M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame Micouleau, vous avez utilisé les mots « appel au secours » pour relayer la voix des enseignants de ce lycée.

Aujourd’hui, 70 des 135 enseignants du lycée Joseph-Gallieni se sont mis en retrait, parce qu’ils vivent la situation totalement inacceptable que vous venez de décrire.

Ce phénomène n’est pas nouveau. Cet établissement, reconstruit après le drame de 2001, a normalement une capacité d’accueil de 1 400 places. Ses effectifs sont aujourd’hui largement inférieurs, car les tensions qui existent ont amené les services du ministère de l’éducation nationale à faire des choix.

L’année dernière, déjà, il a fallu déployer sur le site même du lycée l’équipe mobile académique de sécurité. Des cellules d’écoute ont également été mises en place pour les personnels. Autant de situations que nous avons connues ces dernières semaines et qui se sont renouvelées le jour de la rentrée, le 8 janvier dernier.

Les faits que vous avez rappelés et ceux que j’évoque à mon tour sont totalement anormaux. Un établissement scolaire doit être un lieu de paix, un lieu de calme, un lieu de partage, un lieu d’éducation.

Aujourd’hui, ces conditions ne sont pas réunies. C'est la raison pour laquelle l’inspection d’académie et le rectorat ont reçu, dès la semaine dernière, l’équipe de direction pour envisager, avec les autorités des collectivités locales, les moyens d’aménagement nécessaires pour cet établissement.

L’inspecteur d’académie et les services du rectorat recevront ce soir l’ensemble des représentants des enseignants pour trouver une solution pérenne, qui permette de ramener le calme nécessaire à l’apprentissage des enseignements.

Il s’agit d’un quartier difficile, comme il en existe ailleurs dans notre pays. Nous voulons investir massivement dans l’éducation, parce qu’il s’agit de la clef de l’émancipation et de la sécurité de chacune et de chacun.

Le ministre de l’éducation nationale est bien évidemment très attentif à ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

plateforme « parcoursup » (II)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Piednoir. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

Comme M. Gay, je voudrais revenir sur le lancement de la plateforme d’inscription dans l’enseignement supérieur, dite « Parcoursup », présentée lundi à grand renfort de relais médiatiques, d’échanges et même d’un déjeuner avec des lycéens.

Certes, l’ancienne procédure admission post-bac a connu des dysfonctionnements importants et tout le monde s’accorde ici sur l’absolue nécessité d’éviter le recours au tirage au sort pour les admissions dans les filières dites « sous tension ».

Toutefois, les injonctions formulées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, et par la Cour des comptes, ne faisaient nullement mention d’une refonte complète de la plateforme, ni de la suppression de l’algorithme de tri. Un tel outil est complexe. Sa mise en place suppose de prendre le temps suffisant pour répondre aux attentes de tous les acteurs éducatifs.

Or force est de constater que le nouveau dispositif suscite aujourd’hui l’inquiétude non seulement des présidents d’université, qui n’ont pas le temps de mettre en place les parcours pédagogiques personnalisés, mais aussi des lycéens, qui ne disposent pas des informations nécessaires à leur réflexion. Cette réforme se déroule donc dans une grande précipitation.

Dans le cadre du projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants, vous aviez proposé, pour la construction de cette nouvelle plateforme, une méthode fondée sur le débat parlementaire. Or la plateforme est lancée avant même l’examen du texte au Sénat.

Aucun débat de fond ne peut réellement s’instaurer. C’est un déni de démocratie assez scandaleux, qui en dit long sur votre considération du Parlement. Pourquoi nous faire voter une loi que vous avez en réalité déjà mise en application ? Comment justifiez-vous que toute modification significative du texte par le Sénat soit systématiquement rejetée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, votre interpellation, comme celle qui a été adressée au Premier ministre au début de cette séance de questions au Gouvernement, ressemble à un reproche, celui de ne pas maintenir le statu quo. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Pas du tout !

M. Marc-Philippe Daubresse. Cela n’a rien à voir !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État. Il est évident que si nous avions attendu, comme nous y invitent les auteurs de ces deux questions, le Gouvernement n’aurait pas été en mesure de tenir son engagement de faire en sorte que les difficultés rencontrées lors de la dernière rentrée ne se reproduisent pas.

Mme Éliane Assassi. Respectez au moins le Parlement !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État. Je vous rappelle que, voilà quelques mois, dans cet hémicycle, vous avez justement interpellé le Gouvernement sur les mauvaises conditions dans lesquelles s’était déroulée la rentrée universitaire.

Comme vous l’avez souligné, le système admission post-bac et le recours au tirage au sort, qui aboutit à exclure d’une filière des enfants passionnés par une profession, est injuste. Et comme l’a rappelé le Premier ministre, il s’agit d’un système sélectif par l’échec que nous refusons.

Nous aurions évidemment pu attendre et lancer des concertations. Nous aurions pu nous retrouver tous ensemble et réfléchir à la meilleure façon de faire. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous aurions aussi pu oublier, monsieur le président Retailleau, que les règles constitutionnelles prévoient d’adopter le budget avant le 31 décembre.

Dès lors, nous aurions pu attendre et donner rendez-vous aux étudiants non pas à la rentrée prochaine, avec un système plus juste, plus efficace, déterminant pour leur avenir, mais à l’année suivante.

Je pense qu’il était urgent d’agir. Je ne doute pas que nous puissions nous retrouver, ensemble, pour débattre de ce texte, l’améliorer et faire en sorte qu’il entre en vigueur dans les meilleures conditions, pour mettre un terme à un système injuste qui condamne des jeunes, au nom du libre choix, à aller vers l’échec. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour la réplique.

M. Stéphane Piednoir. Monsieur le secrétaire d’État, il faut arrêter de brandir la menace du statu quo pour balayer toute critique. Pour des questions de calendrier, vous négligez la représentation nationale, ce que je déplore.

Le Gouvernement et la majorité à l’Assemblée nationale vont rejeter toutes les propositions de modification du Sénat. Il s’agit véritablement d’une occasion ratée de dialogue constructif avec la représentation nationale, contrairement d'ailleurs à ce que vous aviez promis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mardi 23 janvier prochain, à seize heures quarante-cinq, et seront retransmises sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

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État du service public dans les transports en région Île-de-France

Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle le débat sur l’état du service public dans les transports en région Île-de-France, organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Nous allons procéder au débat sous la forme d’une série de questions-réponses dont les modalités ont été fixées par la conférence des présidents.

L’orateur du groupe qui a demandé ce débat, en l'occurrence le groupe communiste républicain citoyen et écologiste, disposera d’un temps de parole de dix minutes, y compris la réplique, puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.

Dans le débat, la parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe auteur de la demande.

Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les Franciliennes et les Franciliens qui empruntent les transports en commun ne supportent plus la galère qu’elles ou ils vivent au quotidien : retards, annulations, incidents divers, inconfort générant stress et fatigue... Cette exaspération légitime nourrit un sentiment de déclassement et d’abandon que nous ne pouvons ignorer.

Quant aux personnels de la RATP et de la SNCF, dont il faut saluer l’engagement professionnel, ils sont en souffrance face à la dégradation de leurs conditions de travail.

Si la question du service public des transports et de sa dégradation se pose sur l’ensemble du territoire national, comme nous l’avons vu lors du débat précédent, les caractéristiques de la région capitale en font une question spécifique sur cet espace qui concentre 5 millions de voyageuses et de voyageurs par jour.

Parler transports, c’est aborder la question de l’aménagement. Le droit à la mobilité ne peut se penser en dehors du droit au logement accessible ni des problématiques d’accès à l’emploi et aux services publics. Tenir ces quatre exigences, c’est permettre un aménagement équilibré et une meilleure qualité de vie pour les Franciliennes et les Franciliens.

Or nous avons hérité, depuis des décennies, d’un déséquilibre entre l’est et l’ouest régional. Pour faire vite, les bureaux sont à l’ouest et les logements à l’est, ce qui entraîne des mouvements de transports trop importants. Le développement urbain a également créé de nouveaux besoins de mobilité encore sans réponse aujourd’hui. Un rééquilibrage entre bureau et logement et une réelle réflexion sur l’étalement urbain constituent donc un premier élément de réponse aux problèmes de transport.

Toutefois, si l’enjeu des transports collectifs est un enjeu majeur, c’est aussi parce qu’il touche à des défis environnementaux et sanitaires.

Trop de camions et de voitures saturent le réseau. Je rappelle que nous déplorons 6 000 morts par an en Île-de-France du fait de la pollution – sans compter les coûts induits estimés, à l’échelle de la France, à 101 milliards d’euros par an.

Il est donc urgent d’inverser la tendance en engageant un report modal de la route vers le rail et vers le fluvial, pour les voyageurs comme pour les marchandises.

À l’ère de la COP23, comment minorer le fait que ces modes émettent moins de gaz à effet de serre ? Pourtant, aujourd’hui, en Île-de-France, seuls 3 % des marchandises transitent par le rail. Ainsi, comment justifier que, dans mon département du Val-de-Marne, un seul train par jour desserve le marché d’intérêt national de Rungis ?

Respecter les engagements liés à l’accord de Paris pris dans le cadre de la COP21 doit donc nous conduire à adopter des politiques qui favorisent le rail face à la route, le collectif face à l’individuel.

Grande question de santé publique, l’accessibilité des transports en commun constitue également un enjeu social. Trop de nos concitoyennes et de nos concitoyens subissent en effet une discrimination à l’embauche selon l’endroit où elles et ils résident. Et ces mauvaises conditions de transport, comme la saturation des réseaux routiers, sont un frein évident à la compétitivité des entreprises, qui ont intérêt à disposer de bonnes conditions de mobilité pour leurs salariés comme pour leur clientèle.

Depuis plus de dix ans, les politiques publiques en matière de transport tiennent en un mot : le désengagement de l’État. On peut même se demander si ces conditions n’ont pas été créées pour aboutir à cette situation dégradée, afin de justifier des politiques de libéralisation et de privatisation.

Comment laisser entendre que l’ouverture à la concurrence pourrait être la solution aux dysfonctionnements actuels, puisque tout recul de la puissance publique entraînera un recul de l’égalité et des droits ? En effet, la mise en concurrence ne peut qu’aboutir au délaissement de la partie du territoire jugée la moins rentable – je pense notamment à la grande couronne.

À la concurrence, nous préférons la complémentarité entre les différents modes de transports – le ferroviaire, le bus, les vélos –, afin d’offrir une offre cohérente et maillée sur l’ensemble du territoire, ce qui implique, mais j’y reviendrai, un renforcement de la maîtrise publique de ce secteur.

L’ouverture à la concurrence, c’est également le dumping social, économique et environnemental et des prises de risque pour la sécurité des usagers et des personnels. Nous pensons donc qu’il faut en finir avec cette logique libérale en transformant et en améliorant le service public des transports collectifs.

Cela suppose notamment d’abandonner les projets qui ne répondent pas aux besoins des Franciliennes et des Franciliens. Je pense ici au projet privé CDG Express, qui ne vise qu’à satisfaire les usagers d’affaires qui pourront dépenser 24 euros pour aller de l’aéroport à Paris.

Ce projet, qui bénéficie d’un fort soutien public – faut-il rappeler que l’État vient d’accorder un prêt de 1,7 milliard d’euros au groupement constructeur ? –, conduit à un service à deux vitesses : d’un côté, des transports de qualité pour celles et ceux qui peuvent payer, de l’autre, un service au rabais et non financé.

Ce projet est un serpent de mer, jusqu’à présent repoussé par la mobilisation des populations, des personnels et d’un certain nombre d’élus, dont ceux de notre groupe.

Cette même mobilisation a aussi permis de modifier le projet initial du Grand Paris Express. Alors qu’il devait s’agit d’un supermétro desservant les seuls pôles de compétitivité, les habitants regardant passer les trains, l’intervention citoyenne a permis de revoir le nombre de gares à la hausse pour véritablement mettre ce projet au service des populations.

Aussi, je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous apportiez des informations sur de possibles retards de calendrier nous laissant craindre l’abandon de certaines lignes.

Sachez que nous serons intransigeants sur la pleine réalisation de cette infrastructure utile au désengorgement du réseau, qui doit être réalisée non seulement dans les délais prévus, mais encore dans son ensemble. Il en va de même du prolongement de la ligne 14.

Je ne pense pas qu’un seul sénateur ici présent soit satisfait des conditions de transports dans la région Île-de-France. Je ne crois pas davantage que notre groupe soit le seul à remarquer un déséquilibre entre l’est et l’ouest, avec une concentration d’entreprises autour de La Défense.

Si le constat est largement partagé, la question qui nous est posée, mes chers collègues, est celle des actions que nous sommes prêts à engager pour remédier à cette situation. Or les choix politiques faits depuis des dizaines d’années ne permettent pas de développer un réseau de transports publics digne du XXIe siècle.

Vouloir réaliser des économies sur le dos des investissements en matériel et en personnel a conduit 5 millions voyageurs à vivre des galères quotidiennes. Par exemple, comment l’annonce de 2 000 nouvelles suppressions de postes à la SNCF va-t-elle permettre d’humaniser les gares ou de mieux entretenir le matériel ?

Pour répondre à l’exigence d’un service de qualité à un tarif accessible à toutes et tous, participant à la nécessaire transition écologique, il faut, au contraire, améliorer et renforcer le service public des transports.

Pour ce faire, il convient de s’engager dès à présent dans des travaux visant à rénover et faire évoluer le réseau francilien existant. Nous avons besoin d’investissements massifs pour mener à bien les chantiers programmés, mais aussi pour assurer une maintenance de qualité ou renouveler le matériel roulant, même si nombre d’efforts ont été faits de ce point de vue sous la précédente mandature régionale.

Ainsi, il est urgent d’investir massivement sur l’ensemble des lignes du RER, véritable point noir du réseau régional, et de poursuivre le développement et le maillage des réseaux de bus. Il est urgent que les opérateurs publics que sont la SNCF et la RATP développent une politique d’embauche, afin d’améliorer les services aux voyageurs.

Concernant le fret, les triages et les infrastructures doivent retrouver une pleine activité, et les emprises foncières être préservées.

Pour tous ces investissements, notre sensibilité politique formule, aux niveaux local et national, d’autres pistes de financement nourries par le dialogue avec les syndicalistes, les usagers et les élus. On ne peut pas nous reprocher notre inconstance en la matière, c’est le moins que l’on puisse dire.

Nous estimons, comme beaucoup d’autres, que les mesures adoptées jusqu’à maintenant sont injustes et inefficaces. Cessons de demander aux usagers de payer toujours plus !

Au conseil régional d’Île-de-France, notre groupe a porté l’exigence d’un pass Navigo à tarif unique. Nous l’avons obtenu grâce à la mobilisation que nous avons contribué à impulser. Je l’ai vécue en tant que conseillère régionale et administratrice du STIF, aujourd'hui Île-de-France Mobilités.

Nous avons également contribué à la prise en compte, au travers de la tarification sociale, des difficultés des plus fragiles : les jeunes, les privés d’emploi et les retraités.

Néanmoins, aujourd’hui, la nouvelle majorité de droite remet en cause tous ces acquis, n’ayant de cesse, notamment, d’augmenter le prix du pass Navigo. Pourtant, les départements du Val-de-Marne et de Paris viennent d’adopter des mesures de tarification spéciale et de gratuité en faveur des retraités. Il s’agit donc bien d’une volonté politique !

Notre groupe estime que les entreprises, qui bénéficient en priorité du bon maillage territorial des transports en commun, doivent participer davantage au développement de l’offre de transport. Trop de cadeaux fiscaux ont été faits sans contreparties réelles.

Nous formulons plusieurs propositions : augmenter le versement transport à Paris et dans la partie la mieux desservie du département des Hauts-de-Seine (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) ;…

M. Philippe Pemezec. Cela nous manquait !

Mme Laurence Cohen. … entreprendre une réforme de la taxe pour création de bureaux et instaurer un moratoire s’agissant de la construction de bureaux à la Défense et dans l’ouest de Paris ; créer une taxe sur les parkings des centres commerciaux ; mettre en œuvre une écotaxe permettant de prendre en compte les coûts externes de la route ; enfin, ramener la TVA à 5,5 %, afin de dégager des marges de manœuvre pour les autorités organisatrices.

M. Philippe Dallier. Il faut juste trouver l’argent ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Laurence Cohen. Pour l’Île-de-France, ces financements nouveaux rapporteraient 500 millions d’euros, soit 5 milliards d’euros à l’échelle nationale. Vous vous contentez de vous gausser, chers collègues de la majorité sénatoriale. Faites donc des propositions susceptibles de régler le problème ! (Mme Éliane Assassi applaudit.)

J’insiste sur ce point, rien ne se fera sans une véritable démocratisation. Il faut donner la parole à ceux qui ont une expertise importante en la matière. Je pense non seulement aux usagers, mais aussi au personnel.

Madame la ministre, les usagers, les associations, les comités de ligne et les syndicats attendent, avec nous, des réponses extrêmement précises aux propositions que nous formulons et qui sont largement partagées.

En réalité, l’apport de notre groupe devrait être pour votre gouvernement un point d’appui lui permettant de prendre les mesures d’urgence qui s’imposent, à la fois pour mettre un coup d’arrêt aux galères vécues par les Franciliennes et les Franciliens dans les transports en commun et pour redonner au fret ferroviaire la place qui doit être la sienne dans l’intérêt de toutes et tous. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la sénatrice, je vous ai écoutée attentivement. Si je partage certaines de vos interrogations, je ne vous rejoins pas sur tout ce que vous avez dit.

Vous le savez, je suis également, de par mes précédentes fonctions, sensible aux enjeux des transports publics en Île-de-France et, plus largement, à l’offre de mobilités dans cette région.

Je ne reviendrai pas sur les sujets que nous avons pu aborder lors de notre premier débat et qui concernaient aussi l’Île-de-France. Cependant, je le constate tout autant que vous, tout ne fonctionne pas au mieux.

Nous connaissons tous la spécificité du contexte francilien et la saturation réelle des réseaux, structurés historiquement en radiale entre Paris et ses territoires limitrophes. Bien sûr, je ne m’en satisfais pas, et l’État, même s’il n’est pas autorité organisatrice des transports en Île-de-France, s’engage fortement dans la région capitale. En effet, le Gouvernement a pleinement conscience des enjeux, notamment de l’urgence de la rénovation de l’existant et de l’amélioration des conditions de transport au quotidien.

L’État est également pleinement engagé pour accompagner des projets de dimension internationale à moyen terme – je pense aux jeux Olympiques de 2024 ou encore à l’organisation de la Coupe du monde de rugby en 2023 –, destinés à soutenir le développement et l’attractivité de la région capitale.

Je tiens à le rappeler, en Île-de-France comme sur l’ensemble du territoire français, l’État a quatre priorités.

Premièrement, il faut améliorer les conditions de transport des voyageurs, en permettant aux autorités organisatrices d’assurer le développement d’une offre de mobilités de qualité.

Deuxièmement, il est nécessaire de lutter contre la pollution de l’air et d’aider les collectivités à mettre en œuvre la transition énergétique, conformément à l’action que je mène avec Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire.

Troisièmement, il convient de favoriser une politique des transports qui protège les Franciliens, en leur permettant de vivre leur quotidien dans les meilleures conditions possible. Je pense à la sécurité des personnes, bien entendu, mais aussi aux tracas du quotidien liés à la suppression ou au retard d’un train que l’on doit prendre pour se rendre au travail ou aller chercher ses enfants à l’école. Une telle politique des transports protège également les agents qui assurent le service des transports en Île-de-France, à savoir les cheminots de la SNCF et les agents de la RATP.

Quatrièmement, nous devons répondre à l’enjeu national, particulièrement central en Île-de-France, de cohésion sociale et d’accessibilité à tous. Vous le savez tout autant que moi, une meilleure cohésion territoriale est fondamentale non seulement pour le vivre ensemble, mais également pour le développement économique et l’attractivité d’un territoire.

Oui, tous les jours, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État s’engage aux côtés des collectivités franciliennes pour l’amélioration des transports du quotidien, qu’il s’agisse du RER, du métro, du tramway ou du bus à haut niveau de service.

Ainsi, dans le cadre du contrat de plan État-région en cours, l’État consacrera 1,4 million d’euros à améliorer les mobilités en Île-de-France. À cela s’ajoutent les contributions de la Société du Grand Paris au plan de mobilisation pour les transports, lesquelles s’élèvent à plus de 2 milliards d’euros pour la période.

Pour l’année 2018, des projets prioritaires, tels que le prolongement de la ligne 11, le tram-train Massy-Évry ou encore le T9 bénéficieront de crédits de l’État.

Par ailleurs, je tiens à rappeler que la RATP et la SNCF déploieront 1,6 milliard d’euros pour la régénération de leur réseau en 2018. Je l’ai dit tout à l’heure, le trafic augmente sur les réseaux de l’Île-de-France. C’est une bonne nouvelle, qui révèle l’attractivité des transports en commun. Toutefois, nous devons accompagner une telle évolution.

Pour ce faire, l’État, en lien avec les élus, au travers de la Société du Grand Paris, réalise le Grand Paris Express. La réalisation du métro du Grand Paris est désormais pleinement engagée. Vous le savez, la fin des études et l’entrée en phase opérationnelle – je pense en particulier à la ligne 15 Sud – ont conduit à préciser la réalité des coûts et des délais. Je le dis très clairement, le calendrier présenté jusqu’à présent était, pour partie, trop ambitieux.

Dans ce contexte, et sans remettre en cause le projet, le Gouvernement a lancé une réflexion, confiée au préfet d’Île-de-France, sur le rythme de réalisation du projet et ses modalités de financement. Les décisions en la matière seront annoncées dans les prochains jours. Toutefois, soyez rassurés, l’intégralité du schéma d’ensemble du Grand Paris Express sera maintenue.

Enfin, comme je l’ai évoqué lors de notre précédent débat, l’État n’intervient pas uniquement en matière de financement des infrastructures. Il demande aussi à ses opérateurs de porter une attention particulière à la qualité de service, en particulier à l’information des voyageurs, le cas échéant lors de situations perturbées.

Avec la présidente d’Île-de-France Mobilités, nous avons réuni vendredi dernier les présidents de la SNCF, de la RATP et de la Société du Grand Paris, afin de leur demander de mieux se coordonner et de mieux informer sur les opérations de travaux de rénovation ou d’interconnexion en cours.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le constatez avec moi : bien qu’il ne soit pas autorité organisatrice des transports, l’État s’engage pour l’Île-de-France et son service public de transport.

Mme Laurence Cohen. C’est normal, non ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Oui, mais il fallait le dire !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Enfin, au-delà des grands projets et de la rénovation des réseaux, mon devoir en tant que ministre est aussi de permettre aux autorités organisatrices, au premier rang desquelles figure Île-de-France Mobilités, et aux collectivités comme la Ville de Paris, la région Île-de-France ou la métropole du Grand Paris de se projeter dans les mobilités du XXIe siècle. Je l’ai dit tout à l’heure, tel est l’objet de loi d’orientation des mobilités qui sera présentée au printemps.

C’est pourquoi, en complément de ce que l’on appelle le mass transit, la loi d’orientation des mobilités doit permettre d’offrir un cadre réglementaire incitant à aller vers plus d’innovations dans les mobilités – je pense notamment aux mobilités partagées et aux mobilités propres –, afin de les adapter aux enjeux de demain. Car en Île-de-France comme partout en France, la mobilité des biens et des personnes est un enjeu majeur, à la fois économique, social et environnemental. Nous devons nous assurer que nous apportons des solutions de mobilité durables à tous les citoyens, dans tous les territoires.