Mme Sylvie Goy-Chavent. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Chevaux découpés encore vivants, vaches qui se débattent pendues à des crochets, animaux battus et martyrisés : l’affaire de l’abattoir d’Alès est une honte et un nouveau coup dur pour la filière de la viande française !

En réponse, monsieur le ministre, vous avez cherché à minimiser le problème, promis de faire respecter le bien-être animal et déclaré que vous alliez renforcer les contrôles. Mais de quels contrôles parlez-vous ? L’abattoir d’Alès était régulièrement contrôlé et, pourtant, on a vu le résultat !

Je dispose de plusieurs témoignages de professionnels des abattoirs qui prouvent que le cas de l’abattoir d’Alès n’est pas un cas isolé, mais plutôt l’arbre qui cache la forêt ! Il est temps, monsieur le ministre, d’ouvrir les abattoirs pour voir ce qui s’y passe ! Il est grand temps de sanctionner les « brebis galeuses ».

Les agriculteurs n’élèvent pas leurs animaux pour qu’ils subissent des sévices inadmissibles sur les chaînes d’abattage. À Alès et parfois ailleurs, les animaux se débattent pendant de longues minutes dans un mélange de sang et de matières fécales. La viande contaminée par la bactérie Escherichia coli est ensuite écoulée dans les hôpitaux et les écoles, comme c’était le cas à Alès. Cette viande peut provoquer la mort ou de graves séquelles chez les consommateurs, mais de cela non plus, monsieur le ministre, vous ne parlez pas !

Il est temps de mettre fin à des pratiques inacceptables, qui nuisent à nos éleveurs, aux consommateurs, sans parler des millions d’animaux dont les souffrances épouvantables pourraient être évitées !

Monsieur le ministre, l’abattoir d’Alès est fermé depuis plusieurs semaines. Et vous, qu’avez-vous fait pendant tout ce temps ? (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et sur certaines travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, vous avez commencé votre question en disant que ce sujet venait s’ajouter aux autres difficultés que connaît l’élevage. La manière dont vous avez posé cette question me conduit à penser que, malheureusement, vos propos ne peuvent pas non plus être considérés comme un soutien à l’élevage et aux éleveurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

Madame la sénatrice, vous avez signalé certains problèmes. D’ailleurs, j’en profite pour dire que, chaque fois que l’on parle des abattoirs ici comme à l’Assemblée nationale, et que l’on demande au ministre de l’agriculture d’en créer de nouveaux, il faudrait aussi penser aux contrôles !

Tout d’abord, contrairement à ce que vous avez affirmé d’une manière péremptoire, madame la sénatrice, le ministre de l’agriculture que je suis mène des contrôles. Je rappellerai que, entre 2010 et 2012, près de 440 postes ont été supprimés dans les services vétérinaires,…

M. Stéphane Le Foll, ministre. … alors que mon ministère aura créé 160 postes d’ici à 2017 !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Les contrôles seront donc renforcés !

Ensuite, madame la sénatrice, j’ai pris des mesures dès le 3 novembre en adressant une lettre à tous les préfets afin, justement, d’assurer l’ensemble de ces contrôles.

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt va permettre la mise en œuvre de la transparence, grâce à la communication des contrôles. Cela existe aujourd’hui pour les restaurants, cela se fera demain pour les abattoirs. Toute la transparence doit effectivement être faite, car chacun a le droit de savoir ce qui s’y passe.

En outre, madame la sénatrice, je suis comptable du bien-être animal ! Comme vous, je ferai tout pour que les contrôles conduisent les abattoirs à respecter des règles qui doivent être appliquées partout et par tous les abattoirs, grands comme petits.

Pour terminer, je rappellerai tout de même que 104 avertissements et 60 mises en demeure ont été adressés aux abattoirs au cours de l’année 2014 et que deux agréments ont été retirés : par conséquent, contrairement à ce que vous dites, madame la sénatrice, l’État contrôle et continuera à contrôler les abattoirs et à renforcer ces contrôles. L’État jouera bien la transparence ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Goy-Chavent, pour la réplique.

Mme Sylvie Goy-Chavent. Monsieur le ministre, le scandale de l’abattoir d’Alès a malheureusement prouvé que les contrôles menés par l’État, lorsqu’ils existent, sont rarement suivis d’effet.

Voilà pourquoi j’ai demandé la création d’une commission d’enquête parlementaire destinée à faire toute la lumière sur les pratiques en vigueur dans les abattoirs français ! (Exclamations sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.) C’est à ce prix que nous pourrons réformer ce qui doit l’être.

Une soixantaine de sénateurs de toutes les sensibilités, mais aussi de très nombreux députés et un collectif de 90 personnalités, soutiennent cette démarche. Plusieurs pétitions diffusées sur internet à ce sujet rassemblent également plusieurs centaines de milliers de signatures.

À quelques semaines des élections régionales, je ne doute pas, monsieur le ministre, que le Gouvernement appuiera ma demande pour garantir davantage de transparence et de respect des animaux.

Les veaux, les vaches et les chevaux de selle…

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Sylvie Goy-Chavent. … découpés encore vivants et qui agonisent en gigotant, cela suffit ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Pendant la campagne de l’élection présidentielle,…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Sylvie Goy-Chavent. … François Hollande avait assuré aux Français que le changement c’était pour maintenant ! Et pour vous, monsieur le ministre, c’est quand le changement dans les abattoirs ?

finances publiques

M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Charles Guené. Ma question s’adressait à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Monsieur le ministre, votre projet de loi de finances prévoit un déficit budgétaire de 3,3 % du PIB en 2016. Vous maintenez que la France, en 2017, sera en dessous de l’objectif de 3 % de déficit, tel qu’il est exigé en vertu des critères de convergence de la zone euro, et qu’elle atteindra un déficit de 2,7 %. Faut-il donc s’attendre à de nouvelles hausses des prélèvements, alors que l’on sait bien que les dépenses publiques, loin d’être maîtrisées, ont augmenté de 0,9 % en volume en 2015 ?

Le Gouvernement s’est engagé à limiter la hausse des dépenses publiques à 0,3 % en volume en 2016. Cependant, vous n’expliquez pas comment vous y parvenez, monsieur le ministre ! Même le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, pourtant socialiste, dénonce le fait que plus de la moitié des économies que l’État prévoit de réaliser en dépenses en 2016 ne sont pas, ou peu, étayées ! À ce rythme, le déficit s’élèvera en réalité à 3,9 % en 2017 !

C’est d’ailleurs ce constat qui semble justifier les réserves de Bruxelles. La Commission européenne ne croit pas en vos prévisions, puisqu’elle situe le déficit de la France aux environs de 3,3 % en 2017, quand vous avancez le taux de 2,7 %...

Monsieur le ministre, comment expliquez-vous un tel décalage chaque année entre vos prévisions et la réalité ? Ne craignez-vous pas que nous perdions toute crédibilité aux yeux de nos partenaires européens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Charles Guené, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Michel Sapin et de Christian Eckert qui sont retenus à l’Assemblée nationale par le débat budgétaire.

Vous avez, monsieur le sénateur, mis en cause le rapport publié par la Commission européenne voilà environ une semaine, qui concernait d’ailleurs l’ensemble des États membres de l’Union européenne.

Vous savez que la Commission européenne a constaté, comme le Gouvernement, le retour progressif de la croissance, lié au soutien de la consommation, mais aussi à la reprise de l’investissement. (M. Pierre-Yves Collombat s’exclame.) Elle a validé les chiffres fixés par le Gouvernement pour le déficit en 2015 comme en 2016, déficit qui, depuis que nous sommes aux responsabilités, ne cesse d’ailleurs de décroître. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État. Mais si ! Il sera, je vous le confirme, de 3,8 % du PIB en 2015 et de 3,4 % en 2016.

Vous m’avez également interrogé sur ce qui se passera en 2017. La Commission européenne doit prendre en compte le troisième volet du plan de diminution des dépenses publiques, plan de diminution qui porte sur 50 milliards d’euros. Il restera donc un volet de 15 milliards d’euros à mettre en œuvre pour 2017, qui explique que nous tiendrons, en 2017, les prévisions prévues, c’est-à-dire un déficit inférieur à 3 % du PIB.

M. le président. Il faut conclure !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État. Voilà, monsieur le sénateur, si l’on se réfère à ce qui s’est passé depuis trois ans – et surtout depuis deux ans, puisque toutes nos prévisions, qu’il s’agisse de croissance ou de déficit, ont été respectées –, le plan de marche du Gouvernement qui, je vous le confirme, placera le déficit de notre pays sous la barre des 3 % en 2017. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour la réplique.

M. Charles Guené. Je vous ai entendu, monsieur le secrétaire d’État, mais permettez-moi de vous livrer un verbatim du pouvoir socialiste.

Engagement n° 9 du programme présidentiel : « Le déficit public sera réduit à 3 % du PIB en 2013 ». Il a été de 4,1 %.

Michel Sapin, le 14 avril 2014 : « Il faut qu’il y ait 3 % de déficit en 2015 ». Le déficit est estimé à 3,8 %.

M. Didier Guillaume. Il est vrai qu’en matière de promesses vous êtes des spécialistes !

M. Charles Guené. Manuel Valls, le 15 avril 2014 : « Nous tiendrons tous nos engagements. C’est la parole et la crédibilité de la France qui sont en jeu, et personne ne peut les mettre en doute ».

Quant à Pierre Moscovici : « Dans la zone euro, seules la France, l’Espagne et la Grèce devraient connaître des déficits supérieurs à 3 % du PIB en 2016 ».

Comment voulez-vous, dans ces conditions, monsieur le secrétaire d’État, que la parole de la France puisse continuer d’être crédible ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

objectifs du projet de loi sur les « nouvelles opportunités économiques »

M. le président. La parole est à M. Alain Duran, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Alain Duran. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a posé des jalons importants pour la modernisation de notre économie. Ce travail important de réforme doit être poursuivi avec la même force de conviction.

Vous avez annoncé ce lundi, monsieur le ministre, les grandes orientations autour desquelles vous souhaitez bâtir le nouveau projet de loi que vous présenterez sur les « nouvelles opportunités économiques » pour notre pays.

La numérisation de l’économie et de la société recèle, en effet, un potentiel immense en termes d’activité et d’emploi, à condition que nous nous adaptions, anticipions et accompagnions les mutations en cours, pour en faire une opportunité et non les subir.

Nos modèles économiques sont en effet profondément remis en question par le développement accéléré de l’économie collaborative et du partage, par les nouveaux usages dont s’emparent les Français, par l’arrivée de nouveaux acteurs.

Ces nouveaux modèles bousculent l’organisation du travail et des secteurs en place, comme l’a rappelé, il y a encore quelques minutes, M. le Premier ministre. Ils sont porteurs de très nombreux bénéfices pour les citoyens et les entrepreneurs de notre pays, comme ils peuvent parfois être sources de dangers si nous n’organisons pas les conditions harmonieuses de leur déploiement.

Vous avez dès lors, monsieur le ministre, indiqué les trois dimensions essentielles qui guideront ce nouveau volet de réformes.

Tout d’abord, il s’agit de faire émerger une économie de l’innovation en soutenant les entreprises innovantes, en mettant en place de nouvelles voies de financement et en accompagnant les secteurs traditionnels vers cette nouvelle économie et ses atouts.

Ensuite, il faut accompagner les initiatives des créateurs et des entrepreneurs en termes de simplification, de formation et de soutien de la puissance publique.

Enfin, il importe de construire des sécurités individuelles dans l’économie numérique.

Monsieur le ministre, le calendrier de vos propositions est connu. L’ossature des propositions gouvernementales sera dévoilée dans le courant du mois de décembre, avec le dépôt de votre projet de loi au début de l’année 2016. D’ici là, pouvez-vous nous préciser vos ambitions et celles du Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Monsieur le sénateur Alain Duran, vous l’avez rappelé, les enjeux auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés, face à cette transformation de nos économies, sont liés à un mouvement de plus en plus rapide et de plus en plus profond, qui, dès qu’il s’enclenche, est immédiatement mondialisé et vient percuter des pans entiers de nos secteurs industriels comme de nos services. En même temps, ce mouvement offre des opportunités de création d’emplois et de secteurs d’activités.

Le défi que nous devons relever consiste à nous assurer que notre économie est prête à ces déploiements d’activités, à préparer la transition, en donnant à chacun sa place dans cette transformation. Pour ce faire, quels sont les défis auxquels nous devrons faire face dans les semaines à venir ?

D’abord, il faut en effet nous assurer que nous innovons au bon rythme et à la bonne puissance. À cette fin, il nous faut adapter le cadre de financement et certaines de nos modalités réglementaires de manière à favoriser l’innovation et à créer de nouvelles activités partout où cette innovation existe.

Parallèlement, il faut permettre à l’industrie existante, en particulier, de se transformer, ce que nous avons commencé à faire avec le projet « Industrie du futur ». Cela suppose un investissement en capital physique et une modernisation, mais également un investissement en capital humain, donc la mise en œuvre d’une vraie politique de formation.

Ensuite, il importe de se donner les souplesses nécessaires. C’est en particulier l’objet du texte porté par Myriam El Khomri, qui visera à rendre notre droit du travail plus adaptable, plus flexible. C’est aussi le sens du compte personnel d’activité. Mais il s’agit aussi de favoriser, sur l’ensemble du territoire et dans tous les secteurs d’activités, la création de nouvelles activités, en donnant plus de liberté aux entrepreneurs, donc plus de fluidité entre les différents statuts d’entrepreneurs, notamment individuels. Il faut aussi revoir la rigidité qui, parfois, existe en termes de qualifications et de métiers.

M. le président. Il va falloir conclure !

M. Emmanuel Macron, ministre. Je finirai sur les sécurités, collectives et individuelles.

Les sécurités collectives concernent les infrastructures. Nous avons beaucoup travaillé avec la Haute Assemblée en ce sens, lors de l’examen de la loi pour la croissance et l’activité, et nous continuerons à avancer en la matière.

Enfin, nous réfléchissons sur les sécurités individuelles, réflexion qui va de pair avec celle sur le droit du travail. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

contrôle aux frontières dans le cadre de la cop 21 (conférence de paris sur le climat)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. André Reichardt. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a annoncé que, dans le cadre de l’organisation de la COP 21, les contrôles aux frontières seront rétablis du 13 novembre au 13 décembre.

Cette mesure, autorisée par les accords de Schengen, est motivée par la volonté d’éviter l’entrée sur notre territoire de terroristes potentiels attirés par l’importance des délégations étrangères présentes pour l’évènement et de groupes altermondialistes violents, souhaitant perturber notamment les rassemblements de la Coalition climat 21 prévus à cette occasion !

Je souhaite, monsieur le ministre, vous poser deux questions à cet égard.

Dans un premier temps, j’aimerais que vous puissiez nous indiquer comment ces contrôles seront effectués concrètement sur le terrain. Allez-vous rétablir les postes-frontières antérieurs ? Rien qu’en Alsace, plus de 70 000 travailleurs frontaliers souhaitent le savoir.

Ensuite, si l’on peut penser que les contrôles décourageront effectivement certaines entrées, ne pensez-vous pas que, pour l’essentiel, les éventuels terroristes ou fauteurs de troubles sont déjà en place dans notre pays, si l’on en juge notamment par l’action du réseau No Border à Calais depuis trois jours ou par la récente arrestation d’un candidat terroriste à Toulon ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, votre question me permet d’apporter des éclaircissements sur la décision qui a été prise par le gouvernement français dans la perspective de cette grande conférence internationale sur le climat qu’est la COP 21. Cette décision, d’ailleurs, s’apparente à celles qu’ont prises d’autres gouvernements dans des circonstances comparables. Je pense à l’Allemagne qui l’a fait à l’occasion d’un récent sommet international ou à d’autres pays qui ont eu à accueillir la conférence sur le climat.

Nous n’allons pas fermer les frontières, contrairement à ce que certains ont prétendu, instrumentalisant cette décision de raison, pour faire de la mauvaise propagande électorale.

Nous allons mettre en place des contrôles aux frontières pendant un mois, comme le prévoient les articles 23 à 25 du code frontières Schengen, de manière à prévenir l’intrusion sur le territoire national d’individus qui pourraient représenter un risque.

Vous me demandez comment vont se passer ces contrôles. Je vais vous répondre très clairement. Nous allons mobiliser 30 000 de nos fonctionnaires, issus essentiellement, pour 26 000 d’entre eux, de la direction centrale de la sécurité publique. Quatre compagnies républicaines de sécurité sont mobilisées, ainsi que des acteurs de la direction centrale de la police aux frontières. Ils procéderont, entre le 13 et le 19 novembre, à des contrôles mobiles et aléatoires, qui ne perturberont en rien la possibilité de mouvement des travailleurs frontaliers.

Nous renforcerons ces contrôles dix jours avant les deux manifestations prévues les 29 novembre et 12 décembre. Quatre jours avant ces manifestations, les contrôles seront plus systématiques.

Nous aurons donc des moyens, de la sécurité et il n’y aura pas, pour ceux qui traversent la frontière quotidiennement, de conséquences en termes de mobilité. Voilà très exactement comment nous allons procéder à ces contrôles…

M. le président. Il vous reste quelques secondes !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Cela n’empêche pas des terroristes ou des acteurs violents d’être présents sur le territoire national, dites-vous. Oui, il y en a, et nous prenons toutes les mesures utiles pour empêcher qu’ils ne nuisent, à l’instar de ce que nous avons fait à travers l’arrestation de Toulon et nous éviterons que d’autres, qui pourraient accroître les menaces à l’ordre public, ne viennent s’ajouter à eux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour la réplique.

M. André Reichardt. Vous ne m’avez malheureusement pas rassuré, monsieur le ministre.

Je vous rappelle que, lors du sommet de l’OTAN à Strasbourg, le rétablissement des contrôles aux frontières n’avait pas empêché les importants débordements que nous avons connus !

Ensuite, vous n’ignorez pas que, depuis le début de l’année, au moins 800 000 migrants sont entrés dans l’espace Schengen sans jamais avoir été recensés. Un contrôle temporaire d’un mois est, dès lors, aussi illusoire qu’inopérant.

M. David Assouline. Il est en campagne électorale !

M. André Reichardt. Les mesures pour contenir la pression migratoire – bouclages douaniers, quotas d’accueil, centres aux portes de l’Union, incitations au retour – étant inefficaces, il y a urgence à repenser la notion de frontière et à passer à autre chose que Schengen pour assurer la sécurité de nos concitoyens.

On n’entend malheureusement pas assez le gouvernement français sur ce sujet ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

situation en syrie

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann, pour le groupe Les Républicains.

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Monsieur le ministre, Alep, qui compte 2,5 millions d’habitants, a été coupée du monde et encerclée par les djihadistes islamiques de Daech et du Front al-Nosra, qui s’entretuaient encore voilà trois à quatre semaines, et sont maintenant unis contre l’armée officielle. La seule voie de communication d’Alep avec l’extérieur est devenue un lieu de combats entre les forces islamistes djihadistes et l’armée syrienne. Il s’agit d’une tragédie que vivent des millions de civils et, parmi eux, quelques dizaines de Français. Pourquoi ne parle-t-on pas de cette tragédie dans les médias ?

Je viens de l’apprendre, le « blocus », qui aura duré quinze jours, a été partiellement levé. Nous devons impérativement exercer une pression politique sur les pays qui arment et soutiennent ces islamistes fanatiques.

Après avoir été privés de nourriture, de médicaments, de fioul et d’essence, les habitants d’Alep sont condamnés à la soif et à l’obscurité. En effet, les djihadistes contrôlent l’eau, qui arrive tous les dix à quinze jours, et l’électricité, qui manque depuis des mois !

Monsieur le ministre, nous devons absolument éviter la tragédie humanitaire qui menace les millions d’Alépins : c’est le moment pour la France d’intervenir rapidement et efficacement, en faisant pression sur ses alliés que sont l’Arabie saoudite, le Koweït, le Qatar et la Turquie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Harlem Désir, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Vous avez évidemment raison, madame Kammermann : la situation de la ville martyre d’Alep est un sujet de préoccupation sur lequel le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, a attiré à plusieurs reprises l’attention de la communauté internationale.

En ce qui concerne le blocus que vous décrivez, comme vous l’avez vous-même indiqué, la situation vient d’évoluer au cours des dernières heures, puisque les forces du régime syrien ont repris il y a peu la route qui avait été perdue le mois dernier.

En revanche, il faut garder à l’esprit la situation dramatique des populations civiles et de l’opposition modérée à Alep depuis plus d’un an. Celle-ci se bat courageusement contre un double ennemi : d’une part, le régime, qui poursuit ses attaques indiscriminées et qui, il ne faut pas l’oublier, porte la principale responsabilité des violences commises contre les civils, comme le rappellent régulièrement les Nations unies ; d’autre part, Daech, dont on connaît également la monstruosité et la barbarie vis-à-vis des civils et de tous ceux qui ne se soumettent pas à son idéologie.

Il n’y a donc pas de solution exclusivement militaire à la crise syrienne, et Laurent Fabius rappellera samedi à Vienne nos trois priorités, en concertation avec nos partenaires.

La première priorité est humanitaire. Vous l’avez dit, madame la sénatrice, il faut assurer l’accès humanitaire aux populations et obtenir la fin des bombardements indiscriminés, autrement dit un cessez-le-feu.

Notre deuxième priorité est de lutter contre le terrorisme : la France poursuit et accroît ses frappes contre Daech et va déployer dans la région le porte-avions Charles-de-Gaulle. Nous devons également préserver l’opposition modérée, car elle constitue le meilleur rempart contre les terroristes – ce n’est pas le cas du régime syrien actuel.

Enfin, notre troisième priorité est de rechercher une solution politique globale, qui relève d’une absolue nécessité, car elle est la condition de tous les progrès dans les autres domaines. Les contours de cette solution sont connus, ils sont fondés sur ce que l’on appelle le « communiqué de Genève ». Ce document, issu de discussions internationales, prévoit la mise en place d’un gouvernement de transition, incluant à la fois des éléments du régime et de l’opposition,…

M. le président. Il faut conclure !

M. Harlem Désir, secrétaire d’État. … et la préservation des institutions de l’État syrien.

Quoi qu’il en soit, Assad devra partir. En effet, tant qu’il sera là, il n’y aura pas de rassemblement du peuple syrien autour d’une solution de paix. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann, pour la réplique.

Mme Christiane Kammermann. Le général de Gaulle (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.) disait que « cette obligation de jouer notre rôle à nous, de ne laisser à personne le droit d’agir ou de parler pour nous […] marque l’esprit et la manière de notre participation aux entreprises internationales ».

On aimerait entendre la voix de la France plus haut et plus fort ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)