M. Sébastien Lecornu, ministre. Non, madame la sénatrice, je ne méconnais pas ce que disent les élus locaux, notamment ceux de votre département, que j’ai eu l’occasion de rencontrer à de nombreuses reprises.

Les élus locaux nous demandent effectivement de bouger sur cette question. Je ne suis pas du tout doctrinaire. Fallait-il assouplir ? Cela a déjà été un peu fait. Fallait-il aller plus loin et plus vite ? Peut-être, et je fais amende honorable. Je me souviens d’une question au Gouvernement posée sur ce sujet par M. Darnaud voilà quelques mois…

La qualité du service public de l’eau est-elle satisfaisante est dans notre pays ? En tant qu’ancien secrétaire d’État à l’écologie ayant mené les assises de l’eau, avec le concours de la commission du développement durable du Sénat, je réponds par la négative. Il ne s’agit pas de faire injure à qui que ce soit, mais, en ce qui concerne notamment l’eau claire, le service rendu pose de vrais problèmes en termes de rentabilité et de rendement. Les fuites font perdre entre un litre sur deux et un litre sur quatre…

M. François Bonhomme. C’est faux !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur Bonhomme, je veux bien que l’on déclare ici, le Journal officiel faisant foi, qu’il n’y a aucune fuite dans ce pays, mais ce n’est pas la vérité. Nous sommes un grand pays moderne dans lequel existe, malheureusement, un grand scandale écologique de déperdition en eau. Il faut avoir le courage de le reconnaître.

La question de l’adduction d’eau potable, davantage que celle de l’assainissement, est devant nous, notamment en raison des grands changements climatiques. Dans les années à venir, je pense que nous connaîtrons de graves difficultés à certains moments de l’année. Une partie de nos concitoyens, notamment agriculteurs, se plaindront de problèmes d’adduction d’eau.

Je reste persuadé que, pour des raisons de massification de l’investissement, l’échelle intercommunale n’est pas une mauvaise échelle, même si on peut lui reprocher, sur le terrain, sa rigidité et son côté « tout ou rien » : soit toute la compétence remonte à l’intercommunalité, soit toute la compétence descend… Par ailleurs, au regard d’autres compétences, le tourisme ou à l’urbanisme par exemple, la compétence eau et assainissement est redoutablement rigide, les nappes phréatiques ne s’arrêtant pas aux limites communales ou intercommunales. Certains conseils départementaux demandent d’ailleurs à récupérer les réseaux.

M. Bruno Sido. C’est une bonne idée !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le niveau intercommunal est pertinent. Les besoins en matière d’interconnexion et de solidarité en eau sont appelés à croître. Certaines communes ont de l’eau, d’autres n’en ont pas. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on trouve souvent des syndicats à la manœuvre, et ce depuis longtemps : l’idée de se regrouper a prévalu historiquement, pour des raisons de bon sens.

Ce qui est aberrant, c’est d’imposer à la régie d’eau d’une commune qui fonctionne bien depuis un siècle de cesser son activité pour transférer toute la compétence à l’intercommunalité. C’est là qu’est le nœud du problème. Le caractère intransigeant du transfert de compétence a nié la réalité territoriale, historique et géographique.

Cet amendement ne tend pas, madame Monier, à introduire un énième assouplissement. Il s’agit d’inventer un niveau de souplesse infracommunautaire : on peut trouver une régie communale sur le col d’une montagne, un syndicat de communes dans la vallée qui fonctionne bien et d’autres communes qui ont besoin de la solidarité intercommunale. Ce genre de situation doit sans doute vous parler. Cette souplesse territoriale est devenue d’autant plus nécessaire que les intercommunalités ont grandi.

En la matière, je crois à la délégation. Avec notre proposition, le CIF ne sera pas affecté, l’intercommunalité restant « propriétaire » de la compétence et déléguant en outre seulement ce qu’elle veut : les tarifs, l’investissement, la gestion ou tout à la fois, avec ou sans cahier des charges, comme dans n’importe quel schéma délégant-délégataire.

En un mot, accepter cette proposition, c’est admettre que le fameux principe de subsidiarité dont nous parlons tant est compatible, messieurs Marie et Kerrouche, avec le phénomène intercommunal. Cette nouvelle forme de délégation permettra une vraie différenciation territoriale et présente l’avantage majeur de permettre au délégant, en l’occurrence l’EPCI, c’est-à-dire l’assemblée des maires, de reprendre la compétence au délégataire si celui-ci ne remplit pas convenablement sa mission, par exemple si des problèmes de qualité de l’eau apparaissent. La délégation, c’est la liberté et la souplesse. On ne peut continuer à raisonner avec des blocs de compétences qui bougent de manière uniforme alors que les intercommunalités ont grandi. Il faut imaginer des solutions infracommunautaires. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. L’amendement n° 523 rectifié bis, présenté par MM. Kerrouche, Durain, Marie, Kanner, Antiste, Assouline, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Dagbert, Mme de la Gontrie, MM. Duran, Éblé, Féraud et Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte, Iacovelli et Jacquin, Mme Jasmin, MM. Jomier, Lalande et Leconte, Mmes Lepage et Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Préville, MM. Raynal et Roger, Mme Rossignol, M. Sueur, Mme Taillé-Polian, M. Temal, Mme Tocqueville, M. Tourenne, Mme Van Heghe et M. Vaugrenard, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’article 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « assainissement », sont insérés les mots : « ou qui exerce en partie seulement l’une ou l’autre » et l’année : « 2019 » est remplacée par l’année : « 2020 » ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé ;

3° Au troisième alinéa, les mots : « les compétences relatives à l’eau et à l’assainissement ou l’une d’entre elles » sont remplacés par les mots : « les compétences relatives à l’eau ou à l’assainissement ou exerce en partie seulement l’une ou l’autre ».

II. – Toutes les délibérations prises avant le 1er juillet 2020 dans les conditions requises au premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 précitée ayant pour objet de s’opposer au transfert des compétences relatives à l’eau ou à l’assainissement, de l’une d’entre elles ou d’une partie d’entre elles ont pour effet de reporter le transfert de compétence au 1er janvier 2026.

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. La mise en œuvre des compétences eau et assainissement s’est effectivement heurtée à un grand nombre de difficultés, ce qui a amené le législateur, à plusieurs reprises, à trouver des modalités d’assouplissement.

Au travers de cet amendement, nous proposons de maintenir le dispositif de la loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes. Un pouvoir d’opposition au transfert est ouvert aux communes membres qui n’exercent pas ces compétences ou à l’une d’entre elles, à titre optionnel ou facultatif. Si 25 % des communes membres représentant au moins 20 % de la population intercommunale s’opposent, par délibération avant le 1er juillet 2019, au transfert obligatoire des compétences eau et assainissement, la minorité de blocage est activée et le transfert reporté au 1er janvier 2026. Ce mécanisme de blocage vaut aussi pour les communes membres des communautés de communes qui exercent à titre facultatif un service public d’assainissement non collectif, ou Spanc.

Conformément aux amendements déposés par le groupe socialiste lors de l’examen de la loi du 3 août 2018, repris par le présent projet de loi, cet amendement vise à élargir le pouvoir d’opposition des communes à l’ensemble des cas où la compétence n’est exercée qu’en partie par la communauté de communes.

Pour permettre aux communes de se saisir de cette faculté, les dispositions de cet amendement prévoient qu’elles pourront délibérer en ce sens jusqu’au 1er juillet 2020. Le projet de loi fixait initialement la date butoir au 1er janvier 2020, mais il nous semble indispensable de permettre aux nouvelles municipalités qui seront élues en mars 2020 de s’exprimer sur ce sujet important.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Il ne s’agit pas d’un sujet nouveau pour la Haute Assemblée.

Le 23 février 2017, nous avions voté, à l’unanimité moins une abstention, le maintien du caractère facultatif de l’exercice de la compétence eau et assainissement.

Si nous avons fait ce choix à l’époque et si certains d’entre nous, comme j’ai cru le comprendre à l’écoute de notre collègue Marie-Pierre Monier, ont encore à cœur de faire en sorte que la compétence eau redevienne facultative, c’est que, plus encore que la compétence assainissement, elle a un caractère tout à fait singulier.

Nous sommes d’accord sur le constat, monsieur le ministre. Dès lors, pourquoi ne pas tout simplement lui rendre son caractère facultatif ? Cela ne veut pas dire que votre proposition n’est pas intéressante. Elle est relativement audacieuse et pourrait même être étendue à d’autres compétences. Nous en discuterons lors de l’examen d’un autre article.

Avant même le vote de la loi NOTRe, 54 % des EPCI avaient déjà pris les compétences eau et assainissement. Pourquoi avons-nous voté comme nous l’avons fait le 23 février 2017 ? Parce que, dans certains territoires, on éprouve les plus grandes difficultés à transférer ces compétences. Dans d’autres se pose la question de la ressource en eau et de sa sécurisation, ce qui a amené nombre de départements à créer des syndicats départementaux, voire bidépartementaux, comme en Alsace. En effet, l’exercice de cette compétence tout à fait singulière exige des ressources spécifiques en ingénierie et répond à des problématiques de territoire.

J’invite les sceptiques à regarder l’évolution du coût de l’eau dans certaines communes, notamment de montagne, qui ont transféré la compétence à l’intercommunalité. J’ai d’ailleurs déjà dit à Mme Gourault qu’il serait intéressant de disposer d’une étude sur l’évolution, pour ne pas dire l’explosion, des coûts de l’eau dans certaines intercommunalités du fait du transfert de la compétence. Un tel document serait riche d’enseignements pour nous tous.

Quand l’exercice facultatif de la compétence tombait sous le sens, les élus l’ont assuré, le cas échéant via des syndicats. Si nous avons adopté en juillet 2018 l’évolution qui épouse les dispositions de l’amendement de nos collègues socialistes, c’est bien qu’il était nécessaire de maintenir certains syndicats. Nous avons ainsi restreint à deux le nombre de périmètres intercommunaux à regrouper pour permettre le maintien des syndicats des eaux.

La constance de notre position ne relève pas de la posture ni d’une volonté de ne pas évoluer. Au contraire, je crois que le maintien du caractère facultatif de la compétence eau est profondément moderne, car son exercice, plus que celui de n’importe quelle autre, doit s’adapter aux problématiques territoriales.

Pour toutes ces raisons, j’invite le Sénat à redonner à cette compétence un caractère facultatif. La commission est défavorable à ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Nous ne voterons pas ces amendements.

Comme l’a rappelé M. Darnaud, nous avons voté, en 2017, le maintien du caractère facultatif pour la compétence eau et assainissement.

Nous sortons ici du champ des irritants de la loi NOTRe, pour entrer dans celui de ses conséquences. La question de l’eau et de l’assainissement n’est toujours pas réglée.

Le dispositif initial du projet de loi pouvait représenter un moindre mal. Quand le ministre dit que ce dispositif visait à préserver le CIF, cela signifie bien que l’on reste dans un donnant-donnant : si nous allons au bout de nos intentions, nous serons ceux qui auront affaibli les finances des communes désireuses de reprendre la compétence eau et assainissement. Vu le niveau de crispation actuel dans certains EPCI, on n’en est même pas là ! Les choix faits par le Sénat avaient été appréciés d’un très grand nombre d’élus.

Monsieur le ministre, les élus d’une commune de mon département, exaspérés, ont mis fin aux discussions avec la communauté d’agglomération sur la remontée à l’EPCI de la compétence eau et assainissement. C’est dire à quelles difficultés ils sont confrontés. Je vous ferai parvenir le communiqué qu’ils ont rédigé : selon eux, en voulant faire une loi nationale et uniforme prévoyant le transfert, au 1er janvier 2020, de la compétence eau, le législateur a perdu de vue les enjeux et les spécificités des territoires. Considérant la difficulté qu’il y a à harmoniser le fonctionnement d’une intercommunalité comptant 87 communes, dotée de plus de nouvelles compétences, ils estiment qu’il n’y a pas urgence absolue à transférer une compétence supplémentaire.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. Le mal vient du CIF : beaucoup d’intercommunalités ont pris la compétence eau et assainissement pour augmenter leur CIF, et donc leur dotation. À vrai dire, ce n’était pas très pertinent.

La question de l’eau et de l’assainissement est tout sauf communautaire. L’assainissement relève de l’échelon communal ou de la mutualisation entre communes voisines, pas de l’échelon intercommunal – la région parisienne étant un cas à part.

Quant à l’eau, chacun sait qu’elle est res nullius, même si certains maires pensent qu’elle appartient à leur commune. Pour avoir été le rapporteur de la loi sur l’eau, j’en sais quelque chose.

Il y a trop de captages ; dans mon département, la Haute-Marne, on en compte plus de 700, qu’il faut protéger ! Lors des épisodes de sécheresse, on transporte l’eau par camions ou on tire des tuyaux pour capter quelques mètres cubes pendant huit jours sur le territoire d’un autre syndicat… On voit bien que la gestion de l’eau relève de l’échelon départemental, voire interdépartemental. Nous le savons tous, les périodes de sécheresse vont se multiplier et les problèmes sont devant nous. Des dépenses incroyables sont réalisées pour consommer quelques mètres cubes dans l’année et écrêter les étiages.

Je partage donc l’opinion du rapporteur : il faut laisser les communes décider de l’échelon pertinent, soit départemental, soit interdépartemental, pour utiliser des ressources en eau de plus en plus rares le mieux possible et au plus faible coût possible.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, je m’inscris en faux contre vos propos.

Le groupe auquel j’appartenais à l’époque avait voté la loi NOTRe, dont j’ai ensuite mesuré les effets négatifs sur les territoires.

Vous proposez de confier la compétence eau et assainissement à l’intercommunalité et, par délégation, aux communes, le cas échéant. Mais si une commune de l’intercommunalité veut reprendre la compétence, il faudra un vote favorable du conseil de l’intercommunalité. Autant dire qu’elle aura peu de chance d’obtenir ce qu’elle souhaite.

Comme l’a dit le président Kanner, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis… Je pense aujourd’hui que cette compétence doit être facultative, raison pour laquelle je suivrai l’avis de la commission des lois.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. La situation est très disparate d’un territoire à l’autre.

Dans mon département, que j’ai présidé durant un peu plus de dix ans, on comptait plus d’une centaine de syndicats d’eau et d’assainissement. Il arrivait, sur un petit territoire, que deux syndicats, desservant à peu près le même nombre d’usagers, puisent dans la même nappe phréatique, avec deux concessionnaires et deux tarifs différents. Une telle hétérogénéité ne peut pas durer.

Le meilleur moyen d’avancer est d’intercommunaliser la compétence eau et assainissement à une échelle suffisante pour mettre en œuvre des politiques cohérentes et globales.

Cela étant, nous connaissons les réalités du terrain. Il n’est pas toujours si simple d’avancer. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’accorder un délai, en fixant l’échéance à 2026, sans revenir sur la trajectoire.

À titre personnel, je suis favorable à la mise en œuvre d’une politique publique de l’eau sur le périmètre le plus large possible. On ne pourra y parvenir en émiettant les compétences. Les grands groupes, massivement présents dans les syndicats, n’ont aucune envie que nous prenions ce chemin. L’intercommunalisation de la politique de l’eau est indispensable si l’on veut maîtriser le prix et la qualité de la ressource et, le cas échéant, aller vers la mise en place d’un service public.

M. Bruno Sido. Départementalisons !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le ministre, vous nous avez asséné tout au long de la semaine que ce projet de loi reposait sur la confiance. Or la confiance ne se décrète ni ne s’achète ; elle se mérite.

Vous aviez l’occasion de faire confiance aux élus en leur laissant la responsabilité de décider eux-mêmes qui fait quoi, dans une sorte de préfiguration de la différenciation : il s’agit de laisser les territoires mettre en place le système qui leur paraît le plus pertinent, le plus approprié.

Là où la compétence a déjà été transférée, je peux comprendre que l’on mette en place un système de délégation. Mais pourquoi, sinon par dogmatisme, persister dans cette volonté de dessaisir les communes qui n’ont pas transféré la compétence ?

Cela a été dit, y compris par ceux qui l’avaient votée, la loi NOTRe a fait nombre de dégâts. Il est temps que vous le compreniez et que vous preniez en compte l’attente des territoires : 96 heures de discussions, c’est beaucoup, mais peut-être n’était-ce pas encore assez…

Je ne voterai pas ces amendements.

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. Nous sommes encore sur le reculoir. Ce qui s’est passé avec la compétence eau et assainissement est pourtant emblématique des effets délétères de la loi NOTRe.

Il s’agit d’une compétence éminemment territoriale. On ne peut jouer avec les éléments géophysiques et les bassins hydrologiques. On n’a pas voulu le comprendre, alors même que l’on a toujours à la bouche les mots « adaptation », « territoires »… Mais nous arrivons à l’heure de vérité.

On pourrait se satisfaire d’un assouplissement supplémentaire, mais, comme l’a dit M. le rapporteur, la solution passe par le maintien du caractère facultatif de la compétence.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué un taux de rendement faible, dont nous ne pourrions nous satisfaire. La DGE et les promoteurs de la loi d’août 2018 ont recouru à ce même argument, en présentant des histogrammes censés démontrer que plus grande était la taille du syndicat, meilleur était le taux de rendement. Mais cet argument comporte un biais fondamental : il n’est pas tenu compte des spécificités territoriales. Il y a des zones où l’habitat est diffus, d’autres où l’habitat est concentré. Je regrette que l’on se soit servi d’un tel argument biaisé pour passer en force. Nous devons aujourd’hui nous efforcer de corriger la situation.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 829.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 523 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 263 rectifié, présenté par Mme Guidez, MM. Milon, Dallier, Guerriau et Fouché, Mme Sittler, MM. Moga, Janssens, Mizzon, Piednoir, Cazabonne, Prince, Médevielle et Cigolotti, Mme Kauffmann, MM. Bonhomme, Danesi, de Nicolaÿ et Canevet, Mme Lherbier, MM. H. Leroy, Détraigne et Laménie et Mme Sollogoub, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé

…. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le II de l’article L. 5214-16, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Les décisions des conseils municipaux et de l’organe délibérant de la communauté de communes sur un éventuel transfert de la compétence “eau” ou de la compétence “assainissement” sont prises au vu d’un état des lieux de son réseau établi par chaque commune et dont le contenu est précisé par décret en Conseil d’État. » ;

2° Après le II de l’article L. 5216-5, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Les décisions des conseils municipaux et de l’organe délibérant de la communauté d’agglomération sur un éventuel transfert de la compétence “eau” ou de la compétence “assainissement” sont prises au vu d’un état des lieux de son réseau établi par chaque commune et dont le contenu est précisé par décret en Conseil d’État. »

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Mme Jocelyne Guidez. En cohérence avec la position déjà exprimée par le Sénat, la commission des lois a modifié la rédaction initiale de l’article 5 de ce projet de loi et propose désormais de supprimer le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et d’agglomération. Cette modification permettra ainsi aux communes n’ayant pas réalisé ce transfert de conserver ces compétences. Elles pourront toujours être transférées à l’avenir, sur la base d’une décision des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, dans les conditions de majorité habituelle.

Néanmoins, il convient de préciser qu’une telle procédure peut s’accompagner, dans certains cas, de mauvaises surprises pour les EPCI. En effet, il arrive que des établissements publics soient amenés à prendre en charge un réseau communal dont ils ne connaissaient pas le mauvais état.

Cet amendement prévoit donc qu’un état des lieux, dont le contenu sera précisé par décret, soit fait par la commune en amont de la décision de transfert et transmis à la communauté de communes ou d’agglomération. Cette mesure de bon sens répond à un principe de transparence. Elle est demandée par de nombreux maires.

M. le président. L’amendement n° 680 rectifié ter, présenté par MM. Maurey, Longeot, L. Hervé, Cigolotti et Médevielle, Mmes Morin-Desailly et Billon, M. Prince, Mme Sollogoub, M. Mandelli, Mme Duranton, MM. de Nicolaÿ, Canevet et P. Martin, Mmes Ramond et Vermeillet, M. Guerriau, Mme Sittler et M. H. Leroy, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Lorsqu’une commune transfère l’ensemble des compétences relatives à l’eau qu’elle exerce à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, la commune transmet le schéma de distribution d’eau potable mentionné à l’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales ainsi qu’un état financier de l’exercice de la compétence. Elle répond aux questions de l’établissement public de coopération intercommunale à cet égard.

Lorsque le schéma fait apparaître un taux de perte en eau supérieur au taux mentionné au deuxième alinéa du même article L. 2224-7-1, le transfert de compétence s’accompagne du transfert du solde positif du budget annexe du service d’eau à l’établissement public de coopération intercommunale, sauf disposition contraire définie par convention. La convention peut définir un transfert partiel de budget en fonction de l’état du réseau.

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Lorsqu’il y a transfert de la compétence eau de la commune à l’EPCI, il doit y avoir également transfert du solde de trésorerie lorsque le réseau transféré nécessite beaucoup de travaux qui devront être assumés par l’EPCI. Pour l’heure, le transfert du solde de trésorerie n’est pas obligatoire. Dans un département que M. le ministre et moi-même connaissons bien, le transfert d’un réseau en mauvais état a conduit à un doublement du tarif de l’eau pour les usagers… (M. le ministre acquiesce.)

Cet amendement prévoit donc que, lorsque le schéma de distribution d’eau potable prévu par le code général des collectivités territoriales fait apparaître un taux de perte supérieur à 15 %, l’EPCI pourra récupérer tout ou partie, en fonction de l’état du réseau, de l’excédent de trésorerie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Initialement, la commission avait émis un avis défavorable sur l’amendement n° 680 rectifié ter. Toutefois, celui-ci ayant été récrit, il est maintenant beaucoup plus abouti. Il prévoit que la commune transmette le schéma de distribution de l’eau potable à l’EPCI et que, si le taux de perte en eau est trop important, le transfert de compétence s’accompagne du transfert du solde de trésorerie.

À titre personnel, je suis favorable à cet amendement. Je vous invite, madame Guidez, à retirer l’amendement n° 263 rectifié à son profit.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Madame Guidez, je vous demande moi aussi de bien vouloir retirer l’amendement n° 263 rectifié au profit de l’amendement n° 680 rectifié ter, dont les dispositions juridiques ont été retravaillées avec les services de l’État. L’amendement de M. Maurey repose sur un principe courageux et il vise à défendre l’intérêt général. Le budget annexe de l’eau est alimenté par les factures d’eau de nos concitoyens. Si la compétence est transférée, il est bien normal que l’argent prélevé sur les factures d’eau le soit aussi. C’est de bonne politique.

Le Gouvernement est donc favorable à l’amendement n° 680 rectifié ter.

M. le président. L’amendement n° 263 rectifié est-il maintenu, madame Guidez ?

Mme Jocelyne Guidez. Je retire bien évidemment mon amendement en faveur de celui qui a été défendu par mon collègue Hervé Maurey.

La disposition en question va dans le bon sens et répond à une demande. Les petites communautés de communes doivent parfois exposer des dépenses très importantes lorsque les travaux nécessaires n’ont pas été effectués avant le transfert du réseau.