M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.

Mme Samia Ghali. La question des familles monoparentales constitue aujourd’hui un véritable sujet dans notre pays. Sur certains territoires, plus de 50 % des familles sont monoparentales. Le père est fréquemment inexistant et on ne lui demande même plus de comptes !

J’espère que le futur projet de loi relatif à la famille abordera tout cela, car une discussion de fond est absolument nécessaire, en particulier sur le désengagement des pères.

Je voudrais dire à M. Ravier, qui est élu sur un territoire proche du mien, qu’il croise tous les jours ces familles monoparentales : il leur parle à la sortie des écoles, leur dit qu’il va les aider, les accompagner… Il devrait donc se rendre compte que les aides destinées aux femmes seules, qui éduquent leurs enfants et se lèvent chaque matin pour aller travailler afin de remplir les assiettes, sont particulièrement importantes.

Peut-être que les femmes comprennent cela mieux que les hommes, monsieur Ravier !

Pour moi, la politique destinée aux familles monoparentales doit aller encore plus loin. Il est nécessaire de soutenir davantage les femmes qui se battent au quotidien pour l’éducation et la réussite de leurs enfants.

Au final, je voterai donc la suppression de l’article 26, mais pas pour les mêmes raisons que M. Ravier !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Je ne suis pas encore revenu de la façon dont Mme la ministre justifie la baisse de la PAJE ! Elle nous parle de tout, sauf de la baisse elle-même… On comprend surtout que ce gouvernement développe un style… géométrique, qui comprend l’alignement comme constante : avec cet article, la PAJE est alignée sur le complément familial et, tout à l’heure, ce sont les dates de revalorisation des retraites qui le seront – l’année 2018 sera ainsi une année blanche.

On pourrait comprendre cette constante, mais l’ennui, c’est que vous alignez toujours par le bas ! Personnellement, je suis d’accord pour aligner les conditions de la PAJE, mais sur celles du complément familial.

Je ne comprends vraiment pas pourquoi vous proposez cette baisse, madame la ministre.

Vous nous dites que vous vous concentrez sur les familles les plus en difficulté, mais considérez-vous vraiment que, quand un ménage avec un enfant gagne 26 000 euros par an, il est dans une forme d’opulence, qui justifierait qu’on lui enlève une allocation ? Et alors même que l’économie qui en résulte est dérisoire !

Vous nous dites aussi que vous augmentez par ailleurs d’autres prestations au bénéfice des familles monoparentales. C’est bien, mais rien n’empêche de le faire sans baisser la PAJE, puisque la branche famille est en excédent. Qui plus est, les deux choses sont loin d’être équivalentes en masses budgétaires et, en définitive, les équilibres de la branche restent gagnants.

Finalement, on peut tout de même se demander quelle est votre véritable motivation en proposant la mesure prévue à l’article 26. S’il s’agit juste de gagner de l’argent, c’est triste !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Sur la forme, je voudrais vous dire, madame la ministre, qu’avant vous, d’autres ministres ont eu à défendre, pour la branche famille, des mesures moins généreuses que ce qu’ils auraient voulu. Et je pense que ce que vous faites aujourd’hui, à savoir l’alignement des plafonds de ressources de la PAJE et du complément familial, est probablement une mesure moins généreuse que ce que vous auriez souhaité.

Mais, en ce qui me concerne, jamais je n’ai répondu à mes prédécesseurs ou à mes opposants d’une manière aussi cassante que celle que vous venez d’utiliser à mon égard. Tout le monde peut en témoigner dans cette assemblée !

Sur le fond, vous pouvez effectivement m’opposer les mesures que nous avons prises, mais si nous ne les avions pas adoptées, vous ne pourriez pas, aujourd’hui, faire ce que vous faites et prendre des dispositions en faveur des familles monoparentales – mesures qui, par ailleurs, sont excellentes.

C’est bien parce que nous avons fait des économies que, aujourd’hui, vous avez la possibilité de prendre des mesures nouvelles, que nous soutenons. Ces mesures prolongent des décisions que nous avons prises : la garantie des impayés de pensions alimentaires, la priorité que nous avions déjà accordée aux familles monoparentales…

Je me réjouis que vous poursuiviez dans ce sens et je ne souhaite qu’une chose : que les gouvernements qui se succèdent fassent toujours mieux que les précédents !

Ce que vous faites pour les familles monoparentales est bien, mais exclure des familles du bénéfice de la PAJE l’est nettement moins !

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Nous apprécions le ciblage des aides sur les familles monoparentales qui vivent sous le seuil de pauvreté – comme l’a dit Mme la ministre, elles sont 750 000 – et sur celles qui vont bénéficier du complément familial – elles sont 450 000. Ce sont donc 1,2 million de familles qui vont recevoir des aides supplémentaires, la PAJE augmentant par exemple de 30 %. Je crois qu’il faut apprécier cet effort de 70 millions d’euros à sa juste valeur.

Nous souhaitons que la sécurité sociale soit en équilibre en 2020 et ne subisse pas de dérapage financier, mais je m’associe tout de même à l’amendement présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.

Durant le quinquennat précédent, les allocations familiales ont fortement diminué, si bien que la branche famille peut aujourd’hui se permettre le maintien du barème et des plafonds de la PAJE. L’adoption de cet amendement ne constituera pas un dérapage sensible.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Madame la ministre, vous avez fait un choix clair, certes difficile, celui de vous concentrer sur les familles les plus pauvres.

Vous avez rappelé le cercle vicieux de la grande pauvreté, en particulier pour les enfants. Contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays européens, les enfants les plus pauvres n’ont guère la possibilité, en France, d’échapper à « la spirale du déclassement », pour reprendre l’expression du sociologue Louis Chauvel.

Vous vous attaquez aussi à un problème de société de plus en plus prégnant : la situation des familles monoparentales, qui représentent un pourcentage important des familles et qui sont les plus touchées par la pauvreté, mais plus généralement par des formes de fragilité et de précarité qui ne sont pas seulement financières.

Il n’en demeure pas moins que, même pour des familles avec deux parents, les familles classiques, si j’ose dire, la mesure proposée peut causer des soucis. J’ai d’ailleurs noté que vous vous êtes engagée, madame la ministre, à lancer une véritable réflexion sur ces questions et sur l’équilibre entre universalité et solidarité. Après cette concertation, nous devrons faire des choix qui devront peut-être remettre à plat notre système d’allocations familiales – ô combien complexe !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je m’associe largement aux différents propos qui viennent d’être tenus et je voudrais rappeler quelques éléments.

En ce qui me concerne, je ne considère pas que la branche famille est en excédent. En fait, elle ne l’est que parce que 860 millions d’euros d’allocations ne sont plus distribués aux familles au titre des allocations familiales. Le principe d’universalité a commencé à être remis en cause par le gouvernement précédent, soit bien avant vous, madame la ministre.

Par ailleurs, nous devons être très attentifs à la baisse de la natalité que nous connaissons depuis deux ans. Est-ce un phénomène sociétal, identique à celui que rencontrent d’autres pays européens ? A-t-elle un lien avec la diminution, depuis deux ans, des allocations familiales ?

Le corollaire entre natalité et allocations familiales est peut-être ridicule, ce n’est peut-être pas une preuve de causalité, mais en tout cas, nous pouvons effectivement constater ce parallélisme. On peut donc se poser légitimement la question des conséquences sur la natalité de la remise en cause de l’universalité de la politique familiale.

Pour autant, l’universalité ne signifie pas nécessairement l’impossibilité de mettre en place une politique de solidarité. C’est un autre problème et je crois, comme vous l’avez dit, madame la ministre, qu’il faut étudier la question de manière attentive.

Sans vouloir donner de conseils – les conseilleurs ne sont pas souvent les payeurs… –, il me semble que, à l’image des questions de bioéthique, il pourrait être intéressant de lancer des états généraux de la famille, à l’échelon régional, puis national, afin de réfléchir à la manière de faire évoluer la politique familiale : universalité, solidarité, universalité ou solidarité, universalité et solidarité.

Un gouvernement peut évidemment décider seul, dans son coin, mais il me semble que des sujets aussi importants doivent être soumis à la population.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11, 108, 211, 369 rectifié, 468 et 532.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 26 est supprimé.

Article 26
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article 26 bis (nouveau)

Articles additionnels après l’article 26

M. le président. L’amendement n° 534, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « pour les familles dont un parent au moins est français ».

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Nous considérons que la solidarité nationale, comme son nom l’indique, doit s’appliquer principalement aux citoyens français. C’est ainsi que nous concevons les choses. Charité et solidarité bien ordonnées commencent par soi-même, autrement dit les nôtres avant les autres !

M. Dominique Watrin. C’est anticonstitutionnel !

M. Stéphane Ravier. Cet amendement va dans ce sens. (Les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que des membres du groupe socialiste et républicain protestent et quittent l’hémicycle.)

M. le président. Seul M. Ravier a la parole !

M. Stéphane Ravier. Dès qu’il faut mener un combat, la gauche prend évidemment la poudre d’escampette ! C’est sa ligne historique !

Avec cet amendement, nous proposons que les allocations familiales soient réservées aux familles, dont un parent au moins est français. Il nous paraît urgent, dans cette période de grandes difficultés financières, de pouvoir adopter une telle mesure.

L’extension des allocations familiales constitue un danger pour le principe de solidarité soutenu par notre État-providence. Je l’ai déjà dit, je le répète et je n’aurai de cesse de le répéter, sans haine, sans violence et même sans rage,…

Mme Patricia Schillinger. Encore heureux !

M. Stéphane Ravier. … oui, je suis convaincu, comme le sont au moins onze millions de nos compatriotes – ce n’est quand même pas rien ! – qu’il faut couper les pompes aspirantes de l’immigration, qui est de plus en plus massive et qui menace gravement notre pays, non seulement son économie, mais également sa sécurité et son identité nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteur. Monsieur Ravier, comme les autres prestations de la branche, les allocations familiales sont versées à toute famille résidant dans notre pays, quelle que soit sa nationalité, à condition qu’elle réside de manière régulière sur notre sol.

Cette règle constitue justement une déclinaison du principe d’universalité, dont nous avons parlé lors de l’examen des amendements précédents. Nous sommes nombreux à être attachés à ce principe ; en tout cas, je le suis !

Par ailleurs, réserver les allocations familiales aux seules familles comptant au moins un parent français poserait un problème d’égalité, ces familles contribuant au financement de la politique familiale au travers des cotisations versées par leurs employeurs ou encore via la CSG qu’elles acquittent.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Défavorable, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je suis évidemment contre cet amendement et je veux demander au Front national d’arrêter de s’immiscer dans les débats sur la politique familiale au nom de l’universalité des prestations. Lorsqu’on est réellement favorable à l’universalité des prestations familiales, on ne trie pas entre les enfants nés de parents français et ceux nés de parents étrangers. (Mmes Nassimah Dindar et Patricia Schillinger applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Même si ma voix est un peu éteinte, je tiens à m’exprimer. Nous sommes des élus, nous siégeons au Parlement. Cela devrait nous imposer certaines responsabilités et nous obliger à respecter l’ensemble de nos concitoyens. Oser proposer un tel amendement, entendre de tels propos est totalement inacceptable ! Bien évidemment, je voterai contre cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Je constate avec plaisir que la première dose de vaccin contre la rage a produit ses effets (Sourires.), puisque le ton est beaucoup moins agressif ! En ce qui me concerne, je ne sors pas quand j’entends ce type d’intervention, mais il va sans dire que je voterai contre cet amendement.

Je veux juste rappeler une phrase d’un auteur qu’on ne peut pas prendre pour un grand homme de gauche, Chateaubriand : « En ces temps difficiles, il convient d’accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux. » (Sourires et applaudissements sur plusieurs travées.)

M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.

Mme Samia Ghali. Peut-être suis-je vaccinée contre M. Ravier, je le pratique depuis longtemps ! Et vous verrez, mes chers collègues, on s’habitue vite, finalement… (Sourires.)

M. Stéphane Ravier. Il faudra bien !

Mme Samia Ghali. Oui, on s’habitue, parce qu’il se transforme rapidement en agneau…

Je remercie Michel Amiel des propos qu’il vient de tenir, mais je crois qu’il en faut davantage pour M. Ravier, qui n’a pas compris une chose : les allocations familiales ont aussi permis la construction de la France. Elles ont permis aux familles qui sont venues pour travailler et construire la France d’éduquer leurs enfants et de les faire réussir à l’école.

Les allocations familiales participent pleinement de la République et de la réussite française. Mais il est vrai que ces mots vous sont souvent complètement… étrangers. (Sourires sur plusieurs travées.)

Monsieur Ravier, vous ne pouvez pas à la fois serrer la main des gens que vous croisez, leur faire la bise, leur dire que vous êtes avec eux, et tenir, dans cet hémicycle, le discours que nous venons d’entendre.

Bien sûr, je voterai contre votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Le groupe Union Centriste, qui est attaché aux valeurs humanistes et au respect des personnes, quelle que soit leur origine, votera bien entendu contre cet amendement.

M. Loïc Hervé. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 534.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 533, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 112-2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 112-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 112-2- – Ne peuvent bénéficier des prestations énumérées à l’article L. 112-2 les familles dont l’un des membres a été condamné sur le fondement des articles 421-1 à 421-2-3 du code pénal. »

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Cet amendement vise à retirer les prestations sociales aux familles dont l’un des membres a été condamné pour des actes de terrorisme. La suppression des allocations familiales aux familles de terroristes ne doit plus être un tabou, mais une véritable priorité.

Selon la brigade criminelle, 20 % des djihadistes perçoivent encore des prestations sociales. Les djihadistes en rêvaient, le système social français l’a fait ! C’est tout simplement insupportable et indéfendable, alors que ces individus revendiquent fièrement leur haine de la France et approuvent les assassinats et les horreurs commis sur notre sol par les soldats de l’État islamique.

Il ne s’agit pas d’une mesure de prévention, car elle n’empêchera pas un homme ou une femme de devenir, s’il l’a décidé, un fou d’Allah. Il s’agit d’une mesure de répression, mais également d’un témoignage de solidarité avec les familles des victimes.

Il serait choquant et immoral de continuer à assister financièrement des familles qui soutiennent des actes de barbarie commis par l’un de leurs membres. Les exemples ne manquent pas : parmi les plus connus, je cite celui de la mère de l’abominable Mohamed Merah, ou encore celui de cette femme, jugée en septembre dernier pour avoir envoyé de l’argent à son fils parti combattre en Syrie aux côtés des barbares de Daech.

Quand les prestations et les aides sociales, expressions de la solidarité nationale, financent la haine de la France, c’est non seulement un masochisme morbide, mais également une insulte – oui, une insulte – faite aux victimes et à leurs familles.

Comment, mes chers collègues, pourrions-nous encore tolérer une telle infamie ?

Cet amendement n’est pas comme les autres, il est un marqueur. Il conduit chacun d’entre nous à prendre ses responsabilités devant ce qui constitue encore aujourd’hui un véritable scandale, dénoncé non seulement par les familles des victimes, mais, je le crois, par l’ensemble de nos compatriotes.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à vous libérer de vos lectures, à abandonner, l’espace d’un instant, votre idéologie, pour voter cet amendement, afin que justice soit rendue.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteur. Je ne sais pas lequel d’entre nous devrait abandonner son idéologie… Quand le terrorisme atteint une seule famille de France, toutes sont meurtries.

Dans votre amendement, monsieur, vous ne précisez pas quels membres de la famille vous voulez sanctionner. L’ensemble d’une famille pourrait donc être pénalisé, alors que certains membres ne sont pour rien dans l’affaire en question. Au final, ce sont surtout les enfants que vous pénalisez.

Cet amendement me semble donc anticonstitutionnel et l’avis de la commission est défavorable.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Comment un tel amendement a pu arriver jusqu’ici ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je veux d’abord rassurer M. Ravier… En matière de terrorisme, en cas de condamnation pour acte ou apologie au sens du code pénal, les prestations familiales versées au titre de la personne condamnée sont immédiatement suspendues.

En cas de sortie du territoire, les organismes de protection sociale suspendent également immédiatement, sur la base du signalement transmis par les services de renseignement intérieur, le versement des prestations familiales.

Les organismes de protection sociale sont d’ores et déjà engagés dans la lutte contre le terrorisme et aucun individu identifié comme combattant ou condamné pour terrorisme ne bénéficie de prestations familiales.

Dans ce contexte, monsieur le sénateur, je comprends que vous êtes favorable aux punitions collectives : au-delà de supprimer les allocations familiales des personnes pouvant être identifiées comme terroristes, vous voulez faire la même chose pour l’ensemble d’une famille, quel que soit l’engagement de ses membres auprès de la personne en question.

Ainsi, vous visez des enfants qui n’ont évidemment commis aucun crime ou faute, vous leur reprochez donc uniquement d’être une sœur, un frère ou un cousin de quelqu’un de condamnable.

Cela s’appelle une punition collective et, évidemment, le Gouvernement y est défavorable. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je suis moi-même élu d’une région, Provence-Alpes-Côte d’Azur, et d’un département, le Vaucluse, où nous avons malheureusement l’habitude, comme les Bucco-Rhodaniens, d’entendre le langage du Front national. Mais, en l’occurrence, ces amendements, écrits, me semblent discriminatoires et je me demande comment ils sont arrivés jusqu’ici.

M. Stéphane Ravier. Parce qu’ils sont pertinents !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. J’interroge la présidence sur ce point. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)

M. le président. Je transmettrai votre question au président du Sénat, mon cher collègue.

La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.

Mme Nassimah Dindar. Je vais aller dans le sens de M. Milon. Nous parlons ici de politique familiale.

Évidemment, nous sommes tous opposés au djihadisme, au terrorisme, et nous sommes tous blessés dans notre chair, quand le moindre attentat est commis ou que des enfants et des familles sont touchés par ces actes de barbarie.

Je ne vous connais pas, monsieur Ravier, mais sachez que nous portons tous l’ambition de la République : liberté, égalité, fraternité. Et pour ma part, j’en suis heureuse.

Nous qui venons de la France diverse, celle qui représente notre pays sur tous les continents et qui veut y porter les valeurs républicaines – je pense par exemple à l’Afrique, à Madagascar ou aux Comores –, nous voulons aussi porter cette ambition française et nous sommes heureux de le faire.

Je défends le principe de l’universalité des allocations familiales et j’ai l’impression que, de votre côté, monsieur Ravier, vous confondez et mélangez tout, parents et enfants. Alors, je n’en ai pas avec moi, mais je voudrais vous donner une bouteille d’Orangina – vous savez, celle qu’il faut secouer –, car dans votre tête, ça me semble être un peu comme ça en ce moment. J’en suis déçue ! (Rires et applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)

M. Stéphane Ravier. Vous ne vous permettez ce genre de propos que contre le Front national !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 533.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 26
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article additionnel après l'article 26 bis

Article 26 bis (nouveau)

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard neuf mois après la promulgation de la présente loi, un rapport sur les modalités d’attribution des places au sein des établissements et services d’accueil des enfants de moins de six ans mentionnés aux deux premiers alinéas de l’article L. 2324-1 du code de la santé publique. Ce rapport étudie en particulier l’opportunité d’une modulation des aides financières versées par les caisses d’allocations familiales à ces établissements, en fonction de leurs pratiques en matière d’attribution de places.

M. le président. L’amendement n° 573, présenté par M. L. Hervé, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Loïc Hervé.

M. Loïc Hervé. Nous demandons la suppression de l’article 26 bis, introduit par amendement à l’Assemblée nationale, et qui prévoit qu’un rapport soit rendu au Parlement sur les modalités d’attribution des places au sein des établissements et services d’accueil des enfants de moins de 6 ans.

Tout d’abord, vous connaissez la réticence générale du Sénat devant ce type de production. Ensuite, il se trouve que l’objet de ce rapport est d’étudier « l’opportunité d’une modulation des aides financières versées par les caisses d’allocations familiales à ces établissements, en fonction de leurs pratiques en matière d’attribution de places ».

Cet article a suscité de nombreuses réactions parmi les élus locaux, relayées par leurs associations nationales, car il n’a fait l’objet d’aucune concertation avec ces dernières préalablement à son introduction.

Avec cet amendement, je veux éviter de faire peser lourdement sur les collectivités une suspicion et un risque de remise en cause des décisions. De nouveau, la prise en compte de spécificités territoriales, au travers des critères d’attribution définis en fonction du contexte local, pourrait être écartée. Or je suis très attaché à cette forme de subsidiarité, d’adaptation aux réalités locales.

C’est pourquoi je vous propose de supprimer cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteur. Je partage votre avis circonspect sur cette proposition de rapport. Effectivement, je pense, tout comme vous, qu’il peut y avoir autant de règlements que d’établissements d’accueil du jeune enfant. Cette diversité est liée à des effets d’opportunité de territoires, mais aussi aux spécificités d’une collectivité, des associations, et je ne vois pas ce qu’un rapport comme celui-là pourrait apporter.

Par ailleurs, madame la ministre, je pense que vous avez la capacité de demander, autant qu’il vous semble utile, ce type de statistiques et d’éléments d’appréciation.

J’émets néanmoins un avis de sagesse, la commission n’ayant pas voulu rejeter brutalement cette demande de rapport, mais elle s’est vraiment posé la question de son opportunité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Cet article est issu d’un amendement déposé par des députés. Il vient nous aider d’ la concertation, qui débute avec les élus, sur la question de la transparence de l’attribution des places en crèche. Ce travail avait été souhaité par le Président de la République lors de sa campagne. Nous entamons une discussion, car ce manque de transparence, qui n’est pas général, mais qui existe dans certains endroits, est d’autant plus mal vécu que l’offre d’accueil est aujourd’hui assez insuffisante. Cela nourrit un sentiment d’injustice ou d’arbitraire, ce qui n’est pas souhaitable.

Nous voulons donc travailler avec les élus sur la transparence. Ce rapport permettra de faire un état des lieux partagé et d’objectiver un certain nombre de pratiques. Nous y sommes donc favorables, car, sans lui, nous serons obligés de discuter sans un état des lieux récent et complet.

Je vous demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je dois dire que la lecture de cet article m’a moi aussi plongée dans une certaine perplexité. Je n’avais pas envisagé de déposer un amendement de suppression comme vous, monsieur Hervé, mais je me suis demandé quel était le but visé par les députés qui ont fait adopter cet amendement.

J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’identifier la mixité sociale dans les crèches. Pourtant, on connaît le sujet : la dernière convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la CNAF fixe un objectif de 10 % d’enfants issus de familles pauvres dans les crèches ; or le taux observé est de 20 %, c’est-à-dire le double de l’objectif. Le sujet n’est donc pas là.

Peut-être s’agit-il de connaître les conditions d’attribution des places en crèche, commune par commune ? En clair : faut-il un piston pour avoir une place en crèche ? Est-ce bien la question posée, madame la ministre ? Cette interrogation mérite effectivement des réponses, mais il ne faut pas non plus être totalement psychorigide. Les directrices et directeurs de crèche organisent aussi la mixité dans leur établissement, et ils y veillent. Il y a probablement des communes qui recourent au clientélisme, et ce dans tous les domaines, donc probablement aussi dans les crèches. Je n’en doute pas.

Par ailleurs, je crois qu’un rapport a déjà été commandé au Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge sur le bilan quantitatif et qualitatif des modes d’accueil des moins de 3 ans. Faut-il plusieurs rapports ou un seul rapport incluant cette question suffirait-il ? Il me semble que cela relève plus du fonctionnement de l’administration que de la procédure législative.

Je m’abstiendrai sur cet amendement.