Mme la présidente. La parole est à Mme Vivette Lopez, pour présenter l’amendement n° 351.

Mme Vivette Lopez. Aux arguments des deux précédents orateurs, que j’approuve, j’ajoute que l’instauration de cette taxe semble se fonder à la fois sur une méconnaissance de la nature des produits concernés et sur une erreur d’appréciation des bénéfices espérés en termes de prévention de l’alcoolisme chez les jeunes.

L’aromatisation des vins fait vivre une tradition qui remonte à des milliers d’années. Les vins produits, qui nécessitent la mise en œuvre de plus de 20 000 hectares de vignes, font partie d’une catégorie viticole bien précise et définie de longue date par le règlement européen du 26 février 2014.

Les apéritifs aromatisés à base de vin ne procèdent donc pas d’un processus de seconde main ; ils sont issus de recettes parfois ancestrales et d’un savoir-faire régional reconnu. D’ailleurs, le savoir-faire français dans la production de ce type de vins est reconnu également à l’export.

En outre, cet article ne répond pas aux objectifs du Gouvernement en matière de prévention de l’alcoolisme chez les jeunes. Comme mes collègues l’ont déjà souligné, plusieurs études montrent que ces produits sont consommés non pas par les jeunes, mais à 80 % par les plus de 35 ans et à 61 % par les plus de 50 ans.

Par ailleurs, une taxe sur des produits moins alcoolisés risque de favoriser fortement un report de la consommation vers des produits plus alcoolisés, ce que, me semble-t-il, le Gouvernement ne peut que vivement refuser.

Enfin, il s’agit encore d’une taxe supplémentaire, alors que j’avais cru comprendre que l’on ne voulait pas ajouter des taxes aux taxes…

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 384 rectifié ter.

M. Franck Montaugé. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 391 rectifié.

M. Franck Menonville. Il est également défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 925 rectifié bis n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à la suppression de la taxe sur les premix et mélanges à base de vin.

Le rosé sucette, le rosé pamplemousse, mandarine, fraise, cassis ou cerise sont appréciés des jeunes, car leur teneur importante en sucre masque le goût de l’alcool. Les premix sont les boissons les plus prisées des jeunes après la bière et les spiritueux.

M. René-Paul Savary. Et après la bière !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends certains contester ce fait, mais j’aimerais qu’ils démontrent ce qu’ils avancent.

M. Gilbert Bouchet. Vous aussi !

Mme Nathalie Delattre. Nous vous avons donné les chiffres !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Par ailleurs, les mélanges à base de vin sont réalisés à plus de 80 % à partir de vins d’importation. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Laurent. Pas du tout !

M. Gilbert Bouchet. C’est faux !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Chers collègues, vous affirmez que c’est faux. Mais il faut le démontrer !

M. Gilbert Bouchet. Venez donc dans les vignobles !

M. Jean-François Husson. Que l’on nous apporte donc des premix… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il n’y a qu’à voir les réactions des Italiens ou des Espagnols, par exemple, pour comprendre quelle est l’origine de ces vins. Au reste, les grandes marques de premix à base de vins le reconnaissent elles-mêmes.

Enfin, toutes les appellations d’origine protégée et indications géographiques protégées sont hors du champ d’application de la mesure. Voilà, mes chers collègues, qui est de nature à vous rassurer.

Le marché des vins aromatisés reste très limité.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ce sont surtout des majors qui seront concernées par cette taxe, dont les vins aromatisés ne représentent qu’un quantum marginal du chiffre d’affaires.

L’objectif est d’arrêter le développement de nouveaux produits clairement dirigés vers les jeunes. En effet, les packagings de ces nouvelles boissons sont très colorés et imagés, rappelant les confiseries et les fruits pour s’acheter une innocence.

Or ces produits n’ont rien d’innocent et introduisent chez les jeunes une acclimatation à l’alcool que nous devons combattre,…

M. Gilbert Bouchet. Mais puisque l’on vous dit que ce ne sont pas les jeunes qui consomment ces boissons !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … que l’on soit agriculteur-viticulteur ou autre. C’est un enjeu de santé publique.

Mme Patricia Schillinger. Tout à fait. Assez de clientélisme !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Chers collègues, permettez-moi tout de même de rapporter l’avis de la commission !

La commission est donc défavorable à tous ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous avions annoncé cette mesure lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année dernière. La députée Audrey Dufeu Schubert avait entrepris une réflexion sur les premix, avec le soutien du Gouvernement, soutien renouvelé cette année.

En 2010, je le rappelle, sont arrivés sur le marché ces vins dédiés aux adolescents et aux jeunes. Ce sont des boissons titrant en général à 7 ou 8 degrés et dont le sucre masque le goût de l’alcool.

Plusieurs orateurs ont entendu défendre la filière économique. À cet égard, je rejoins M. Jomier : nous devons concilier cette filière, dont nous sommes fiers sur les territoires, et les impératifs de santé publique, puisque nous savons que certains publics sont particulièrement vulnérables. Certains alcooliers ciblent les jeunes, qu’ils cherchent à faire entrer dans la consommation de plus en plus tôt. C’est parce que ces boissons sont une porte d’entrée que nous les ciblons spécifiquement.

Au reste, s’agissant des premix, on ne peut pas parler d’une filière économique. En effet, il s’agit d’un segment excessivement limité, voire marginal, de la production viticole française. Comme il a été dit, quelque 80 % des premix sont réalisés avec des vins étrangers.

En ce qui concerne l’exonération des boissons aromatisées à base de vins, celle-ci ne repose en réalité sur aucune justification en termes de santé publique. L’objectif est de taxer les boissons alcoolisées mélangées avec du sucre ou des boissons sucrées.

Par ailleurs, la taxation prévue est cohérente et adaptée, de manière à répondre à l’objectif de santé publique sans remettre en cause l’équilibre du secteur. Contrairement à ce qui a été avancé, elle ne présente pas de risque eu égard à nos engagements et touche également tous les produits, quel que soit leur lieu de production.

En outre, comme il a déjà été expliqué, la mesure ne remet pas en cause l’exonération dont bénéficient les vins aromatisés porteurs d’une indication géographique protégée (IGP), d’une appellation d’origine protégée (AOP) ou d’une appellation d’origine contrôlée (AOC). Monsieur Laurent, madame Delattre, les vins de liqueur que vous avez cités ne sont donc pas concernés.

Enfin, il est tout à fait exact que la mesure n’a pas d’intérêt en termes de recettes. L’objectif est non pas de dégager des recettes, mais, via une taxe purement comportementale, d’amener les jeunes à moins acheter ces produits, du fait de la hausse de prix. Et contrairement à ce qui a été affirmé, il ne s’agit pas d’une taxe nouvelle, mais de l’élargissement d’une taxe existante à tous les alcools.

Pour ces raisons claires, qui sont uniquement de santé publique, pour protéger notre jeunesse, je suis défavorable à l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Le vin fait partie de la gastronomie et de la culture françaises. Les premix, je n’en suis pas convaincu…

Par ailleurs, en tant que maire ou dans la vie, je n’ai pas rencontré de détresse beaucoup plus grande que celle des familles dont l’un des membres est touché par l’alcoolisme, surtout quand il est jeune.

À Lille, où les étudiants sont nombreux, une rue est surnommée « la rue de la soif »… (« À Rennes aussi ! » sur les travées du groupe Les Républicains.) Eh bien, je puis vous dire que l’on y voit de la tristesse, et même de la détresse.

Oui, les premix contribuent à accroître l’alcoolisation des plus jeunes. Tous les avis sont recevables, mais, à titre personnel, je ne voterai pas ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.

Mme Catherine Conconne. J’ai entendu des arguments magnifiques contre la taxation envisagée. J’espère que le devoir de cohérence obligera nos collègues à voter les amendements que je défendrai à l’article suivant…

Oui, mes chers collègues, j’espère que vous serez cohérents pour refuser la destruction d’une filière économique, pour affirmer que, autant le vin fait partie de la gastronomie et de la culture franco-françaises, autant le rhum fait partie de la culture, mais aussi de l’économie et du patrimoine, de la Martinique et de la Guadeloupe.

M. Gilbert Bouchet. Bien sûr !

Mme Catherine Conconne. Or qu’a-t-on fait l’année dernière ? Un massacre en règle !

Sous prétexte que nous serions les plus grands buveurs d’alcool au monde, alors que 18 % seulement de la production de rhum est consommée en Martinique même – le reste est emporté par des touristes dans leur valise ou exporté dans plus de 120 pays de par le monde –, on a fait souffrir une production présentant néanmoins les plus belles conditions de développement que l’on peut attendre d’une production endogène.

Oui, il s’agit d’un véritable massacre fiscal : 168 euros par hectolitre en 2020, quelque 246 euros en 2021 et jusqu’à 557 euros en 2025 !

Je n’en dirai pas davantage, pour ne pas déflorer mon sujet.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. C’est déjà fait…

Mme Catherine Conconne. Vraiment, je compte sur vous, mes chers collègues, pour soutenir,…

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Sûrement pas !

Mme Catherine Conconne. … par cohérence avec les beaux arguments que vous venez de développer au sujet des premix, faits à partir de vins de je ne sais où – ce n’est pas la question –, les amendements que je défendrai contre la taxation inique qui a causé un tort grave à la filière du rhum martiniquais et brouillé totalement les professionnels avec les élus et le Gouvernement.

À tout à l’heure ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je voudrais dire à mes collègues qui ont exprimé leur attachement au terroir et au vin de ne pas se fourvoyer dans ce mauvais combat.

Si vous voulez que l’on parle de terroir, parlons d’un Côte-Rôtie ou d’un Bergerac rouge ou blanc. (Marques dintérêt.) Si vous aimez ce qui est sucré, parlons d’un Tokay vendanges tardives, ou, si comme moi vous êtes auvergnat, parlons de ce qu’un Saint-Pourçain dit de l’âpreté de la terre d’Auvergne.

Toutefois, ne me parlez pas de ces quatre produits les plus populaires : le vin rouge aromatisé « saveur sangria » – ce n’est même pas de la sangria ! – à 3,45 euros la bouteille, le vin rosé aromatisé saveur fraise-ananas, le vin rosé aromatisé saveur pamplemousse et – je m’arrêterai au quatrième –, le vin rosé aromatisé « saveur sex on the beach ». (Sourires.)

Mes chers collègues, croyez-vous que ces produits visent des personnes âgées vivant en milieu rural ? Croyez-vous que la cible marketing du vin aromatisé « saveur sex on the beach » soit autre que les jeunes et les adolescents ? (Rires.)

Vous riez, mes chers collègues, mais la réalité, c’est que cette stratégie marketing touche les plus vulnérables que j’évoquais tout à l’heure et déshonore ce noble produit qu’est le bon vin. Ce n’est pas une éducation au bon goût, c’est un avilissement du palais que de faire boire ces produits à des jeunes et de les habituer à l’alcool avec ce type de boissons.

La présente taxe tente de mettre fin à cette dérive, comme celle qui, il y a des années, a mis fin aux premix à base d’alcool fort et a permis d’arrêter leur consommation délétère pour la jeunesse ; nous étions alors dans notre rôle d’adultes responsables.

De grâce, travaillons à régler les problèmes, notamment économiques, que rencontre la filière viticole. Cette filière demande l’organisation d’états généraux ou d’assises pour régler les multiples problèmes qu’elle connaît. Mais ne mélangeons pas les combats.

Ne compromettons pas la santé publique et la jeunesse de notre pays avec ces mauvais produits au nom de l’avenir économique de cette filière. (Applaudissements sur des travées des groupes SOCR, CRCE, LaREM, RDSE et Les Républicains. – M. le rapporteur général applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, au lieu de proposer des taxes, j’aurais souhaité que vous centriez vos propositions sur la prévention et sur son financement.

Madame la ministre, je vous ai adressé il y a à peu près un an un courrier pour attirer votre attention sur une émission sur la prévention diffusée en Guadeloupe. Je vous demandais d’étendre ces actions de prévention à toutes les chaînes premières, sur le modèle de ces émissions, dans lesquelles interviennent des acteurs de santé. À ce jour, je n’ai reçu aucune réponse.

Je souhaite vivement que l’on parle de la prévention, afin de financer à la fois les projets de prévention et les associations qui contribuent à cette dernière.

Vous proposez des taxes, toujours des taxes ! Mais ce ne sont pas les taxes qui vont résoudre le problème. Les produits sont proposés sur les marchés, et partout sur le territoire des panneaux de quatre mètres sur trois en font la publicité ; d’ailleurs, ce ne sont pas forcément des produits de chez nous.

Il serait sans doute plus pertinent de réorienter nos travaux pour intensifier et financer les actions de prévention.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, pour explication de vote.

M. Daniel Laurent. Des avis différents sont exprimés ce soir, et c’est très bien.

Madame la ministre, j’ai bien entendu vos propos relatifs aux premix à base de vin. Les professionnels que j’ai rencontrés m’ont indiqué qu’au moins 50 % de ces vins sont français – j’en ai encore eu la confirmation cette après-midi.

Ces produits contribuent eux aussi à la viticulture française, notamment dans les petites régions viticoles qui n’ont pas d’écoulement assuré. Il n’y a pas que les grands crus en France ! Contrairement à ce que l’on peut imaginer, de nombreuses régions viticoles rencontrent des difficultés.

Madame la ministre, ces premix représentent environ 500 000 hectolitres de vin par an. Vous n’êtes pas sans savoir que le solde de la balance commerciale française des vins et spiritueux affiche pour 2018 un excédent de 13 milliards d’euros. C’est le deuxième solde excédentaire de la balance commerciale.

Cessons de taper sur les viticulteurs et de taxer la viticulture. À la taxe USA, au mois de janvier sans alcool – vous ne m’avez d’ailleurs pas répondu sur ce point, madame la ministre – et aux zones de non-traitement (ZNT) s’ajoutent toutes ces contraintes que nous sommes en train d’imposer à la viticulture. Nous allons adresser un mauvais signal supplémentaire aux viticulteurs.

Tout à l’heure, M. Gremillet indiquait que, chaque jour, des viticulteurs se suicident. À force d’accumuler toutes ces bêtises, je crois que l’on va trouver la cause de ces suicides !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Il est sans doute regrettable d’opposer des considérations économiques comme celles qui viennent d’être développées à des arguments de santé publique.

Je ne reprendrai pas les arguments lyriques de mon collègue et confrère Bernard Jomier concernant les grands crus, car, cela vient d’être dit, il n’y a pas que les grands crus dans la production viticole.

Le problème est bien de dissuader les jeunes de s’alcooliser. Or les premix et la publicité dont ils font l’objet – ne nous cachons pas derrière notre petit doigt –, visent bien à inciter les jeunes à boire. C’est de l’alcool, c’est du sucre, et outre une incitation à l’alcoolisation, ils constituent une incitation à l’obésité.

Nous avons certes en France une culture du vin, et c’est très bien ainsi, mais, malheureusement, nous avons aussi une sous-culture de l’alcoolisme. Les complications liées à la consommation d’alcool sont nombreuses, qu’elles soient hépatiques, neurologiques, etc. Et je n’évoquerai pas, madame Conconne, le syndrome d’alcoolisation fœtale, que l’on connaît bien aux Antilles.

Soyez assurée que je serai pour ma part cohérent et que je voterai également contre votre amendement.

Mme Catherine Conconne. Vous faites comme vous voulez !

M. Michel Amiel. Mais certainement !

La prévention a été évoquée, mais cette taxe est une mesure de prévention. Il ne faut pas confondre prévention et éducation à la santé.

Taxer des alcools comme les premix est une façon de dissuader les jeunes de les consommer par le biais économique. L’éducation à la santé relève pour sa part de l’éducation tout court : prévention, dépistage et éducation à la santé forment le triptyque de la médecine préventive.

Telle est donc ma position : je ne puis voter en faveur des premix. Nous avons de plus en plus de jeunes qui s’alcoolisent et de plus en plus de jeunes obèses, et ça, c’est un vrai fléau de santé publique. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. J’ai écouté tous les orateurs, et je dois dire que les arguments de santé publique ne me laissent pas indifférent.

Tout le monde a assisté aux ravages du jeudi, du vendredi et du samedi soir dans ces grandes villes. Or ces premix constituent une porte d’entrée vers une alcoolisation massive, rapide et très forte. Nous devons en être conscients, au moment où nous décidons de l’éventuelle suppression de cette taxe sur les premix, et c’est pourquoi je suis favorable à cette taxe.

Ces boissons excessivement sucrées brouillent les frontières habituelles et ont d’importants effets en termes d’obésité. Le corps n’est pas disposé à recevoir aussi rapidement des quantités si massives de sucre. Cela cause des dégâts en dehors de l’alcoolisation, notamment en termes de diabète.

Par ailleurs, comme l’a dit justement notre collègue, ces produits déshonorent le vin. Nous avons certes une culture du vin, et pas seulement des grands crus, mais, si nous laissons prospérer cette niche, qui touche essentiellement les jeunes, elle fera beaucoup de dégâts. La responsabilité doit prévaloir sur la passion.

Vous avez évoqué un massacre de la culture, madame Conconne. La culture n’a rien à voir ici ; ce sont les ravages de l’alcool qui sont en cause ! Or les données sanitaires de la Martinique devraient nous inciter à y réfléchir à deux fois.

Mme Catherine Conconne. N’importe quoi ! C’est n’importe quoi ! Et le champagne ? C’est avec le champagne que nous avons des problèmes, pas avec l’alcool !

Mme la présidente. La parole est à Mme Vivette Lopez, pour explication de vote.

Mme Vivette Lopez. Je me sens tout à fait à l’aise pour évoquer cette question, car je ne bois absolument pas de vin – je n’ai aucun mérite, je n’aime pas cela.

Connaissez-vous des jeunes autour de vous ? Je suis entourée de jeunes, et je puis vous assurer que c’est un alcool qu’ils ne boivent pas du tout ; ils lui préfèrent le Coca-Cola.

Ce qu’ils boivent aujourd’hui, ce sont de petits verres, pas plus grands que cela, contenant des alcools excessivement forts. C’est à celui qui en boit le plus, le plus rapidement possible, jusqu’à être « raides ». Mais ils n’aiment pas du tout le vin aromatisé, auquel, à la limite, ils préfèrent le Coca-Cola.

Par ailleurs, je voudrais dire à ma collègue Catherine Conconne que je soutiens pleinement son amendement, car j’estime que la taxation du rhum n’a pas été une bonne chose non plus – c’est peut-être le seul alcool que je bois. (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, les jeunes n’ont que faire des vins aromatisés.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. J’essaierai de répondre à quelques-unes des interventions. Je n’ai pas cosigné l’amendement de Daniel Laurent, mais j’en approuve l’objet.

La lutte contre l’alcoolisme est un sujet sensible, depuis un certain nombre d’années, dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il en est de même de la lutte contre le tabagisme.

Sait-on ce que la taxe prévue dans le présent article, inséré par l’Assemblée nationale, pourrait « rapporter » financièrement ?

Quoi qu’il en soit, je m’associerai aux cosignataires de l’amendement de Daniel Laurent.

M. Marc Laménie. De nombreux orateurs ont rappelé le savoir-faire des viticulteurs et les difficultés qu’ils rencontrent.

Dans le département que je représente, on produit plutôt de la bière, du cidre ou du jus de pomme, mais le champagne n’est pas très loin, puisque nos voisins de la Marne et de l’Aube en produisent. Il faut suivre la voie du bon sens et ne pas tout verrouiller.

C’est pourquoi je voterai les amendements de mes collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le rapporteur général, vous demandiez des chiffres, vous les avez : les vins aromatisés ou les vins d’apéritifs sont consommés à 80 % par les plus de 35 ans, et 61 % des consommateurs ont plus de 50 ans. Ces chiffres sont tirés d’études réalisées en 2019 par les cabinets Nielsen et Kantar.

De plus, la part des moins de 35 ans parmi les consommateurs, qui représentent donc 20 % de ces derniers, est constamment en baisse. Vous cherchez un prétexte, car ce ne sont pas les jeunes qui sont visés par ces boissons !

Monsieur Bonhomme, nous ne devons pas participer aux mêmes soirées – en tout cas, nous ne nous rencontrons pas ! (Sourires.)

J’ai été adjointe au maire de Bordeaux pendant dix ans. La ville a été endeuillée parce que des jeunes alcoolisés étaient tombés dans la Garonne, et je me suis rendue plusieurs fois aux urgences de l’hôpital Saint-André. Je puis vous assurer que ces jeunes s’alcoolisent avec du gin ou de la vodka mélangés à du Coca, le sucre masquant le goût de l’alcool, et qu’ils consomment également des boissons énergisantes et des pilules d’ecstasy. On est donc loin du vin ! (Mme Vivette Lopez applaudit.)

Il faut arrêter avec les fake news, et cesser de taxer sous de mauvais prétextes !

Je le répète, cette taxe ouvre la porte à la taxation de l’alcool demain. Il faut simplement s’en rendre compte. Certes, les sommes attendues ne sont pas énormes, et cette taxation ne va pas révolutionner le monde viticole, mais la taxe qu’on nous prépare le révolutionnera sûrement. En effet, l’année prochaine, nous n’aurons pas cette discussion sur les premix, mais sur le vin.

Je souhaite vous alerter, pour que nous avancions dans cette discussion.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je commençais à m’inquiéter qu’il ne me reste plus d’arguments à développer. (Sourires.)

J’ai écouté les uns et les autres, et si Michel Amiel n’était pas intervenu, j’aurais formulé quelques observations à certains orateurs.

Madame Conconne, vous vous êtes trompée d’amendement : votre amendement relatif au rhum sera examiné plus tard. Vous avez indiqué que 7 % de la production de rhum était consommée sur place.

Or, chaque année, 85 300 hectolitres d’alcool pur sont produits dans votre île – j’ai demandé que l’on vérifie –, ce qui représente 6 300 hectolitres d’alcool pur consommés par an par votre population. C’est beaucoup trop,…

Mme Catherine Conconne. C’est moins que le champagne !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. … et Michel Amiel a eu raison de vous rappeler le syndrome d’alcoolisation fœtale.

Je rejoins pleinement les propos de M. Jomier sur certains sujets.

Permettez-moi de revenir sur mon expérience personnelle. Ceux qui me connaissent savent que j’apprécie, après une réunion de la commission, boire un verre de vin avec vous, mes chers collègues. C’est un moment de fête, un moment délicieux en termes gustatifs. Pour autant, je ne suis pas d’accord avec ce qui a pu être dit par certains orateurs.

Je défends le vin et, étant moi-même originaire d’une région viticole – Châteauneuf-du-Pape –, j’en suis amateur, mais je ne puis comprendre que l’on défende à la fois le vin de qualité et les premix.

Comme l’a dit M. Jomier, les premix ne sont pas des vins de qualité. Ce sont des vins produits dans l’objectif d’attirer les jeunes en cachant l’alcool dans une boisson sucrée, pour les conduire progressivement vers l’addiction à l’alcool. Il n’est pas honorable de vouloir cacher quelque chose ; cela n’honore pas les régions viticoles, qui cultivent l’excellence.

Certains ont évoqué des difficultés, en particulier sur le marché international. La situation avec les États-Unis est effectivement difficile. Est-ce une raison pour alcooliser nos jeunes ? Sûrement pas.

Notre mission est non pas d’alcooliser nos jeunes, mais de leur apprendre à apprécier l’excellence et la qualité. Quant aux difficultés rencontrées par les viticulteurs et les négociants, notre travail doit consister à les aider à trouver d’autres marchés sur le territoire international et en Europe.

Je me joins donc à Mme la ministre et à M. le rapporteur général : je ne voterai pas ces amendements. Pour notre jeunesse et pour la qualité de notre production française, je vous demande également de ne pas les voter. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et LaREM, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 27 rectifié bis, 277 rectifié bis, 351, 384 rectifié ter et 391 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)