Mme Myriam El Khomri, ministre. L’apprentissage des codes et des moyens d’effectuer une recherche de stage sont des fondements de l’autonomie. Cette dernière est, quant à elle, un pas essentiel pour aller vers l’emploi. Tel est le sens des six semaines de coaching que j’ai évoquées en présentant cet amendement. Cet encadrement ne relève en rien du loisir ou de l’occupationnel !

En généralisant ce dispositif, nous dirons à tout jeune Français privé d’emploi, ne suivant ni une formation ni des études, subissant de surcroît une situation de précarité, qu’il a droit, où qu’il se trouve, à la garantie jeunes.

Aujourd’hui, seuls 80 % des missions locales proposent ce dispositif. D’ici au 1er janvier 2017, l’ensemble du territoire français doit être couvert !

Je tenais à insister sur ce point capital : l’accès à l’autonomie est un pas vers l’emploi. Surtout, la garantie jeunes ne se résume pas à une simple allocation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Yves Daudigny. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Mes chers collègues, nous allons bien sûr voter en faveur de cet amendement. Je précise néanmoins que les écologistes sont favorables à un RSA sans condition d’âge. Ainsi, à partir de dix-huit ans, tous les jeunes pourraient bénéficier d’un revenu. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas le sujet !

M. Jean Desessard. La mission d’information relative à la pauvreté et à l’exclusion l’a clairement constaté : parmi les habitants les plus défavorisés de notre pays, les jeunes sont extrêmement nombreux. Et, comme par hasard, ce sont ceux qui n’ont pas droit au RSA !

Plutôt que d’élaborer des systèmes compliqués assortis de diverses conditions, mieux vaudrait partir du principe suivant : dès lors que l’on a dix-huit ans, l’on est majeur et l’on bénéficie des mêmes droits que tout citoyen.

M. Patrick Abate. Ce serait le bon sens !

Mme Nicole Bricq. Mais ce serait un changement de logique !

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je tiens à réagir aux propos de M. Desessard : pour l’heure, le revenu de solidarité active, comme l’ensemble de notre modèle social, est financé à crédit. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Nicole Bricq. Ce n’est toujours pas le sujet !

M. René-Paul Savary. On ne parvient déjà pas à respecter les engagements souscrits, et l’on donne de nouveaux cadeaux aux jeunes en laissant peser leur coût sur le dos des suivants ! Il ne faut pas occulter cette réalité.

Madame la ministre, le système d’accompagnement que vous nous présentez me paraît intéressant. Néanmoins, comme pour le RSA, il faut se poser la question de la sortie du dispositif : c’est là tout le problème.

Pourquoi sommes-nous face à un blocage au sujet du RSA ? Cette prestation devait inciter à la reprise d’emploi… Le résultat obtenu est contestable ! Elle devait permettre de réduire la part de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Sur ce front, l’efficacité n’est pas non plus redoutable au regard du coût supporté…

À présent, le Gouvernement nous propose un nouvel outil. Il est très intéressant sur le plan philosophique. Toutefois, rendra-t-il service aux jeunes, dès lors que l’on ignore comment ils sortiront du dispositif ? Voilà ce qui nous interpelle. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. Louis Nègre. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Par souci d’équilibre, je tiens à dire tout le bien que nous pensons de ce dispositif.

Non, il ne s’agit pas d’assistanat. Non, il ne s’agit pas d’un doublon du RSA. Non, il ne s’agit d’argent perdu ou gaspillé, distribué sans contrepartie.

M. Vanlerenberghe, Mme Bricq et Mme la ministre l’ont déjà expliqué de manière très claire et très complète : chaque fois qu’un jeune de ce pays éprouvant de graves difficultés recevra un appui, sera aidé, guidé, conduit à prendre des initiatives pour se former, pour contacter des entreprises, son propre sort s’améliorera : une voie vers l’emploi et vers l’intégration s’ouvrira pour lui. L’action sociale s’en trouvera renforcée. Et, dans le même temps, la société tout entière s’enrichira.

L’argent consacré aujourd’hui à la garantie jeunes, qui – j’y insiste – n’a rien d’une allocation, est un excellent investissement pour notre pays ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.

M. Yannick Vaugrenard. Mes chers collègues, gardons bien à l’esprit que ce dispositif se fonde sur une démarche volontaire de la part des jeunes et que, parallèlement, ces derniers doivent être soutenus pour tracer des perspectives d’avenir, alors qu’ils traversent une existence particulièrement difficile. Le système proposé par Mme la ministre n’a donc rien à voir avec l’assistanat.

Par ailleurs, souvenons-nous que les citoyens de la République française ne sont pas assistés par principe : ils sont des ayants droit, en tant que membres de la communauté nationale. C’est précisément en tant qu’ayants droit, et non en tant qu’assistés, qu’ils bénéficient des aides sociales.

M. Yannick Vaugrenard. À cet égard, la rédaction proposée par le Gouvernement a toute son importance. Elle est même fondamentale : elle responsabilise tout le monde, notamment les jeunes qui font face à une situation difficile.

Permettez-moi d’insister sur un fait trop souvent méconnu : statistiquement, la pauvreté est héréditaire. On pourrait s’imaginer que celles et ceux qui sont pauvres le sont du fait du contexte économique difficile que nous traversons, mais la réalité n’est malheureusement pas celle-là : ceux qui ont des parents ou des grands-parents pauvres ont plus de chances de l’être à leur tour.

Cet amendement vise à responsabiliser les jeunes, tout en faisant en sorte que la collectivité publique leur apporte l’aide dont ils ont besoin pour s’en sortir et pour pouvoir ensuite trouver un emploi.

Vous nous rétorquez que les jeunes ne trouveront pas un emploi du jour au lendemain pour autant. C’est une évidence ! Toutefois, il dépend des politiques publiques et de notre volonté à tous, quelles que soient nos orientations politiques, de faire en sorte qu’il y ait le maximum d’emplois. C’est vrai pour les jeunes, mais cela l’est tout autant pour d’autres ; c’est une évidence absolue.

De grâce, ayons ce souci, primordial, me semble-t-il, dans la République qui est la nôtre, d’aider les jeunes ! Nous le savons, leur génération se trouve aujourd’hui dans une situation inédite, puisque, pour la première fois, ils risquent de vivre moins bien que les générations d’hier et d’avant-hier. C’est la première fois dans l’histoire de notre pays que nous connaissons cette situation, et c’est pourquoi nous devons nous montrer particulièrement attentifs.

Tel est le sens de cet amendement, que je vous invite à adopter, mes chers collègues, pour des raisons politiques, mais aussi humanistes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Nicole Bricq. Le président Larcher a recommandé aux candidats à la primaire de prendre le social en considération !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 973.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1035, présenté par MM. Forissier, Lemoyne et Gabouty, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 6

1° Première phrase

Supprimer les mots :

et mis en œuvre par les organismes mentionnés aux articles L. 5314-1 à L. 5314-4 du code du travail

2° Après la première phrase

insérer deux phrases ainsi rédigées :

Ce parcours est mis en œuvre par les organismes mentionnés à l’article L. 5314-1. Toutefois, par dérogation, un autre organisme peut être désigné par le représentant de l'État dans le département, lorsque cela est justifié par les besoins de la politique d'insertion sociale et professionnelle des jeunes.

La parole est à M. Michel Forissier, rapporteur.

M. Michel Forissier, rapporteur. Au travers de cet amendement, la commission souhaite apporter une précision nécessaire.

Lors de nos débats en commission, nous avons unanimement décidé qu’il reviendrait aux missions locales de porter ce dispositif.

Cet amendement vise à préciser que les missions locales sont appelées à mettre en œuvre le parcours contractualisé, mais que, si nécessaire, un autre organisme peut être désigné. Dans les cas où cela sera justifié par les besoins de politique d’insertion sociale et professionnelle des jeunes, ou dans des cas exceptionnels où il n’y aurait pas de couverture suffisante du territoire, cet organisme désigné sera le représentant de l’État dans le département.

Permettez-moi de souligner que nous considérons ce dispositif avec bienveillance. Si je ne souhaite pas l’inscrire dès aujourd'hui dans le marbre de la loi et préfère à ce stade un décret, c’est tout simplement pour le parfaire et l’affiner.

Madame la ministre, je serai très clair avec vous. Nos collègues du groupe CRC nous ont fait part, hier, des difficultés financières de mise en œuvre de ce dispositif. Or le coût à supporter par les missions locales se répercute sur les collectivités territoriales, comme j’ai pu l’observer dans mon territoire, où la mission locale a demandé un financement pour mettre en place ce dispositif de manière correcte, ce qui n’est pas normal.

Le Gouvernement devrait s’appliquer la fameuse règle d’or budgétaire. Le financement de tous les dispositifs qui sont mis en place sur son initiative devrait être clarifié au préalable, car il y a des besoins de financement pour rendre le dispositif efficace.

Le dispositif du parcours contractualisé nécessitera des locaux et des personnels dédiés, donc des recrutements. Il concerne aujourd'hui 40 000 jeunes et pourrait en concerner 60 000 supplémentaires. Vos objectifs sont, en effet, de l’ordre de 150 000 jeunes.

Nous souscrivons à votre ambition, mais, de grâce, si vous voulez que ce dispositif soit efficace, veillez à l’aspect financier des choses. Compte tenu de l’état des finances des collectivités locales, j’attire votre attention le problème qui va se poser.

M. René-Paul Savary. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement présenté par M. le rapporteur. En effet, la disposition qu’il vise à introduire permettra de mettre en œuvre la garantie jeunes lorsqu’un territoire n’est pas couvert par une mission locale.

Permettez-moi de saluer tous les professionnels qui travaillent dans les missions locales et de vous apporter des éléments très concrets sur la question du budget de ces missions.

Mme Cohen a indiqué hier soir que le budget alloué par l’État aux missions locales avait baissé de 60 millions d’euros. C’est faux. (M. Michel Bouvard s’exclame.) Le budget de l’État a été maintenu, et a même augmenté de 13 % avec la garantie jeunes, ce qui a, en partie, compensé la baisse du financement lié à l’arrêt de l’« ANI jeunes », l’Accord national interprofessionnel jeunes, et la baisse de 2 % des dépenses « socle », mais aussi – je vous réponds là de manière très transparente –, le désengagement de certaines collectivités locales s’agissant des missions locales. Telle est la réalité.

Que faire, vu que l’État augmente les financements et que l’on demande aux missions locales de prescrire des contrats d’avenir dans le cadre de la garantie jeunes ? La question du modèle économique des missions locales pose des difficultés depuis de nombreuses années. Dès que les crédits du Fonds social européen, le FSE, se font attendre, ou qu’une collectivité locale se désengage, une fragilité s’en ressent sur le terrain.

À la demande des syndicats représentant le personnel des missions locales, j’ai donc diligenté une mission de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, sur le modèle économique des missions locales. Je lui ai demandé de me transmettre ses conclusions d’ici au mois de septembre prochain, pour que nous puissions prendre ensemble des mesures visant à consolider le budget des missions locales lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2017.

Nous disposerons donc d’une analyse très transparente, avec des focus sur certains bassins d’emplois dont les missions locales sont dans une situation plus inquiétante, comme à la Réunion ou à Marseille. Au moins, nous pourrons savoir en toute transparence qui diminue les crédits des missions locales.

Le Gouvernement a effectivement donné des missions supplémentaires aux missions locales avec la garantie jeunes. Ces dernières se voient allouer en moyenne 1 600 euros par jeune pris en charge, mais l’impact n’est pas le même, par exemple en termes de locaux, à Paris et dans une ville moyenne.

Toutes ces questions sont posées de façon très claire. L’objectif du Gouvernement est que, à partir du 1er janvier 2017, tout jeune qui n’est pas en situation de formation, d’emploi ou de poursuite d’études supérieures et qui se trouve dans une situation de précarité puisse demander à entrer dans la garantie jeunes.

Il ne s’agit donc pas des 700 000 jeunes dits « NEET », ni scolarisés, ni en emploi, ni en formation, puisque tous ne sont pas en situation de précarité et que tous ne sont pas volontaires et motivés. La garantie jeunes est, je le répète, un contrat donnant-donnant entre la mission locale et le jeune. C’est un dispositif d’accompagnement particulièrement intensif qui s’adresse à des jeunes volontaires et motivés.

Quoi qu’il en soit, j’émets un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, pour que la transparence soit complète, permettez-moi, à mon tour, de me livrer à ce petit exercice de justification.

Les argumentaires qui sont développés par le groupe CRC sont bien sûr contestables pour qui n’est pas d’accord avec nous, mais nous essayons toujours de varier nos sources, afin de ne pas être taxés d’être partisans. Les chiffres que j’ai cités hier ont été repris de notre collègue député Jean-Patrick Gille, qui n’a pas la même sensibilité politique que nous et qui exerce des responsabilités importantes au niveau des missions locales. Il serait donc étonnant qu’ils soient faux !

Par ailleurs, madame la ministre, la proposition que vous faites est certes intéressante, dans la mesure où elle permettrait à des jeunes qui sont particulièrement en difficulté de remettre le pied à l’étrier, si je puis m’exprimer ainsi, mais le problème de la précarité qui sévit au sein de la jeunesse n’est pas réglé pour autant.

Comme je l’ai souligné hier, si votre proposition est très ambitieuse, les moyens qui lui sont alloués ne sont pas au rendez-vous. Il faut donc raison garder ! En tout cas, nous resterons vigilants jusqu’au bout, pour voir cela tient la route.

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour explication de vote.

Mme Agnès Canayer. Je voudrais revenir sur la question de la qualité de l’accompagnement, en réponse à Mme Bricq, qui avait l’air de dire que je ne jaugeais pas la qualité.

Pour avoir pris part à de nombreux ateliers dans la mission locale que je préside, j’ai pu observer que de nombreux jeunes y trouvent un accès à la citoyenneté. Nous en sommes d’accord, la qualité de l’accompagnement est ce qui permet de tirer les jeunes vers le haut, même les plus décrocheurs, et de les faire accéder à l’emploi.

Toutefois, nous constatons aujourd'hui que le potentiel de jeunes est très supérieur au nombre de jeunes accompagnés. Dans ma mission locale, nous accompagnons quelque 500 jeunes, alors que le potentiel non pas simplement de jeunes décrocheurs, mais de volontaires est de 2 000 jeunes.

Quand bien même disposerions-nous de 1 600 euros par jeune, nous n’aurions jamais les moyens d’offrir à ces 2 000 jeunes la même qualité d’accompagnement qu’aux 500 jeunes que nous aidons aujourd'hui. Cet accompagnement demande des moyens humains et des locaux. Or les financements des missions locales baissent.

Nous venons d’avoir notre dialogue de gestion, et c’est donc seulement au mois de juin que nous connaissons les financements pour les actions de la mission locale. Or nous perdons au moins 2,5 % de nos ressources hors FSE.

Dans un contexte de baisse des financements de l’État et de déséquilibre de notre modèle économique, nous n’avons pas les moyens d’accompagner l’ensemble des jeunes qui peuvent bénéficier de la garantie jeunes à la hauteur de ce que nous proposons aujourd'hui. Même avec une augmentation du FSE, ce qui entraînerait d’autres contraintes administratives et de gestion des fonds pesant sur le fonctionnement des missions locales, nous n’en aurions pas les moyens.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Madame la ministre, j’ai l’impression que vous faites de la politique sur le dos des collectivités locales.

Vos ambitions sont grandes, et on peut les partager, car, dans nos territoires, nous sommes confrontés à cette population en difficulté, plus spécialement d’ailleurs dans les communes et intercommunalités que dans les départements, car ce public est relativement séparé du point de vue de la prise en charge. Toutefois, encore faut-il donner aux collectivités locales les moyens d’assumer leurs responsabilités. C’est un véritable problème.

D’un côté, vous baissez la DGF et dénoncez encore les charges de fonctionnement des collectivités locales. De l’autre, vous leur demandez de répondre aux ambitions de l’État. Pardonnez-moi l’expression, qui n’est pas adaptée, mais il s’agit là d’un comportement schizophrénique ! Même si l’on partage votre volonté et vos ambitions, nous n’avons pas les moyens de les réaliser.

Par ailleurs, comme vous l’avez dit, ne faut-il pas territorialiser le financement, puisque le coût de la vie est différent en province et à Paris ? C’est un point important pour le jeune, s’il veut s’en sortir.

Certains pays le font, parmi lesquels le Royaume-Uni, qui, comme nous l’avons appris hier dans le cadre de la commission d’enquête sur le chômage, amorce la territorialisation des aides et des accompagnements.

Il semble important de réfléchir à un dispositif permettant de prendre en compte le pouvoir d’achat de la personne qui reçoit des aides pouvant être différentes d’une collectivité à l’autre. Je ne cherche pas à faire de polémique, mais vous n’obtiendrez pas de résultat si nous n’avons pas les moyens de prendre en charge les jeunes sur le terrain.

Enfin, j’évoquerai le FSE. Vous le savez, madame la ministre, il y a deux ans de décalage ; il faut donc le préfinancer.

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. René-Paul Savary. Les départements peuvent certes être des autorités organisatrices de second rang pour le compte des communes ou des associations, mais des questions de préfinancement se posent, là aussi.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Après les éclaircissements de ma collègue Laurence Cohen, je voudrais répéter que nous ne sommes pas favorables à cet amendement présenté par notre rapporteur.

Madame la ministre, nous nous étonnons que vous donniez un avis favorable sur cet amendement, dont je rappelle que l’objet est de permettre à d’autres organismes que les missions locales de mettre en œuvre ces parcours contractualisés pour nos jeunes.

Cela nous semble d’autant plus inquiétant que vous avez diligenté une mission d’analyse du modèle économique des missions locales auprès de l’IGAS. Vous contestez les chiffres de M. Jean-Patrick Gille, qui est tout de même président de l’Union nationale des missions locales et qui se dit très inquiet de la baisse de son budget. Et alors même que la mission d’analyse que vous avez diligentée est en cours, vous donnez un avis favorable à un amendement du rapporteur, donc de la droite, qui vise à élargir à d’autres organismes que les missions locales la possibilité de mettre en œuvre cette garantie jeunes…

Cet avis favorable nous inquiète donc beaucoup, et nous ne voterons pas en faveur de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Myriam El Khomri, ministre. Pour que les choses soient très claires, je répète que le budget de l’État en direction des missions locales a augmenté. Si les financements n’ont pas été suffisants par rapport aux charges nouvelles des missions locales, c’est dû au désengagement de certains partenaires et à des situations complexes dans les territoires.

L’ambition que je porte n’est pas la mienne, ni celle de l’État ; c’est une ambition pour notre pays et pour nos jeunes. La garantie jeunes est un dispositif qui va chercher ceux qui en ont le plus besoin.

En contractualisant avec ces jeunes, ce dispositif permet de les rapprocher de l’entreprise, de les mettre en situation professionnelle ou de les renvoyer vers l’apprentissage. Voilà une réponse intelligente, qui ne consiste pas à demander aux jeunes d’entrer dans une boîte, mais qui s’efforce de s’adapter au profil de chacun de ces jeunes, en ne les lâchant pas tant qu’une solution n’a pas été trouvée.

J’ai en effet diligenté l’IGAS pour une mission d’analyse du modèle économique des missions locales, notamment en ce qui concerne les coûts réels de fonctionnement. Je crois que cela répond à votre question sur les locaux, madame Canayer : quel est le coût réel des mesures nationales au regard des budgets qui leur sont consacrés ?

Une telle transparence permettra de déterminer si les missions locales ont la capacité d’assurer leur mission de service public et de faire face aux échéances qui arrivent. Nous disposerons de toutes ces informations lors du prochain débat budgétaire.

Je le répète, cet amendement vise à préciser que ce sont les missions locales qui doivent mettre en œuvre la garantie jeunes, mais que, par dérogation, un autre organisme peut être désigné par le représentant de l’État dans le département.

Comme vous le savez, la vie associative est parfois difficile, et il arrive que des associations mettent la clef sous la porte. J’ai émis un avis favorable sur cet amendement, parce qu’il peut arriver qu’il n’y ait pas ou plus de mission locale sur un territoire, et parce que je refuse que les jeunes de ces territoires ne puissent pas entrer dans la garantie jeunes pour cette raison.

C’est donc de façon tout à fait responsable que j’ai donné cet avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Il y a quelques minutes, j’ai voté l’amendement n° 973 du Gouvernement, parce que l’article 23 prévoit que seul le jeune engagé dans un parcours contractualisé vers l’autonomie par l’emploi peut bénéficier d’une allocation. J’ai d’ailleurs compris que celle allocation pouvait être suspendue ou supprimée si le jeune ne se maintenait pas dans l’emploi.

Je suis toutefois conscient des difficultés des missions locales, qui demandent chaque année une augmentation des dotations des communes ou des communautés de communes, parce que celle de l’État diminue.

Je voterai donc en faveur de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1035.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 320 est présenté par Mmes D. Gillot et Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet, MM. Lozach, Botrel, Magner et les membres du groupe socialiste et républicain.

L'amendement n° 893 rectifié est présenté par MM. Collombat, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 11

Rétablir le 6° dans la rédaction suivante :

6° L'article L. 5131-6 est ainsi rédigé :

« Art. L. 5131-6. - La garantie jeunes est une modalité spécifique du parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie.

« Elle est mise en œuvre par les organismes mentionnés à l'article L. 5314-1. Toutefois, par dérogation, un autre organisme peut être désigné par le représentant de l'État dans le département, lorsque cela est justifié par les besoins de la politique d'insertion sociale et professionnelle des jeunes.

« Elle comporte un accompagnement intensif du jeune, ainsi qu'une allocation dégressive en fonction de ses ressources d'activité. Cette allocation est incessible et insaisissable. Elle peut être suspendue ou supprimée en cas de non-respect par son bénéficiaire des engagements du contrat.

« La garantie jeunes est un droit ouvert aux jeunes de seize à vingt-cinq ans qui vivent hors du foyer de leurs parents ou au sein de ce foyer sans recevoir de soutien financier de leurs parents, qui ne sont pas étudiants, ne suivent pas une formation et n'occupent pas un emploi et dont le niveau de ressources ne dépasse pas un montant fixé par décret, dès lors qu'ils s'engagent à respecter les engagements conclus dans le cadre de leur parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie. » ;

II. – Alinéa 17

Remplacer la référence :

à l'article L. 5131-5

par les références :

aux articles L. 5131-5 et L. 5131-6

La parole est à Mme Dominique Gillot, pour présenter l’amendement n° 320.

Mme Dominique Gillot. Au-delà de la précision rédactionnelle sur le niveau, la mise en œuvre et les objectifs, cet amendement vise à rétablir la généralisation de la garantie jeunes, telle qu’elle issue des travaux de l’Assemblée nationale et supprimée par la commission des affaires sociales du Sénat.

Au regard de la situation générale dans notre pays, la situation des jeunes est objectivement plus difficile. Pourtant, ils ne sont pas résignés, ils ont foi en l’avenir et aspirent à en faire la preuve, qu’ils soient en situation d’emploi, de formation, de poursuite d’études supérieures ou dans aucun de ces trois derniers cas.

Les organisations de jeunesse l’ont démontré en investissant le débat sur cette loi qui, au départ, ne leur était pas destinée, et en portant dans l’espace public leurs difficultés, leurs besoins pour construire leur vie. Notre société doit être inclusive et réellement prendre en compte sa jeunesse dans l’ensemble de ses politiques publiques : l’instauration de la clause d’impact jeunesse, qui oblige à analyser l’effet de chaque loi sur cette partie essentielle de la population, est un signal fort du Gouvernement.

Toutefois, il reste du chemin à faire pour accompagner la jeunesse dans la conquête de son autonomie : le taux de chômage des 18-25 ans est bien plus qu’inquiétant.

La garantie jeunes, c’est un dispositif d’accompagnement vers l’emploi assorti d’une aide financière, filet de sécurité pour ceux qui n’ont pas encore trouvé leur premier travail, qui n’ont pas le soutien de leur famille et qui sont volontaires pour ce partenariat bienveillant et efficient.

La garantie jeunes, c’est 250 millions d’euros dans notre budget 2016, à savoir 461 euros par mois pour chaque bénéficiaire. Comme cela a été expliqué précédemment, cette somme est assortie d’obligations et d’un suivi. Est-ce trop pour permettre à ces jeunes de vivre à peu près dignement ? Est-ce de l’assistanat, comme on a pu l’entendre sur certaines travées ?

La garantie jeunes portée par le Gouvernement dans ce projet de loi s’inscrit dans la dynamique européenne, et elle est à ce titre éligible aux 10 milliards d’euros du Fonds social européen pour la période 2014-2020. Pour les comptables convaincus dans cet hémicycle – ils s’expriment assez souvent –, le rapport d’Eurofound estime le coût du chômage des jeunes à 153 milliards d’euros pour l’Union européenne, soit sept fois plus que la mise en place de la garantie jeunes dans toute l’Union européenne.

La généralisation de la garantie jeunes n’est pas une charge. C’est un investissement !

Mme la présidente. Veuillez conclure, chère collègue.