Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. De grâce, épargnez-moi vos incantations sur la cohérence !

D’abord, madame Lienemann, je rappelle que, si le texte réintroduisant le droit de préemption a été voté, c’est grâce à des amendements de votre groupe à l’Assemblée nationale et de groupes de l’opposition. Vous leur accorderez le même brevet d’incohérence ! (M. Xavier Iacovelli sexclame.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mais je ne suis pas contre le droit de préemption !

M. Xavier Iacovelli. Le groupe de la majorité aussi l’a voté !

M. Jacques Mézard, ministre. Il faut faire attention aux excès linguistiques.

Je veux bien tout entendre, et c’est parfaitement normal d’ailleurs, mais si les choses étaient parfaites, s’il n’existait strictement aucun problème dans le domaine du logement, de la construction de logements sociaux dans ce pays, ça se saurait ! Et ce n’est quand même pas une situation qui remonte aux douze derniers mois. C’est une réalité !

Alors, j’entends toutes les explications, d’abord celle du sénateur Dallier qui s’interroge, se montrant constant sur ce point, sur les préconisations du Gouvernement, et qui pense que notre politique ne réussira pas. (M. Philippe Dallier le confirme.) On en a discuté, on a échangé nos arguments. Personnellement, j’espère que notre méthode va réussir.

En revanche, me dire que nous allons bouleverser la politique du logement, alors qu’en fait, en termes d’objectifs, on se trouve exactement sur la même trajectoire que celle qui avait été définie en 2009… Du reste, en 2009, c’est l’avis simple du maire qui était requis, avis que, à ma connaissance, personne n’a modifié depuis cette date. Ça aussi, c’est une réalité !

Encore une fois, j’entends tous les points de vue, toutes les conceptions, mais vous savez très bien que le procès en incohérence peut s’inverser très facilement : il suffit de se regarder dans une glace, c’est facile !

Aujourd’hui, la réalité, c’est que nous proposons un certain nombre de solutions à la problématique actuelle, solutions qui découlent aussi des échecs et des réussites des années précédentes, quels qu’ils soient.

Quand j’annonce, ce que j’ai fait ce matin, que nous avons déjà un accord avec Action Logement pour l’acquisition d’un minimum de 10 000 logements par an, c’est une réalité. Ensuite, on peut estimer que cela ne fonctionnera pas, parce que la revente des logements sera difficile, mais mon annonce correspond avant tout à une réalité. Ça, au moins, ça va marcher ! C’est acté ! Dès que la loi sera promulguée, dès le 1er janvier 2019, ce système sera mis en place.

Alors, j’entends les procès d’intention : cela ne fonctionnera pas pour telle ou telle raison, mais je constate aussi que ce qui a été fait auparavant n’a pas forcément toujours marché ! Encore que j’ai toujours fait attention à ne pas faire de procès aux initiatives passées, y compris dans le domaine de l’ANRU ! D’autres l’auraient fait à ma place, compte tenu de la situation que l’on a trouvée, et dont on pourra reparler tout à l’heure si vous l’estimez nécessaire.

Je n’ai jamais fait de procès jusqu’à présent, y compris à mon prédécesseur dans le domaine de politique de la ville ou à l’ancien président de l’ANRU. Après tout, s’il faut parler de tout, on parlera de tout.

Voilà ce que je tenais à dire. Autant j’entends les prises de position des uns et des autres et je les respecte, autant le Gouvernement lui aussi a une position !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. Je vous propose que nous évitions de nous envoyer mutuellement à la tête des arguments de cohérence ou d’incohérence.

M. Julien Bargeton. C’est ce qui a été fait !

M. Marc Daunis. Il semblerait que les argumentaires qui les étayent soient réversibles.

M. Jacques Mézard, ministre. C’est ce que j’ai dit !

M. Marc Daunis. Généralement, quand une argumentation est réversible, cela signifie qu’elle comporte des failles.

En revanche, il y a des cohérences qui sont différentes. En l’occurrence, je prendrai l’exemple très simple de la carence : on ne peut pas laisser une commune entrer en situation de carence à cause de ventes auxquelles elle ne pourrait pas s’opposer. On ne peut pas la démunir totalement comme cela, et la plonger dans une situation délicate. Je ne reviens pas sur ce qui a été dit sur la mixité sociale.

Pourquoi est-il utile d’avoir ces doubles cliquets ? Nous savons tous que les équilibres actuels sont relativement fragiles et qu’ils nécessitent des politiques fines, adaptées à des situations très précises, parfois même ciselées. On sait qu’il suffit parfois que des politiques de peuplement ne soient pas suffisamment adaptées pour déséquilibrer la situation de quartiers, qui était jusque-là plutôt saine.

La position de la commission donne les moyens, les instruments pour réguler le dialogue et, parfois, les confrontations entre communes et EPCI, relations qui tiennent à la perte de la compétence directe en matière de logement social qui affecte les communes. Il s’agit d’éviter que les EPCI ne puissent éventuellement imposer aux communes certaines politiques qu’elles ne veulent pas.

Bref, le droit de préemption, d’une part, et l’avis conforme du maire, d’autre part, forment un tout.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. La question du rôle du maire et de la nature de l’avis qu’il émet est essentielle.

On va nous demander la raison pour laquelle on n’a pas demandé plus tôt un avis conforme du maire. C’est simplement parce que la situation était différente autrefois : les APL n’avaient pas baissé de 11 euros à cause de leur non-réévaluation et il y avait encore l’APL accession. En outre, on ne cherchait pas à vendre des logements sociaux pour financer le secteur du logement social.

M. Martial Bourquin. Il s’agit d’un changement considérable.

Les logements vendus deviendront-ils des copropriétés dégradées ? Le maire et son conseil municipal ont un avis sur le sujet. C’est pourquoi il ne sert à rien de comparer les situations dans le temps.

On entre dans une période nouvelle où le dispositif de financement du logement social connaît une déstabilisation profonde. Dans ces conditions, le maire et son conseil municipal doivent évidemment jouer un rôle essentiel. En effet, c’est le maire qui va hériter des situations difficiles et qui, compte tenu de la politique de peuplement qu’il a mise en place et de la politique de revitalisation de certains quartiers, pourrait être pris au dépourvu.

Il ne sert à rien d’établir des comparaisons année par année : c’est la première fois qu’une loi déstabilise complètement le système de financement du logement social ! C’est la raison pour laquelle cet amendement est important : il faut que le Sénat impose l’avis conforme du maire, avant que l’Assemblée nationale – on l’espère – ne vote aussi cette disposition.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Personne ne fait de procès en cohérence ou en incohérence dans cet hémicycle. Il faut regarder de l’avant.

Comme l’a dit notre collègue Martial Bourquin, les circonstances changent, si bien que les décisions peuvent changer. Les avis peuvent aussi changer en fonction de l’expérience vécue par les uns et les autres, et des résultats que nous observons au niveau des politiques générales qui sont menées.

C’est également notre rôle de contrôler que les mesures que nous votons portent leurs fruits et de modifier les dispositifs quand ceux-ci sont inefficaces.

Monsieur le ministre, comme vous le savez, ce débat résulte en réalité d’un malaise du Sénat qui fait suite à la réaction qu’il a décelée pendant la conférence de consensus. Pendant cette conférence, l’un des consensus consistait à dire qu’il fallait redonner le pouvoir aux maires, car les maires se sentent dépossédés de ce qui fait l’essence de leur condition et de leur pouvoir dans une commune, c’est-à-dire le droit de l’urbanisme.

Certes, vous donnez quelques pouvoirs aux maires et leur imposez des contraintes, comme en matière d’égouts – vous savez que nous avons une différence appréciable sur ce point –, comme cet avis conforme sur la vente des logements, ou dans certains domaines déterminés par la loi SRU – je sais qu’on ne sera pas là non plus tous d’accord sur ces travées.

Tous ces éléments donnent aux maires l’impression qu’ils sont les réceptacles de certaines obligations de politique générale, décidées dans nos hémicycles, et qu’ils sont, en même temps, dépossédés des compétences nécessaires pour les exercer. Il y a donc un grand écart que les maires ne comprennent plus. Ceux-ci veulent être responsables de ce qui se passe sur le territoire de leur commune. Ils veulent pouvoir décider et être responsables devant leurs électeurs.

À un moment où les EPCI se mettent en place – cela me paraît d’ailleurs très bien, car je n’oppose pas les EPCI aux communes –, où des transferts de compétences s’opèrent entre communes et EPCI, je réaffirme que l’urbanisme reste vraiment l’expression la plus importante des politiques municipales. Je considère donc qu’il faut laisser cette mission aux communes.

Je voudrais formuler une dernière petite remarque, qui est autant une inquiétude qu’une question.

J’imagine que les ventes réalisées par les bailleurs sociaux se feront naturellement sur le patrimoine le plus amorti.

Mme Valérie Létard. Certainement !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je voudrais être sûre que l’argent issu des ventes de logements, quand celles-ci ont lieu dans les communes, soit réinvesti localement – il y aura sûrement des amendements en ce sens –, en particulier dans la rénovation et la restructuration des programmes sociaux.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Comme je fais partie des anciens dans cet hémicycle, je voudrais tout d’abord préciser qu’en 2009 nous étions un certain nombre de sénateurs à déposer des amendements tendant à demander l’avis conforme du maire.

Mme Catherine Procaccia. Même si c’était notre majorité qui était au pouvoir à l’époque, nous n’avions pas été suivis,…

M. Julien Bargeton. Bah alors ?

Mme Catherine Procaccia. … pas plus que le Gouvernement ne nous suit à l’heure actuelle.

Nous sommes un certain nombre à demander depuis longtemps cet avis conforme, même si, comme mes collègues l’ont dit, on n’était pas dans le même contexte, avec le même nombre de ventes de logements sociaux.

Ensuite, je voudrais dire que je comprends parfaitement votre position, monsieur le ministre : vous ne souhaitez pas que les maires puissent rendre un avis négatif, puisqu’un tel avis remettrait en cause la vente des logements.

Seulement, il est évident que, dans les communes carencées – je ne parle même pas des communes qui vont le devenir à cause de la vente de ces logements sociaux –, les maires qui font des efforts depuis dix ou quinze ans pour éviter à leur commune de continuer à régler des pénalités, lesquelles deviennent de plus en plus monstrueuses, ne pourront pas accepter que l’on vende des appartements alors qu’on leur demande de continuer à faire du logement social !

M. Marc Daunis. Bien sûr !

Mme Catherine Procaccia. Votre refus d’un avis conforme des maires s’inscrit dans une logique de vente. De notre côté, nous sommes un certain nombre à ne pas être d’accord !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. D’abord, je voudrais rassurer la présidente de la commission en ce qui concerne le réinvestissement du produit des ventes de logements sur les territoires : je suis en effet favorable à ce que nous avancions sur le sujet.

M. Philippe Dallier. Bonne nouvelle !

Mme Catherine Procaccia. Où est l’amendement, alors ?

M. Jacques Mézard, ministre. Pour la forme, c’est autre chose, mais d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire nous aurons le temps de nous améliorer les uns et les autres.

M. Philippe Dallier. C’est déjà bien !

M. Jacques Mézard, ministre. En tout cas, ma position est de considérer qu’il faut absolument que nous trouvions les moyens de réinvestir l’argent des ventes sur le territoire.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Merci !

M. Marc Daunis. Très bien !

M. Jacques Mézard, ministre. Je dis ce que je pense.

Pour le reste, vous avez rappelé que vous aviez été un certain nombre à demander un avis conforme du maire en 2009. Je vous avoue ne pas me souvenir de ce que j’ai voté à l’époque…

M. Philippe Dallier. On va chercher ! (Rires.)

M. Jacques Mézard, ministre. Je vais vous donner une piste : je crois savoir ce que j’ai voté parce que, en général, et en disant cela, je ne veux pas être cruel avec M. Bourquin.

M. Martial Bourquin. Je n’étais pas là !

M. Jacques Mézard, ministre. S’agissant de la défense du pouvoir des maires, il est inutile de relancer le débat sur ce qui s’est passé ces dernières années.

M. Martial Bourquin. Quand vous voulez !

M. Jacques Mézard, ministre. Non, vraiment, personne dans cet hémicycle n’a agi ou fait quoi que ce soit contre le pouvoir communal ces dernières années ! Tout a été oublié : les fusions autoritaires de régions, les fusions autoritaires d’intercommunalités, rien de tout cela n’a jamais existé (M. Sébastien Meurant sexclame.), jamais ! Il s’agissait d’autres sénateurs !

M. Martial Bourquin. Si c’est pour faire pire… Vous déglinguez le logement social !

M. Jacques Mézard, ministre. Je sais que j’appuie là où ça fait mal !

M. Martial Bourquin. Pas du tout !

M. Jacques Mézard, ministre. Me faire le procès que je ne défends pas les collectivités locales et le pouvoir communal me laisse froid, vous savez, parce que je pense qu’en la matière j’ai suffisamment œuvré et que j’y œuvre encore !

M. Jacques Mézard, ministre. Je vois bien que vous n’êtes pas content que je dise cela, monsieur Bourquin. Je veux bien tout entendre, mais quand même… (M. Martial Bourquin proteste vivement. – Brouhaha sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. Monsieur Bourquin, je vous en prie, c’est M. le ministre qui a la parole, et lui seul.

Je vous en prie, poursuivez, monsieur le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. Sur ces sujets, il est normal que chacun s’exprime,…

M. Martial Bourquin. Ne vous inquiétez pas, on va s’exprimer !

M. Jacques Mézard, ministre. … le Gouvernement y compris !

Pour revenir au débat, il faut effectivement que l’on restaure la possibilité de réinvestir massivement l’argent des ventes sur les territoires en question.

Pour le reste, il y a une différence de conception : la commission a introduit l’avis conforme du maire, qui n’existait pas jusqu’à présent. Le Sénat, conformément au vote émis en commission des affaires économiques, devrait confirmer cette position.

J’appelle simplement votre attention sur les intercommunalités. Quand j’entends dire que le droit de l’urbanisme doit rester à l’échelon communal, je réponds qu’il ne fallait pas créer les plans locaux d’urbanisme intercommunal, les PLUI, dans ce cas.

M. Michel Canevet. On ne l’a pas fait partout !

M. Jacques Mézard, ministre. Certes, mais in fine ça sera fait partout, parce que la loi le prévoit.

M. Jacques Mézard, ministre. Il y a des délais,…

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Ce n’est pas contradictoire !

M. Jacques Mézard, ministre. Chère madame la présidente, j’ai fait en sorte, sauf pour un cas que vous connaissez, et sur lequel il y a une différence d’appréciation entre le Sénat et le Gouvernement, de ne pas remettre en cause la délivrance des permis de construire par les maires.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Et je vous en remercie !

M. Jacques Mézard, ministre. J’y ai tenu personnellement pour éviter que cela ne puisse faire l’objet de discussions dès la phase d’élaboration du projet de loi. Et je peux vous dire que je me suis impliqué personnellement ! C’est ma responsabilité, et je l’assume ! D’ailleurs, c’est normal parce que c’est conforme aux positions que j’ai exprimées ici pendant des années.

Il y a une forme d’équilibre avec ce texte. Il y a également des dispositions qui changent, qui évoluent. Après, on peut certes être en désaccord sur ces évolutions, mais nous avons réalisé des avancées sur un certain nombre de sujets et devrions pouvoir en faire d’autres.

En tout cas, je vous assure qu’il n’est aucunement dans mes intentions de fragiliser ou de remettre en cause le pouvoir des maires en matière de permis de construire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 793.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 795, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 133

Rétablir les II et III dans la rédaction suivante :

II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi :

1° Permettant aux organismes d’habitations à loyer modéré mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation et aux sociétés d’économie mixte mentionnées à l’article L. 481-1 du même code de mettre en œuvre à titre expérimental une politique des loyers qui prenne mieux en compte la capacité financière des ménages nouveaux entrants du parc social ;

2° Adaptant le mode de calcul du supplément de loyer de solidarité mentionné à l’article L. 441-3 dudit code afin de renforcer la prise en compte des capacités financières des locataires.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois suivant la publication de l’ordonnance.

III. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi visant à permettre le développement de la vente de logements sociaux destinées à :

1° Permettre l’inclusion dans un contrat de vente par un organisme d’habitations à loyer modéré à une personne physique d’un logement situé dans un immeuble destiné à être soumis au statut de la copropriété d’une clause permettant de différer le transfert de propriété de la quote-part de parties communes à l’acquéreur jusqu’à l’expiration d’une période ne pouvant excéder dix ans à compter de la première de ces ventes intervenues dans cet immeuble, en prévoyant la possibilité d’une décote du prix de vente ;

2° Définir les droits et les obligations de l’organisme vendeur et de l’acquéreur durant la période mentionnée au 1° ;

3° Définir les conditions dans lesquelles l’acquéreur participe au paiement des charges d’entretien et de fonctionnement des parties communes de l’immeuble pendant la période mentionnée au 1°, en dehors de toute application du statut de la copropriété, de toute association syndicale libre ou de toute association foncière urbaine libre.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois suivant la publication de l’ordonnance.

La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. Sur ce sujet, le Gouvernement a une position, la commission en a une autre. Je vais donc être bref. (Mme Catherine Procaccia rit.)

Cet amendement a pour objet de rétablir les ordonnances prévues à l’article 28, qui permettent au Gouvernement de prendre des mesures expérimentant une politique des loyers qui prenne en compte la capacité financière des ménages, des mesures adaptant le mode de calcul du supplément de loyer de solidarité et, enfin, des mesures visant la vente des logements HLM avec application différée du statut de la copropriété.

Le présent amendement tend à rétablir l’article 28 tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sans surprise ni pour le Gouvernement ni pour l’ensemble des sénateurs présents aujourd’hui dans l’hémicycle, la commission émettra un avis défavorable sur cet amendement.

D’abord, nous avons dit à plusieurs reprises que nous étions défavorables à un certain nombre d’ordonnances figurant dans le projet de loi et concernant des sujets primordiaux.

Le Gouvernement a entendu nos remarques, surtout après la conférence de consensus sur le logement. Le contenu de certaines ordonnances a ainsi été réintégré dans le texte même du projet de loi – je pense en particulier à l’ordonnance relative à la réorganisation du secteur social HLM –, sauf qu’à l’issue de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, il restait encore au moins une dizaine d’ordonnances dans le texte transmis au Sénat, dont certaines portent sur des sujets ô combien importants.

Celles que le Gouvernement propose de réintroduire au travers de cet amendement portent sur la politique des loyers et de copropriété privée.

Au-delà du fait qu’il s’agit d’une position exprimée par la commission à plusieurs reprises, il nous est plus que jamais apparu comme étant indispensable de débattre dans l’enceinte parlementaire des dispositions relatives à la politique des loyers, compte tenu de l’enjeu qu’elles représentent, à la fois pour les bailleurs sociaux et pour les locataires du parc social.

Quant aux secondes dispositions qui touchent à la copropriété privée, elles sont envisagées comme étant dérogatoires au droit commun de la copropriété, puisque le Gouvernement prévoit un transfert différé de la copropriété. Pour les mêmes raisons, nous pensons que ces mesures doivent faire l’objet d’un débat parlementaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 795.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 794, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 135 et 136

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

V. – L’article 1er de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée est ainsi modifié :

1° Au 2° , après les mots : « leurs établissements publics », sont insérés les mots : « , les offices publics de l’habitat mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation pour les logements à usage locatifs aidés par l’État et réalisés par ces organismes et à l’exception du titre II de la présente loi » ;

2° Le 4° est complété par les mots : « , à l’exception du titre II de la présente loi ».

La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. Il s’agit là encore du rétablissement d’une disposition votée par l’Assemblée nationale sur l’exonération de la soumission des bailleurs sociaux aux dispositions de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.

Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises depuis un certain nombre d’heures. Vous connaissez donc l’objet de cet amendement, qui recevra un avis défavorable de la commission. (Rires.)

M. Philippe Dallier. On accélère le rythme ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Effectivement, monsieur le ministre, c’est le troisième amendement consécutif du Gouvernement qui recevra un avis défavorable de la commission ! (Sourires.)

M. Julien Bargeton. Bis repetita !

Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission, à la suite de plusieurs amendements identiques, et notamment – je tiens à le souligner – d’un amendement de la commission de la culture, a considéré que rien ne justifiait d’exclure totalement les bailleurs sociaux du titre II de cette loi. Cela étant, la rédaction adoptée prévoit une mission adaptée pour l’équipe de maîtrise d’œuvre, censée être réduite par rapport à une mission classique, afin de prendre en compte les besoins spécifiques des bailleurs sociaux.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 794.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les six premiers sont identiques.

L’amendement n° 15 rectifié quinquies est présenté par Mme Guidez, MM. Delahaye et Janssens, Mme Vullien, MM. Henno, Laugier et Détraigne, Mme de la Provôté, M. Moga, Mme Sollogoub, M. B. Fournier, Mmes Doineau et Gatel et M. Delcros.

L’amendement n° 176 est présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 266 rectifié quinquies est présenté par M. Longeot, Mme Billon et MM. Perrin, Kern et L. Hervé.

L’amendement n° 564 rectifié est présenté par Mme S. Robert, MM. Antiste et Assouline, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mme Monier, MM. Daunis, Sueur et Lurel, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé et Tissot, Mmes Bonnefoy, de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 688 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, M. Guérini, Mmes Guillotin et Laborde et M. Léonhardt.

L’amendement n° 711 rectifié ter est présenté par Mmes de Cidrac, Micouleau et L. Darcos, MM. Milon, de Nicolaÿ, Houpert et Schmitz, Mmes Perrot, Lassarade, Lanfranchi Dorgal et F. Gerbaud et MM. Gilles et Hugonet.

Ces six amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 137

Supprimer cet alinéa.

L’amendement n° 15 rectifié quinquies n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 176.

Mme Michelle Gréaume. Cet article s’insère dans la volonté affirmée par les auteurs de ce texte : construire mieux, plus vite et moins cher. Ses promoteurs pensent ainsi que s’exonérer des concours d’architecture, c’est gagner du temps et de l’argent. Rien n’est moins sûr, en réalité.

Cet article est une illustration très simple de cette volonté de déréglementation et de dérégulation de l’urbanisme et de la construction. Tout irait tellement plus vite si les promoteurs pouvaient délivrer eux-mêmes les autorisations d’urbanisme, pratiquer les révisions des plans locaux, faire des plans de construction, diriger la construction, les travaux, gérer les locataires, et j’en passe ! Tout cela n’est pas sérieux, mes chers collègues.

La responsabilité publique est importante, surtout lorsqu’il s’agit de l’accès au logement. Si le concours d’architecture a été instauré, c’est parce qu’il répond à un enjeu d’utilité publique. Les normes ont historiquement permis de faire des progrès importants en matière de sécurité, de salubrité, de confort et de performance énergétique.

On voit bien, depuis une dizaine d’années, la montée en régime des ventes en état futur d’achèvement, ou VEFA, dans la production de logement social. Les promoteurs privés jouent un rôle nouveau dans ce secteur de la construction des villes. Or, ceux-ci étant habitués à des logiques de commercialisation classique, leur production tend à une uniformité de forme architecturale qui appauvrit les villes. Ils sont plus intéressés par la rentabilité de l’opération que par sa pérennité, contrairement aux architectes.

Dans ce processus, l’architecte ne tient souvent qu’un rôle d’exécutant qui se limite à optimiser le rendement de plan et à rechercher les solutions les plus économiques, souvent en partie au détriment de la qualité.

Le risque, avec la disparition du concours, est que les bailleurs sociaux finissent par s’aligner sur la manière de faire des promoteurs et perdent ce qui fut un de leur grand mérite au cours du siècle passé : être les fers de lance de l’architecture, de l’innovation et du progrès.

Voilà, mes chers collègues, pourquoi nous proposons le maintien du concours. (Applaudissements sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)