de grande instance –, un office vacant est un office dont personne ne veut. Il n’est dès lors pas nécessaire de créer un concours.

J’ajoute qu’il est peu probable que de nouveaux TGI soient créés en France métropolitaine – même si certains renaissent de leurs cendres… – et entraînent la création de nouveaux offices.

Le Gouvernement fournira sans doute aux auteurs des amendements des précisions sur ses intentions, qui les convaincront de retirer leurs amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis !

Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° 690 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Colette Mélot. Non, je vais le retirer, madame la présidente, compte tenu du fait que, selon M. le rapporteur, le nombre de cas risquant de se présenter sera très faible. Je souhaite néanmoins que des aménagements soient apportés afin de tenir compte des arguments que nous avons développés.

Je retire l’amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 690 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 1070.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 20.

(L'article 20 est adopté.)

Article 20
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 20 ter (supprimé)

Article 20 bis

L’article 22 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d’expert-comptable est ainsi modifié :

1° Le septième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Ils peuvent également, sans pouvoir en faire l’objet principal de leur activité :

« - effectuer toutes études ou tous travaux d’ordre statistique, économique et administratif et apporter, dans ces matières, leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise ;

« - donner des consultations, effectuer toutes études ou tous travaux d’ordre juridique, fiscal ou social et apporter, dans ces matières, leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise, mais seulement s’il s’agit d’entreprises dans lesquelles ils assurent des missions d’ordre comptable de caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où lesdites consultations, études, travaux ou avis sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés. » ;

2° À l’avant-dernier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 235 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collombat.

L'amendement n° 289 rectifié bis est présenté par M. Détraigne, Mme Férat, MM. Savary, Guerriau, Kern, Longeot et Canevet, Mme Loisier, MM. Bockel, Roche, Marseille, Pozzo di Borgo et Jarlier, Mme Joissains et M. Namy.

L'amendement n° 1341 est présenté par M. Grand.

L'amendement n° 1441 est présenté par M. Bouvard.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 235 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. Par le présent amendement, nous proposons la suppression de l’extension infondée du périmètre des compétences des experts-comptables.

L’article 20 bis issu des travaux l’Assemblée nationale redéfinissait les prérogatives des experts-comptables. Ceux-ci sont soumis, pour les activités autres que comptables, à la règle du « double accessoire » : ils ne sont autorisés à pratiquer ces activités – consultations ou travaux administratifs, économiques, statistiques, juridiques – que si elles restent accessoires et si elles sont effectuées à l’occasion d’une mission comptable.

L’article 20 bis, introduit sur l’initiative du Gouvernement, levait cette seconde contrainte, sauf pour les prestations juridiques.

La guerre du droit et du chiffre serait donc rallumée... Le chiffre a gagné la bataille à l’Assemblée nationale, mais nous espérons qu’il ne gagnera pas la guerre ici !

Comme l’a souligné la commission Darrois dans son rapport, la notion d’activité à titre accessoire n’a fait l’objet d’aucune définition précise par le législateur et a, en conséquence, donné lieu à de nombreux conflits.

La profession d’expert-comptable occupe une place stratégique auprès des entreprises, de par sa mission d’appréciation et de révision des comptes, avec laquelle interfèrent des problèmes de droit fiscal, social ou commercial.

Le rapport soulignait déjà en 2009 que, la profession ayant développé la formation juridique de ses impétrants, elle tentait régulièrement d’être inscrite sur la liste des professions réglementées habilitées à pratiquer la consultation juridique et la rédaction d’actes à titre principal.

La commission Darrois, s’étant penchée sur ce sujet, avait conclu que la consultation juridique devait demeurer spécifique et qu’elle nécessitait, de ce fait, certaines exigences en matière de formation, que la profession d’expert-comptable ne remplit pas et n’est pas destinée à remplir.

Une réflexion aurait pu être menée par le législateur pour préciser ce qu’est l’« accessoire » d’une mission comptable.

Le rapport précité proposait que cette définition se rattache, individuellement ou cumulativement, à des notions de temps – temps global consacré à la pratique du conseil – et de volume d’activité – nombre de dossiers –, ou encore à la part du chiffre d’affaires réalisée en la matière. Il excluait également du champ de l’accessoire la rédaction d’actes sans l’intervention d’un membre d’une profession réglementée, sauf dans certaines matières prédéfinies – l’établissement de contrats de travail, par exemple.

Convaincus que la consultation juridique relève d’un métier à part entière et requiert une formation, nous vous invitons, chers collègues, à supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 289 rectifié bis.

M. Yves Détraigne. Cet amendement vise également à supprimer l'article 20 bis, qui prévoit d'étendre le champ des activités que les experts-comptables peuvent effectuer à titre accessoire, sans qu'elles se rattachent par ailleurs à une mission comptable qui leur soit assignée.

Il paraît nécessaire de maintenir les périmètres actuels des compétences des différentes professions du chiffre et du droit s'agissant des questions juridiques. Les deux professions n'ont en effet pas les mêmes règles de fonctionnement concernant la déontologie, le secret professionnel et les conflits d'intérêts.

Bien que l’article ait été modifié par M. le rapporteur de la commission spéciale, il présente un risque d'éviction réel de l'avocat au profit de l'expert-comptable.

Le système actuellement en vigueur fonctionne de façon satisfaisante. La jurisprudence qui s’est développée sur cette base est parvenue à un équilibre permettant aux différents professionnels de travailler en bonne entente, et surtout aux clients de bénéficier de conseils de qualité, chacun intervenant dans son domaine de compétence : la comptabilité pour les uns, le droit pour les autres.

Les auteurs du présent amendement ne comprennent donc pas l'intérêt de remettre en cause ce système. Le risque est de placer les clients dans une certaine insécurité juridique, car ils bénéficieront alors de conseils en droit sans les garanties de compétence qu’apportent les avocats, lesquels se consacrent exclusivement au droit.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour présenter l'amendement n° 1341.

M. Jean-Pierre Grand. Bien qu’il ait été réécrit par la commission spéciale, je vous propose de supprimer l’article 20 bis. En effet, cet article donne de nouveaux droits aux experts-comptables au détriment des avocats, et risque d’inciter ces derniers à déserter les petites villes ou les villes de moyenne importance pour se concentrer dans les grandes villes.

Mme la présidente. L’amendement n° 1441 n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements identiques restant en discussion ?

M. François Pillet, corapporteur. Ces amendements de suppression traitent d’une question qui est très souvent en débat, celle de la levée de la règle dite du « double accessoire » pour certaines prestations des experts-comptables.

Cette règle se traduit par l’interdiction, pour ces professionnels, de réaliser d’autres prestations que les prestations comptables à moins, d’une part, que cette activité ne soit marginale au regard de leur activité principale, et que, d’autre part, elle ne soit effectuée à l’occasion d’une mission comptable ou pour le compte d’un client ayant sollicité l’activité comptable du professionnel.

Le dispositif, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, levait cette seconde réserve pour tous les travaux non juridiques « d’ordre statistique, économique, administratif, social et fiscal ». En revanche, elle était maintenue pour les travaux juridiques.

Or la commission spéciale a observé que, en dehors de l’accomplissement de formalités déclaratives, comme l’édition des bulletins de paie ou la rédaction de déclarations d’impôts, que les experts-comptables peuvent d’ores et déjà accomplir à titre principal, il est difficile de cerner la nature exacte de travaux fiscaux ou sociaux non juridiques. En effet, en ces matières, il est avant tout question d’appliquer une règle de droit, qu’il soit social ou fiscal, et de conseiller le client en conséquence.

La commission spéciale a donc modifié l’article 20 bis pour limiter la levée de la restriction aux seules prestations « d’ordre statistique, économique ou administratif ». Cette rédaction devrait éviter de rallumer la guerre du chiffre et du droit, en conservant une avancée notable au bénéfice des experts-comptables.

Mes chers collègues, je vous invite à retirer vos amendements après avoir, je l’espère, levé les inquiétudes que vous avez exprimées.

Dans la suite de nos débats, le Gouvernement présentera un amendement tendant à proposer une nouvelle rédaction de l’article, amendement modifié par la commission spéciale. Au cours de ses travaux, la commission a estimé que le Gouvernement améliorait ainsi la rédaction de l’article en apportant des précisions utiles.

Je vous inviterai par conséquent, mes chers collègues, à adopter cet amendement qui, en outre, a reçu l’aval tant des avocats, par l’intermédiaire du Conseil national des barreaux, que des experts-comptables, ce que M. le ministre aura l’occasion de vous confirmer.

Si les deux professions ont réellement trouvé un accord sur cet amendement, toute difficulté est donc levée et vos amendements de suppression peuvent être retirés.

Lorsque la commission spéciale et le Gouvernement consentent des efforts communs, les choses avancent !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Quel était l’objectif du Gouvernement ? Il s’agissait de permettre aux experts-comptables, sans toucher aux règles existantes de l’accessoire, de réaliser certains actes – par exemple, établir des fiches de paie ou la déclaration relative au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE - pour le compte d’acteurs économiques dont ils n’étaient pas les comptables réguliers.

Nous souhaitions donner un statut aux travaux fiscaux et sociaux non juridiques que je viens d’évoquer. La rédaction de l’ordonnance de 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et de la loi de 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ne le permettait pas entièrement jusqu’ici. Nous avons cherché à créer un espace sans pour autant ranimer la guerre qu’évoquait M. Requier entre les professions du chiffre et du droit.

Le Gouvernement invite donc au retrait de ces amendements de suppression, faute de quoi il émettra un avis défavorable.

Pour plus de clarté, madame la présidente, j’exposerai dès à présent l’objet de l’amendement n° 1624 du Gouvernement, dont vient de parler M. le rapporteur, et qui est maintenant l’amendement n° 1624 rectifié.

À la lumière des discussions qui se sont déroulées devant la commission spéciale, et après avoir réuni les professionnels du chiffre et du droit, nous avons en effet trouvé une rédaction de l’article 20 bis qui convient à tout le monde.

Tout d’abord, notre amendement réintroduit une référence explicite à la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, afin de définir de façon précise l’accessoire direct de la prestation fournie et d’en redonner le cadre.

Ensuite, il définit les travaux et études en matière fiscale ou sociale que les experts-comptables sont autorisés à fournir à des personnes pour lesquelles ils ne réalisent pas de travaux comptables et qui ne peuvent être qu’administratifs ou techniques.

En aucune manière un expert-comptable ne pourra réaliser en matière fiscale ou sociale des consultations juridiques ou des actes sous seing privé auprès d’un client pour lequel il n’effectue pas également des travaux comptables. Et s’il effectue des travaux comptables pour un client, l’expert-comptable est alors soumis à l’a règle de l’accessoire de la loi de 1971 que nous rappelons ici.

Le Gouvernement clarifie ainsi cet article en identifiant les actes techniques et administratifs qui, sans être inscrits dans le cadre d’un mandat, peuvent être effectués par le comptable et qui ne sauraient en quoi que ce soit être des consultations juridiques.

Le Gouvernement a ainsi su tirer profit de ses nombreux échanges avec la commission spéciale, ainsi que de l’éclairage des professions du droit et du chiffre, qui ont su s’accorder, pour aboutir à un cet amendement. Il s’agit, de manière pragmatique, d’ouvrir un petit espace permettant aux experts-comptables de travailler plus simplement et aux entreprises d’avoir accès à ces prestations sans pour autant raviver une guerre inutile.

À ceux qui ont argué de ces difficultés pour justifier leurs amendements de suppression, je tiens à dire que nous avons entendu leurs préoccupations. Nous avons mené des concertations qui ont abouti la semaine dernière et qui, si elles étaient intervenues plus tôt, nous auraient sans doute permis de « coproduire » cette rédaction avec la commission spéciale, car M. le rapporteur et moi-même étions animés du même esprit.

Le Gouvernement et la commission ont heureusement su poursuivre leur travail dans un esprit constructif : l’amendement n° 1624 rectifié en est le résultat.

Mme la présidente. Monsieur Requier, l’amendement n° 235 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Monsieur Détraigne, l’amendement n° 289 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Yves Détraigne. Je maintiens également mon amendement.

Mme la présidente. Monsieur Grand, l’amendement n° 1341 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1341 est retiré.

La parole est à M. François Pillet, corapporteur.

M. François Pillet, corapporteur. Dans la mesure où cela pourrait rassurer certains de mes collègues, je tiens à préciser d’emblée que l’amendement n° 1624 du Gouvernement a été rectifié à la suite d’une demande de votre commission spéciale. Nous avons proposé deux rectifications, mineures, qui ont été acceptées par M. le ministre et qui me semblent mettre définitivement un terme au débat avec le Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 235 rectifié et 289 rectifié bis.

M. Jean-Marc Gabouty. Je comprends tout à fait les arguments de notre collègue Yves Détraigne, mais je pense que les garanties apportées sont suffisantes, étant donné que les experts-comptables et les commissaires aux comptes acquièrent une véritable expertise dans de nombreux domaines lorsqu’ils sont des conseillers permanents de l’entreprise.

Au niveau de l’entreprise, il existe en effet une continuité : les domaines comptable, fiscal et social ne sont pas séparés et forment un tout.

Ces professions sont présentes lors des conseils d’administration ou des assemblées générales. Elles doivent donc avoir un champ de compétences relativement large.

Il est un peu illusoire de vouloir empêcher les experts-comptables, souvent liés à la même structure d’entreprise que les professionnels du droit, mais à un autre titre, de réaliser des missions dans les domaines fiscal et social. Certes, ils n’ont pas à représenter l’entreprise juridiquement, mais ils doivent l’accompagner car le comptable, le fiscal et le social ont de fait des implications juridiques.

Il est plus opérationnel de procéder ainsi que de réunir deux professions différentes dans laquelle chacune garderait complètement sa spécificité, comme précédemment avec la création de la profession de commissaire de justice. Ce n’est pas en faisant appel à des compétences multiples que l’on créera pour autant un appel d’air en termes de candidatures.

Malgré les réticences compréhensibles de notre collègue Yves Détraigne, la position du Gouvernement et de la commission spéciale sur cet article me semble raisonnable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 235 rectifié et 289 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements en discussion commune.

L'amendement n° 1624 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 à 5

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ils peuvent également, sans toutefois en faire leur activité principale, effectuer tous travaux et études d’ordre statistique, économique, administratif, ainsi que tous travaux et études à caractère administratif ou technique, dans le domaine social et fiscal, et apporter, en ces matières, leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise.

« Ils ne peuvent réaliser les activités prévues à l’article 59 de la loi n° 71–1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, y compris dans le domaine social et fiscal, qu’au profit de personnes pour lesquelles ils assurent des missions prévues à l’article 2 de la présente ordonnance de caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où lesdites activités sont directement liées à ces missions. » ;

II. – Alinéa 6

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

quatre

La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Pillet, corapporteur. Comme je l’ai dit précédemment, la commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. L’amendement n° 1444 n'est pas soutenu.

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 502 rectifié ter est présenté par Mme Deromedi, M. Frassa, Mmes Kammermann et Garriaud–Maylam, MM. Calvet, Charon, Commeinhes, Laufoaulu et Magras, Mme Mélot et M. Milon.

L'amendement n° 1071 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 1473 est présenté par Mme Aïchi, M. Desessard, Mmes Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Labbé et Dantec.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 502 rectifié ter.

Mme Jacky Deromedi. Cet amendement tend à supprimer la possibilité, pour les non-professionnels du droit, d'exercer une activité de conseil juridique à titre accessoire. Il répond aux craintes des professions juridiques de se voir dépossédées de leurs attributions de conseil juridique au profit d’autres professions.

La séparation entre les métiers du droit et du chiffre est autant un acquis économique et déontologique qu’une prévention contre toute forme de mélange des genres tombant sous le coup de la criminalité financière. À cet égard, l’« affaire Enron », au début des années deux mille, nous a instruits sur les risques auxquels peuvent conduire les dispositions de l’alinéa dont nous proposons la suppression.