M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

Le délai de départ volontaire est aujourd'hui fixé à trente jours, sachant que, selon la directive européenne, les gouvernements peuvent l’établir librement dans une fourchette comprise entre sept et trente jours.

Que constate-t-on ? En réalité, le dispositif actuel ne fonctionne pas très bien et, objectivement, le but est souvent de rester le plus longtemps possible sur le territoire. Donc, plus le délai est important, plus l’éloignement est difficile à mettre en œuvre.

C’est sur le fondement de ce constat de fait que la commission a souhaité établir le délai à sept jours.

Je précise que des recours peuvent ensuite être engagés par les migrants contre cette obligation de quitter le territoire dans un délai de sept jours. Les procédures seront traitées dans de meilleurs délais et, selon leurs résultats, les étrangers seront ou ne seront pas éloignés plus rapidement.

Notre décision témoigne donc d’un souci d’efficacité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est favorable sur cet amendement n° 136, la réduction du délai à sept jours n’étant effectivement pas appropriée.

Le délai de trente jours, institué par la loi du 16 juin 2011, s’inscrit dans le cadre de la transposition de la directive européenne et répond au principe de priorité accordée aux retours volontaires.

Sa réduction à sept jours n’est pas réaliste dans les faits. Ce délai permet en effet de préparer les conditions du retour et d’en garantir la réussite. En le restreignant, nous multiplierions les recours et contentieux destinés à obtenir une prorogation.

Les trente jours prévus actuellement constituent un délai raisonnable, contribuant au développement souhaité des retours volontaires.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 136.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 120, présenté par MM. Kaltenbach et Leconte, Mme Tasca, MM. Sueur, Delebarre, Marie, Desplan et Sutour, Mmes S. Robert, D. Gillot, Jourda, Yonnet et Cartron, M. Courteau, Mme Khiari, M. Yung et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 11, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, telles que la durée du séjour, l’existence d’enfants scolarisés et d’autres liens familiaux et sociaux

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement vise à transposer le 2. de l’article 7 de la directive Retour. Il s’agit de préciser ce qu'il faut entendre par les « circonstances propres à chaque cas » motivant l’accord pour une prolongation du délai de départ volontaire. Cette précision facilitera la compréhension des nouvelles dispositions et en garantira une application uniforme sur le territoire national.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission a estimé qu’il n’était pas opportun de fixer une liste non exhaustive de ces circonstances. Cela alourdirait à la fois les contraintes et le texte, et ce sans utilité pratique. En conséquence, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est favorable dès lors qu’il s’agit ici de reprendre les termes mêmes de la directive dans la loi. D’ailleurs, monsieur le rapporteur, vous vous êtes référé à la directive lors de l’examen d’un précédent amendement… Vous êtes donc dans une forme de contradiction !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 120.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 121, présenté par MM. Kaltenbach et Leconte, Mme Tasca, MM. Sueur, Delebarre, Marie, Desplan et Sutour, Mmes S. Robert, D. Gillot, Jourda, Yonnet, D. Michel et Cartron, M. Courteau, Mme Khiari, M. Yung et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Les deuxième à quatrième alinéas du 3° sont supprimés ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Le présent amendement vise à mieux encadrer les critères définissant le risque de fuite.

Actuellement, celui-ci s'établit, pour l'essentiel des cas, sur la seule irrégularité du séjour. Le but serait de ne conserver, pour le caractériser, que les cas dans lesquels l'étranger a, de façon délibérée et caractérisée, manifesté une volonté de se soustraire à ses obligations dans le but de prendre la fuite. Les caractéristiques fondées sur le seul maintien irrégulier sur le territoire sont donc supprimées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement qui a pour objet de supprimer trois des quatre critères permettant de caractériser un risque de fuite est contraire à la position de la commission.

Je tiens à rappeler que la faible effectivité des mesures d’éloignement s’explique par la soustraction des étrangers aux mesures d’éloignement. Le taux d’exécution des OQTF – il est question ici, non pas des personnes placées en rétention, mais uniquement de celles qui ont une obligation de quitter le territoire national – est de 19 %. Efficacité : 19 %, mes chers collègues ! Or l’adoption de cet amendement affaiblirait fortement ce taux d’exécution des OQTF.

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’avis est défavorable, car cet amendement tend à réduire trop nettement les critères.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 121.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 43 rectifié bis, présenté par MM. Leconte, Yung et Sutour, Mmes Yonnet, Jourda et Espagnac, M. Durain et Mme Lepage, est ainsi libellé :

Alinéa 16

1° Remplacer le mot :

assortit

par les mots :

peut assortir

2° Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. L’article 14 du projet de loi tend à prévoir que l’autorité administrative a compétence liée s’agissant du prononcé d’une interdiction de retour sur le territoire lorsque aucun délai de départ volontaire n’a été accordé à l’étranger ou lorsque celui-ci n’a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti.

Le présent amendement vise à laisser au préfet – M. le rapporteur aime souvent ce genre de dispositions – une marge d’appréciation concernant le prononcé de l’interdiction de retour, afin qu'elle ne soit pas automatique.

L'automaticité d'une telle mesure encourt effectivement l'inconstitutionnalité. Ainsi, le Conseil constitutionnel avait déjà censuré l'interdiction de retour automatique liée, à l'époque, aux arrêtés de reconduite à la frontière pris « sans égard à la gravité du comportement » de l’intéressé.

En outre, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, indique, dans son avis du 21 mai 2015 relatif au présent projet de loi, qu'elle « ne peut que déplorer cette automaticité de principe de l'interdiction de retour, ce d'autant qu'elle est de nature à nourrir une augmentation du contentieux ».

Cet amendement tend également à rétablir le délai maximal de trois ans, contre celui de cinq ans qui est prévu dans le texte issu de la commission des lois du Sénat.

M. le président. L'amendement n° 79, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Remplacer le mot :

assortit

par les mots :

peut assortir

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je vais considérer cet amendement comme défendu, puisque nous nous inscrivons dans la même philosophie que celle qui vient d’être présentée par notre collègue Jean-Yves Leconte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements tendant à prévoir une possibilité de prononcer l’interdiction de retour, l’amendement n° 43 rectifié bis visant également à réduire la durée maximale de cette mesure de cinq à trois ans.

La directive Retour prévoit plusieurs cas dans lesquels l’interdiction de retour doit être prononcée. L’administration sera alors tenue de prendre en compte un certain nombre d’éléments, relatifs notamment à la vie privée et familiale, pour en moduler la durée.

L’amendement contredit l’esprit de la directive. Il a d’ailleurs été repoussé par la commission à l’Assemblée nationale.

En outre, le retour à une durée de trois ans, au lieu de cinq, est contraire à la position de la commission, qui a souhaité rétablir le délai prévu par la directive.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’avis est défavorable, l’automaticité étant prévue par la directive.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 79.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 198, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 26

Remplacer les références :

des 1° à 5°, du 7° ou 8°

par les références :

des 3°, 5°, 7° ou 8°

II. – Alinéa 29

Remplacer la référence :

du 6°

par les références :

des 1°, 2°, 4° ou 6°

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. L’examen du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile a donné lieu à un long échange, dans cette assemblée, sur la question de l’éloignement des déboutés du droit d’asile. Le ministre de l’intérieur avait alors pris l’engagement que ce sujet serait traité sérieusement, et après un examen attentif, dans le cadre du présent projet de loi.

Le Gouvernement a proposé d’accélérer la procédure contentieuse des obligations de quitter le territoire français prises après rejet définitif d’une demande d’asile par l’OFPRA ou par la Cour nationale du droit d’asile. Ces recours seraient jugés deux fois plus vite, le débouté ayant un délai de recours de deux semaines, contre quatre actuellement, le recours devant être jugé en juge unique en six semaines, contre trois aujourd'hui.

Pour sécuriser ce dispositif, l’analyse juridique que nous avions faite - validée par le Conseil d’État, qui n’a soulevé aucune objection au moment où il a été saisi du texte pour avis -, c’est qu’il fallait étendre cette nouvelle voie de recours à tous les cas dans lesquels l’OQTF n’assortit pas une décision de rejet d’une demande de titre de séjour.

Dans ce type de situations, le préfet tire les conséquences d’une situation de séjour irrégulier, qui, selon les cas, procède de l’entrée irrégulière ou du maintien sans droit sur le territoire.

Dans tous les cas, le préfet procède certes à un examen individuel de situation, mais il n’a pas été saisi d’une demande de titre de séjour. La procédure contentieuse peut donc être plus rapide.

La commission des lois du Sénat a modifié l’équilibre de cette disposition en réduisant son champ d’application aux seuls déboutés du droit d’asile. Cela conduit dès lors à instituer, sans justification, une différence de traitement à l’égard des demandeurs d’asile déboutés, ce qui présente en conséquence un risque d’inconstitutionnalité au titre de la rupture d’égalité.

C’est donc la disposition du projet de loi consacrée aux déboutés du droit d’asile que vous avez fragilisée dangereusement. Vous l’aviez pourtant longuement appelée de vos vœux lors de l’examen du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile.

Le présent amendement vise à rétablir la disposition votée à l’Assemblée nationale en première lecture, qui assure la constitutionnalité du texte et qui, en outre, est cohérente avec l’esprit de simplification des procédures juridictionnelles présidant à la réforme contentieuse concernant le placement en rétention que nous soutenons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, pour des raisons que je voudrais expliciter de manière à la fois concise et précise.

Le Gouvernement entend, par ce projet de loi, modifier les délais et moyens de recours contre les obligations de quitter le territoire français.

On distingue trois types d’OQTF : les obligations de quitter le territoire français sans délai, les obligations de quitter le territoire français avec délai et les obligations de quitter le territoire français après placement en rétention. Sans entrer dans le détail, j’indique que le Gouvernement propose de modifier les délais de recours et les délais accordés aux magistrats pour se prononcer. Au final, cela reviendrait à créer quatre régimes différents.

À vouloir agir sur tous les fronts en même temps, on n’est pas efficace, surtout en matière de procédure accélérée. C’est pourquoi la commission des lois a essayé de cibler une action particulière à une procédure accélérée pour un sujet particulier.

Nous avons évoqué ensemble à plusieurs reprises dans cet hémicycle la problématique des déboutés du droit d’asile : 66 000 demandes, 14 000 accords, 50 000 déboutés du droit d’asile. Dans la loi relative à la réforme du droit d’asile, que nous avons examinée au printemps dernier, nous avions voté une disposition aux termes de laquelle le préfet délivre une OQTF dès lors que la personne a été définitivement déboutée de sa demande. Si l’on veut rendre cette OQTF vraiment efficace et lutter effectivement contre les déboutés du droit d’asile, il est nécessaire de préciser les termes de cette procédure accélérée (M. Roger Karoutchi opine.), à savoir un recours possible pendant un délai de quinze jours et un jugement intervenant dans un délai d’un mois.

Cibler ainsi une action est probablement le gage d’une bien plus grande efficacité. Cela vaut mieux que de créer quatre procédures accélérées différentes, source de complexité.

Sans trahir la pensée des uns et des autres, en particulier celle de l’une des personnes que nous avons auditionnées, je peux dire que l’administration reconnaît qu’elle est plus efficace lorsqu’un objectif précis lui est assigné, car elle peut alors s’organiser.

Dès lors, on peut espérer qu’avec le dispositif proposé par la commission les déboutés du droit d’asile pourront être éloignés plus rapidement ; c’est notre objectif et nous le croyons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 198.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 81, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 33

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au premier alinéa du II, les mots : « les quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « un délai de deux jours ouvrés » ;

II. – Après l’alinéa 34

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À la première phrase du premier alinéa du III, les mots : « quarante-huit heures »

sont remplacés par les mots : « un délai de deux jours ouvrés » ;

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En 2013, 69,3 % des personnes placées en rétention l’étaient sur la base d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire.

Malgré l’accompagnement des associations chargées de l’aide à l’exercice des droits, comme le révèle La Cimade, le délai de recours de quarante-huit heures contre ces OQTF entrave considérablement les droits de la défense. Rassembler des pièces, mobiliser les proches, rédiger les recours et faire le lien avec les avocats est bien difficile dans un délai aussi court.

Cette difficulté devient une impossibilité notamment pour des personnes placées en rétention le vendredi soir, dont le délai de recours expire le dimanche soir. La présence réduite des associations, des avocats, des travailleurs sociaux susceptibles d’intervenir contrarie grandement le droit à un recours effectif.

La situation est encore plus délicate pour les personnes enfermées dans des locaux de rétention – 3 309 en 2013 –, qui ne bénéficient pas de l’aide à l’exercice des droits des associations et sont souvent transférées vers des centres de rétention administrative alors que le délai de recours est bien entamé, voire expiré.

C’est pourquoi nous vous proposons de remplacer le délai de quarante-huit heures par un délai de deux jours ouvrés afin de rétablir un minimum de possibilité de contester cette mesure d’éloignement.

M. le président. L'amendement n° 122, présenté par MM. Kaltenbach et Leconte, Mme Tasca, MM. Sueur, Delebarre, Marie, Desplan et Sutour, Mmes S. Robert, D. Gillot, Jourda, Yonnet, D. Michel et Cartron, M. Courteau, Mme Khiari, M. Yung et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 33

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au premier alinéa du II, les mots : « les quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « un délai de deux jours ouvrés » ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement étant quasi identique au précédent, je considère qu’il a été défendu, monsieur le président.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 123 est présenté par MM. Kaltenbach et Leconte, Mme Tasca, MM. Sueur, Delebarre, Marie, Desplan et Sutour, Mmes S. Robert, D. Gillot, Jourda, Yonnet, D. Michel et Cartron, M. Courteau, Mme Khiari, M. Yung et les membres du groupe socialiste et républicain.

L'amendement n° 173 rectifié est présenté par Mmes Benbassa, Aïchi, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 34

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du premier alinéa du III, les mots : « les quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « un délai de deux jours ouvrés » ;

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 123.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l'amendement n° 173 rectifié.

Mme Esther Benbassa. En vertu de l’article L. 561-2 du CESEDA, l’étranger peut demander au président du tribunal administratif l’annulation d’une décision de placement en rétention ou d’assignation à résidence dans les quarante-huit heures suivant sa notification.

Cet amendement a pour objet de porter ce délai de quarante-huit heures contre les assignations à résidence à un délai de deux jours ouvrés. Il s’agit par cette mesure de permettre la mise en œuvre effective de ce droit de recours durant le week-end.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

L’objectif des auteurs de ces quatre amendements, selon les cas, est de substituer au délai de quarante-huit heures un délai de deux jours ouvrés s’agissant du délai de recours contre une OQTF sans délai de départ volontaire, une décision de placement en rétention ou une assignation à résidence, au motif que ce droit peut difficilement être exercé le week-end.

En matière de procédure, le samedi est considéré comme un jour normal. C’est donc seulement le dimanche qui pourrait poser problème. Or, en la circonstance, dès lors que le délai de quarante-huit heures s’applique, l’inclusion éventuelle d’un dimanche ne soulève pas de difficulté particulière.

Il importe de donner toute leur efficacité aux procédures sans remettre en cause le droit des justiciables à faire valoir devant la juridiction administrative leurs points de contestation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 123 et 173 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 82, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 35 et 36

Supprimer cet alinéa.

II. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

…- La dernière phrase du III de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est supprimée.

…- La dernière phrase de l’article L. 552-1 du même code est supprimée.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Les alinéas 35 et 36 de cet article permettent la mise en place de salles d’audience reliées aux tribunaux en direct par des moyens de communication audiovisuels.

La délocalisation de ces audiences est une idée ancienne que le précédent gouvernement avait tenté de mettre en œuvre à l’intérieur même des centres de rétention de Marseille et de Toulouse. Ces tribunaux délocalisés avaient dû fermer à la suite de la censure de la Cour de cassation en 2008. Malgré cela, des salles ont subsisté, à quelques pas cette fois des centres de rétention de Coquelles et de Marseille.

Depuis le 14 octobre 2013, malgré l’opposition marquée d’un certain nombre de parlementaires, dont moi-même, de personnalités, de magistrats, etc., des justiciables sont jugés dans un tribunal délocalisé sur la même parcelle que le centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot – que je connais bien –, qui est accolé à une caserne de CRS. Rien que cela devrait amener à réfléchir ! (M. Philippe Dallier s’esclaffe.)

Le gouvernement actuel projette par ailleurs d’ouvrir prochainement une autre salle au sein de la zone d’attente des personnes en instance de Roissy, la fameuse ZAPI, une annexe du tribunal de grande instance de Bobigny…

M. Philippe Dallier. Effectivement !

Mme Éliane Assassi. … pour juger les personnes étrangères non admises sur le territoire.

Sous le prétexte, pourtant non formellement établi, de rationaliser – encore rationaliser ! – la procédure et de réduire les coûts des escortes de police, le Gouvernement est disposé à sacrifier les principes fondamentaux de la justice.

Que dire de l’effectivité de la publicité des débats lorsqu’une audience est organisée loin de la cité et à proximité des zones aéroportuaires, souvent mal desservies par les transports en commun ?

J’invite en particulier nos collègues parisiens à se rendre par les transports en commun à la zone de Roissy ; ils verront que ce n’est guère évident.

Il est légitime de se demander si l’apparente indépendance est assurée lorsque des audiences ont lieu dans l’enceinte commune au centre de rétention et aux services de police, derrière des grillages et sous haute surveillance policière.

En outre, que reste-t-il du respect de l’égalité des armes entre l’étranger et l’administration dans un tribunal éloigné du palais de justice et de la cité ?

Pour toutes ces raisons, vous aurez compris que je suis formellement opposé à ce qui est dans le texte, qui a malheureusement été soutenu par le gouvernement actuel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

Ce dispositif, on peut en convenir, ne fonctionne pas forcément très bien ; en revanche, il est intéressant que cette possibilité existe et c’est pourquoi il faut la maintenir.

Certains magistrats y sont favorables, d’autres ne le sont pas, mais quand les uns et les autres font l’effort d’utiliser ces salles d’audience, cela permet un moindre recours aux escortes, ce qui n’est pas sans intérêt.

Il en va de même pour les audiences par vidéotransmission : en pratique, elles commencent à être assez souvent utilisées et, à certains égards, appréciées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je partage l’avis du rapporteur.

J’ai visité le centre de rétention du Mesnil-Amelot il y a une dizaine de jours ; j’y ai rencontré aussi bien le personnel que, à l’annexe du tribunal, les magistrats.

Les effectifs de police affectés à ce centre ont été réduits considérablement depuis 2012, pratiquement de 25 %. Si on leur assigne comme mission d’assurer le transfert des justiciables jusqu’à un tribunal éloigné, cela rendra en pratique extrêmement difficile la présentation de ces personnes devant les magistrats et l’exercice de la justice.

La proximité immédiate de l’annexe du tribunal et du centre de rétention réduit d’autant la durée des missions des effectifs de police, lesquels, je le répète, sont en baisse.

Il faut faire les choses avec cohérence et humanité. D’ailleurs, les magistrats que j’ai rencontrés m’ont expliqué que l’existence de ces annexes de tribunal ne changeait rien à la nature des arguments mis en avant aussi bien par les avocats et les magistrats que par les justiciables.

Par conséquent, il faut, comme l’estime le rapporteur, maintenir cette possibilité.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Comme Éliane Assassi, je suis élu de Seine-Saint-Denis. Certes, je ne suis pas retourné récemment au Mesnil-Amelot, mais je m’y étais rendu voilà quelques années, dans le cadre d’un contrôle budgétaire. À cette occasion, j’avais pu voir les belles salles dont il est équipé, salles à l’époque complètement inutilisées, certains, dont vous, ma chère collègue – et encore aujourd’hui – (M. Roger Karoutchi sourit.),…

Mme Éliane Assassi. Je suis cohérente !

M. Philippe Dallier. … considérant alors qu’on ne pouvait pas, pour des raisons de principe, y siéger.

Vous savez bien, ma chère collègue, et même si les choses ont un peu changé depuis lors, que, dans ce département de la Seine-Saint-Denis, les forces de police passent un temps considérable dans ces missions d’accompagnement des personnes devant les tribunaux. Sans compter qu’à l’époque la direction départementale de la sécurité publique était aussi chargée de la surveillance du Stade de France !

Il vaut mieux que les forces de l’ordre de Seine-Saint-Denis, qui ne sont déjà pas en nombre suffisant eu égard à la problématique que nous avons à traiter, se concentrent sur la priorité des priorités. Ces salles, qui sont tout à fait opérationnelles, doivent être utilisées.

J’ai donc un peu de mal à comprendre que vous continuiez à défendre cette position. Ce département est si particulier – nous sommes sans doute d’accord sur ce point (Mme Éliane Assassi opine.) – qu’il faut rationaliser le plus possible les missions des forces de police en faisant en sorte qu’elles se concentrent sur l’essentiel.