Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Que dire après cette belle citation de George Bernard Shaw ?

Après ces longues heures de discussion générale, je sais que vous aspirez à entrer dans le vif du débat sur les articles. Je voudrais néanmoins prendre encore quelques instants pour répondre à certaines interpellations.

Je souhaite tout d’abord remercier toutes celles et tous ceux qui ont apporté leur soutien à ce texte, en particulier M. Daudigny, Mmes Archimbaud et Bricq, MM. Fortassin, Godefroy et Tourenne.

Je me suis fixé une ligne de conduite, pour reprendre les termes de Mme Bricq, ou un « cap clair », pour reprendre ceux de M. Tourenne : l’accès aux droits, la réduction du reste à charge de nos concitoyens, la modernisation de notre protection sociale sans remettre en cause notre volonté de faire baisser les déficits, car réduire les déficits c’est donner confiance à nos concitoyens dans l’avenir de leur système de protection sociale.

M. Didier Guillaume. Voilà de la clarté !

Mme Marisol Touraine, ministre. À cet égard, je tiens aussi à saluer la volonté réaffirmée de Mme Archimbaud de faire de l’accès aux droits l’une de ses priorités.

Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous avez regretté que le niveau des déficits reste trop élevé. Certes, les déficits sont élevés, mais que préférez-vous ? Un déficit de 21 milliards d’euros, comme en 2011, avec une augmentation du reste à charge…

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Certainement pas !

Mme Marisol Touraine, ministre. …ou environ douze milliards d’euros de déficits et moins de 10 milliards d’euros l’année prochaine, avec une réduction constante du reste à charge ?

Oui, le déficit reste trop élevé, et c’est bien ce qui justifie l’engagement déterminé du Gouvernement, mais reconnaissez que nous l’avons réduit de manière plus que significative, de près de moitié, par rapport à la situation laissée par la majorité précédente.

MM. Godefroy et Dériot ont évoqué la branche AT-MP dans leurs interventions. Je voudrais rappeler qu’un rapport a été envoyé aux assemblées, dès le mois de septembre dernier, sur la situation de cette branche. Je veux rassurer M. Godefroy et ceux qui se sont exprimés sur cette question : la branche AT-MP va connaître des excédents extrêmement importants qui justifient un transfert de ressources en direction de l’assurance maladie.

M. Desessard a gardé ses distances, comme il a déjà eu l’occasion de le faire, à l’égard du pacte de responsabilité. Toutefois, monsieur Desessard, dire que le Gouvernement mène une politique d’offre pure – que vous opposez à une politique de relance pure – est un raccourci pour le moins difficile à entendre. C’est oublier les ressources que nous consacrons au maintien du pouvoir d’achat et les politiques de soutien en matière de protection sociale que nous menons.

Monsieur Tourenne, vous avez eu raison de souligner l’engagement sans faille du Gouvernement pour faciliter l’accueil des personnes en situation de handicap et augmenter le nombre de places disponibles. Il s’agit également, au-delà d’une politique quantitative, de mettre en place ce que j’appellerai une politique de citoyenneté pleine et entière, qui consiste à faire en sorte que nos concitoyens confrontés au handicap soient des citoyens à part entière.

Tel est le principe qui nous guide et je veux en assurer M. Mouiller et Mme Giudicelli, laquelle – je tiens à le dire – a exprimé son soutien à beaucoup de dispositions du texte, mais aussi son inquiétude sur le fait que les ESAT bénéficieraient de deux sources de financement différentes : l’assurance maladie et l’État. Il ne faut voir là aucune source de confusion : l’État financera la rémunération des travailleurs des ESAT, alors que l’assurance maladie financera le fonctionnement des établissements. Ces deux postes de financement n’ont rien à voir : il est normal que l’assurance maladie apporte son soutien à l’établissement, mais il n’y a pas de raison pour qu’elle rémunère les hommes et les femmes qui y travaillent. Il s’agit même d’une clarification bienvenue au regard des attentes des acteurs du monde du handicap.

Mme Cayeux et M. Cigolotti se sont exprimés sur la politique familiale. Je leur répondrai en quelques mots seulement, afin de ne pas refaire le débat que nous avons déjà eu l’année dernière.

Mme Cayeux a réitéré, comme d’autres, l’opposition de son groupe à la modulation des allocations familiales au prétexte qu’il s’agirait d’une remise en cause de leur universalité. Je vais donc préciser, pour la énième fois, que tel n’est pas le cas, puisque toutes les familles éligibles antérieurement le demeurent. Les parents de deux enfants et plus continuent de percevoir des allocations familiales, même réduites. Il s’agit seulement d’une modulation du montant et non d’une remise en cause du versement.

Mme Cayeux a ajouté, de manière surprenante, que cette modulation des allocations familiales ouvrait la voie à une modulation du remboursement des soins. Mais quel est le responsable politique qui propose une franchise universelle en matière de soins, c’est-à-dire le déremboursement systématique et modulé d’une partie des soins en fonction du revenu ? Cette proposition ne vient pas d’un membre du Gouvernement, mais de l’un des candidats à la primaire de l’opposition. Quand nous proposons une protection sociale universelle, M. Fillon, quant à lui, propose une franchise de soins universelle, c’est-à-dire une modulation des remboursements en fonction des revenus, exactement ce dont ne veut pas Mme Cayeux ! Je trouve donc assez cocasse que cette critique me soit adressée depuis les travées de l’opposition ! Le Gouvernement suit une ligne claire : ne pas remettre en cause l’universalité de l’assurance maladie.

M. Didier Guillaume. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. La France reste en haut du podium européen en termes de fécondité, puisqu’elle est passée devant l’Irlande. La baisse de la natalité, c’est-à-dire la baisse du nombre de naissances mise en avant par certains, s’explique en réalité par la baisse du nombre de femmes âgées de vingt ans à quarante ans dans notre pays. Les Françaises font toujours autant d’enfants. Le taux de fécondité, c’est-à-dire le nombre de naissances rapporté au nombre de femmes, ne baisse pas. (M. Barbier se montre dubitatif.) Monsieur Barbier, le nombre de femmes âgées de vingt ans à quarante ans est inférieur de 300 000 à ce qu’il était voilà dix ans. C’est seulement dans quelques années que l’effet du baby-boom du début des années 2000 se fera sentir.

M. Delattre s’est interrogé sur un propos de mon collègue Christian Eckert, selon lequel l’accord AGIRC-ARRCO aurait des répercussions sur l’assurance chômage. M. Eckert a indiqué que la trajectoire financière de la France, et non le PLFSS, prenait en compte l’incidence de cet accord sur l’équilibre des comptes du chômage. Cet accord a en effet pour ambition de modifier les comportements non seulement des salariés, mais aussi des employeurs.

J’ai entendu dire beaucoup de choses sur cet accord, notamment qu’il allait faire peser une pression sur les salariés, contraints de choisir entre un départ à la retraite assorti d’une contribution de solidarité financière temporaire ou le maintien en emploi plus longtemps. Au fond, l’accord AGIRC-ARRCO demande aux salariés, tant que l’équilibre des comptes n’est pas rétabli, d’apporter une contribution de solidarité soit en temps travaillé soit sous forme financière, à leur convenance.

Toutefois, on ne dit pas assez que cet accord a aussi pour ambition de peser sur les comportements des entreprises. En effet, celles-ci ne peuvent déclarer qu’il est souhaitable de travailler plus longtemps et licencier des salariés âgés cinquante-huit ans ou cinquante-neuf ans. Tout l’enjeu est de faire en sorte que les entreprises conservent leurs salariés aussi longtemps que nécessaire, en tout cas plus longtemps qu’aujourd’hui, ce qui se traduira financièrement sur les comptes de l’assurance chômage.

Je vous remercie, monsieur Roche, de votre minute de poésie. D’après vous, nous voyons un « coin de ciel bleu » pour ce qui concerne le financement des retraites. Les inquiétudes dont vous nous avez ensuite fait part ne sont corroborées ni par le Conseil d’orientation des retraites ni par l’INSEE, qui indique clairement que les retraites sont financées durablement. C’est cela, la nouveauté ! Nous devons collectivement le dire aux Français. Qui, parmi nous, a intérêt à ce que nos concitoyens s’inquiètent à propos de l’avenir de leurs retraites ? Personne ! Les inquiétudes en matière de protection sociale et de retraite viennent alimenter des tourments auxquels nous ne devons pas donner prise. Soyons, sinon heureux, du moins collectivement fiers de voir que les efforts demandés portent leurs fruits.

Car les Français ne refusent pas de faire des efforts, mais ils veulent que ceux-ci soient payés de retour. Ils travaillent désormais plus longtemps et cotisent donc davantage. Les résultats sont là ! Assurons-leur ensemble qu’ils n’ont pas fait ces efforts pour rien, au contraire ! Nous avons tous à y gagner.

Monsieur Vasselle, vous affirmez qu’on en reste à des efforts « paramétriques » et qu’il est temps de passer à autre chose. On peut toujours passer à autre chose ! Mais quand les efforts donnent des résultats, que les comptes sont équilibrés et que la stabilité s’installe, pourquoi vouloir tout bousculer ?

Allonger la durée de cotisation, prendre en compte la pénibilité : est-ce une réforme paramétrique ou structurelle ? Pour moi, c’est une réforme structurelle !

Quand j’entends, au sein de l’opposition nationale, les candidats à la primaire batailler pour savoir s’il faut fixer l’âge de départ à la retraite à 63 ans, 64 ans ou 65 ans, je n’ai pas l’impression qu’ils vivent sur une planète structurelle. Le débat paramétrique semble donc prospérer davantage dans votre camp que dans le nôtre. (M. Jean Desessard approuve.)

Monsieur Barbier, nous avons eu un débat sur la carte hospitalière voilà quelques jours à peine, au cours de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé. Le Gouvernement ne croit pas que l’avenir de notre système de santé et la réduction des déficits passent par une diminution drastique du nombre d’hôpitaux en France. Nous croyons aux coopérations et aux mutualisations entre établissements. Tel est le sens des groupements hospitaliers de territoire. Dans la mesure où il s’agit d’une véritable modernisation de la carte hospitalière, vous devriez soutenir une telle démarche.

Enfin, Mmes Cohen et Imbert ont indiqué qu’elles n’avaient rien contre un engagement en faveur de la médecine ambulatoire.

Madame Imbert, vous avez regretté l’insuffisance des ressources affectées en la matière. Je vous le rappelle, la médecine de ville recevra 1,4 milliard d’euros supplémentaires l’année prochaine, sans compter les 300 millions d’euros de baisse de cotisations des médecins. Dire qu’il n’y a pas de ressources affectées pour amorcer le virage ambulatoire ne me semble donc ni très juste ni très sérieux. Je ne sais pas comment vous réussirez à expliquer aux Français que ces 1,4 milliard d’euros supplémentaires ne représentent pas plus de moyens !

Madame Cohen, laisser croire que la volonté du Gouvernement est de faire en sorte que les personnes hospitalisées rentrent le plus rapidement chez elles pour faire des économies, c’est une approximation que je ne peux pas laisser passer. La France est en retard par rapport à d’autres pays en matière de soins ambulatoires : c’est donc qu’il y a des choses qui se font ! Des « premières » sont réalisées dans des hôpitaux français, grâce à l’engagement de services hospitaliers qui en sont fiers. Par exemple, et c’est absolument sidérant, on peut réaliser des poses de prothèse de hanche en ambulatoire. Bien évidemment, il faut être accompagné à domicile. Mais qui dit le contraire ?

Personne ne peut considérer que l’avenir de l’hôpital consiste à maintenir des patients dans des chambres, alors qu’ils pourraient être chez eux ou dans des hôtels hospitaliers, accompagnés par un personnel moins spécialisé. L’hôpital doit se consacrer à ce pour quoi il est irremplaçable.

Monsieur Fortassin, vous avez apporté votre soutien à ce texte, ce dont je vous remercie. Vous avez également posé des questions très précises sur l’évaluation très prochaine par la Haute Autorité de santé des implants oculaires. Vous m’avez également interrogée sur les médicaments biosimilaires. Nous aurons l’occasion d’examiner toutes ces questions dans la suite du débat.

Pour terminer, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous remercier de vos interventions et de vos interpellations. Nous allons maintenant entrer dans le vif du sujet. Je savoure par avance ces discussions, qui doivent nous permettre de travailler au service des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Didier Guillaume. Savourons ensemble !

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Article 1er

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Article 2 et annexe A (début)

Article 1er

Au titre de l’exercice 2014, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

186,7

193,2

-6,5

Vieillesse

219,1

219,9

-0,8

Famille

56,3

59,0

-2,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

13,8

13,1

0,7

Toutes branches (hors transferts entre branches)

462,8

472,1

-9,3

 ;

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

161,9

168,4

-6,5

Vieillesse

115,6

116,8

-1,2

Famille

56,3

59,0

-2,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,3

11,6

0,7

Toutes branches (hors transferts entre branches)

334,1

343,8

-9,7

 ;

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

17,2

20,6

-3,5

 ;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 178 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 12,7 milliards d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° 71, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances. Cet amendement, adopté par la commission des finances, vise à supprimer l’article 1er du projet de loi, qui présente l’exécution des recettes et des dépenses des organismes entrant dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale pour l’exercice 2014.

Cet amendement est en cohérence avec la position proposée par la commission des finances, et adoptée par le Sénat, sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014.

Il me permet également de formuler quelques remarques. Tout d’abord, notre pays a pris des engagements, notamment à l’égard de la Commission européenne, sur la réduction de ses déficits. Nous avons ainsi proposé des plans que tous les organismes financiers de ce pays ont examinés à la loupe. Il était notamment prévu que nous aurions un budget à l’équilibre en 2016. Tel était l’engagement du pays pour pouvoir atteindre, en 2017, un déficit inférieur à 3 % du PIB pour l’ensemble des comptes de la dépense publique.

Or le montant des dépenses et recettes des régimes de sécurité sociale pour 2016 qui nous est présenté aujourd’hui handicapera forcément la réalisation de l’objectif pour lequel nous avons pris des engagements internationaux, les dépenses du secteur social représentant environ 42 % de l’ensemble des dépenses du pays.

Ensuite, le paysage qui s’offre à nous est loin d’être celui d’un long fleuve tranquille ! Un déficit de 9,3 milliards d’euros – 6,2 milliards d’euros pour l’assurance maladie et 3,7 milliards d’euros pour le FSV –, ce n’est pas anodin ! Nous regrettons aussi, et je n’ai pas eu le temps de développer complètement ce point tout à l’heure, que notre dette sociale subisse un phénomène d’accumulation et d’accélération.

Il est inexact d’affirmer, comme je peux l’entendre, que notre endettement n’a jamais été aussi faible. Si on demande au ministre son montant, il sera incapable de répondre. Le chiffre exact est de 219 milliards d’euros. Une telle somme est due aux phénomènes d’accumulation et d’accélération. Ainsi, la reprise de la dette de l’ACOSS par la CADES ne fera pas obstacle au fait que, à la fin de l’année 2016,…

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis. … on sera obligé d’ajouter au total de la dette une somme au moins égale à 24 milliards d’euros.

Pour ces raisons, nous pensons qu’il ne convient pas d’adhérer aux chiffres présentés, qui ne nous permettront pas de tenir nos engagements.

M. Jean-Pierre Caffet. Quelle confusion !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement, qui vise à supprimer l’article 1er, ne correspond pas tout à fait, vous le savez, monsieur Delattre, à la position de la commission des affaires sociales.

La première partie de la loi de financement n’est pas une loi de règlement des comptes de la sécurité sociale, tout comme une loi de financement n’est pas un budget de la sécurité sociale. À la différence du budget de l’État, il ne s’agit pas d’un acte d’autorisation de la dépense.

L’exercice 2014 est clos et les comptes sont certifiés. L’article 1er ne fait que constater les écarts par rapport aux prévisions, écarts que vous avez d’ailleurs rappelés. Adopter cet article ne signifie pas que nous approuvons la politique menée, mais que nous prenons acte de ce constat, comme le Sénat l’avait fait l’an dernier pour l’exercice 2013.

La commission des affaires sociales a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Cela vient d’être dit, cet amendement est l’occasion de rappeler certains chiffres.

Puisque nous avons les résultats du déficit du régime général pour l’année 2014, hors FSV, il me semble opportun de nous remémorer ceux des années précédentes. En 2011, ce déficit atteignait 17,4 milliards d’euros ; en 2010, 23,9 milliards d’euros ; en 2009, 20,3 milliards d’euros ; en 2008, 10,2 milliards ; et, en 2007, 9,5 milliards d’euros.

M. Jean Desessard. Alors, monsieur Delattre ?

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

M. Francis Delattre. C’est un exercice un peu facile ! Il ne vous aura pas échappé que certains événements se sont produits en 2008…

Si la commission des affaires sociales dit qu’elle est d’accord avec nous sur le fond, mais que les comptes doivent être approuvés, nous nous rallions à sa position sans aucun problème, monsieur le rapporteur général.

M. Francis Delattre. Je retire donc cet amendement qui nous a permis de dire des choses qui n’ont pas l’air de plaire à tout le monde ! Mais ce n’est qu’un début !

Mme la présidente. L’amendement n° 71 est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er.

(L’article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Article 2 et annexe A (interruption de la discussion)

Article 2 et annexe A

article 2

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2014, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2014 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2014, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents et la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2014

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2014

(En milliards d’euros)

Actif

2014 (net)

2013 (net)

Passif

2014

2013

Immobilisations

7,0

7,7

Capitaux propres

-110,7

-110,9

Immobilisations non financières

4,3

4,3

Dotations

29,2

30,9

Régime général

0,6

0,6

Prêts, dépôts de garantie

1,7

2,5

Autres régimes

4,5

4,2

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

0,2

0,2

Avances / prêts accordés à des organismes de la sphère sociale

1,0

0,9

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

23,9

26,0

Réserves

12,1

10,3

Régime général

2,6

2,6

Autres régimes

5,5

5,5

FRR

4,1

2,2

Report à nouveau

-156,9

-152,6

Régime général

-10,0

-4,3

Autres régimes

-3,8

-3,0

CADES

-143,1

-145,4

Résultat de l’exercice

1,4

-1,6

 

Régime général

-9,6

-12,5

Autres régimes

0,4

-0,6

 

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

-3,5

-2,9

 

CADES

12,7

12,4

 

FRR

1,4

1,9

 

Écart d’estimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché)

3,4

2,1

 

Provisions pour risques et charges

15,0

20,4

Actif financier

58,5

55,4

Passif financier

179,9

173,4

Valeurs mobilières et titres de placement

50,4

48,3

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, euro-papiers commerciaux)

162,5

159,8

Régime général

0,1

0,5

Régime général

24,2

20,5

Autres régimes

7,5

6,9

CADES

138,2

139,3

CADES

7,0

7,1

FRR

35,9

33,9

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

12,4

11,2

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) (prêts Caisse des dépôts et consignations)

6,0

3,0

Encours bancaire

7,9

6,7

Régime général (ordres de paiement en attente)

4,6

4,6

Régime général

2,2

1,5

Autres régimes

0,8

2,6

Autres régimes

1,5

1,8

CADES

1,0

1,0

FSV

1,2

1,0

CADES

1,7

0,2

Dépôts reçus

1,9

2,2

FRR

1,3

2,2

ACOSS

1,9

2,2

Dettes nettes au titre des instruments financiers

0,2

0,0

Créances nettes au titre des instruments financiers

0,2

0,4

ACOSS

0,2

0,0

CADES

0,2

0,2

Autres

0,2

FRR

0,0

0,2

Autres régimes

0,1

CADES

0,1

Actif circulant

69,7

63,7

Passif circulant

51,0

43,8

Créances de prestations

7,8

7,6

Dettes et charges à payer (CAP) à l’égard des bénéficiaires

27,1

20,0

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

11,1

9,3

Dettes à l’égard des cotisants

1,2

1,2

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions

35,7

35,5

Créances sur entités publiques

9,0

9,0

Dettes à l’égard d’entités publiques

9,6

8,7

Produits à recevoir de l’État

0,5

0,5

Autres actifs

5,2

1,8

Autres passifs

13,1

13,8

Total de l’actif

135,2

126,8

Total du passif

135,2

126,8

Sur le champ des régimes de base, du FSV, de la CADES et du FRR, le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres négatifs, qui représentent le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 110,7 milliards d’euros au 31 décembre 2014, soit l’équivalent de 5,2 points de PIB. Après la forte dégradation consécutive à la crise économique des années 2008-2009, ce passif net connaît pour la première fois en 2014 une légère amélioration, qui reflète essentiellement la poursuite de la réduction des déficits des régimes de base et du FSV (12,8 milliards d’euros en 2014 contre 16,0 milliards d’euros en 2013 et 19,2 milliards d’euros en 2012) et de l’amortissement de la dette portée par la CADES (12,7 milliards d’euros en 2014 contre 12,4 milliards d’euros en 2013).

Cette amélioration se traduit en particulier par le constat, pour la première fois en 2014, d’un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale retracé ci-dessus, avec un excédent de 1,4 milliard d’euros contre un déficit de 1,6 milliard d’euros en 2013.

Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’ACOSS. L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, s’établit donc à un niveau proche de celui-ci et en suit les tendances, corrigées des effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui pèsent également sur la trésorerie. Du fait de l’augmentation du besoin en fonds de roulement liée notamment aux créances sur les cotisants émises en 2014, dont le taux de recouvrement est par ailleurs demeuré stable, l’endettement financier net s’établit à 121,3 milliards d’euros au 31 décembre 2014, en légère hausse par rapport à fin 2013.

Évolution du passif net, de l’endettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009

(En milliards d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Passif net au 31 décembre (capitaux propres négatifs)

-66,3

-87,1

-100,6

-107,2

-110,9

-110,7

Endettement financier net au 31 décembre

-76,3

-96,0

-111,2

-116,2

-118,0

-121,3

Résultat comptable consolidé de l’exercice

-19,6

-23,9

-10,7

-5,9

-1,6

+1,4

II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur l’exercice 2014

Les comptes du régime général ont été déficitaires de 9,7 milliards d’euros en 2014. La branche Maladie a ainsi enregistré un déficit de 6,5 milliards d’euros, la branche Famille un déficit de 2,7 milliards d’euros et la branche Vieillesse un déficit de 1,2 milliard d’euros, la branche Accidents du travail et maladies professionnelles ayant quant à elle dégagé un excédent de 0,7 milliard d’euros. Par ailleurs, le FSV a enregistré un déficit de 3,5 milliards d’euros.

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total. Conformément aux dispositions organiques, la CADES a été affectataire de ressources lui permettant de financer ces sommes. Même si la reprise des déficits de la branche Vieillesse et du FSV reste prioritaire, compte tenu des marges rendues disponibles par les différentes mesures prises en matière de redressement financier par la réforme des retraites de 2014, la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu que les déficits des exercices 2012 à 2018 des branches Maladie et Famille pourraient être intégrés dans le champ de la reprise, sans modification des plafonds globaux de reprise ni de l’échéance prévisionnelle d’amortissement de la dette transférée à la CADES. Un montant de 10 milliards d’euros a ainsi été repris en 2014, correspondant au transfert des déficits définitifs de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2013 et au financement d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2012.

Le PLFSS 2016 vient modifier le calendrier de reprise des dettes, toujours dans le respect du plafond global. Il est en effet proposé de permettre à la CADES de financer dès 2016 l’intégralité du reliquat de déficits à reprendre en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 modifiée. 23,6 milliards d’euros seraient ainsi transférés à la CADES dès 2016, donnant les moyens à cette dernière de réaliser dans des conditions de financement favorables une stratégie globale de portage et d’apurement de la dette sociale qui lui a été transférée. Cette modification permettra de tirer parti des conditions particulièrement favorables de financement actuellement constatées sur les marchés et de prémunir ainsi la sécurité sociale contre le risque qu’une remontée des taux de long terme dégrade les conditions de financement des déficits s’ils étaient transférés plus tardivement.

Par ailleurs, les excédents de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles au titre de l’exercice 2014 (0,6 milliard d’euros) ont été affectés à la réduction des déficits accumulés par cette branche, dont le montant s’est ainsi réduit de 1,7 à 1 milliard d’euros.

La plupart des régimes de base autres que le régime général présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des régimes intégrés financièrement au régime général (régimes agricoles à l’exception de la branche retraite du régime des exploitants, régimes maladie des militaires et des marins), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins), des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État), équilibrés par ces derniers, et enfin du régime social des indépendants dont les déficits étaient couverts jusqu’en 2014 par l’affectation, à due proportion, du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés. Un mécanisme d’intégration financière aux branches Maladie et Vieillesse du régime général s’y substitue à compter de 2015.

Cependant, plusieurs régimes ne bénéficiant pas de tels mécanismes d’équilibrage ont enregistré en 2014 des résultats déficitaires. S’agissant de la branche retraite du régime des exploitants agricoles, dont les déficits 2009 et 2010 avaient été repris par la CADES, le déficit s’est réduit à 0,2 milliard d’euros (contre 0,6 milliard d’euros en 2013), portant le montant des déficits cumulés depuis 2011 à 2,8 milliards d’euros. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que ce déficit puisse être financé par des avances rémunérées de trésorerie de l’ACOSS en complément des financements bancaires auxquels avait recours jusqu’ici la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) pour couvrir ces déficits cumulés. Au 31 décembre 2014, ces déficits ont été financés en totalité par une avance de l’ACOSS (2,5 milliards d’euros).

Le déficit du régime des mines s’est élevé à 0,1 milliard d’euros en 2014, portant le montant cumulé de dette à 1 milliard d’euros. Dans le contexte d’une limitation des concours financiers de la Caisse des dépôts et consignations, partenaire financier historique de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a étendu jusqu’à 2017 les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 prévoyant la faculté de recours à des avances de trésorerie de l’ACOSS à hauteur de 250 millions d’euros, en complément des financements externes procurés par la Caisse des dépôts et consignations et par des établissements bancaires.

Enfin, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a dégagé, pour la première fois depuis cinq ans, un excédent de 0,4 milliard d’euros (après avoir connu un déficit de 0,1 milliard d’euros en 2013). Cet excédent, qui résulte principalement de l’effet des hausses de taux de cotisations intervenues en 2013 et 2014, a été affecté aux réserves du régime, portant celles-ci à 1,6 milliard d’euros.