M. Vincent Segouin. Monsieur le secrétaire d’État, j’abonde dans le sens de mes collègues, et vous avez tout intérêt à soutenir cet amendement. En effet, il est sûrement plus facile de mettre en place un tel dispositif que de réduire les délais d’acheminement du courrier par La Poste. Vous économiserez même beaucoup d’énergie !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens une nouvelle fois à vous rassurer : le but, c’est bien d’avoir le maximum de procurations.

À cet égard, comme pour le premier tour, la communication sera extrêmement importante. D’ailleurs, les procurations régulièrement établies pour le 22 mars ont été prorogées : le décret en question a été examiné la semaine dernière en conseil des ministres et il est d’ores et déjà publié. En parallèle, nous travaillons évidemment avec La Poste pour que tout soit en bon ordre pour le jour J.

En adoptant une telle mesure, l’on ajouterait bel et bien une formalité de nature à compliquer l’établissement des procurations. Je maintiens donc mon avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Perrin, Raison, Milon et Brisson, Mme Estrosi Sassone, M. Bonne, Mmes L. Darcos, Micouleau et Puissat, MM. Bascher et D. Laurent, Mme Gruny, MM. Grosperrin et Mandelli, Mme Imbert, M. del Picchia, Mmes Deromedi, Lamure, Canayer et Bruguière, M. Pierre, Mme Lopez, M. Bouloux, Mme Lassarade, M. Lefèvre, Mme A.M. Bertrand, M. Piednoir, Mme M. Mercier, MM. Bouchet, Saury et B. Fournier, Mme Bories, MM. Bonhomme, Rapin et Vogel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Duplomb, Chaize et Charon, Mmes Raimond-Pavero et Berthet et MM. Sido et Darnaud, est ainsi libellé :

Seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Il est informé par voie électronique ou, lorsqu’il n’a pas accès à un moyen de communication électronique, par voie postale.

La parole est à M. Cédric Perrin.

M. Cédric Perrin. Monsieur le secrétaire d’État, avec ces dispositions, nous nous trouvons au cœur de ma proposition de loi initiale, visant à alerter les mandataires de l’existence de la procuration que leur ont confiée les mandants.

C’est une excellente chose que de communiquer sur la question – je suis le premier à le dire –, mais, vous le savez très bien, l’essentiel des procurations est établi à la dernière minute. Ou bien l’électeur constate tardivement qu’il ne pourra pas se déplacer le jour du vote ; ou bien il n’a pas pu donner procuration plus tôt ; ou bien il ne s’est intéressé à l’élection que la veille ou l’avant-veille du scrutin – quand c’est la semaine précédente, on peut s’en féliciter.

La communication ne suffira donc pas : voilà pourquoi il importe d’informer le mandataire de l’existence de la procuration.

En outre, comme Mme Gatel l’a fort justement rappelé, il faut pouvoir établir des procurations le dimanche. En vertu des textes en vigueur, on peut donner procuration jusqu’au dernier moment : si le bureau de vote ferme à dix-huit heures, on peut encore signer une procuration à dix-sept heures trente, pour peu qu’elle soit acheminée au bureau dans les temps et que votre mandataire puisse voter.

Refuser, comme vous le faites, d’informer la mairie par un moyen électronique instantané, c’est priver de leur droit celles et ceux qui, sans être sur le territoire communal, pourraient légalement donner procuration le dernier jour.

Dans ma commune, le bureau de poste est actuellement ouvert deux après-midi par semaine, et il n’est pas prévu d’étendre ses horaires d’ouverture avant un bon moment… Si un service a connu des défaillances au cours de cette crise, c’est bien La Poste. D’ici le 28 juin, la situation normale ne sera probablement pas rétablie.

Enfin, combien de votes ont été perdus parce que le mandant n’avait pas averti le mandataire ou parce que ce dernier avait été désigné par plusieurs mandants ?

L’automaticité de l’information du mandataire a été annulée par décret en 2006. Mais, à mon sens, cette décision n’est pas propice à l’exercice de la démocratie. Il est important de pouvoir informer le mandataire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. Monsieur Perrin, vous ne précisez pas sur qui reposerait la charge d’informer le mandataire. Actuellement, cette obligation incombe au mandant ; et, si cette obligation a été supprimée en 2006, c’est pour des raisons extrêmement précises.

Par ailleurs, en tout état de cause, ces modalités relèvent non de la loi, mais du domaine réglementaire.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Mes chers collègues, nous avons voté le précédent amendement et nous allons également voter celui-ci. En effet, ces mesures ne risquent en aucun cas d’interférer dans le choix des électrices et des électeurs ; elles ne mettent pas en cause la sincérité du scrutin ; elles ne font peser aucune menace de rupture d’égalité devant le vote. Il s’agit de dispositions strictement techniques, facilitant l’établissement des procurations.

Monsieur le secrétaire d’État, vous demandez qui va être chargé d’informer le mandataire. Nous pouvons tous émettre des observations quant à l’organisation du service postal dans nos territoires ; mais l’État territorial, lui aussi, laisse à désirer…

À cet égard, nous venons d’obtenir un élément de réponse. On nous dit et on nous répète qu’il faut lutter contre l’abstention : après le confinement et la crise du Covid, la mobilisation de la République serait plus que jamais nécessaire.

Par le biais d’un amendement, qui ne vient pas de notre groupe politique, le Sénat vous propose une solution fondée sur la technologie numérique. On nous a vendu le digital à tout bout de champ, bien avant le Covid, en vantant le modèle des start-ups et en en nous reprochant, au passage, de ne pas être modernes. Ce dispositif fait le consensus ; il permettrait aux communes d’être informées à l’instant T ; et vous affirmez qu’il pose problème, au motif que l’on ignore qui assumera la charge…

Nous n’approuverons pas toutes les dispositions de cette proposition de loi, mais nous voterons cet amendement : c’est une question de cohérence !

M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour explication de vote.

M. Cédric Perrin. Monsieur le secrétaire d’État, il faut vivre avec son temps ! On ne peut pas, d’un côté, nous obliger à communiquer au maximum par voie électronique et, de l’autre, nous opposer que cette solution est trop compliquée, alors même qu’il s’agit d’une communication instantanée.

J’imagine que tout le monde ici a déjà établi une procuration au moins une fois dans sa vie. Il suffit d’ajouter, en bas du formulaire, l’adresse électronique du mandataire : où sera la surcharge de travail pour l’officier de police judiciaire ?

En quoi la procédure s’en trouvera-t-elle compliquée ? Un officier de police judiciaire est parfaitement capable d’envoyer un courriel au mandataire pour le prévenir qu’une procuration lui a été donnée. La procédure administrative s’en trouvera étoffée, mais dans des proportions limitées. Je suis donc tout à fait d’accord avec M. Savoldelli.

L’organisation des procurations a été imaginée à l’époque des fax, voire des télégrammes… Mais, aujourd’hui, nous disposons d’un moyen de communication beaucoup plus efficace : le courriel ; et, loin de compliquer la procédure, ce dernier va faciliter l’organisation !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi tendant à sécuriser l'établissement des procurations électorales et l'organisation du second tour des élections municipales de juin 2020
Article 1er ter (nouveau)

Article 1er bis (nouveau)

I. – Chaque mandataire peut disposer de deux procurations, y compris lorsqu’elles sont établies en France.

Si cette limite n’est pas respectée, les procurations qui ont été dressées les premières sont les seules valables. La ou les autres procurations sont nulles de plein droit.

II. – Le mandataire doit être inscrit dans la même commune que le mandant, sauf lorsqu’il dispose de la procuration d’un ascendant, d’un descendant, d’un frère ou d’une sœur.

III. – À leur demande, les électeurs suivants disposent du droit à ce que les autorités compétentes se déplacent pour établir ou retirer leur procuration :

1° Personnes souffrant d’une vulnérabilité physique, selon une liste fixée par le Haut Conseil de la santé publique et y compris lorsqu’elles sont accueillies dans des hébergements collectifs ;

2° Personnes infectées par le covid-19 ou récemment exposées à un risque d’infection, y compris lorsqu’elles sont mises en quarantaine ou placées en isolement.

M. le président. L’amendement n° 1 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 14 rectifié bis, présenté par Mmes Costes et N. Delattre, MM. Requier et Artano, Mme M. Carrère et MM. Castelli, Collin, Corbisez, Gabouty, Gold, Jeansannetas, Roux et Labbé, est ainsi libellé :

Alinéa 1

1° Remplacer le mot :

deux

par le mot :

trois

2° Remplacer les mots :

y compris lorsqu’elles sont

par les mots :

dont deux

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. La procuration établie pour une personne résidant à l’étranger est de nature tout à fait exceptionnelle. En conséquence, nous proposons qu’elle soit comptabilisée en plus de deux procurations accordées en France. Le nombre maximal de procurations serait, partant, fixé à trois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Monsieur Gabouty, le texte de la commission constitue déjà une avancée non négligeable pour les électeurs.

En outre, la plupart des Français établis hors de France sont aujourd’hui inscrits sur la liste électorale consulaire et, depuis 2016, ils ne peuvent plus être inscrits de manière concomitante sur les listes communales ; le problème ne se pose donc que dans un nombre très restreint de cas.

Pour ces raisons, je vous propose de retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. Défavorable.

M. le président. Monsieur Gabouty, l’amendement n° 14 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Marc Gabouty. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 14 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 15 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Gabouty, Requier, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin, Corbisez, Gold, Jeansannetas et Roux et Mme Jouve, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Cet amendement, dont Nathalie Delattre est la première signataire et que j’ai cosigné, vise à supprimer l’alinéa 3 de l’article 1er bis.

Comme il est impossible pour les services municipaux de vérifier l’établissement de procurations hors de leur commune, le problème se pose du contrôle de nombreuses procurations : faute d’un système centralisé, des fraudes sont à craindre, certaines personnes pouvant détenir trois ou quatre procurations, sans possibilité de vérification.

M. le président. L’amendement n° 12, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – Le mandataire peut ne pas être inscrit dans la même commune que le mandant.

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement et le suivant visent, de façon différente, à étendre le vivier des mandataires possibles, en levant intégralement la restriction actuelle obligeant le mandant et le mandataire à être inscrits sur les listes électorales de la même commune.

À la vérité, cette disposition a déjà été adoptée, dans la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, mais on s’est donné du temps pour la mettre en place, compte tenu de la nécessité technique de modifier le répertoire électoral unique. Nous proposons aujourd’hui de hâter son application.

M. le président. L’amendement n° 13, présenté par M. Kerrouche et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

procuration

insérer les mots :

de son conjoint, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, de son concubin,

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Il s’agit ici d’élargir le vivier des mandataires, au-delà du cercle familial, au conjoint, au partenaire lié par un Pacs ou au concubin.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. La commission est défavorable à l’amendement n° 15 rectifié : il ne nous paraît pas exorbitant de permettre à un très proche parent n’habitant pas la commune de recevoir la procuration d’un parent âgé ou malade, ni si difficile de vérifier que le mandataire ne détient pas plus de deux procurations, dans des communes où il a des parents vulnérables ou dans la sienne.

M. Kerrouche, au contraire, voudrait que l’on ne limite pas aux membres de la famille proche le vivier des personnes non électrices de la commune susceptibles de recevoir procuration.

À la vérité, mon cher collègue, c’est ce qu’il faudrait faire. Mais M. le secrétaire d’État nous expliquera certainement que l’administration n’est pas prête, parce que le fichier national doit être adapté. C’est la raison pour laquelle nous avons voulu limiter à une dérogation pour les membres de la famille proche la possibilité de détenir une procuration pour une personne non électrice de la commune.

Monsieur Kerrouche, il sera bon de faire comme vous le proposez dès l’année prochaine, mais, pour ce qui est de cette année, nous nous sommes heurtés aux mêmes objections que vous et avons eu le temps de constater que cet obstacle matériel était bien réel. C’est uniquement en raison de cette difficulté pratique que nous n’avons pas donné un avis favorable à votre premier amendement.

En revanche, la commission, après en avoir longuement délibéré ce matin, a accepté de modifier le périmètre de la famille proche. Il arrive en effet que des conjoints, des partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou des concubins ne votent pas dans la même commune. Or il faut admettre que, avec les ascendants, les descendants et les frères et sœurs, la personne qui vit avec le mandant doit se voir reconnaître la possibilité de voter par procuration, même si elle n’est pas électrice dans la même commune.

Nous avons donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 12, mais un avis favorable sur l’amendement n° 13.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. Comme il a été rappelé, une disposition législative prévoit cette faculté à terme, mais le décret nécessaire n’est pas paru. Nous nous sommes fixé pour échéance le 1er janvier 2022, pour des raisons uniquement techniques.

De fait, le répertoire électoral unique, actuellement établi par commune, ne permet pas une vérification simple et directe de la réalité d’une procuration extérieure à la commune. Dans ces conditions, des fraudes peuvent être commises : une personne ayant des parents dans le périmètre prévu par la proposition de loi pourrait détenir six ou sept procurations, sans que nous soyons en mesure de procéder à un contrôle – pis, celui-ci reposerait sur les maires….

Même si le dispositif proposé réduit le champ des procurations possibles pour faciliter le travail des maires, ce travail restera compliqué. En revanche, à partir du 1er janvier 2022, ce sera possible.

Pour ces raisons, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 15 rectifié et défavorable aux amendements nos 12 et 13 de M. Kerrouche.

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Compte tenu des explications de M. le président de la commission des lois, nous retirons l’amendement n° 12, au profit de l’amendement n° 13.

M. le président. L’amendement n° 12 est retiré.

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur Bas, pourriez-vous m’expliquer pourquoi nous examinons ces trois amendements ensemble ? Ce doit être mon manque de savoir ou un moment d’égarement de ma part, mais je me suis posé la question… Vous allez sans doute me remettre sur les rails !

Sur le fond, on demanderait aux communes de demander aux services municipaux d’autres communes, et cela dans la plus extrême urgence, de vérifier des procurations ? Ce n’est pas tenable ! Nous voterons donc l’amendement n° 15 rectifié.

Pour le reste, ne pourrions-nous pas, pour ces élections municipales, en rester au niveau local ? Ou alors, il faut jouer cartes sur table !

Certains – nous le verrons dans la suite de notre discussion – veulent une évolution de la relation de l’électrice et de l’électeur au vote : ils promeuvent le vote par correspondance, voire le vote électronique. Il faut l’assumer, chers collègues : nous en débattrons, nous nous écouterons, nous argumenterons, puis nous déciderons.

Toutefois, dans les conditions économiques, sociales et démocratiques actuelles, croyez-vous franchement que nous allons être crédibles devant les Françaises et les Français, du point de vue de leur participation à un scrutin, en élargissant le vivier des mandataires ? En parlant du conjoint pacsé, du mari et même de l’oncle et du cousin ? Franchement – je le dis avec mes mots, en m’excusant par avance s’ils sont maladroits –, ce n’est pas très sérieux pour la République et pour l’esprit de citoyenneté.

Croyez-en mon expérience : toutes les femmes et tous les hommes que j’ai côtoyés, quelles que soient leur sensibilité et leur sociologie, quand ils veulent aller voter, ils n’ont pas besoin d’appeler le cousin, la tante, la mère, le pacsé ou l’amant ! (Sourires.) Ils trouvent au niveau local, par la vie associative, leur réseau résidentiel ou leur parcours professionnel, une personne à qui donner procuration : ils ont des amis au travail, dans le quartier, dans la résidence pavillonnaire, dans la vie associative. Croyez-moi, ils savent exercer leur droit de citoyenneté !

Attention à ne pas trop les infantiliser ; ça pourrait être mal compris.

M. le président. Mon cher collègue, pour répondre à votre question, ces trois amendements ont été réunis dans une discussion commune parce que l’adoption de l’un priverait d’objet les deux autres.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Gabouty. L’amendement n° 15 rectifié n’est pas un amendement d’opinion, traduisant une position sur le fond. Nous ne sommes pas du tout opposés au dispositif de la commission, non plus d’ailleurs qu’à celui que propose M. Kerrouche.

Simplement, sans stigmatiser quiconque – familles nombreuses, communautés… –, nous constatons que, aujourd’hui, nous n’avons pas de moyens de contrôle et que tout cela va encore retomber sur les mairies. Attendons d’avoir les moyens nécessaires pour mettre en place ce dispositif !

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Mme Françoise Gatel. Les observations et arguments de chacun sont tout à fait recevables, notamment celui qui consiste à dire que l’on charge la barque des communes. Il est vrai qu’on l’a déjà beaucoup fait pendant la crise, sans que cela pose question…

En même temps, nous cherchons à faciliter le vote et à éviter une abstention trop forte. De ce point de vue, monsieur Savoldelli, je ne partage pas du tout votre analyse : on n’infantilise personne en permettant, par exemple, à une dame de 85 ans ou 90 ans résidant dans un Ehpad…

M. Pascal Savoldelli. Non, je vous en prie, n’employez pas ce type d’argument compassionnel !

Mme Françoise Gatel. Monsieur Savoldelli, j’aimerais pouvoir poursuivre mon intervention !

M. le président. Cher collègue, Mme Gatel seule a la parole.

Mme Françoise Gatel. Il ne s’agit pas de compassion, et je ne suis pas une démagogue. J’évoque une situation que j’ai connue avec mes propres parents : ils ne voulaient pas donner procuration à une personne de leur entourage à l’Ehpad, pour ne pas que l’on connaisse leur vote, et préféraient mandater leur fille ou leur petit-fils. Le respect de chacun impose d’entendre de telles demandes.

M. Pascal Savoldelli. Ce n’est pas ainsi que l’on doit faire la loi !

Mme Françoise Gatel. Que l’on puisse, dans des circonstances exceptionnelles, mandater un membre de sa famille, qui va garder le secret, j’y suis assez favorable : certaines personnes n’ont simplement pas envie que leur voisin connaisse leur vote, parce qu’elles ne veulent pas entrer avec lui dans un débat politique.

Je me réjouis donc que la commission ait accepté la proposition de M. Kerrouche d’élargir le cercle des mandataires, notamment aux concubins.

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Relativisons les choses : pour tenir des bureaux de vote, nous savons tous que, dans les faits, la part des procurations rapportées au nombre total de votants est très faible. Honnêtement, je ne crois pas que cela pose un problème particulier d’étendre le vivier des mandataires à la personne avec laquelle on vit ou à un membre de la famille.

Je ne pense pas non plus que cela infantilise quiconque : il s’agit simplement de faciliter le vote, les contrôles me semblant assez praticables au vu du nombre de procurations par rapport au total des votants ; ce dispositif terre à terre apportera ponctuellement une aide à nos concitoyens. Pour moi, c’est aussi simple que cela !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 13.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Gabouty et Requier et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

…° Personnes âgées de 70 ans révolus à la date du scrutin sans que celles-ci aient à justifier d’un autre motif que leur âge.

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Avec cet amendement et les deux suivants, nous proposons trois variantes du même dispositif.

Les motifs permettant de donner procuration ne sont pas très clairs pour nos concitoyens : faut-il être vulnérable, faut-il qu’il y ait un risque d’infection ? De ce fait, des électeurs ignorent qu’ils peuvent demander à voter par procuration ou hésitent à le faire. Pour être efficace, il faut énoncer clairement les choses.

Alors que les décès liés au Covid-19 concernent à 90 % les plus de 65 ans – un constat très fréquemment repris dans les médias –, les électeurs de cette tranche d’âge pourraient être dissuadés à se déplacer pour le scrutin du 28 juin prochain. Le Gouvernement a lui-même édicté des recommandations à leur égard, leur conseillant de ne pas multiplier leurs déplacements.

Pour faciliter le vote de ces électeurs, qui ont généralement un comportement tout à fait civique et qui participent fortement aux scrutins nationaux comme locaux, il convient de leur accorder le droit de donner procuration sans avoir à invoquer d’autre motif que leur âge. Ils bénéficieraient alors du déplacement des autorités compétentes pour établir la procuration.

Ma proposition est ouverte, puisque je propose de fixer le seuil d’âge à 70 ans, 75 ans ou 80 ans, selon les cas. J’espère que, tout de même, le seuil de 80 ans sera accepté, car nos concitoyens de cet âge méritent qu’on se soucie de leur liberté de vote.

M. le président. L’amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Gabouty et Requier et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

…° Personnes âgées de 75 ans révolus à la date du scrutin sans que celles-ci aient à justifier d’un autre motif que leur âge.

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Gabouty et Requier et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

…° Personnes âgées de 80 ans révolus à la date du scrutin sans que celles-ci aient à justifier d’un autre motif que leur âge.

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Il est également défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. La commission exprime sa gratitude à M. Gabouty : pour proposer les âges à partir desquels on pourrait demander à bénéficier du nouveau régime de procuration, il est allé de cinq ans en cinq ans.

Nous l’avons échappé belle, car, s’il avait choisi un palier d’un an, nous aurions eu quinze amendements ! Je vous remercie, mon cher collègue, d’avoir abrégé nos débats en vous limitant à ces trois âges, qui pourraient servir de paliers…

En dépit de cette bonne volonté, dont nous vous sommes redevables, nous préférons que le Haut Conseil de la santé publique détermine les critères de vulnérabilité. Jusqu’à présent, il a considéré que, au-delà de 65 ans – un âge qui concerne plusieurs d’entre nous… –, la vulnérabilité est plus forte, mais sans fixer de palier au-delà duquel elle serait beaucoup plus forte, voire extrêmement plus forte.

Par ailleurs, certaines personnes, sans avoir atteint les âges dont nous parlons, méritent aussi d’être prises en considération, parce qu’elles présentent d’autres facteurs de vulnérabilité.

Aussi, monsieur Gabouty, la commission m’a-t-elle donné mandat de vous demander le retrait de ces amendements, au bénéfice d’une approche plus qualitative que fondée sur un seuil d’âge ; si vous les mainteniez, l’avis de la commission serait défavorable, mais nous préférions vous solliciter tout d’abord pour un retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat. L’avis du Gouvernement sera le même que celui de la commission, mais pour une raison quelque peu différente.

Nous allons faciliter – j’y insiste – la possibilité d’établir des procurations, soit par circulaire, soit dans des textes réglementaires, en multipliant les lieux où les officiers de police judiciaire établiront ces procurations et le nombre de délégués qui se déplaceront pour les recueillir. En outre, nous supprimerons, dans un texte réglementaire, les motifs d’établissement des procurations, ce qui est en partie l’objet des amendements en discussion.

S’agissant du déplacement à domicile, un tel dispositif a été mis en place pour le premier tour, par une circulaire interprétant l’article R. 72 du code électoral ; nous avons prévu de l’introduire dans un décret à paraître.

Dès lors, l’objectif visé par ces trois amendements est atteint. C’est pourquoi j’en sollicite le retrait ; s’ils étaient maintenus, l’avis du Gouvernement serait défavorable.