Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour avis. Je fais également miennes ces préoccupations. Toutefois, il apparaît que, dans les territoires ultramarins, la difficulté de mise en œuvre de ces protocoles résulte principalement de la faiblesse de la démographie médicale. Ce déploiement n’en est pas moins l’une des obligations de la stratégie nationale ultramarine.

Pour ces raisons, j’émets, au nom de la commission des affaires sociales, un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ericka Bareigts, ministre. Madame Claireaux, nous estimons qu’il faut absolument aller dans le sens que vous indiquez. Même si ces objectifs figurent dans les plans régionaux de santé, il faut aller plus loin et passer à la pratique.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 199 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 sexies est rétabli dans cette rédaction.

Article 10 sexies (supprimé)
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Article 10 septies (Texte non modifié par la commission)

Article 10 septies A

(Supprimé)

Article 10 septies A
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Article 10 octies A

Article 10 septies

(Non modifié)

À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution :

1° Le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles mentionné à l’article L. 6123-3 du code du travail est doté d’une commission sur la pluriactivité. Elle est chargée d’établir un diagnostic partagé sur la pluriactivité dans le territoire et de formuler une stratégie pour la sécurisation des parcours professionnels des personnes pluriactives. La composition de cette commission est fixée par décret ;

2° La convention régionale pluriannuelle de coordination de l’emploi, de l’orientation et de la formation mentionnée à l’article L. 6123-4 du même code détermine les actions conduites par les signataires pour mettre en œuvre la stratégie mentionnée au 1° du présent article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Gélita Hoarau, sur l'article.

Mme Gélita Hoarau. Les premiers contrats d’avenir ont été signés en 2013. Depuis la fin de l’année 2016, ils commencent à arriver à terme. Selon une étude de la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, au plan national, les deux tiers des personnes ayant achevé leur contrat souscrit avec une collectivité publique seront à la recherche d’un emploi lorsqu’elles quitteront le dispositif.

Ce constat est encore plus vrai dans les outre-mer, où la situation financière des collectivités territoriales est beaucoup plus difficile.

Quelle que soit l’importance du volet formation dont ces contrats ont été assortis, force est de constater que, en l’état actuel, ces jeunes ne trouvent pas d’emploi, et que les collectivités locales ne peuvent les inclure dans leurs effectifs.

À La Réunion, par exemple, près de 4 000 jeunes ont vu, ou verront dans les prochaines semaines, leur contrat d’avenir s’achever. La seule solution que leur propose l’État est une préinscription à Pôle Emploi, avant le terme de leur contrat, afin qu’ils soient accompagnés au mieux par le biais d’aménagements spécifiques. Cela n’est pas suffisant.

À La Réunion toujours, on se souvient de la fin du dispositif des emplois jeunes : une sortie non préparée, qui a provoqué beaucoup d’actions, d’agitation et de manifestations.

Il est évident que, dans les outre-mer en général et à La Réunion en particulier, l’on se prépare à une crise aussi grave que celle que l’on avait connue avec la fin des emplois jeunes.

Toutes les études menées ont mis au jour l’importance de la préparation de la sortie du programme lorsqu’il n’y a pas d’intégration chez l’employeur ; or c’est le cas le plus fréquent. Afin de préparer une issue à ces contrats, il aurait été souhaitable de les prolonger. Nous aurions donc désiré que, dans les outre-mer, ce dispositif soit reconduit, aux mêmes conditions d’accompagnement par l’État des collectivités, intercommunalités et autres employeurs.

Il va sans dire que la simple reconduction de ce dispositif aurait dû s’accompagner d’un volet de formation personnalisée. Cette méthode aurait permis à chaque jeune qui le souhaite d’élaborer une stratégie personnelle d’insertion professionnelle. Il n’en sera rien. D’où cette question : quelles solutions pour ces 4 000 jeunes ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 septies.

(L'article 10 septies est adopté.)

Article 10 septies (Texte non modifié par la commission)
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Article 10 octies

Article 10 octies A

(Non modifié)

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour étendre et adapter la législation relative aux allocations logement à Saint-Pierre-et-Miquelon au regard des spécificités locales.

II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement au plus tard le premier jour du sixième mois suivant la publication de l’ordonnance. – (Adopté.)

Article 10 octies A
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Article 10 nonies

Article 10 octies

(Non modifié)

Le V de l’article 39 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, un décret peut prévoir une entrée en vigueur avant le 1er janvier 2018 des mêmes 2° et 14° pour les travailleurs indépendants affiliés aux fonds d’assurance-formation de non-salariés qu’il détermine. » – (Adopté.)

Article 10 octies
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Article 10 decies (supprimé)

Article 10 nonies

(Supprimé)

Article 10 nonies
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Article 10 undecies A (nouveau)

Article 10 decies

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 78 est présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 200 rectifié est présenté par Mme Claireaux, MM. Mohamed Soilihi, S. Larcher, Cornano, Patient, Karam, Desplan, Antiste, Vergoz, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant le lien entre le prix des boissons alcooliques et la consommation d'alcool, et évaluant l'impact d'une éventuelle majoration des droits d'accises sur les boissons alcooliques en matière de lutte contre l'alcoolisme.

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l’amendement n° 78.

Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à rétablir l’article 10 decies, supprimé en commission au Sénat, qui demandait le rendu d’un rapport sur le lien entre le prix des boissons alcooliques et la consommation d’alcool.

L’alcoolisme provoque 50 000 morts par an dans notre pays : il constitue un véritable enjeu de santé publique. Il faut se donner les moyens de lutter contre ce fléau. Les territoires d’outre-mer sont particulièrement touchés par les problèmes liés à une consommation excessive d’alcool, notamment chez les jeunes.

Le baromètre santé 2010 de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, montrait ainsi que, à La Réunion, 31 % des enfants de treize ans avaient déjà été ivres, contre 16 % des enfants du même âge dans l’Hexagone.

Des études mettent régulièrement au jour le lien qui existerait entre le prix de l’alcool et la consommation d’alcool. Or l’alcool, notamment le rhum, est d’un prix bien inférieur dans les territoires d’outre-mer par rapport à celui qui est pratiqué dans l’Hexagone. Lorsqu’on sait que les prix des produits alimentaires sont en général bien supérieurs dans les territoires d’outre-mer à ceux qui sont en vigueur en métropole, ce constat paraît encore plus surprenant.

Pour avoir en notre possession toutes les informations nécessaires au déploiement de la bonne stratégie de lutte contre la consommation excessive d’alcool, en particulier par les jeunes, nous proposons de rétablir cette demande de rapport, qui nous semble importante.

Mme la présidente. La parole est à M. Karine Claireaux, pour présenter l'amendement n° 200 rectifié.

Mme Karine Claireaux. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, de même que pour les deux précédentes demandes de rapport.

Certains semblent sceptiques quant à l’issue des rapports émanant du Parlement, notamment de ses délégations. Je tiens à le leur assurer : d’ici quelque temps, le présent projet de loi prouvera que les rapports sénatoriaux et, en particulier, ceux de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, peuvent voir plusieurs de leurs recommandations aboutir dans un texte de loi. Il ne faut pas désespérer ! Et, pour reprendre les mots de Mme la ministre, à un moment donné, il faut abandonner la logique du rapport pour celle de l’action.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ericka Bareigts, ministre. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de vos propos. Sur l’initiative de sénatrices et de sénateurs ainsi que du Gouvernement, nombre de mesures issues des rapports de la Haute Assemblée connaissent, avec ce texte, une mise en œuvre concrète. Et c’est bien là que réside l’acte de gouverner, qu’assument conjointement le pouvoir exécutif et le Parlement.

Pour ce qui concerne, plus précisément, les demandes de rapports, vous avez fait une exception au sujet de l’eau. En l’occurrence, nous traitons de l’alcoolisme et de ses ravages.

Sur chaque territoire, les conférences régionales et les plans régionaux de santé se déclinent en diverses actions locales. Néanmoins, je perçois bien un certain nombre de flottements et d’hésitations. Sur le sujet de l’alcool, il faut aller plus loin.

Sur ces deux amendements, je m’en remets donc à la sagesse du Sénat. En examinant ces dispositions, et celles dont nous débattrons dans quelques instants, j’observe que la réflexion mérite d’être poursuivie.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 78 et 200 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 decies est rétabli dans cette rédaction.

Article 10 decies (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique
Article 10 undecies (supprimé)

Article 10 undecies A (nouveau)

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Avant le dernier alinéa de l’article L. 131-8, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° Le produit de la cotisation sur les boissons alcooliques dont le tarif est fixé à l’article L. 758-1 est versé :

« – à la branche mentionnée au 3° de l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime pour une fraction du tarif de 80 euros par hectolitre d’alcool pur ;

« – à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du présent code. » ;

2° L’article L. 758-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « 0,04 euro par décilitre ou fraction de décilitre » sont remplacés par les mots : « 96 euros par hectolitre d’alcool pur » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le tarif fixé au premier alinéa est relevé au 1er janvier de chaque année dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année, majorée de 20 %. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le second chiffre étant augmenté d’une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Ce relèvement ne peut excéder 21,75 %. Le tarif est publié au Journal officiel par arrêté du ministre chargé du budget. »

II. – L’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.

III. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2018.

IV. – Le II du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2028.

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.

M. Maurice Antiste. Je suis une nouvelle fois très préoccupé par certaines dispositions et certains discours qui, sous couvert d’arguments fallacieux, entraîneraient une surtaxation importante des rhums ultramarins.

Un amendement de même nature que cet article, déposé au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, m’avait poussé à réagir avec force. Aujourd’hui, je ne peux pas imaginer que la volonté de certains et certaines, fondée sur une méconnaissance totale de nos territoires et de nos populations, puisse aller vers une disparition de la filière française de la canne à sucre.

Le présent article augmente, dès cette année, la cotisation sécurité sociale, la CSS, qui pèse sur les rhums produits et consommés dans les départements d’outre-mer. Puis, il impose des hausses successives de cette cotisation à hauteur de 20 % par an pendant dix ans.

Or la vente sur le marché local est le débouché principal, et bien souvent unique, de très nombreuses petites distilleries. De plus, elle représente une part importante des ventes des autres distilleries.

Confrontées à des hausses de la fiscalité aussi massives, nos distilleries ne pourraient plus écouler leur production sur le marché local : c’est donc bien la disparition pure et simple de la quasi-totalité des distilleries de rhum d’outre-mer qui serait en jeu si cet article était maintenu.

En outre, les distilleries qui, miraculeusement, parviendraient à survivre ne pourraient y parvenir qu’en tournant le dos au marché local, en exportant toute leur production, voire en recourant à des ventes non déclarées. En Martinique, 25 % du rhum vendu est à destination des touristes. J’ajoute que le développement du « spiritourisme » a fortement accru cette proportion, qui n’était que de 10 % voilà dix ans.

Avec les hausses massives prévues, une bouteille de rhum risque ainsi d’atteindre le même tarif qu’une bouteille de whisky ou de vodka sur les linéaires de la grande distribution en outre-mer. Sans avantage concurrentiel, le rhum français subira inéluctablement de plein fouet la concurrence des spiritueux étrangers.

Enfin, cet article s’appuie sur un fait prétendu : la consommation d’alcool serait plus forte en outre-mer qu’en métropole.

Les études et rapports dédiés au sujet démontrent que la fiscalité comportementale déjà mise en œuvre sur les boissons alcoolisées n’a pas fait montre d’efficacité en France ou en Europe. J’en veux pour preuve les travaux de la Cour des comptes, ceux de l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, et ceux d’une mission d’information parlementaire relative à la fiscalité comportementale.

Le dernier rapport de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies indique pour sa part que, dans les outre-mer, la consommation régulière et abusive de boissons alcoolisées chez les jeunes est inférieure à la moyenne nationale.

On constate donc bien que la démarche d’augmentation de la fiscalité ne trouve aucune justification au regard de la situation outre-mer, ni aucune logique au regard de l’absence d’effet des hausses de fiscalité sur la consommation abusive d’alcool.

Pis encore, par ce biais, on organise sciemment la mort de la filière de la canne à sucre, sur laquelle repose l’économie des outre-mer : cette filière représente près de 40 000 emplois directs et indirects, 23 distilleries, 5 500 exploitations de canne à sucre et une forte valeur ajoutée pour l’industrie agroalimentaire dans les départements d’outre-mer !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 167 rectifié est présenté par MM. Arnell, Mézard, Amiel, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.

L'amendement n° 201 rectifié est présenté par MM. S. Larcher, Antiste, Mohamed Soilihi, Cornano, Patient, Karam et Desplan, Mme Claireaux, MM. Vergoz, J. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 167 rectifié.

M. Guillaume Arnell. Si le rhum n’est pas, par excellence, la boisson de mon territoire, je tiens à revenir sur ce sujet. Je suppose que chacun, dans cet hémicycle, se souvient de la force avec laquelle j’ai soutenu la filière du rhum, en tout cas pour ce qui concerne les quotas.

Introduit en commission des affaires sociales, le présent article augmente la cotisation sociale sur l’alcool pur. Si les rhums ultramarins doivent faire l’objet d’une surtaxation, il me semble inadmissible que cette mesure soit mise en œuvre sous couvert d’une action de santé publique.

Tout d’abord, il est très discutable de considérer qu’une taxation puisse constituer une mesure sanitaire. Ensuite, pour ce qui concerne la filière de la canne à sucre, on ne saurait ignorer les enjeux socio-économiques que soulève une telle augmentation de la fiscalité. De nombreux emplois sont concernés, et il n’est pas concevable de mettre en danger les producteurs ultramarins. Que cela soit bien entendu. Je l’affirme une nouvelle fois, en associant ma voix à celle de mon collègue Maurice Antiste : c’est la survie de la filière tout entière qui est en jeu !

En conséquence, le présent amendement tend purement et simplement à supprimer l’article 10 undecies A.

Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l'amendement n° 201 rectifié.

M. Maurice Antiste. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales sur ces deux amendements identiques ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, contrairement à mon avis, la commission est favorable à ces amendements.

Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour avis. Je tiens à clarifier la position de la commission des affaires sociales.

Le but n’était pas de stigmatiser les territoires et les populations, ou de mettre à mal les productions locales du rhum. Néanmoins, vous reconnaîtrez avec moi que l’on fait face, en la matière, à un véritable enjeu de santé publique, qu’il s’agisse des outre-mer ou de la métropole. En l’espèce, celle-ci n’a pas de leçons à donner.

À l’instar – j’en suis sûre – de mes collègues de la commission des affaires sociales, je serai très attentive aux dispositions qui, dans ce domaine, pourront être prises à des fins sanitaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ericka Bareigts, ministre. À mon tour, j’insiste sur le fait qu’il s’agit là d’un sujet extrêmement grave : l’abus d’alcool détruit une partie de la jeunesse.

Mme Ericka Bareigts, ministre. Nous n’avons nullement l’intention de stigmatiser un quelconque secteur d’activité, surtout pas la belle filière de la canne à sucre et du rhum. Cependant, il faut admettre que, en la matière, les territoires d’outre-mer, comme plusieurs régions de l’Hexagone, font face à un problème de santé publique.

J’ajoute que, chez les jeunes d’outre-mer, on observe des consommations d’alcool excessives au point d’en devenir mortifères : certains jeunes absorbent de grandes quantités d’alcool très fort en des laps de temps très courts. La finalité est clairement de se faire du mal ! C’est un véritable sujet.

M. Hervé Poher. En métropole, on le constate aussi…

Mme Ericka Bareigts, ministre. Comment surmonter ce problème ?

Il ne faut pas écarter de but en blanc la piste de la taxation. Cette dernière peut constituer un outil, à condition de ne pas être employée isolément ou de manière trop étalée dans le temps. De plus, elle doit être déclinée en différents niveaux, et ne saurait être limitée au seul rhum. On pourrait même envisager de prendre en compte l’ensemble des boissons alcooliques.

Surtout, il faut développer les politiques locales de prévention, d’éducation et d’accompagnement. Il faut également miser sur la présence des forces de l’ordre. Ces dernières sont à même de rappeler les règles en vigueur au titre de la sécurité publique. Gardons à l’esprit que des vies peuvent être en jeu : les accidents de la route sont souvent liés à la consommation d’alcool, et ils tuent énormément.

Nous avons d’ores et déjà décliné ces initiatives au sein des plans régionaux de santé. Il faut encore aller plus loin. Mais le présent article ne permettrait en rien de résoudre le problème en question. Il serait même contre-productif.

Sur ce front, nous avançons à petits pas, et nous aurons besoin de la mobilisation de tous, aux niveaux tant national que local.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

M. Michel Magras. Si j’osais, je ferais remarquer que tout a déjà été dit sur le sujet !

Je tiens à rappeler à mon collègue Maurice Antiste que, lorsqu’il était intervenu à ce titre lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’avais soutenu sa démarche.

De manière assez surprenante, certains continuent à croire que les taxes relatives aux boissons alcooliques permettront de lutter directement contre l’alcoolisme.

L’alcoolisme est non pas une simple addiction, une simple dépendance, mais une pathologie. L’alcoolique est prêt à renoncer à son déjeuner s’il a besoin de l’argent correspondant pour acheter de quoi s’enivrer !

Moi aussi, j’ai eu diverses études entre les mains. C’est encore un cliché de croire que l’alcoolisme, notamment chez les jeunes, serait plus répandu outre-mer qu’en métropole. Il s’agit là d’un phénomène général, qui, bien au-delà de la France, s’étend au monde entier. Les excès décrits par Mme la ministre peuvent se vérifier partout.

Je peux concevoir le raisonnement en vertu duquel une taxation permettra de collecter des montants financiers à l’aide desquels des plans de prévention seront déployés. Le prélèvement fiscal en question n’empêchera pas pour autant l’alcoolisme !

De plus, les dispositions dont nous débattons s’en prendraient à des produits haut de gamme. Je suis désolé si cette expression heurte les uns ou les autres, mais la consommation d’alcool ne rime pas nécessairement avec l’alcoolisme. Le rhum dont il s’agit vaut le cognac ou d’autres boissons, produites et consommées dans d’autres régions.

Or, en surtaxant le rhum, on mettra en péril toute une économie. Les alcooliques continueront de s’approvisionner directement dans les distilleries ! En revanche, les produits ultramarins cesseront d’être concurrentiels, et la consommation de vin, de champagne, de whisky et d’autres boissons importées augmentera davantage encore outre-mer.

À mon sens, l’alcoolisme est un sujet de fond. Il exigera un débat spécifique, car il faut prendre le taureau par les cornes en traitant la problématique de la prévention. Mais, je le répète, la taxe ne serait pas le bon outil. Enfin, je peine quelque peu à voir quel est le lien entre cette disposition et le présent texte, qui porte sur l’égalité réelle.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Cornano, pour explication de vote.

M. Jacques Cornano. Ce dispositif aurait pour conséquence, dès cette année, une augmentation de 65 % de la fiscalité locale applicable à la CSS pesant sur les rhums produits et consommés dans les territoires d’outre-mer. Ce n’est pas compréhensible.

Au cours des dix dernières années, les hausses d’impôts successives ont déjà multiplié par sept le niveau de la fiscalité locale pesant sur le rhum des outre-mer. Nous avons donc été particulièrement surpris que cette proposition, alourdissant cette fiscalité locale dans des proportions inédites, émane d’une commission sénatoriale.

Enfin, pour ne pas en dire davantage, les hausses prévues, outre leur caractère massif – l’augmentation serait de 20 % par an ! –, ne s’appliqueraient qu’aux rhums produits localement. Les autres alcools seraient totalement épargnés. Sans avantage concurrentiel, le rhum subirait ainsi de plein fouet la concurrence des spiritueux importés, notamment étrangers.

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Larcher, pour explication de vote.

M. Serge Larcher. Je tiens à féliciter vivement Mme la rapporteur pour avis, qui, en tenant compte des réalités ultramarines, a fait preuve de son ouverture d’esprit.

À partir du jus de canne, les îles de la Réunion et de la Guadeloupe ont opté pour la production de sucre. En revanche, le rhum est essentiel à l’économie martiniquaise. J’ajoute que la Martinique est le seul territoire produisant un rhum AOC, et que 45 % de la production française de rhum en sont issus. Les dispositions proposées constituent donc, en quelque sorte, une attaque frontale contre la Martinique.

Parallèlement, il faut garder à l’esprit que la consommation locale diminue en Martinique. Entre 2005 et 2015, elle a baissé de 12,4 %.

Il faut savoir que 25 % du rhum vendu à la Martinique l’est aux touristes, qui l’emportent dans leurs valises. Le problème n’est donc pas la surconsommation : celle-ci n’existe pas.

Les statistiques et la géographie de la toxicologie en France indiquent bien que nous sommes en dessous de la moyenne nationale. Nos jeunes ne sont pas les plus impactés.

Bien sûr, le rhum, comme l’alcool en général, tue. La consommation totale diminue à la Martinique, mais, en passant les données au peigne fin, on constate un transfert du rhum vers d’autres alcools, tels que le whisky, la vodka ou le champagne. Le problème posé par ces boissons reste donc à régler.

Quant aux jeunes, madame la ministre, ils ne consomment pas en priorité du rhum, mais plutôt de la bière, à laquelle ils ajoutent d’autres produits, en particulier des alcools très forts.

Il importe de ne pas improviser sur ce sujet, mais de rester collé au terrain afin d’apporter des solutions adéquates aux difficultés qui se posent véritablement. Nous avons collectivement un problème avec l’alcool en France, dans toute la diversité du pays.

Si j’étais un peu retors, je rappellerais que, dans un verre de vin, la charge fiscale est soixante-deux fois moindre que dans un verre de spiritueux, pour la même quantité d’alcool pur. Autrement dit, le vin est quelque peu favorisé. Nous pourrions donc être tentés de penser qu’il y a deux poids deux mesures !

Je vous remercie d’avoir permis que subsiste encore cette activité importante pour nos îles. Certes, le problème de l’alcoolisme reste à régler. J’insiste cependant sur le fait qu’il concerne non pas seulement l’outre-mer, mais la Nation tout entière : nous avons un problème avec les alcools, comme avec les drogues.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 167 rectifié et 201 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 10 undecies A est supprimé.

Article 10 undecies A (nouveau)
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Articles additionnels après l'article 10 undecies

Article 10 undecies

(Supprimé)

Article 10 undecies (supprimé)
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Article 10 duodecies (nouveau)

Articles additionnels après l'article 10 undecies

Mme la présidente. L'amendement n° 153 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, à rapprocher par ordonnance le droit applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon de la législation applicable en métropole ou dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution en matière de sécurité sociale et, le cas échéant, à codifier dans un cadre conjoint l’ensemble de ces dispositions.

II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au I.

III. – Le 2° de l’article 4-1 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon est ainsi rédigé :

« 2° Six représentants des assurés sociaux relevant de la caisse de prévoyance sociale nommés par le représentant de l’État sur proposition des organisations syndicales de salariés représentatives à Saint-Pierre-et-Miquelon au sens de l’article L. 133-2 du code du travail. »

La parole est à Mme la ministre.