M. Hussein Bourgi. Les associations vous écoutent !

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat. Quand notre mesure ne fait aucun perdant, la vôtre prend l’AAH des personnes qui travaillent. Nous portons une mesure de simplification, une mesure de justice sociale. (Mme Laurence Cohen proteste.)

Je souhaite que le texte qui a été voté à l’Assemblée nationale aboutisse. Parce que je crois à cette mesure redistributive qui est au cœur de notre ADN politique, oui, monsieur le sénateur, j’inscrirai quoi qu’il arrive cette avancée majeure dans le budget de l’État pour 2022.

Je le ferai, car le Gouvernement est fier de la politique d’émancipation (Protestations sur de nombreuses travées.) que nous portons depuis 2017 et parce que nous apporterons ainsi un soutien constant au pouvoir d’achat des personnes concernées, que je respecte profondément. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Hussein Bourgi. C’est cela…

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour la réplique.

M. Gérard Lahellec. Madame la secrétaire d’État, votre entêtement à imposer la prise en compte des revenus des conjoints dans le calcul de l’AAH pour faire des économies budgétaires est en réalité dogmatique.

Vous refusez la proposition d’individualiser l’allocation aux adultes handicapés, estimée à 750 millions d’euros, et vous défendez votre proposition d’abattement fiscal de 200 millions d’euros, ce qui n’est, certes, pas rien.

Pour trouver les 500 millions d’euros nécessaires, il suffirait, par exemple, d’imposer les dividendes des actionnaires à hauteur de 1 %. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) Toute autre proposition est bienvenue, ce n’est qu’un exemple !

M. le président. Il faut conclure !

M. Gérard Lahellec. Nous regrettons que le Gouvernement fasse ce choix et nous saurons nous en souvenir, comme les associations du secteur ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

soutien aux salariés de la filière automobile

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Bernard Buis. Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.

La filière automobile fait face depuis plusieurs années à deux révolutions, technologique et écologique, qui ont bouleversé son modèle économique.

Le Président de la République a dévoilé, il y a un an, un plan de soutien inédit à la filière automobile, durement touchée par la crise, lequel prévoyait plus de 8 milliards d’euros d’aides, d’investissements et de prêts pour soutenir et accompagner la reconversion du secteur.

C’est l’ambition du plan de relance : préparer la reprise en encourageant le développement de l’industrie de demain, tout en accompagnant celles et ceux qui font partie des secteurs sinistrés.

Vendredi dernier, l’annonce du lancement du fonds d’accompagnement et de reconversion des salariés de la filière automobile marque une nouvelle étape dans le déploiement du plan automobile.

La signature de la convention entre les acteurs de la filière permettra de conforter le troisième volet du plan de soutien à l’automobile, annoncé au mois de mai dernier.

Le ministre de l’économie l’a rappelé la semaine dernière à l’Assemblée nationale : avec le plan de relance, nous offrons une perspective aux Français, celle d’un redressement de l’économie en deux ans, qui doit nous permettre de retrouver en 2022 le niveau de développement économique de 2019, tout en accompagnant les emplois menacés vers les secteurs d’avenir.

Madame la ministre, quelle est la place du fonds d’accompagnement dans cette perspective et comment pouvons-nous faire en sorte que les forces vives du secteur automobile soient au cœur de la reprise que nous appelons tous de nos vœux ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.

Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de lemploi et de linsertion. Monsieur le sénateur Bernard Buis, permettez-moi tout d’abord de saluer votre réélection, dimanche dernier, dès le premier tour, au conseil départemental de la Drôme. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.) Je félicite également toutes celles et tous ceux qui ont été élus ou réélus dimanche dernier. (Murmures ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Comme vous l’avez indiqué, face aux mutations de la filière automobile, nous devons tous nous mobiliser pour accompagner les salariés dans ces transitions. C’est tout l’objet du fonds d’accompagnement et de reconversion des salariés de la filière automobile.

Ce fonds, cofinancé à hauteur de 20 millions d’euros par les constructeurs Renault et Stellantis et à hauteur de 30 millions d’euros par l’État, permet de renforcer l’accompagnement des salariés des entreprises de la filière affectées par des restructurations. Il s’adresse particulièrement aux salariés des entreprises de la sous-traitance automobile en situation de redressement ou de liquidation judiciaire.

Ces salariés seront accompagnés de manière renforcée par des cellules territoriales d’appui au reclassement. Concrètement, cela pourra se traduire par le financement de formations qualifiantes, par le versement d’aides à la création d’entreprise ou à la mobilité, ou encore par des primes au reclassement.

Ce dispositif est d’ores et déjà mobilisé pour les salariés de MBF dans le Jura, dont je partage l’émotion à la suite de l’annonce de la liquidation de leur entreprise.

Au-delà de ce dispositif sectoriel, nous avons mis en place des moyens substantiels pour la formation des salariés : 1 milliard d’euros à l’aide à la formation du Fonds national de l’emploi (FNE-formation), financés dans le cadre de France Relance.

Grâce au dispositif Transitions collectives, nous accompagnons également la reconversion des salariés dont les emplois sont menacés, en leur proposant des formations susceptibles de leur permettre de rebondir vers des secteurs qui recrutent au sein de leur bassin d’emploi.

Comme vous le constatez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour permettre à chaque salarié de rebondir rapidement. (M. Didier Rambaud applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour la réplique.

M. Bernard Buis. Madame la ministre, je suis heureux que les entreprises sous-traitantes ne soient pas oubliées, car celles-ci, particulièrement celles qui font l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation, s’en inquiétaient. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

élections départementales et régionales (ii)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jérôme Durain. Que reste-t-il de l’État quand il n’est plus capable d’assurer correctement le cœur même de ses missions, à savoir l’organisation des élections ? Le ministère de l’intérieur est-il bien tenu ? Telles sont les questions que beaucoup se posent depuis le scrutin de dimanche dernier.

Ma question s’adresse à M. Darmanin.

Lors de votre audition de ce matin, monsieur le ministre, vous nous avez expliqué qu’il était compliqué pour notre pays d’organiser deux élections le même jour. J’ai compris que vous faisiez référence à votre propre expérience, puisqu’en sus de vos fonctions de ministre vous étiez candidat deux fois aux élections de dimanche dernier… (Rires et applaudissements sur de nombreuses travées.)

Pendant ce temps, des élus de tous bords et de tous les territoires ont constaté que des plis non distribués avaient été jetés dans les fossés ou brûlés dans les bois. Le corps préfectoral lui-même nous a parfois fait part de sa honte au regard de l’image que l’État renvoie de lui-même.

Vous répondiez dimanche en citant les chiffres communiqués par Adrexo, selon lesquels 21 000 plis n’auraient pas été distribués. Dans ma seule région de Bourgogne-Franche-Comté, j’aurais pu vous annoncer dès dimanche qu’on dépassait ces chiffres !

Si l’on en croit le ministère de l’intérieur, la responsabilité de ces dysfonctionnements, notamment ceux qui sont imputables à la société Adrexo, revient, a, à Lionel Jospin, b, à La Poste et, c, au Parlement, qui a autorisé la tenue de ce scrutin par vote ; comme dans tous les bons questionnaires, plusieurs réponses sont possibles.

Puisque c’est la faute de tout le monde, sauf la vôtre, monsieur le ministre, il reviendra à la commission d’enquête du Sénat de définir l’ampleur des dysfonctionnements observés dimanche.

Dans cette attente, je vous poserai une question très politique : à partir de quel taux de non-distribution de la propagande électorale estimez-vous que votre propre responsabilité est engagée ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, GEST, UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, vous avez participé ce matin à la réunion de la commission des lois. Vous avez donc connaissance des échanges que nous avons eus.

Il est un fait établi que la privatisation de la distribution du courrier, notamment de la propagande électorale, a été négociée, entre 1997 et 2002, par un gouvernement que vous souteniez.

Il est un fait établi que, depuis 2005, un marché public s’impose au ministère de l’intérieur pour la distribution de la propagande électorale.

Il est un fait établi qu’il y a toujours eu des dysfonctionnements. Ces derniers n’ont certes jamais été de la hauteur de ceux que nous avons connus – c’est une évidence –, mais, à titre d’exemple, je rappellerai que, lors des dernières élections municipales, la propagande électorale n’a pas été distribuée du tout dans des communes entières, comme celle d’Annecy.

Il est un fait établi que seules deux sociétés sont aujourd’hui qualifiées par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), autorité administrative indépendante, pour répondre au marché public que le ministère de l’intérieur doit conclure en vertu de la loi et des directives européennes.

Or par définition, les deux lots, qui représentent un marché de plus de 200 millions d’euros, doivent être attribués à deux sociétés différentes. Dès lors qu’il n’est plus possible de confier la distribution de la propagande électorale à une régie, nous sommes légalement tenus de mettre en concurrence les sociétés qualifiées par l’Arcep. Celles-ci n’étant qu’au nombre de deux, elles ont logiquement toutes deux remporté le marché.

La responsabilité de la société Adrexo dans la non-distribution des plis, dont les images ont été relayées par les réseaux sociaux, et dans une moindre mesure, celle de La Poste, est évidente. Cela nous conduira sans doute à ne pas payer une partie du marché, voire à le révoquer.

J’attendrai toutefois l’élection de dimanche prochain, car je ne suis pas de ceux qui souhaitent démotiver les personnes qui, aujourd’hui, distribuent ces propagandes électorales et s’efforcent de redresser la barre, alors que celle-ci est effectivement bien mal en point.

J’ajoute enfin, monsieur le sénateur, que le taux de participation constaté dans les bureaux de vote pour lesquels la distribution de la propagande a été attribuée à La Poste ne diffère que d’un point de celui constaté dans les bureaux de vote pour lesquelles cette distribution a été attribuée à Adrexo. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) J’aurai tout loisir de le démontrer devant la commission d’enquête. (M. Martin Lévrier applaudit.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout va bien, alors !

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.

M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, votre responsabilité ne s’arrête pas à la question de la propagande officielle. Les sénateurs socialistes vous avaient alerté sur l’ampleur de l’abstention à venir.

Nous avions proposé, dans cinq textes et au travers de trente amendements, des solutions alternatives, parmi lesquelles l’étalement du vote sur plusieurs jours ou le vote par correspondance.

L’approche de ces élections a été un fiasco, et ce taux d’abstention est un record dans l’histoire de la République. Votre responsabilité est évidemment engagée sur l’ensemble de ces points ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

présence postale

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Christian Bilhac. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

De nombreux maires de l’Hérault ont récemment protesté contre la diminution des horaires d’ouverture des bureaux de poste, mais également contre la transformation de bureaux de poste en agences postales communales.

Si l’on comprend que, dans les communes les plus rurales, les agences postales assurent les services de proximité, cette évolution est plus contestable dans des communes de 3 000 ou 4 000 habitants, sans oublier les fermetures surprises de certains bureaux, ou encore l’insuffisance de la compensation financière versée par La Poste aux communes pour les agences postales communales.

En effet, selon le récent rapport d’information de nos collègues Patrick Chaize, Pierre Louault et Rémi Cardon, le déficit imputable aux quatre missions de service public confiées à La Poste s’élève, en 2020, à 2,103 milliards d’euros, dont 1,32 milliard pour le service universel postal, 296 millions pour le transport et la distribution de la presse, 227 millions pour l’aménagement du territoire et 260 millions pour l’accessibilité bancaire.

Pourtant, monsieur le ministre, La Poste n’a reçu de l’État que 503 millions en compensation, ce qui représente un déficit de 1,6 milliard d’euros. Il paraît difficile, dans ces conditions, de maintenir le service public.

Ma question est la suivante : monsieur le ministre, quand envisagez-vous de mettre fin à cette situation ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Martine Filleul applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Bilhac, à la fin du mois de mai, vous m’aviez déjà adressé un courrier dans lequel vous évoquiez les sujets de la présence postale et de la réorganisation en cours du groupe La Poste.

Comme vous le savez parfaitement, depuis une loi de 2010, La Poste est tenue de remplir un certain nombre d’obligations liées au service universel, notamment en matière d’accessibilité, puisqu’elle doit maintenir au moins 17 000 bureaux et points de contact sur le territoire, et s’assurer que 90 % de la population se trouve à moins de cinq kilomètres au plus ou à vingt minutes de trajet au plus de ces bureaux et points de contact.

Toujours en matière de service universel, elle est également soumise à l’obligation d’assurer la distribution du courrier cinq jours sur sept.

Ces obligations sont un cadre. La Poste peut s’en acquitter soit directement, soit dans le cadre d’agences postales communales issues de conventions passées avec les communes, soit, enfin, au travers de points de contact établis en association avec des commerçants.

Malgré cela, La Poste connaît des difficultés. Le nombre d’objets, colis ou courriers qu’elle traite annuellement a été divisé par deux – il est passé de 18 milliards à 9 milliards entre 2008 et 2019 – et le nombre de courriers prioritaires adressés par les ménages chaque année a été divisé par sept.

Cela se traduit par des déficits et, partant, par la nécessité de réorganiser le service postal et de voir La Poste transformer ses métiers. Celle-ci s’y emploie, au travers d’une réorganisation territoriale, de partenariats accrus, mais aussi par la multiplication d’activités et par une forme de diversification.

Pour accompagner cette réorganisation, le Gouvernement et l’État répondront présents. Le Premier ministre a eu l’occasion de le préciser en réponse aux interrogations et inquiétudes exprimées par la présidente de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.

Par ailleurs, le 28 mai, l’ancien député Jean Launay nous a remis un rapport dans lequel il propose un certain nombre de pistes, que nous instruisons.

La compensation supplémentaire doit-elle prendre une forme budgétaire ou une forme fiscale ? Faut-il opter pour un mix de ces solutions ?

Nous savons que ce problème est devant nous et que nous devons le traiter. Nous mettrons à profit le projet de loi de finances pour 2022 afin de répondre aux inquiétudes, mieux accompagner La Poste et, ainsi, garantir sa présence sur le territoire et un bon niveau de service à l’ensemble des usagers. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour la réplique.

M. Christian Bilhac. J’entends bien vos propos, monsieur le ministre. Je tiens toutefois à rappeler combien La Poste est importante dans les territoires ruraux, mais aussi dans les quartiers difficiles ou sensibles. Les Français sont très attachés à ce service public historique.

Vous vous retranchez quelque peu derrière l’Arcep, mais l’État a versé à La Poste 50 millions d’euros de moins que le montant préconisé par l’Arcep en compensation de sa mission d’aménagement du territoire. De grâce, respectez les chiffrages de l’Arcep ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Martine Filleul applaudit également.)

élections départementales et régionales (iii)

M. le président. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Pemezec. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, comment en sommes-nous arrivés là ? Nous avons atteint, dimanche, les taux de participation les plus bas de l’histoire de la République.

À titre personnel, je n’ai pas à me plaindre, puisque, chez moi, nous avons remporté un large succès, fruit de notre travail au quotidien sur le terrain.

Mais si l’on prend un peu de hauteur, il s’agit d’un vrai déni de démocratie, et vous avez, au Gouvernement, une lourde responsabilité.

La première responsabilité est celle d’une campagne d’information minimaliste sur l’existence de deux scrutins locaux. Bien sûr, la réalité, c’est que vous êtes en campagne présidentielle. M. le Président étant en pleine tournée électorale, vous avez choisi de mettre ces deux scrutins sous le boisseau. Vous êtes d’ailleurs allés jusqu’à annoncer la date de la présidentielle entre les deux tours : c’est dire à quel point cela vous obsède !

Il est vrai que vous avez tout de même découvert le charme des Hauts-de-France : vous y avez envoyé pas moins de cinq ministres. Comme par hasard, il s’agit du terrain d’un des concurrents de droite qui vous semble sans doute le plus dangereux. Cela prouve, encore une fois, que vous ne pensez qu’à la présidentielle.

La deuxième responsabilité est l’affaire – déjà évoquée – de la propagande électorale. Il y a deux ans, le Gouvernement voulait la supprimer. Cette fois, il a imaginé pire, puisqu’il a demandé aux candidats d’écrire et d’imprimer leur profession de foi au moment où ils déposaient leur candidature. Il s’agit pourtant d’un document de campagne de dernière minute par excellence.

De surcroît – cela a été dénoncé –, certains de ces documents ont été distribués un mois avant le scrutin, alors que d’autres ne sont jamais arrivés.

Vous avez tué la mobilisation électorale.

La troisième responsabilité est l’intervention de M. le Premier ministre, dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, sur la fusion des listes LR et En Marche. Si l’opération a fait « flop », elle a provoqué l’incompréhension, le désintérêt, voire le dégoût de l’électorat.

Monsieur le Premier ministre, puisque vous avez été l’apôtre du front républicain, que ne vous entend-on dénoncer les accords que la gauche vient de passer avec l’extrême-gauche pour garder ses présidences ? Pourquoi ne demandez-vous pas à vos listes En Marche de se retirer…

M. le président. Il faut conclure !

M. Philippe Pemezec. … pour faire front contre cette tendance radicale et islamo-gauchiste ? (Exclamations à gauche. – M. Sébastien Meurant applaudit.)

Ma question est double : comment justifiez-vous le passage à la trappe de ces deux scrutins ? Comment comptez-vous faire barrage à la présence d’élus d’extrême-gauche prônant la révolution et le communautarisme, et qui veulent maintenant mettre le feu à la France ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Protestations à gauche.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Pemezec, vous comprendrez aisément que je me borne à vous répondre sur ce qui relève de ma responsabilité, c’est-à-dire l’organisation du scrutin des élections départementales et régionales.

Premièrement, comme je l’ai indiqué ce matin devant la commission des lois du Sénat – nous pourrons y revenir plus longuement, je l’imagine, dans le cadre de la commission d’enquête –, pour la première fois depuis 1986, la France a organisé deux scrutins sur tout le territoire national en même temps. (Murmures sur les travées des groupes Les Républicains et SER. – M. Laurent Duplomb proteste.) En effet, les élections qu’on appelait jadis cantonales, qui ont été plusieurs fois citées, ne concernaient que la moitié du territoire.

Ainsi, depuis 1986, la France n’a jamais organisé deux scrutins en même temps sur l’ensemble du territoire. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Deuxièmement, la plupart de nos voisins européens, qui ont un système démocratique tout à fait semblable au nôtre à quelques exceptions près – tous nos voisins n’ont pas des scrutins à deux tours, tous n’observent pas un délai de cinq jours entre deux tours d’élection et une partie d’entre eux ont mis en place un certain nombre de dispositions différentes pour le vote –, ont reporté leurs élections. Ainsi, en 2021, un certain nombre de nos voisins européens, dont l’Italie – pour citer la plus grande démocratie située à nos portes –, n’ont pas organisé d’élections, notamment locales.

Troisièmement, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, nous avons eu un long débat – chacun peut en témoigner – pour savoir si nous devions tenir ces élections. Celles-ci avaient déjà été reportées par deux fois, une première fois à cause de la crise de la covid, et une deuxième fois, par décret, pour permettre une meilleure couverture vaccinale de la population.

Si la distribution de la propagande est soulevée – je le comprends, et j’aurai l’occasion de m’en expliquer largement au nom du Gouvernement –, permettez-moi de souligner que les présidents et assesseurs des bureaux de vote ont été vaccinés, que les tests ont été faits et que tous les bureaux de vote ont été ouverts, à l’exception de quelques-uns à Marseille – cela relève, vous le savez bien, de la responsabilité non pas de l’État, mais de celle de la mairie.

Je salue d’ailleurs les maires de France, qui ont su organiser ce scrutin dans des circonstances absolument exceptionnelles, y compris dans les territoires touchés par des inondations extrêmement graves, comme le sud de l’Aisne ou l’Essonne.

Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Laurence Rossignol. C’est fini !

M. Gérald Darmanin, ministre. Telles sont les réponses que je souhaitais vous apporter, monsieur le sénateur.

lutte contre les conséquences des inondations

M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Martine Filleul. Ma question s’adresse à monsieur le Premier ministre.

L’an dernier, les sinistres occasionnés par les intempéries ont coûté 1,5 milliard d’euros, un montant supérieur à la moyenne de ces quarante dernières années.

Or la situation s’aggrave : je n’en veux pour preuve que les récentes inondations causées par de violents orages dans plusieurs départements, engendrant de graves dégâts et de nombreuses victimes. Les maires des communes concernées demandent la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Ces conséquences croissantes du changement climatique mettent sous tension le régime dit CatNat et démontrent la nécessité d’assurer sa pérennité.

À notre demande, une mission d’information portant sur la gestion des risques et l’évolution de nos régimes d’indemnisation a été constituée au Sénat en 2019. Nicole Bonnefoy, rapporteure de cette mission d’information, et ses collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ont déposé une proposition de loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat, visant à mieux protéger et accompagner les victimes, à déplafonner le fonds Barnier et à renforcer le pouvoir des maires, toujours en première ligne dans ces circonstances.

Malheureusement, ce texte n’a pas été soutenu par votre gouvernement, qui n’a pas souhaité l’inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Le comble, c’est qu’un texte étrangement similaire a été déposé.

Pis encore, le projet de loi Climat est totalement silencieux sur ces questions, alors même qu’il comporte un titre censé traiter de l’adaptation des territoires au changement climatique. Pourtant, il y a urgence.

Monsieur le Premier ministre, quand reconnaîtrez-vous l’état de catastrophe naturelle pour ces territoires ? Quand prendrez-vous sérieusement ce sujet en considération, en apportant les réponses législatives et financières qui s’imposent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Madame la sénatrice Filleul, vous avez raison, de tels événements climatiques extrêmes risquent de se multiplier, se multiplient déjà, et nous devons en tirer les conséquences.

Ces conséquences sont d’abord immédiates. À ce titre, je tiens à saluer l’efficacité des secours engagés sur le terrain dans de nombreux départements, notamment du nord de la France.

Ensuite, nous devons prendre des décisions afin de nous doter de dispositifs nous permettant, à l’avenir, de nous montrer plus résilients face à ces phénomènes.

Cela suppose d’instituer des indemnisations plus pérennes. Le fonds Barnier a été augmenté de 50 % en 2021, pour atteindre 205 millions d’euros. Si cela a permis de faire face à l’urgence, nous ne réglerons pas tout de la sorte.

Le plus important, maintenant, est de prévenir en nous efforçant de réduire la vulnérabilité de nos territoires. L’une des mesures phares du projet de loi Climat et résilience – qui n’est pas suffisamment évoquée – est à ce titre la réduction de l’artificialisation des sols.

En effet, nous savons que l’artificialisation des sols est une des causes aggravantes des inondations, du fait du ruissellement qu’elle entraîne. L’eau ne pouvant par définition s’infiltrer dans un sol imperméabilisé, l’artificialisation des sols est une des premières causes des catastrophes que nous vivons aujourd’hui.

Je regrette d’ailleurs que, lors de l’examen de ce texte en commission, la territorialisation de l’objectif de division par deux d’ici à 2030 du rythme d’artificialisation ait été remise en cause par le Sénat. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Outre ce projet de loi Climat, permettez-moi de mentionner les investissements, à hauteur de 144 millions d’euros, réalisés par l’État et par Météo-France pour développer des capacités de prévision, ou encore le dispositif d’alerte Vigicrues Flash, disponible depuis le mois de mai. J’incite tout le monde à prévenir les élus locaux de cette possibilité de s’inscrire à ces alertes Vigicrues Flash, qui permettent de gagner un temps précieux – seuls 15 % des maires y sont abonnés.

Je pourrais évoquer bien d’autres sujets, mais nous aurons l’occasion de débattre de tout cela plus largement lors de l’examen du projet de loi Climat et résilience. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

situation du commerce extérieur français