Mme la présidente. L’amendement n° 142, présenté par Mme Poumirol, MM. Jomier et Kanner, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin et Rossignol, MM. Tissot, Bourgi et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

L’employeur reste personnellement responsable de veiller à la bonne exécution de l’évaluation des risques. L’aide du service de prévention et de santé au travail ne remet pas en cause la responsabilité entière de l’employeur dans l’évaluation des risques, la définition et la mise en œuvre des mesures de prévention.

II. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Pour apporter cette aide et celle prévue à l’article L. 4121-3, l’ensemble des acteurs, médecin ou non médecin, du service de santé au travail qui participent à l’évaluation des risques ou à la définition du plan d’action sont couverts par le champ des articles L. 4623-4, L. 4623-5, L. 4623-5-1, L. 4623-5-2, L. 4623-5-3 et L. 4623-7. Ils peuvent mettre en œuvre le signalement de risque et les préconisations dans les conditions prévues à l’article L. 4624-9. Les employeurs sont tenus de les recevoir dans l’entreprise. Les sanctions en cas d’entrave sont les mêmes que celles prévues à l’article L. 8114-1 ; »

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Nous avons tous participé aux mêmes auditions, notamment à celle du collectif Prévention AT-MP, raison pour laquelle nous présentons également un amendement à cet article.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 4 induit un risque de transfert de responsabilité et remet en cause la responsabilité légale de l’employeur en raison des nouvelles missions attribuées aux équipes pluridisciplinaires des services de prévention et de santé au travail.

Si nous ne sommes pas opposés à l’attribution de nouvelles missions à ces équipes, il nous semble important que l’exercice de leurs missions essentielles, décrites par M. Mouiller précédemment, soit déjà garanti avant d’en prévoir de nouvelles.

En outre, ces nouvelles missions supposent l’implication d’acteurs non protégés de l’équipe pluridisciplinaire dans la démarche d’évaluation des risques.

Ces missions sont l’objet d’enjeux très forts pour l’employeur. Actuellement, le droit protège le médecin du travail, et lui seul, du licenciement lors du renouvellement d’un CDD ou d’un transfert vers une autre entreprise. De même, la prérogative du médecin d’imposer son signalement de risque et ses préconisations à l’employeur, qui doit y répondre, le légitime, seul, dans ses missions d’évaluation des risques et de prévention.

L’extension de ces missions à l’ensemble des acteurs du service, conjointement à la disparition progressive des médecins du travail, comme cela a été rappelé, notamment lors de la discussion générale, rend nécessaire d’étendre ces protections et ces prérogatives à la totalité de l’équipe pluridisciplinaire, en particulier aux infirmiers en pratique avancée en santé au travail.

À défaut, l’action en entreprise des acteurs du service sera limitée par la pression qu’ils pourront subir, et les annonces de prévention seront virtuelles.

C’est pourquoi cet amendement, inspiré par le collectif Prévention AT-MP, vise à garantir la responsabilité personnelle de l’employeur de veiller à la bonne exécution de l’évaluation des risques.

Mme la présidente. L’amendement n° 100, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

…° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« L’employeur reste personnellement responsable de veiller à la bonne exécution de l’évaluation des risques. L’aide du service de prévention et de santé au travail ne remet pas en cause la responsabilité entière de l’employeur dans l’évaluation des risques, la définition et la mise en œuvre des mesures de prévention.

« Pour apporter cette aide et celle prévue à l’article L. 4121-3, l’ensemble des acteurs médecin ou non médecin du service de santé au travail qui participent à l’évaluation des risques ou à la définition du plan d’action sont couverts par le champ des articles L. 4623-4, L. 4623-5, L. 4623-5-1, L. 4623-5-2, L. 4623-5-3 et L. 4623-7. Ils peuvent mettre en œuvre le signalement de risque et les préconisations dans les conditions prévues à l’article L. 4624-9. Les employeurs sont tenus de les recevoir dans l’entreprise. Les sanctions en cas d’entrave sont les mêmes que celles prévues à l’article L. 8114-1. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement, similaire à ceux qui viennent d’être présentés, vise à préciser que l’employeur reste personnellement responsable de la bonne exécution de l’évaluation des risques.

L’aide du service de prévention et de santé au travail ne remet pas en cause la responsabilité entière de l’employeur dans l’évaluation des risques, ainsi que dans la définition et la mise en œuvre des mesures de prévention.

Alors que le Gouvernement souhaite élargir les missions des équipes pluridisciplinaires des services de prévention et de santé au travail à l’accompagnement dans l’évaluation des risques professionnels et à la promotion de la santé sur le lieu de travail, les professionnels demandent une meilleure protection.

Actuellement, le droit protège les médecins du travail dans leurs missions d’évaluation des risques et de prévention. Or, on l’a dit, mais il convient selon moi de le répéter, la réduction du nombre de médecins du travail et l’extension des missions de prévention à l’ensemble des équipes pluridisciplinaires des services de prévention nécessitent de renforcer leur protection et leurs prérogatives.

En effet, l’ensemble des acteurs – médecins ou non – du service de santé au travail qui participent à l’évaluation des risques seront soumis à une menace de sanctions par les employeurs. Il est donc important de soutenir ces amendements, mes chers collègues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. Les amendements nos 55, 142 et 100 ont des objets similaires, moyennant quelques différences rédactionnelles.

Ils tendent à préciser que la contribution des SPST à l’évaluation des risques professionnels n’atténue pas l’obligation de l’employeur en matière de santé et de sécurité au travail. Il n’y a pas lieu de prévoir une telle précision, puisque la responsabilité de l’employeur demeure pleine et entière dans ce domaine en application des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

Par ailleurs, les amendements visent à étendre à tous les membres de l’équipe pluridisciplinaire du SPST le statut de salarié protégé, qui est aujourd’hui réservé au médecin du travail, médecin de l’aptitude.

La protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun dont bénéficie le médecin du travail en tant que salarié protégé est liée aux fonctions qu’il exerce dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs.

Les autres membres de l’équipe pluridisciplinaire exerçant leurs missions sous l’autorité du médecin, il n’y a pas lieu de leur étendre le statut de salarié protégé.

Par ailleurs, les professionnels de santé qui ne sont pas des médecins du travail sont déjà soumis aux obligations déontologiques et aux principes d’indépendance qui régissent leur profession.

Enfin, dernier argument, eu égard aux conséquences potentielles qu’il emporte, ce point aurait mérité d’être débattu par les partenaires sociaux dans le cadre de l’ANI. Sauf erreur de ma part, cela n’a pas été le cas.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. Je partage l’avis défavorable de la commission.

Je confirme que ce point fait partie des équilibres qui ont été négociés par les partenaires sociaux. Si l’on ne peut pas faire grief aux organisations représentatives des salariés de chercher à obtenir pour leurs adhérents la meilleure protection possible, il convient de respecter cet équilibre et de ne pas s’inquiéter au-delà du raisonnable, même si je peux comprendre certaines craintes.

Le médecin du travail est un salarié protégé, et les membres de son équipe pluridisciplinaire interviennent sous sa responsabilité : j’estime que les choses sont relativement claires en l’état.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. À partir du moment où les infirmiers en pratique avancée – nous y reviendrons ultérieurement – réalisent les visites d’embauche, appelées désormais « visites d’information et de prévention », un salarié peut ne jamais rencontrer le médecin du travail au cours de son parcours professionnel. Ces infirmiers, qui se trouvent de ce fait au cœur des missions de santé au travail, peuvent donc subir des pressions.

C’est pourquoi ils doivent être protégés, non seulement des licenciements et des discriminations, mais aussi des pressions liées à la nature de leur activité.

C’est à eux de dire s’il faut ou non adapter un poste de travail, car – je le rappelle – c’est au poste d’être adapté à l’employé et non l’inverse ! C’est le médecin ou l’infirmier, lequel dorénavant réalise la majorité des visites, qui a la charge de relever les risques professionnels, de les communiquer à l’employeur et de lui demander d’adapter le poste de travail à la santé du travailleur. On imagine bien, en raison de la nature de leurs tâches, qu’ils peuvent subir des pressions !

C’est la nature de leurs missions qui avait justifié la protection des médecins du travail. À défaut de l’étendre à toute l’équipe pluridisciplinaire, il convient à tout le moins de l’accorder à présent aux infirmiers de santé au travail. Nous défendrons d’ailleurs ultérieurement un amendement en sens.

De loi en loi, les choses changent et les partenaires sociaux doivent faire preuve de pragmatisme, dans un contexte de diminution des ressources humaines.

La visite annuelle a été remplacée par une visite tous les deux ans, puis par une visite tous les cinq ans pour les travailleurs qui ne bénéficient pas d’une surveillance renforcée. Dès lors que cette charge incombe aux infirmiers, eux aussi doivent être protégés de toute pression pouvant résulter de la nature de leurs missions.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 55.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 142.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 100.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 103, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 10 et 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 4 donne aux services de prévention et de santé au travail la possibilité de réaliser des campagnes de vaccination et de dépistage au profit des salariés du secteur privé. À notre sens, cette mission relève de la santé publique.

Alors que les services de prévention et de santé au travail font face à une pénurie de moyens et de médecins du travail, ajouter une nouvelle mission pourrait surcharger une fois de plus les professionnels et rendre impossible l’accès des salariés à ces services.

L’offre étant très hétérogène dans les territoires, cet article fait peser le risque d’une inégalité de traitement entre les salariés. En effet, les campagnes de vaccination et de dépistage pourraient être à géométrie variable, selon la taille de l’entreprise ou le lieu de travail.

En outre, l’employeur pourrait avoir connaissance d’informations sensibles sur l’état de santé du salarié, par exemple des résultats de test PCR, une pratique déjà en cours dans le contexte de pandémie de covid-19.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de ces dispositions.

Mme la présidente. L’amendement n° 134, présenté par Mme Poumirol, MM. Jomier et Kanner, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin et Rossignol, MM. Tissot, Bourgi et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Après le mot :

Participent

insérer les mots :

, une fois les besoins du suivi médical des travailleurs remplis,

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. La proposition de loi opère un glissement de la santé au travail vers la santé en entreprise, préjudiciable à la santé des travailleurs au travail.

Bien sûr, la santé au travail participe de la santé publique, mais ses objectifs ne doivent pas être dilués dans ceux de la santé publique. C’est pourquoi il convient de circonscrire les actions de promotion de la santé à un complément, une fois la mission première de suivi médical des travailleurs remplie par la médecine du travail.

Mme la présidente. L’amendement n° 22 rectifié bis n’est pas soutenu.

L’amendement n° 215 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez et Gold, Mme Guillotin et MM. Guiol et Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Après le mot :

sportive

insérer les mots :

, des actions de sensibilisation aux violences conjugales ou sexuelles

La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.

M. Jean-Pierre Corbisez. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 28 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, M. Cambon, Mme Lassarade, MM. Burgoa, Laménie, D. Laurent, Chatillon et Cardoux, Mmes Joseph, Chauvin, Belrhiti et Deromedi, MM. Savary, Houpert, Allizard et Lefèvre, Mmes Imbert, Puissat, Di Folco et Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Canayer, M. Klinger, Mme Garriaud-Maylam, MM. Charon et Genet, Mme M. Mercier et MM. Gremillet et Husson, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Après le mot :

handicap

insérer les mots :

et de difficultés auditives

La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Cet amendement a pour objectif d’intégrer des actions d’information et de sensibilisation aux difficultés auditives que peuvent rencontrer tous les salariés sur leur lieu de travail.

Mme la présidente. L’amendement n° 160 rectifié ter, présenté par Mmes Billon, Doineau, Férat, Saint-Pé, Vermeillet, Sollogoub, Tetuanui et de La Provôté et MM. Canévet, Détraigne, L. Hervé, Laugier, Le Nay, Longeot et Kern, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas rédigés :

…° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le personnel de santé au travail contribue aux actions de sensibilisation aux violences conjugales et ou sexuelles. »

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Cet amendement, qui se justifie par son texte même, a été en partie défendu lors de l’examen de l’amendement n° 161 rectifié ter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. Dans une logique de décloisonnement de la santé au travail et de la santé publique, la proposition de loi vise à reconnaître la contribution de la médecine du travail à la réalisation d’objectifs de santé publique, ce qui, de notre point de vue, va dans le bon sens. La mise en œuvre de campagnes de vaccination et de dépistage y participe, comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État.

La pandémie a démontré que le risque infectieux se posait dans tous les milieux de vie, tout particulièrement sur le lieu de travail. En outre, l’origine multifactorielle de certaines pathologies, notamment cancéreuses, liées à des facteurs professionnels et environnementaux, plaide pour une sensibilisation renforcée des travailleurs au bénéfice des dépistages. Maintenir à tout prix une frontière étanche entre la médecine du travail et la santé publique n’est donc plus tenable à l’heure du concept One Health.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 103.

J’en viens à l’amendement n° 134. Les actions de promotion de la santé sur le lieu de travail s’entendent, bien entendu, comme des missions complémentaires des SPST, dont la vocation principale, comme l’a rappelé la commission des affaires sociales, est de prévenir l’altération de l’état de santé du fait du travail.

En outre, nous avons précisé à l’article 8 que l’offre socle obligatoire des SPST comprenait trois champs : le suivi individuel du travailleur, la prévention des risques professionnels, la prévention de la désinsertion professionnelle. La promotion de la santé sur le lieu de travail relève donc bien des missions complémentaires.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 134.

L’amendement n° 215 rectifié tend à insérer le même type de dispositif que l’amendement n° 161 rectifié ter, ce qui pose deux problèmes principaux.

D’une part, l’adoption de cet amendement aurait pour conséquence, dans les actions de promotion de la santé conduites par les SPST, de prolonger l’énumération des actions de sensibilisation possibles, laquelle pourrait être poussée à l’infini. Dans un souci d’intelligibilité de la loi, il est préférable de ne pas complexifier outre mesure cette disposition.

D’autre part, l’accent est mis non seulement sur la sensibilisation aux violences sexuelles qui prennent leur origine sur le lieu de travail, mais aussi sur la sensibilisation aux violences conjugales.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 28 rectifié bis concerne le rôle des SPST dans la sensibilisation aux troubles auditifs.

La proposition de loi prévoit déjà que les SPST pourront mettre en œuvre des actions d’information et de sensibilisation aux situations de handicap, ce qui comprend celles qui prendraient leur source dans une réduction des capacités auditives. En outre, les SPST assurent un suivi spécifique des travailleurs exposés au bruit, selon des dispositions inscrites dans la partie réglementaire du code du travail, aux articles R. 4431-1 et suivants.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 160 rectifié ter a le même objectif que l’amendement n° 28 rectifié bis. Il est problématique pour des raisons de deux ordres.

D’une part, là encore, son adoption reviendrait, dans le cadre des actions de promotion de la santé conduites par les SPST, à prolonger à l’infini l’énumération des actions de sensibilisation possibles, ce qui n’est pas souhaitable.

D’autre part, cela met l’accent non seulement sur la sensibilisation aux violences sexuelles qui prennent leur origine sur le lieu de travail, mais aussi sur la sensibilisation aux violences conjugales. Cette disposition découle de la Convention n° 190 sur la violence et le harcèlement de l’Organisation internationale du travail (OIT), de 2019, qui met en avant les répercussions des violences domestiques sur les conditions de travail.

Nous ne nions bien entendu pas cet impact, mais il convient d’être prudent : il faut garder à l’esprit que le sujet des violences conjugales met potentiellement en jeu le partage très délicat d’informations personnelles et familiales, pour lequel le cadre de la promotion de la santé sur le lieu de travail par le SPST ne paraît pas pertinent. Les salariés peuvent déjà solliciter aujourd’hui l’assistant social ou le psychologue du service de santé au travail pour aborder des problèmes qui dépassent la sphère professionnelle. Selon nous, il est préférable de privilégier ces interlocuteurs et ce cadre plus protecteur de la confidentialité.

Enfin, une difficulté rédactionnelle se pose, puisqu’il est fait référence au personnel de santé au travail, sans qu’il soit précisé s’il s’agit du personnel recruté par le service de prévention et de santé au travail ou d’intervenants extérieurs auxquels le SPST pourrait avoir recours. Encore une fois, de notre point de vue, l’assistant social et le psychologue sont les professionnels les plus aptes à appréhender ces problématiques qui dépassent la sphère professionnelle.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. M. le rapporteur sait déjà que je ne partage pas son avis sur l’amendement n° 160 rectifié ter de Mme Billon défendu par Mme Doineau.

Comme je l’ai déjà indiqué, notamment à M. Savary, j’apprécie beaucoup la qualité du travail du Sénat et son exigence d’éviter les lois trop bavardes. J’assume cependant, au nom du Gouvernement, la volonté d’envoyer un signal sur ce sujet spécifique. Certes, je ne peux le faire sur toutes les problématiques, mais il me semble que, sur cette question, nous partageons une sensibilité particulière du fait non pas seulement de l’actualité et des circonstances, mais de ce qui se passe dans la société.

Assumant ce geste au nom du Gouvernement, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 160 rectifié ter.

Sur les autres amendements, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je partage les observations du rapporteur et retire donc l’amendement n° 28 rectifié bis, qui est satisfait. Les troubles auditifs sont pris en compte, cela a été confirmé.

Je suis défavorable à l’amendement n° 103, car – je suis d’accord, là aussi, avec le rapporteur – les campagnes de vaccination et de dépistage sont importantes. Je pense qu’il faut prendre en compte la santé dans son ensemble, globalement. Que l’on soit à son domicile ou au travail, quand on est malade, on est malade ! On peut parfois travailler tout en étant malade, parfois on ne le peut pas… Quoi qu’il en soit, la maladie ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise.

Il faut également valoriser le rôle du médecin du travail au travers d’actes tels que la vaccination et le dépistage. C’est pourquoi je suis favorable à ce que l’on lui accorde une faculté de prescription.

De même, il convient que les médecins généralistes, qui connaissent leurs patients dans leur milieu familial, en tout cas en dehors de leur milieu professionnel, puissent accéder à l’entreprise pour savoir comment les choses se passent et pour établir des « ponts ». Il s’agit ainsi de prendre en compte l’environnement global des patients.

Il faut ouvrir plus largement les barrières, comme le prévoient les accords concernés, et cela semble en bonne voie. Je suivrai donc l’avis des rapporteurs en la matière.

Mme la présidente. L’amendement n° 28 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 103.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 134.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 215 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 160 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 104, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Contribuent au suivi post-professionnel des salariés licenciés pour une inaptitude d’origine professionnelle. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Dans le prolongement de l’obligation de prévention qui incombe aux employeurs, cet amendement vise à permettre le suivi post-professionnel par les services de prévention et de santé au travail des salariés licenciés pour une inaptitude d’origine professionnelle.

Alors qu’un projet de décret modifiant les modalités du suivi post-professionnel des salariés, afin d’en simplifier l’accès, a été soumis à la mi-juin 2021 au Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT), il semble indispensable que les salariés à la retraite, au chômage ou inactifs puissent bénéficier d’une surveillance médicale, dès lors qu’ils ont été exposés à des produits à effets différés sur la santé.

Jusqu’à présent, un salarié devait présenter une attestation d’exposition cosignée par l’employeur et le médecin du travail pour bénéficier d’un suivi post-professionnel. Il est indispensable de faciliter les démarches des salariés et d’assurer ce suivi post-professionnel des personnes licenciées pour inaptitude par les services de santé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. Le suivi de l’état de santé des demandeurs d’emploi est un véritable enjeu de santé publique, que l’on sous-estime et qui reste l’angle mort de la médecine de prévention. Certaines études montrent qu’ils sont proportionnellement plus touchés par les maladies chroniques, les addictions, voire les suicides.

Pour autant, le suivi post-professionnel des personnes licenciées pour inaptitude ne peut pas être confié aux SPST dont le public recouvre, par définition, les salariés employés par les entreprises qui leur sont affiliées. C’est à ce titre que les ressources des SPST reposent sur les cotisations versées par les employeurs, lesquelles sont calculées en fonction de leurs effectifs salariés.

Par ailleurs, les SPST se sont vu reconnaître une mission dans le cadre de la prévention de la désinsertion professionnelle, pour mieux anticiper l’impact sur la carrière des risques d’inaptitude. Les actions menées à ce titre doivent permettre de favoriser le maintien en emploi des personnes concernées.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 104.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 105, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Contribuent au suivi post-professionnel des salariés exposés à des agents chimiques dangereux. »

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Saisi par l’ancienne ministre du travail Muriel Pénicaud, le professeur Paul Frimat, spécialiste de médecine du travail, a rendu, en 2018, un rapport relatif à la prévention et à la prise en compte de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux. On pense, bien évidemment, au scandale d’État de l’amiante, mais aussi aux mineurs lorrains exposés aux polluants chimiques ou encore aux anciens salariés de Metaleurope, dans le Pas-de-Calais, qui mènent tous un combat pour la reconnaissance du préjudice d’anxiété.

Dans son rapport, le professeur Frimat liste vingt-trois recommandations pour une meilleure prévention et protection et un meilleur soin des travailleurs. Avec cet amendement, nous reprenons l’une de ces préconisations : l’application du suivi systématique des travailleurs exposés à des polluants chimiques après leur activité.

Pris de manière globale, ce changement de méthode est une réduction des coûts pour la sécurité sociale et un gain d’expertise pour les travailleurs, y compris les retraités. Ce suivi par la médecine du travail permettrait également de circonscrire l’anxiété et la difficulté de faire reconnaître le lien entre exposition et complications. Il s’agit d’un progrès pour l’ensemble des travailleurs, qui, par effet rebond, renforce également la responsabilité des employeurs, lesquels sont chargés de limiter les expositions aux produits considérés comme potentiellement toxiques.

C’est le sens du progrès social.