M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame Corinne Bouchoux, vous avez raison de rappeler l’importance de cette journée et vous connaissez l’engagement très résolu du Gouvernement dans cette lutte contre les discriminations commises en raison du sexe et de l’orientation sexuelle.

Soixante-dix infractions donnent lieu, chaque année, à des condamnations. Dès juillet 2013, une instruction de politique pénale avait demandé qu’une réponse pénale ferme et adaptée soit apportée aux violences et discriminations commises en raison de l’orientation sexuelle.

Cela entre aussi, plus largement, dans une politique de lutte contre les discriminations. Nous avons invité les parquets à participer à des pôles de lutte contre les discriminations avec les associations et les autres administrations, de façon à mettre en œuvre une action permanente.

En matière civile et sociale, le projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle renforce évidemment les sanctions. De la même façon, le Gouvernement a prévu une déclinaison de l’action de groupe en matière de discrimination, qui offrira ainsi la possibilité d’indemniser les préjudices moraux. Un amendement du Gouvernement a d’ailleurs rétabli le volet indemnitaire de l’action de groupe et l’a étendu au champ du droit du travail.

Ce renforcement passe bien sûr aussi par le soutien au tissu associatif. Ainsi, les associations déclarées depuis plus de cinq ans auront qualité à agir, y compris en matière de droit du travail.

Ces éléments me semblent répondre à votre interpellation tout à fait légitime en démontrant la globalité de l’action et de l’engagement du Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain. – M. André Gattolin applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour la réplique.

Mme Corinne Bouchoux. La réponse qui a été donnée est satisfaisante dans son état d’esprit, mais la question des moyens demeure. S’il a été signalé que les prises en charge de victimes dans les commissariats et les gendarmeries ont été satisfaisantes cette année, reste la formation initiale et continue de tous les professionnels qui reçoivent le public. La formation à la lutte contre l’homophobie, c’est dans toutes les administrations, dans tous les services publics.

Nous comptons sur la volonté de tout le Gouvernement pour porter ce sujet, car, chaque jour, les discriminations demeurent trop nombreuses dans notre pays, y compris dans la vie quotidienne. Merci d’une action énergique ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC. – M. Philippe Madrelle applaudit également.)

cabinets dentaires

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe CRC.

Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Les centres dentaires « à bas coût », ou « bas prix » défraient à juste titre la chronique. Leur seul objectif est celui de la rentabilité au détriment de la qualité des soins, laissant pour compte au moins 2 200 patients, si je me réfère aux victimes de Dentexia signalées à ce jour. Autant de patients mécontents, mal soignés, voire mutilés.

Ce scandale ne survient pas dans un ciel serein. Contrairement à ce qu’affirme la Cour des comptes, il ne s’agit pas d’« une faillite des politiques publiques face aux professionnels ». Depuis des décennies, les pouvoirs politiques ont fait de la santé bucco-dentaire le chantier expérimental de la privatisation du système de soins : faibles remboursements, place importante des assurances privées et des mutuelles, secteur 2 généralisé, absence de programme national de prévention. Et les choses ne se sont pas améliorées dans la dernière période avec l’ANI, l’accord national interprofessionel !

Je sais que Mme la ministre de la santé est sensible à cette problématique des centres dentaires low cost, car elle a diligenté un rapport auprès de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS.

Mais, au-delà de la réparation des préjudices, que compte faire le Gouvernement pour développer une vraie politique de santé publique dans le secteur bucco-dentaire, permettant un véritable accès aux soins à toutes et à tous sur l’ensemble du territoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, vous posez une vraie question, celle des soins dentaires, qui a effectivement défrayé depuis peu la chronique à la suite de l’affaire Dentexia.

La question n’est pas tant celle du développement des centres dentaires, qui ne pose pas réellement de problème en soi, que celle du respect des règles de qualité et de sécurité des soins, comme dans tous les domaines de soin.

Dans l’affaire que vous citez, des contrôles ont été effectués par les autorités sanitaires et ce sont précisément ces contrôles qui ont conduit à constater des manquements graves aux exigences fixées et à suspendre les activités de plusieurs centres.

Dans l’affaire dite Dentexia, le gestionnaire des centres ayant été mis en liquidation judiciaire, il s’agit à présent d’organiser la suite des soins, la qualité et la continuité.

Madame la sénatrice, sachez que le collectif des patients concernés a été reçu par le ministère de la santé. Un certain nombre d’actions concrètes ont déjà été décidées, comme la création d’une plateforme téléphonique déployée par les agences régionales de santé des régions concernées, c'est-à-dire l’Île-de-France et les régions Auvergne - Rhône-Alpes et Bourgogne - Franche-Comté, afin de répondre aux questions des patients et de faciliter leurs démarches et leur orientation dans la reprise des soins, car la question est bel et bien là. La ministre Marisol Touraine a également décidé qu’un bilan bucco-dentaire serait entièrement pris en charge par la sécurité sociale, de façon exceptionnelle étant donné la situation, afin de permettre une reprise des soins adaptée pour chaque patient. Enfin, un accompagnement médico-psychologique sera proposé aux patients concernés.

Comme vous l’avez dit, Marisol Touraine a saisi l’IGAS afin que celle-ci lui fasse des propositions sur la question de l’indemnisation des patients, mais plus généralement, et c’est le sujet de votre interpellation, sur celle des centres de santé dentaire dits low cost. L’affaire Dentexia doit en effet nous amener à apporter des réponses aux problèmes qu’elle soulève.

M. le président. Il faut conclure.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Les échanges avec le collectif des patients vont se poursuivre pour faire le point sur les mesures qui sont déjà mises en place et sur celles qui suivront.

Madame la sénatrice, soyez assurée que Marisol Touraine suit très attentivement ce dossier. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain ainsi que sur quelques travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Mme Laurence Cohen. L’on ne peut dissocier la promotion de la santé bucco-dentaire, la mise en place d’un véritable système de santé publique et l’amélioration de la prise en charge des patients. Si les patients vont dans ce genre de centre, c’est parce qu’il y a un problème de remboursement. (Mmes Brigitte Gonthier-Maurin et Marie-France Beaufils opinent.) Il faut arriver à un remboursement des soins bucco-dentaires à 100 %, et c’est possible.

Permettez-moi d’y insister, car le département du Val-de-Marne dont je suis élue est le seul à avoir développé un programme de prévention qui a montré son efficacité (Mme Christine Prunaud et M. Jean-Pierre Bosino applaudissent.) : une politique de santé bucco-dentaire curative et préventive digne de ce nom passe par la fin des discriminations intolérables issues d’une prise en charge à plusieurs vitesses conduisant les praticiens à établir des plans de traitement différents en fonction de critères socio-économiques.

Force est de constater, et je le regrette vivement, que ce n’est pas la voie choisie par le Gouvernement, qui fait des milliards d’euros d’économie sur le dos des patients et des professionnels de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

violences lors des manifestations

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Sylvie Robert. Ma question s'adressait au ministre de l’intérieur, M. Bernard Cazeneuve.

Depuis plusieurs semaines, Rennes subit des violences en marge des manifestations syndicales contre la loi travail, tout comme sa voisine, Nantes.

Vendredi dernier, la tension est montée d’un cran, car ma ville a été la proie de casseurs ultra-violents venus de plusieurs villes françaises et étrangères. Ils s’étaient donné rendez-vous pour un rassemblement non autorisé par la préfecture le lendemain. Ce rassemblement à haut risque de 700 personnes a été encadré avec une grande maîtrise par les forces de l’ordre, tout comme l’a été l’évacuation, la veille, d’une salle occupée illégalement en plein cœur de la capitale bretonne. Je veux à ce moment les saluer, car elles ont fait preuve d’un grand professionnalisme.

Pourtant, cette nuit du vendredi a plongé Rennes dans la peur et dans l’incompréhension. Si manifester est un droit, casser est un délit.

La venue du ministre de l’intérieur dimanche matin a été le signe de la mobilisation de l’État et de la solidarité nationale à l’égard d’une ville qui vient de vivre des événements exceptionnels, d’une très grande gravité.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer de votre plus grande fermeté contre ces casseurs – il ne peut y avoir de sentiment d’impunité –, pouvez-vous nous confirmer l’annonce de renforts de police dans les prochains jours et pouvez-vous, enfin, préciser les modalités de l’indemnisation qui a été évoquée en faveur des acteurs économiques qui, dans le centre-ville, viennent de subir d’importants préjudices ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame Sylvie Robert, le ministre de l’intérieur et moi-même avons eu l’occasion d’exprimer notre très grande préoccupation il y a quelques instants à l’Assemblée nationale. En écho à votre question, j’ai notamment répondu à Mme Nathalie Appéré, députée et par ailleurs maire de Rennes.

Ce qui se passe à Rennes, à Nantes, à Paris au moment où nous parlons et dans d’autres villes est insupportable. Manifester est un droit, et nous nous battrons toujours pour le préserver, y compris dans le contexte de menace terroriste auquel nous faisons face et qui vous a conduit à voter la prolongation de l’état d’urgence. C’est précisément ce droit de manifester nos valeurs démocratiques qui a été attaqué en 2015.

Mais casser des commerces, du mobilier urbain, vouloir casser du policier ou du gendarme, quitte à mettre en danger la vie de ces hommes et de ces femmes soutenus par les Français et dont nous connaissons l’esprit de sacrifice face aux nombreuses responsabilités qui pèsent aujourd'hui sur leurs épaules – la menace terroriste, les troubles à l’ordre public, la maîtrise migratoire – est un délit, voire un crime.

Vous avez rappelé que le ministre de l’intérieur s’était rendu à Rennes dimanche matin. Au-delà des unités de forces mobiles qui ont été mobilisées pour faire face à cette violence, quatre-vingt-huit postes supplémentaires seront présents sur Rennes dans les prochaines semaines. Nous trouverons, le ministre de l’intérieur s’y est engagé, les dispositifs d’indemnisation nécessaires pour les commerçants qui ont été victimes de ces violences. Permettez-moi d’ailleurs de saluer l’engagement des maires de Rennes et de Nantes ainsi que de tous les élus qui font face à cette violence.

Je veux dire à tous ces casseurs, à ces Black Blocs et aux amis de M. Coupat, à toutes ces organisations qui au fond n’aiment pas la démocratie et qui en contestent les principes, qu’ils trouveront la plus grande détermination de l’État, de la police et de la justice.

M. Jean Bizet. Ce n’est pas suffisant !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je n’ai pas besoin de rappeler, le Président de la République l’a fait ce matin, le nombre d’interpellations réalisées et de décisions de justice rendues.

Madame la sénatrice, j’en appelle comme vous à la responsabilité de chacun. Quand on organise une manifestation, il faut bien l’organiser. Il faut condamner avec la plus grande fermeté ceux qui s’en prennent aux policiers, aux gendarmes, aux commerçants et aux biens d’une ville comme Rennes. Il ne peut y avoir la moindre complaisance en la matière. Il faut dénoncer ces tracts insupportables de la CGT à l’égard des policiers, et de manière générale, tout mot, tout tract, tout écrit qui encourage ces événements alors qu’un texte a été adopté par l’Assemblée nationale.

Je veux le redire à la représentation nationale : le Gouvernement est déterminé à faire adopter cette loi et à la faire publier cet été, après le débat qui a eu lieu au Palais-Bourbon et celui qui viendra au Sénat.

Nous sommes dans une démocratie. J’ai été interrogé il y a quelques instants sur la question de l’État de droit et la cohérence de notre action. Au nom de cette cohérence, parce qu’il y a la violence, parce qu’il a la radicalité, parce qu’il peut y avoir des victimes du côté des policiers et des gendarmes comme des manifestants, ceux qui manifestent aujourd’hui tranquillement, il ne peut y avoir la moindre complaisance. Il ne suffit pas de condamner les casseurs, il faut aussi que chacun assume ses responsabilités dans un moment difficile pour notre pays.

Dans un État de droit, il ne peut y avoir la moindre complaisance envers ceux qui s’en prennent aux lois et aux valeurs de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

réponse judiciaire aux violences lors des manifestations

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour le groupe de l'UDI-UC. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

Mme Françoise Gatel. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur. Il est profondément républicain, homme d’honneur et de devoir. Aussi, je n’aurais jamais imaginé devoir l’interroger sur la situation quasi insurrectionnelle qu’a connue à nouveau la ville de Rennes en plein état d’urgence.

Agressés par des sans-loi déterminés à provoquer les forces de l’ordre, à casser et à détruire, ceux que l’on peut appeler le peuple des invisibles, les habitants qui fuient la ville, les commerçants qui bardent leurs vitrines de planches de bois, craignent et ont peur. Ils sont indignés, car cette horde de sans-loi reviendra. Elle reviendra, galvanisée par un climat social délétère et par la prochaine consultation sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes qui aura lieu dans le département voisin, et où atermoiements et faiblesses ont laissé prospérer un terreau de violence. (M. Bruno Retailleau applaudit.)

Monsieur le ministre, sans polémique mais avec beaucoup de gravité, je vous interroge non pas sur le nombre d’interpellations qui sont intervenues, mais sur les dispositions judiciaires qui viendront sanctionner des gens qui s’emparent sauvagement d’une ville, et qui rendront de manière durable la ville aux habitants, aux commerçants, à ceux qui veulent juste vivre une vie normale. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, du groupe Les Républicains et du RDSE. – M. Jean-Jacques Filleul applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame Gatel, je vous réponds comme je l’ai fait il y a quelques instants à Mme Sylvie Robert. Vous avez raison de dire que ces faits sont particulièrement graves. Depuis que je me suis engagé dans la vie politique, et bien jeune il y a déjà quelques années, je n’ai jamais considéré que l’on pouvait accepter la violence, d’où qu’elle vienne, et à l’occasion des manifestations.

Nous sommes un pays magnifique, où l’on peut manifester et donner son point de vue, où l’on aime le débat et la confrontation des idées. Donc, il ne peut y avoir la moindre excuse, la moindre tolérance vis-à-vis de ces violences, la moindre complaisance comme il y en a eu trop souvent ces derniers jours : au fond, on peut casser, on peut s’en prendre aux policiers, ceux-là mêmes qui nous protègent, on peut les mettre en cause, mettre en cause leur honneur, mettre en cause l’honneur du ministre de l’intérieur qui serait derrière ces agissements. Non ! Il est temps que cela s’arrête et que chacun fasse preuve de la plus grande responsabilité. Je citerai les bris de vitres de bâtiments publics, les bris de vitres de commerces ou de banques, les dégradations commises sur les abribus, des destructions de distributeurs automatiques de billets, l’incendie de véhicules, sans compter les permanences d’élus. Comment peut-on accepter – je n’ai parfois entendu aucune condamnation de ces faits – qu’une trentaine de parlementaires aient vu leur permanence mise en cause ? C’est intolérable, et vous avez raison, madame la sénatrice, non seulement il doit y avoir des interpellations, mais la justice doit suivre ! (Ah ! sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

C’est l’occasion pour moi de rappeler que les magistrats luttent aussi pour contenir et réprimer ces comportements. Ainsi, depuis le 24 mars 2016, il a été procédé à 499 interpellations, dont 164 de mineurs, qui ont notamment donné lieu à 11 ouvertures d’information – je rappelle qu’un individu de dix-huit ans auteur de violences graves sur les forces de l’ordre a été écroué ce week-end –, à 121 comparutions immédiates, y compris pour les individus dont le casier judiciaire était vierge, à 91 convocations devant le tribunal correctionnel par un officier de police judiciaire ou par procès-verbal et, concernant les mineurs, à 99 mesures de réparation pénale, liberté surveillée préjudicielle ou défèrement devant le juge des enfants.

Je ne me permettrai pas de porter un jugement sur les peines prononcées. Je ne commenterai pas les décisions judiciaires, les condamnations d’individus puisque ces éléments sont du seul ressort des magistrats qui jugent – faut-il le rappeler encore ? – en toute indépendance et impartialité.

En revanche, les réponses judiciaires sont bien apportées à chaque fait délinquant caractérisé et des mandats de dépôt ont été décernés pour les faits les plus graves.

Je salue de nouveau le travail particulièrement difficile de la police et de la gendarmerie. Nos forces de l’ordre doivent en effet agir dans un contexte extrêmement complexe du fait de ces casseurs qu’il leur faut distinguer des manifestants sincères.

La détermination du ministre de l’intérieur et de moi-même bien sûr est totale pour faire face à ces faits graves, insupportables, qui, comme je le soulignais voilà quelques instants, peuvent mener à des drames. Vos questions, mesdames les sénatrices, permettent de rappeler cet engagement absolu du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. Notre-Dame-des-Landes !

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour la réplique.

Mme Françoise Gatel. Monsieur le Premier ministre, vos déclarations sont fermes. Je souhaite, et c’est nécessaire, que les mesures judiciaires le soient tout autant. Une République ne peut vivre dans l’atermoiement, la faiblesse. Elle requiert de l’exigence et, surtout, le respect des libertés pour protéger celle des plus faibles. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, du groupe Les Républicains et sur quelques travées du RDSE.)

rôle des maires dans la lutte contre le terrorisme

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Paul Fournier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l’intérieur.

En matière de lutte antiterroriste, le constat est alarmant quant à la place que vous accordez aux maires ! Des échanges d’informations inopérants et le manque de dialogue patent entre les services régaliens de l’État et les collectivités territoriales nous empêchent de nous saisir pleinement de nos pouvoirs de police et de contribuer efficacement à la politique de prévention en la matière.

Comment se fait-il que je puisse découvrir dans la presse nationale que deux individus fichés « S », dont l’un était en possession de soixante-dix drapeaux de Daech, ont été arrêtés au cœur même de ma ville, condamnés à des peines de liberté conditionnelle, mais qu’ils se sont désormais volatilisés dans la nature ?

Les premiers magistrats de nos communes sont tenus à l’écart des principales affaires qui se déroulent sur leur propre territoire. Un partage minimal d’informations serait pourtant susceptible d’orienter judicieusement nos actions municipales. Nous ignorons, au sein même de nos services, s’il se trouve des agents municipaux fichés « S » ou si des intervenants d’associations partenaires de la ville sont eux-mêmes soupçonnés de radicalisation. Ce n’est pas admissible !

Dans le cadre local de la prévention de la radicalisation, les maires, qui sont ceux qui connaissent le mieux leur population et fournissent dès lors beaucoup d’informations aux services de l’État, devraient pouvoir bénéficier en retour de la part de l’État de renseignements utiles.

Le Gouvernement compte-t-il faire évoluer le renseignement territorial français en intégrant réellement le maire comme un véritable partenaire ? La communication des fiches de signalement des individus classés « S » liés à des enjeux terroristes ainsi que la situation dans laquelle se trouvent ces individus serait un bon commencement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Jean-Paul Fournier, je vous remercie de poser cette question à la fois utile et délicate portant sur l’association des maires et des responsables de collectivités territoriales à la lutte contre le terrorisme aux côtés de l’État.

À l’évidence, le Gouvernement réaffirme le rôle essentiel des collectivités territoriales pour prévenir en amont la radicalisation et prendre en charge les personnes radicalisées ou en voie de radicalisation.

Face à cet enjeu, le Premier ministre a mis en place un plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme visant à amplifier l’action de prévention, mais aussi à impliquer l’ensemble des acteurs de l’action publique.

Ce plan prévoit tout d’abord une plus grande association des collectivités territoriales. Ainsi, les conseils départementaux, qui participent déjà aux cellules préfectorales de suivi de la radicalisation et d’accompagnement des familles, seront dynamisés.

S’agissant des communes, qui font plus spécifiquement l’objet de votre préoccupation, le ministre de l’intérieur a proposé leur intégration dans le dispositif de prévention. À cet effet, une convention-cadre entre l’État et l’Association des maires de France, l’AMF, sera signée demain 18 mai, afin de mieux détecter les personnes qui se radicalisent, de favoriser la remontée des signalements vers les autorités compétentes et de mettre en œuvre, sous la coordination des préfets, un suivi social adapté à chaque situation.

L’implication des communes et des intercommunalités est un élément structurant de notre réponse publique à la radicalisation. Bien évidemment, il faut mettre à la disposition des élus des moyens nouveaux. Ainsi, des kits de formation sont désormais accessibles, tout comme des modules de formation en ligne sur la radicalisation, qui ont été créés par le ministère de l’intérieur pour permettre à chaque agent public d’être sensibilisé sur ces phénomènes de radicalisation.

M. le président. Il faut conclure.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Bref, à travers votre question, je veux remercier pour leur implication l’ensemble des élus de la République, qui, aux côtés des pouvoirs publics, mettent en œuvre cette politique de prévention de la radicalisation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier, pour la réplique.

M. Jean-Paul Fournier. Nous verrons ce qui se passe après la signature de cette convention-cadre demain.

Je rappelle que les maires sont des officiers de police judiciaire, au même titre que les polices d’État et que nous sommes également tenus au secret professionnel. Je ne vois donc pas pourquoi une confiance ne s’instaure pas dans ce domaine. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

dette grecque

M. le président. La parole est à M. Vincent Eblé, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Vincent Eblé. Ma question s'adresse à M. le ministre des finances.

Après un long processus de négociation sur sa dette et l’important travail du Président de la République qui a permis d’aboutir aux accords de juillet dernier, l’économie grecque commence à redémarrer. (Exclamations sur quelques travées du groupe Les Républicains.) Ces accords ont permis de remettre de la confiance entre les acteurs économiques et sociaux, et de faire bouger les lignes en évitant la sortie de la zone euro.

Il est important de saluer les réformes structurelles et les efforts budgétaires accomplis par le gouvernement Tsipras : hausses des recettes fiscales, fonds de privatisation, maîtrise des emplois publics. Tout récemment encore, le Parlement grec a voté une réforme des retraites.

Ces efforts réalisés par la Grèce peuvent lui permettre désormais de mettre en débat la question de l’allégement de sa dette. Ce sujet a d’ailleurs fait l’objet d’une première discussion le 9 mai dernier.

L’Eurogroupe a évoqué la possibilité du reversement à moyen terme des bénéfices réalisés par la Banque centrale européenne sur la détention de la dette grecque, soit 7,7 milliards d’euros, conditionné à la mise en œuvre de réformes complémentaires. La BCE et le Fonds monétaire international, le FMI, partageant la même orientation, les négociations promettent d’être extrêmement serrées.

S’il est clair que la Grèce doit maintenir ses efforts, doit-on pour autant lui imposer de nouvelles réformes parfois plus dures, comme une nouvelle baisse du niveau des pensions de retraite ? Le peuple grec a réalisé d’immenses efforts, et les décisions qui seront prises dans les prochaines semaines doivent également avoir pour objectif de veiller à la préservation de la cohésion sociale du pays. À un certain niveau de sacrifices par la population, c’est le « vivre ensemble » qui est menacé.

Au moment des accords de juillet, le Président de la République avait eu cette formule à l’endroit d’Alexis Tsipras : « Aide-moi à t’aider ». L’implication de la France avait permis de sauver la zone euro.

Toujours dans cet esprit, ma question est la suivante (Marques de satisfaction sur quelques travées du groupe Les Républicains.) : nous qui tenions tant à ce que la Grèce maintienne sa place dans la zone euro, quelle position allons-nous défendre lors de la prochaine réunion de l’Eurogroupe pour que la Grèce retrouve la croissance, et sa population de l’aisance, après des années d’efforts considérables ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. André Gattolin applaudit également.)