M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Michelle Meunier. Voilà maintenant plus de dix ans que la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a vu le jour : une loi utile et juste ; une loi extrêmement attendue, après tant de combats, tant de luttes, tant de promesses.

Il s’agissait d’un texte censé traiter de façon globale la question de l’accessibilité dans les dix ans, en joignant notamment la question des transports à celle de l’urbanisme et de la voirie, mais également en prenant en compte les différentes contraintes liées aux différents handicaps, qu’ils soient physiques, mentaux, sensoriels ou psychiques.

Malheureusement, dix ans après, force est de constater, pour le regretter, que cette loi de 2005 n’a pas été suffisamment soutenue sur le plan politique et n’a pas bénéficié des moyens nécessaires à sa mise en œuvre complète.

Combien de mairies, de stades, de commerces, d’hôtels, de restaurants, de salles de spectacle, de locaux associatifs, de préfectures, de caisses d’allocations familiales, de moyens de transport ou d’éléments de voirie sont toujours inaccessibles, voire dangereux ? Les défis de l’accessibilité à la vie sociale et professionnelle pour les personnes porteuses de handicap sont encore nombreux.

En 2011, sentant pointer l’échec dans l’application de sa propre loi, la majorité UMP d’alors a tenté, par la plume de notre collègue Éric Doligé, auteur de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, de substituer, dans l’article 1er de ce texte, au principe d’accessibilité des bâtiments publics un simple principe d’accès au service public. Or cette disposition portait en elle un risque grave de rupture d’égalité entre les citoyens et entre les collectivités territoriales.

Le Conseil national consultatif des personnes handicapées estimait alors que la liberté d’aller et de venir n’avait pas à être sacrifiée en intériorisant des contraintes qui résultaient indirectement de choix de politique économique et sociale. Heureusement, cet article 1er de la proposition de loi n’a jamais passé le cap du Sénat.

Quelques mois plus tard, Claire-Lise Campion s’est saisie du sujet, d’abord au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, puis à la demande du Premier ministre d’alors, Jean-Marc Ayrault. Que ressort-il de ses travaux ?

Il est clair que la dynamique était lancée et que des efforts considérables avaient été faits. Les logements nouvellement construits étaient désormais accessibles, conformément à la loi, ainsi que les nouveaux établissements recevant du public. Cependant, seulement 15 % de l’ensemble des travaux nécessaires avaient été réalisés à l’époque, c’est-à-dire à trois ans de l’échéance.

Ce constat n’était malheureusement pas une surprise, tant le chantier était important et tant les engagements des collectivités étaient variables en la matière.

Plutôt que de rester les bras ballants en théorisant notre impuissance collective ou de tenter un impossible et injuste retour en arrière, Claire-Lise Campion a préféré formuler quarante propositions concrètes pour débloquer la situation, pour mobiliser la société et nous permettre de progresser tous ensemble, coûte que coûte.

Le principe est clair : il s’agit de poursuivre une démarche réaliste et efficace en ciblant les priorités et en s’engageant concrètement sur la mise en place d’agendas d’accessibilité programmée en trois ou quatre ans. Autrement dit, il s’agit de se donner un délai supplémentaire, mais de l’utiliser à bon escient pour avancer réellement.

Parmi les autres propositions du rapport Réussir 2015, citons la mise en place de tables rondes des acteurs de l’accessibilité, l’organisation d’états régionaux rassemblant les collectivités locales et les secteurs d’activité concernés par la réglementation, ou encore l’élaboration d’un plan transversal de formation pour les acteurs chargés de la mise en accessibilité.

Parce qu’il s’agit véritablement d’un enjeu démocratique et d’un enjeu de société, il fallait aller vite et nous y sommes ! La loi d’habilitation du 10 juillet 2014 a d’abord autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi et destinées à rendre effective l’obligation de mise en accessibilité de la cité aux personnes en situation de handicap. L’ordonnance a été publiée le 26 septembre 2014. Il nous appartient aujourd’hui de la ratifier.

Cette ordonnance vise à simplifier les normes d’accessibilité, tout en sécurisant le cadre juridique de leur mise en œuvre par la création des agendas d’accessibilité programmée. On peut résumer l’état d’esprit qui a guidé cette démarche en reprenant les propos de Mme la ministre Marisol Touraine, pour qui la volonté du Gouvernement, en accordant des délais supplémentaires pour la mise en accessibilité des lieux publics et des transports, constitue non pas un recul, mais un choix pragmatique, dès lors qu’il n’est pas possible de faire en deux ans et demi ce qui n’a pas été réalisé depuis 2005.

Concrètement, que dit ce texte ? Le chapitre 1er aborde la mise en œuvre du dispositif des agendas d’accessibilité programmée. Soyons clairs : tous les établissements recevant du public sont et restent soumis à l’obligation d’accessibilité, car il n’existe pas de dérogation possible en la matière. Dès lors, ils doivent faire connaître leur situation, soit en attestant du respect des règles d’accessibilité, soit en déposant un agenda d’accessibilité programmée. L’absence de dépôt de l’agenda expose à des sanctions financières, administratives et pénales, tout comme le non-respect de cet agenda, après son dépôt.

Ce chapitre institue également un fonds national d’accompagnement de l’accessibilité universelle, alimenté par le produit des sanctions et destiné à financer la recherche et le développement en matière d’accessibilité. Ce fonds sera aussi mobilisable pour la remise aux normes d’établissements recevant du public dont la situation financière freine les travaux de mise en accessibilité.

Le chapitre II concerne, quant à lui, les obligations d’accessibilité en matière de transport public et les schémas directeurs d’accessibilité des services. Les points d’arrêt identifiés prioritaires sont précisés, ainsi que les mesures de substitution prévues en cas d’impossibilité technique avérée.

Le chapitre III prévoit, enfin, des mesures telles que l’extension de l’autorisation d’accès des chiens guides d’aveugle ou d’assistance dans les transports et lieux publics au bénéfice des détenteurs de la carte de priorité pour personne handicapée, ou encore la formation des professionnels appelés à être en contact avec les usagers et clients dans les ERP.

Le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui, à l’issue des travaux de la commission, est un texte de consensus, d’équilibre et de progrès. Il a d’ailleurs été adopté à une très large majorité, tout comme les amendements présentés par les deux rapporteurs, dont je salue la qualité du travail.

Les amendements votés par la commission des affaires sociales ont amélioré le texte, tout en respectant son équilibre général, issu du long travail de concertation mené à l’automne 2013 avec l’ensemble des associations d’élus, des représentants d’usagers et des acteurs économiques. Les dispositions qu’ils comportent apportent des précisions utiles en réponse à des interrogations ou à des inquiétudes légitimes exprimées par les associations.

On pourrait à juste titre vouloir aller plus loin, plus vite, plus fort, au risque de rompre cet équilibre fragile, mais indispensable, au risque de ne pouvoir aller au bout de la démarche et de devoir tout reprendre à zéro.

Je le répète : le texte issu des travaux de la commission est pragmatique. Il encadre mieux les délais de dépôt des agendas d’accessibilité programmée et les modalités de prorogation ; il prévoit une meilleure alimentation du fonds national d’accompagnement de l’accessibilité universelle en lui allouant l’ensemble du produit des sanctions financières prévues par l’ordonnance en matière de règles de dépôt, de suivi et d’exécution des Ad’AP et des schémas départementaux d’accessibilité des services.

Ce texte renforce les règles applicables lorsqu’une assemblée générale de copropriétaires refuse des travaux de mise en accessibilité d’un ERP. Il élargit à la formation continue des professionnels en contact avec les usagers d’un établissement recevant du public l’acquisition de compétences dans les domaines de l’accueil et de l’accompagnement des personnes handicapées.

Ce texte prévoit, enfin, de faciliter l’accès au service civique des jeunes en situation de handicap en leur ouvrant, jusqu’à l’âge de trente ans, la possibilité de s’y engager. Au lendemain de la mise en place du service civique universel, cette mesure prend tout son sens, chère Claire-Lise Campion.

Je n’oublie pas non plus, parmi les apports de la Haute Assemblée, l’amendement qui sera présenté en séance par les rapporteurs concernant les points d’arrêt du réseau de transports scolaires pour les élèves handicapés.

Mes chers collègues, notre responsabilité est grande aujourd’hui, car nous sommes très attendus : le texte qu’adoptera le Sénat aura des conséquences directes sur la vie de milliers de personnes et de leurs familles, de milliers de collectivités et de leurs habitants. Il n’aurait jamais dû exister. Quoi qu’il en soit, il nous amène aujourd’hui à prendre nos responsabilités et à continuer d’avancer vers l’accessibilité universelle, et à avancer vraiment !

Certains voudraient reculer, mais pour faire quoi ? Certains voudraient aller plus vite, mais comment faire ? Certains voudraient prendre un peu de temps, mais nous sommes déjà en 2015 ! La démarche proposée aujourd’hui est la bonne : elle est équilibrée, pragmatique, concrète, ambitieuse. Elle est surtout la seule qui puisse fonctionner efficacement et apporter des solutions, dans tous les cas de figure et sur l’ensemble du territoire.

Mes chers collègues, au nom de tous les sénateurs et sénatrices socialistes, je vous appelle donc à soutenir la dynamique proposée par les rapporteurs et à voter ce texte, enrichi par le Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Isabelle Debré. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, voulue par le président Jacques Chirac (Applaudissements sur les mêmes travées.), a consacré pour la première fois le principe d’une société accessible à tous, aux personnes en situation ou non de handicap, et à tous les moments de la vie.

Le texte de l’ordonnance dont nous parlons aujourd’hui vise plus particulièrement l’accessibilité dans la cité, aux bâtiments, qu’ils soient publics ou privés, à la voirie, aux transports. Dix ans après la loi handicap, il s’agit de poursuivre le travail entrepris. Certes, nous avions alors fait preuve d’optimisme en fixant une date butoir à l'échéance de dix années, mais n’était-ce pas nécessaire pour lutter contre le poids des inerties et une certaine indifférence ?

Mes chers collègues, je vous engage à vous reporter aux conclusions du rapport que Claire-Lise Campion et moi-même avons publié en 2012, à l’issue d’une mission de contrôle de l’application de la loi handicap. Mon sentiment est que la fixation d’un délai était indispensable pour tirer les leçons des mauvais résultats précédents, notamment de l’absence d’incidence de la loi de 1975.

Seul un objectif ambitieux de portée universelle pouvait éveiller les consciences et créer une nouvelle dynamique en faveur de l’accessibilité. Même si les réalisations se sont trouvées limitées par un ensemble de contraintes techniques, financières et administratives, nous avons réellement changé de logique, et nul ne remet en question la poursuite de la démarche engagée.

Il faut à présent tirer les leçons de dix années d’application de la loi susvisée et des difficultés qui ont été rencontrées sur le terrain, mes chers collègues élus.

Il y a lieu de distinguer les retards liés à une mauvaise volonté des acteurs et ceux qui sont imputables à des problèmes de financement ou à des considérations de nature technique. En cela, les agendas d’accessibilité programmée créés par l’ordonnance, qui fixeront des échéanciers et des programmations financières, sont une réponse satisfaisante, que nous appelions de nos vœux dès 2012.

De même, le travail sur l’ajustement de certaines normes d’accessibilité était nécessaire, car nombre d’entre elles se sont révélées trop rigides et peu opérationnelles. En tant qu’élus locaux, nous connaissons tous des exemples de situations ubuesques où l’accessibilité est venue emprunter des chemins tortueux. L’ordonnance maintient des objectifs exigeants répondant aux attentes des personnes handicapées, tout en faisant preuve de réalisme : certes, l’accessibilité doit être universelle, mais le bon sens doit prévaloir. Le travail des rapporteurs a précisé et ajusté les dispositifs mis en place. Je tiens à les féliciter pour leur recherche d’un équilibre difficile à atteindre en raison d’exigences souvent contradictoires.

Si je me réjouis que nous fassions avancer les choses aujourd’hui concernant l’accès des personnes handicapées aux établissements publics et privés, à la voirie et aux transports, mon propos visera également d’autres enjeux.

Sans vouloir établir une hiérarchie parmi les nombreux sujets liés à l’accessibilité, tous cruciaux pour les personnes en difficulté ou handicapées, l’un des chantiers qui me semble absolument prioritaire et me tient le plus à cœur est l’accès à l’éducation et à l’instruction.

En effet, l’accession à une vie « normale » et riche passe avant tout par la possibilité d’accéder à la connaissance. Or, aller à l’école, faire des études représente toujours un parcours du combattant pour les jeunes en situation de handicap et leur famille, malgré les engagements pris en 2005.

Certes, la loi du 11 février 2005 a permis une augmentation importante de la scolarisation des enfants handicapés en milieu scolaire ordinaire : en 2010, celle-ci avait augmenté d’un tiers. Cet objectif a pu être atteint en partie grâce à la reconnaissance de nouvelles catégories de handicap, comme les handicaps cognitifs et psychiques. Un rapport de notre ancien collègue Paul Blanc a toutefois relevé que 20 000 enfants étaient encore sans solution de scolarisation, dont 5 000 demeuraient chez leurs parents, en attente d’une aide.

Certains enfants ne sont pas scolarisables en raison de la gravité de leur handicap. Mais, d’une manière générale, les associations signalent les nombreuses difficultés rencontrées par les familles : manque d’accompagnement, problèmes d’aménagement des locaux ou de places dans des classes de proximité. Lors de nos travaux, nous avions par ailleurs constaté de grandes différences de situation selon les départements, concernant notamment la durée des temps de scolarisation.

Je voudrais attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur l’absence d’un outil statistique national qui nous permettrait de déterminer précisément le nombre d’enfants non scolarisés, mais scolarisables, sur l’ensemble du territoire. Il faudrait également pouvoir apprécier plus précisément la suite du parcours de ces jeunes. Moins nombreux au collège et au lycée, ils accèdent difficilement aujourd’hui à un parcours universitaire.

Les parcours chaotiques imposés aux jeunes handicapés révèlent deux failles du système actuel : l’évaluation insuffisante des besoins et l’absence de suivi des situations individuelles. Nous n’avons pas progressé sur ces points, alors que nous recommandions une large concertation sur la création d’un service spécialisé d’accompagnement scolaire et social à l’échelon départemental.

Toute la difficulté de l’intégration de ces enfants et adolescents réside dans leur singularité : à chaque handicap doit correspondre une réponse personnalisée.

Pour les jeunes, l’accès à un premier emploi constitue un véritable défi, tant professionnel que personnel, au regard du handicap qu’ils cherchent à dépasser. Le taux de chômage des personnes handicapées demeure en effet deux fois plus important que celui du reste de la population. Pourtant, la capacité et la motivation des personnes handicapées exerçant un emploi ne sont plus à démontrer, surtout lorsque toutes les mesures appropriées ont été prises pour adapter le poste et l’organisation du travail. Ainsi faut-il poursuivre l’aménagement des postes de travail, outil indispensable à l’insertion et au maintien dans l’emploi.

En conclusion, la condition pour mener à bien le projet d’une société ouverte à tous réside dans la mise en place d’une politique transversale et universelle, que je souhaitais rappeler en évoquant les thèmes de l’éducation et de l’emploi.

Le groupe Les Républicains a regretté le recours à la procédure autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance devenu nécessaire en raison du retard du Gouvernement à présenter un texte en vue de l’échéance de 2015. Cependant, malgré notre désaccord sur ce point, nous répondrons à l’attente de nos concitoyens en votant le présent projet de loi, nouvelle étape nécessaire sur le chemin de l’accessibilité. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, nombre d’entre vous ont évoqué, à raison, la loi de 2005 – en quelque sorte le cœur du sujet traité ce jour –, ce dans un cadre large : les politiques du handicap en général.

À la fin de l’année dernière s’est tenue la conférence nationale du handicap, conformément à la loi précitée imposant l’organisation d’une telle conférence tous les trois ans. Toujours en vertu de ce texte, le Gouvernement est en train de préparer un rapport sur l’ensemble des politiques publiques sur le handicap. Ce rapport sera présenté au Conseil national consultatif des personnes handicapées au début du mois de juillet, puis transmis au Sénat et à l’Assemblée nationale à la fin de ce même mois.

De façon à apaiser vos inquiétudes, nées à la suite d’un sondage qui a été effectué sur les moyens publics dédiés au handicap, je vous indique que, chaque année, ceux-ci s’élèvent à 43 milliards d’euros. Cette somme comprend l’argent à la fois de l’État, de l’assurance maladie et des collectivités locales. Les politiques publiques en la matière sont donc extrêmement fortes.

À cet égard, je tiens à le souligner, les associations réalisent un travail immense et remarquable, mais avec de l’argent public, c’est-à-dire l’argent de tous ! Il nous revient à nous tous – moi en tant que secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, vous en tant que parlementaires – de l’expliquer à nos concitoyens. Si c’est une évidence pour les parlementaires que vous êtes, tel n’est pas toujours le cas pour tous les Français.

Concernant la scolarisation des enfants en situation de handicap, je souscris à l’essentiel des propos de Mme Debré. C’est effectivement l’une des priorités à la fois de mon ministère et du celui de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

C’est pourquoi nous avons engagé une politique volontariste de titularisation d’auxiliaires de vie scolaire, afin que les enfants en situation de handicap soient de plus en plus nombreux à être accompagnés au cours de leur scolarité. Actuellement, 250 000 enfants handicapés sont scolarisés.

C’est aussi pourquoi nous avons entamé une phase de transfert des classes des instituts médico-éducatifs dans les écoles et les collèges de l’éducation nationale, pour favoriser la scolarisation des enfants en situation de handicap au milieu des autres enfants dès leur plus jeune âge. En effet, pour faire changer le regard que porteront demain les adultes sur la société, il faut au préalable habituer les enfants à être mélangés.

Tous ces éléments, vous les trouverez, mesdames, messieurs les sénateurs, dans le rapport que le Gouvernement vous remettra à la fin du mois de juillet. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et visant à favoriser l’accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et visant à favoriser l'accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap
Article 2

Article 1er

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées est ratifiée.

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées et visant à favoriser l'accès au service civique pour les jeunes en situation de handicap
Article additionnel après l’article 2

Article 2

La même ordonnance est ainsi modifiée :

1° L’article 12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les employeurs des professionnels mentionnés au premier alinéa du présent article leur proposent des formations à l’accueil et à l’accompagnement des personnes handicapées. »

2° L’article 18 est ainsi rédigé :

« Art. 18. – Le I de l’article 1er est applicable aux copropriétés des immeubles bâtis dont la demande de permis de construire est déposée à compter du 1er janvier 2015. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 10 rectifié ter, présenté par MM. Raison, Cornu, Vaspart, Perrin, de Nicolaÿ, B. Fournier et Joyandet, Mme Duchêne, M. Grosperrin, Mme Deromedi, MM. Leleux, Chasseing et Chaize, Mmes Lamure et Bouchart et MM. Gremillet et Husson, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Michel Raison.

M. Michel Raison. J’ai eu la chance et la fierté de voter la loi de 2005, car notre pays connaissait un retard considérable en matière d’autonomie des personnes handicapées.

Cela étant, l’ordonnance du 26 septembre 2014, qui réajuste quelque peu les délais et assouplit un certain nombre de mesures que nous n’arrivions pas à appliquer, me convient.

Dans un élan de grande générosité, la commission des affaires sociales a proposé de modifier l’article 12 de cette ordonnance relatif à la formation à l’accueil et à l’accompagnement des personnes handicapées, en étendant à la formation professionnelle continue l’obligation de prévoir l’acquisition de connaissances sur l’accueil et l’accompagnement des personnes handicapées pour les professionnels en contact avec cette clientèle.

Toutefois, cette nouvelle obligation remet en cause l’équilibre issu de la concertation entre les parties prenantes, qui avaient choisi de privilégier la sensibilisation de tous les professionnels en contact avec les usagers et les clients via la réalisation d’un livret d’accueil sous l’égide de la Délégation ministérielle à l’accessibilité.

Ce livret, inséré dans le registre d’accessibilité obligatoire pour tous les établissements recevant du public, est actuellement en cours de diffusion auprès des commerçants et de leurs collaborateurs pour les sensibiliser à l’accueil et à l’accompagnement des personnes handicapées, ce qui n’est pas si naturel, et les lacunes sont courantes en la matière.

Dès lors, il est regrettable que le projet de loi de ratification remette en cause les engagements initiaux en imposant une obligation de formation des salariés en poste, à l’heure où nous souhaitons tous, mes chers collègues, une simplification de la vie des entreprises. Notre pays étouffe sous les normes et les contraintes multiples.

En l’espèce, des accords ont été passés, afin que les personnes chargées de l’accueil soient suffisamment sensibilisées. De surcroît, des problèmes financiers risquent d’apparaître. Soyons vigilants : étant d’origine agricole, je sais comment on ponctionne les fonds de formation pour tenter d’alimenter un certain nombre d’organismes…

M. Roland Courteau. Oh là là !

M. Michel Raison. Par ailleurs, je tiens à signaler la complexité du dispositif : parviendra-t-on à tenir les délais et à trouver le nombre de formateurs ?

Cela étant, je ne doute pas que la Haute Assemblée votera cet amendement de bon sens.

M. le président. L'amendement n° 1 rectifié, présenté par Mmes Imbert et Gruny, MM. Cornu, Vaspart, D. Laurent, Gilles, Morisset, Commeinhes et Frassa, Mmes Morhet-Richaud et Deromedi, MM. Lefèvre, Mandelli, Pierre et Falco et Mme Bouchart, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

à l'accueil et

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à supprimer les termes « à l’accueil et », dans la mesure où le présent projet de loi rend déjà obligatoire l’acquisition des connaissances dans le domaine de l’accueil et de l’accompagnement des personnes handicapées lors de la formation des professionnels exerçant au sein des établissements recevant du public, comme l’a rappelé M. Raison.

La notion d’accueil paraît trop large et relève à mon sens de la formation professionnelle et des programmes proposés par les organismes de formation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Claire-Lise Campion, corapporteur. L’amendement n° 10 rectifié ter tend à revenir sur la position adoptée par la commission des affaires sociales. Celle-ci a en effet voté un amendement visant à ce que les employeurs de professionnels en contact avec le public dans un établissement recevant du public leur proposent des formations à l’accueil et à l’accompagnement des personnes handicapées. Il s’agit non pas de rendre obligatoires ces formations pour les salariés, mais de créer une obligation de moyens pour les employeurs. Cette disposition complète des mesures qui ont déjà été prévues à l’article 12 de l’ordonnance pour la formation initiale de ces mêmes professionnels.

En outre, contrairement à ce qui figure dans l’objet de l’amendement de M. Raison, la position de la commission ne remet pas en cause l’équilibre issu de la concertation. Il est précisément écrit à la page 50 du rapport sur l’ajustement de l’environnement normatif : « le groupe de concertation recommande la généralisation de la formation des personnels en contact avec le public sur les besoins et attentes des usagers handicapés. » Le livret d’accueil, qui a été établi sous l’égide de la Délégation ministérielle à l’accessibilité, constitue l’un des outils pour remplir cet objectif de formation, mais il ne doit pas être le seul.

Je citerai quelques éléments précis illustrant la nécessité d’acquérir des réflexes simples pour être en mesure d’accueillir correctement une personne en situation de handicap. Le manque de formation peut conduire à des maladresses qui seront très mal vécues par les personnes en situation de handicap. Se former aux gestes de premiers secours constitue une évidence pour bon nombre de professionnels, qui estiment indispensable de savoir utiliser un défibrillateur en cas de besoin. De la même façon, il serait tout à fait regrettable qu’un professionnel amené à accueillir du public ne sache pas quelle attitude adopter lorsqu’il doit accueillir une personne malvoyante ou se déplaçant en fauteuil roulant.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 10 rectifié ter. Il en est de même pour l’amendement n° 1 rectifié.