compte rendu intégral

Présidence de Mme pascale gruny

vice-président

Secrétaires :

Mme Françoise Férat,

M. Joël Guerriau.

Mme le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante.)

1

Procès-verbal

Mme le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

Mme le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

contrats de travail des médecins exerçant dans les centres municipaux de santé

Mme le président. La parole est à M. François Calvet, auteur de la question n° 1832, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. François Calvet. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le problème que pose l’article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale pour le recrutement de médecins contractuels dans les centres municipaux de santé. En effet, cet article ne permet de leur proposer un contrat à durée indéterminée qu’à l’issue de deux contrats à durée déterminée de trois ans, soit six longues années.

Cette condition préliminaire est extrêmement préjudiciable à la stabilité des services municipaux de santé, car elle précarise le statut de ces médecins, qui ne peuvent envisager de s’installer durablement. Le risque est, évidemment, de voir ces praticiens s’en aller, faute de garanties quant à leur contrat de travail.

Pourtant, les centres municipaux de santé s’inscrivent dans la volonté du Gouvernement de lutter contre les déserts médicaux, à travers notamment le dispositif « 400 médecins », et rencontrent un grand succès. C’est le cas du centre de la ville d’Elne, dans les Pyrénées-Orientales, qui enregistrait déjà 1 531 patients fin juin, alors qu’il a ouvert début avril, 510 d’entre eux ayant d’ailleurs choisi un des médecins du centre comme médecin traitant.

Monsieur le secrétaire d’État, pour être en cohérence avec la volonté du Gouvernement de lutter contre les déserts médicaux, ne pensez-vous pas qu’il serait opportun de modifier la règle en faveur de ces médecins contractuels, en permettant leur recrutement en contrat à durée indéterminée au bout d’un seul contrat à durée déterminée de trois ans ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de lenfance et des familles. Monsieur le sénateur François Calvet, tout d’abord, je veux vous rappeler l’engagement total, et ce depuis 2017, du Gouvernement pour lutter contre la désertification médicale, en tout lieu du territoire, c’est-à-dire dans les zones rurales, évidemment, mais pas uniquement.

Ensuite, je tiens à souligner notre attachement à renforcer la base légale qui permet aux communes, aux EPCI et aux départements d’assurer le recrutement du personnel nécessaire à l’exercice des missions des centres de santé dont ils sont gestionnaires. Ainsi, cette règle est réaffirmée à l’article 33 du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation et la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dont vous avez eu à débattre.

L’article L. 6323-1 du code de la santé publique précise que, pour exercer les missions dévolues aux centres de santé, qui consistent principalement à dispenser des soins de premier recours et à mener des actions de prévention et d’éducation pour la santé, des agents contractuels peuvent être engagés par contrat à durée déterminée d’une durée maximale de trois ans, renouvelable par reconduction expresse, et ce dans la limite d’une durée maximale de six ans. Si, à l’issue de cette durée, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l’être que par décision expresse et pour une durée indéterminée, conformément à l’article 3-3, que vous citiez, de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

En outre, aux termes de l’article 3-4 de cette même loi de 1984, « tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l’article 3-3 avec un agent qui justifie d’une durée de services publics de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée ».

Les dispositions relatives au recours aux agents contractuels dans la fonction publique territoriale ont été récemment modifiées par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Dans le cadre des débats parlementaires qui ont présidé à l’adoption de cette loi, le primorecrutement d’agents contractuels en CDI, ou à l’issue d’un premier contrat de trois ans, n’a pas été retenu pour le versant territorial. Une évolution générale de ces dispositions législatives n’est, à ce stade, pas envisagée. Toutefois, pour assurer ces missions, il peut aussi être envisagé de recourir à des mises à disposition de praticiens hospitaliers.

différence de situation entre les vaccinés cas contacts et les cas contacts non vaccinés

Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel, auteur de la question n° 1809, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Henri Cabanel. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur la différence de situation entre les vaccinés cas contacts et les cas contacts non vaccinés ou présentant un schéma vaccinal incomplet.

Comme le rappelle Ameli sur la dernière mise à jour de son site internet, si le schéma vaccinal est complet et si la personne n’est pas immunodéprimée, il n’y a pas d’obligation d’isolement. Il est cependant précisé qu’il lui faudra alors non seulement veiller à toujours respecter certaines règles sanitaires – tests PCR, gestes barrières, etc. –, pour briser les chaînes de transmission de la covid-19, mais aussi qu’il lui faut « limiter les interactions sociales ».

Cela pose un fort problème d’interprétation aux chefs d’entreprise qui ne peuvent pas mettre en place le télétravail, par exemple dans les chaînes de production, les commerces. La consigne de limitation des interactions sociales est, pour eux, difficile à faire respecter.

Les chefs d’entreprise sont dans le flou et attendent une consigne claire. Seraient-ils responsables en cas de cluster ? Dans l’affirmative, les arrêts maladie seront-ils autorisés pour les cas contacts vaccinés ?

Par ailleurs, j’ai été interpellé ce week-end par des médecins sur la question de la troisième dose de vaccin, qui est d’actualité. La Haute Autorité de santé a suspendu le vaccin Moderna temporairement, ce dont ils ont été avertis vendredi soir, alors que certains d’entre eux avaient déjà des stocks. Quand allez-vous être fixé sur l’utilisation ou non de ce vaccin, ce qui pourrait les conduire à devoir éliminer lesdits stocks ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de lenfance et des familles. Monsieur le sénateur Henri Cabanel, je vais essayer d’être bref, synthétique et clair pour tenter de répondre à l’ensemble de vos questions.

Effectivement, la France a adapté sa doctrine de tracing à la nouvelle donne sanitaire que constitue l’augmentation de la couverture vaccinale de la population, et nous nous en réjouissons. Cette adaptation repose sur la distinction entre personnes contacts à risque élevé, c’est-à-dire des personnes contacts non vaccinées ou immunodéprimées, et les personnes contacts à risque modéré, c’est-à-dire les personnes contacts qui présentent un schéma complet de primovaccination et une absence d’immunodépression grave.

La mise en place de cette distinction n’est pas franco-française ; elle est constatée aussi chez nos voisins européens : Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Danemark. Elle a pour objectif d’identifier prioritairement les cas contacts présentant un risque accru.

Vous le savez, la dernière étude française d’EPI-PHARE du 11 octobre 2020 précise que les personnes vaccinées de 50 ans et plus ont neuf fois moins de risques d’être hospitalisées ou de mourir du covid-19. Les personnes contacts à risque modéré sont ainsi dispensées de septaine. Ne faisant pas l’objet d’un isolement, elles ne se voient donc pas délivrer d’arrêts maladie si, bien entendu, elles ne sont pas testées positives. En revanche, dans un contexte de circulation accrue du variant delta, il leur est demandé de respecter les autres mesures destinées à briser les chaînes de transmission en raison du risque résiduel d’infection auquel elles sont exposées. Il s’agit notamment de mettre en œuvre, autant que possible, une limitation des interactions sociales afin de circonscrire le risque potentiel de transmission à leur entourage.

Par ailleurs, une adaptation des conditions de travail, notamment le recours au télétravail, devra être privilégiée, quand cela est possible. À ce sujet, Santé publique France a établi, le 22 juillet 2021, un document qui définit les principes généraux de la conduite à tenir vis-à-vis des personnes contacts à risque, recommandations qui diffèrent de celles qui concernent les personnes contacts à risque élevé, afin de prendre en compte la diminution du risque de transmission du covid.

Monsieur le sénateur, je vous renvoie à ces préconisations, que je tiens à votre disposition et qui détaillent les conduites à risque et les adaptations, très pratiques, très opérationnelles, que doivent mettre en place, notamment, les chefs d’entreprise ou les responsables d’établissement recevant du public qui ne peuvent pas mettre en place le télétravail. Je reste à votre disposition pour de plus amples informations.

Mme le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.

M. Henri Cabanel. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Concernant la troisième dose de Moderna, je vous adresserai une question écrite pour obtenir des précisions.

Je reviens sur le problème des interactions sociales. Les chefs d’entreprise ont vraiment des difficultés d’interprétation, et les ARS (agences régionales de santé) ne sont pas en mesure de leur donner des réponses sur les cas contacts vaccinés. C’est un vrai problème.

suppression de la carte vitale pour de nombreux français de l’étranger

Mme le président. La parole est à M. Ronan Le Gleut, auteur de la question n° 1844, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Ronan Le Gleut. Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi le Gouvernement a-t-il décidé de demander à des retraités français qui vivent à l’étranger de rendre leur carte Vitale ?

Je tiens ici à votre disposition un courrier de l’assurance maladie, plus précisément du Cnarefe, le Centre national des retraités de France à l’étranger, daté du 27 août 2021, voilà donc moins de deux mois, et adressé à une Française retraitée, qui vit aux États-Unis et qui a cotisé pendant quatorze ans en France. À ce titre, elle disposait de la carte Vitale. Or la conclusion de ce courrier est la suivante : « Nous sommes contraints de clôturer vos droits et d’invalider votre carte Vitale à compter du 1er octobre 2021. »

C’est en application de votre politique – plus précisément de l’article 52 de la loi 2018-1203 du 22 décembre 2018, entré en vigueur le 1er juillet 2019, et qui est codifié à l’article L. 160-3 du code de la sécurité sociale –, qu’il est demandé à cette personne de rendre sa carte Vitale pour les séjours temporaires qu’elle passe en France. Elle avait par exemple prévu de venir fêter Noël en France avec ses enfants et petits-enfants, mais elle n’est plus assurée, puisqu’elle dépend du système américain Medicare, qui ne la couvre pas à l’étranger. Par ailleurs, les dispositions transitoires qui avaient été envisagées ont été rejetées par un arrêt du Conseil d’État du 2 avril 2021.

Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi le Gouvernement a-t-il pris cette mesure, profondément injuste à l’égard des Français qui ne sont pas établis dans l’Union européenne, l’Espace économique européen ou en Suisse ? Combien de nos compatriotes sont-ils concernés ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, à qui je demande de ne pas dépasser son temps de parole, même d’une quinzaine de secondes, car nous avons déjà pris du retard.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de lenfance et des familles. Je vais faire au mieux, madame la présidente.

Monsieur le sénateur Le Gleut, commençons par un exercice de transparence et d’honnêteté. Cette disposition n’est pas nouvelle et ne concerne pas que les retraités. Par ailleurs, l’exemple des quatorze ans de cotisation n’est pas totalement dû au hasard, puisque la loi impose quinze années de cotisation pour pouvoir continuer à bénéficier de la prise en charge des frais de santé lors des séjours temporaires en France.

Je le répète, cette exigence n’est pas nouvelle, puisqu’elle date de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, dont vous avez bien sûr débattu. Cette mesure avait, à l’époque, reçu un avis favorable du président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), ainsi que du président de la Caisse des Français de l’étranger (CFE).

Par ailleurs, dans un rapport sur la mobilité internationale des Français publié en septembre 2018, Mme la députée Genetet préconisait un pacte de protection sociale pour le rééquilibrage de la cotisation d’assurance maladie, dite Cotam. Elle proposait ainsi, dans sa recommandation n° 93, de modifier cet article L. 160-3 du code de la sécurité sociale que vous évoquez pour limiter le droit à la prise en charge des frais de soins lors d’un séjour temporaire aux pensionnés du régime français pouvant justifier d’au moins quinze années de cotisation, sans condition de nationalité.

Ce délai de quinze ans a été considéré comme un point d’équilibre et a été en quelque sorte validé par le Conseil d’État, qui a considéré qu’il n’était pas manifestement disproportionné au regard des conciliations entre les exigences constitutionnelles de préservation de la santé et de bon usage des deniers publics, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit.

Vous avez raison, les mesures transitoires ont, en revanche, été annulées par le Conseil d’État en avril 2021. Cette décision a eu pour effet d’entraîner la clôture des droits d’un certain nombre d’assurés. Pour autant, conscients des difficultés occasionnées pour les intéressés, les services, notamment la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM), ont mis en place un traitement attentionné de ces dossiers, un délai supplémentaire de six mois étant venu s’ajouter au délai de trois ans entre l’adoption de la mesure et sa mise en œuvre.

Enfin, et j’en termine, madame la présidente, pour les pensionnés ne pouvant rester affiliés à la protection universelle maladie au motif d’une durée de cotisation inférieure à quinze ans, l’adhésion à la CFE constitue une solution de substitution, qui leur permet de continuer à bénéficier d’une couverture des frais de santé en cas de séjour temporaire en France.

Mme le président. Vous avez dépassé de quinze secondes, monsieur le secrétaire d’État. (Sourires.)

La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour la réplique.

M. Ronan Le Gleut. Monsieur le secrétaire d’État, ce qui nous choque profondément, c’est la dimension rétroactive de votre loi. Cette retraitée française dont je parle ne peut plus prendre la dernière option que vous préconisez. Quand on est un actif, on peut faire des choix. Dans son cas, ce n’est plus possible, malheureusement.

hôpital public face à la maladie de l’intérim

Mme le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 1845, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Rémy Pointereau. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur la situation des hôpitaux publics face à ce que l’on appelle le « lobby des intérimaires ».

Vous connaissez le problème, qui ne date pas d’aujourd’hui. Plus du quart des postes de médecins sont vacants, ce qui oblige les hôpitaux publics à faire appel à des intérimaires. Ces derniers profitent de la pénurie de praticiens pour exiger des rémunérations supérieures au plafond réglementaire – 1 170 euros brut pour 24 heures –, une situation qui affecte très négativement les budgets des hôpitaux et qui a des conséquences non négligeables sur l’organisation du travail. Surtout, cela incite les praticiens titulaires à plein temps à démissionner ou à se mettre en disponibilité pour se consacrer à l’intérim.

Les hôpitaux publics sont donc confrontés à ce que l’on appelle le « dilemme du prisonnier », c’est-à-dire que les intérêts des intérimaires s’opposent à l’intérêt collectif. Le département du Cher est très représentatif à cet égard. Ainsi, à Bourges, une carence de médecins urgentistes a conduit à une suspension du service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR) à trois reprises.

Des mesures législatives et réglementaires ont été prises pour lutter contre les dérives de l’intérim médical. Je pense au décret du 24 novembre 2017 et à la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist.

Dans le contexte sanitaire qui est le nôtre, aucune rupture de la continuité du service de santé ne peut être tolérée.

Alors, monsieur le secrétaire d’État, ma question est triple.

Comment s’assurer du respect des mesures de la loi Rist, dont l’entrée en vigueur est prévue le 27 octobre prochain, tout en garantissant l’accès aux soins ?

Comment s’assurer que les intérimaires, conscients de leur nécessité, ne vont pas demander aux hôpitaux publics de contourner les dispositions législatives susmentionnées ?

Le Gouvernement a-t-il prévu d’accompagner les établissements publics pour sortir de la dépendance au mercenariat médical, en leur permettant, par exemple, d’accéder dès à présent au dispositif de la prime de solidarité territoriale ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de lenfance et des familles. Monsieur le sénateur, nous avons fait de la lutte contre les dérives de l’intérim médical l’une de nos priorités d’action. C’est à ce titre que la loi n° 2021-205 du 26 avril 2021 contient un article pour renforcer les contrôles sur les prestations d’intérim médical.

La loi de modernisation du système de santé de 2016 avait déjà introduit le principe d’un encadrement des tarifs qu’une entreprise de travail temporaire était susceptible de facturer à un établissement public de santé au titre du salaire brut versé au praticien intérimaire, avec un plafond de la rémunération fixé à 1 170 euros brut pour une mission de 24 heures.

Toutefois, vous l’avez rappelé, la réglementation est encore insuffisamment appliquée. C’est pourquoi le pacte de refondation des urgences puis les conclusions du Ségur de la santé ont posé de nouveaux jalons pour définir des modalités de contrôle plus efficaces.

Les nouvelles dispositions de la loi du 26 avril 2021, dite loi Rist, permettront, d’une part, au comptable public de renforcer le contrôle qu’il opère sur les établissements publics de santé, et, d’autre part, au directeur général de l’agence régionale de santé d’engager de manière systématique une action juridictionnelle auprès du tribunal administratif compétent en cas de manquements.

Par ailleurs, le contrôle plus strict des pratiques de l’intérim médical s’accompagnera du déploiement d’un nouveau dispositif de solidarité territoriale, qui va permettre de développer, à compter du mois de novembre, les logiques de coopération entre établissements publics de santé d’une même région ou de régions limitrophes. Cela s’appuiera sur des expériences menées en région depuis plusieurs années pour essayer de trouver des solutions collectives afin d’assurer, en toutes circonstances, la continuité des soins sans avoir forcément besoin de recourir à l’intérim.

Pour s’assurer que les dispositions et l’esprit des mesures votés dans cet hémicycle, notamment pour renforcer les contrôles, sont respectés, vous pouvez compter, monsieur le sénateur, sur l’engagement du Gouvernement.

conditions de fermeture et de cession d’officines en zones rurales et déploiement de solutions compensatoires

Mme le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 1848, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les modalités de fermeture et de cession de pharmacies, ainsi que sur les répercussions qu’elles engendrent dans l’offre et l’accès aux services pharmaceutiques dans nos territoires ruraux.

Je prendrai pour point de départ le cas d’une officine implantée dans la commune de Mainsat, en Creuse, dont le fonds fut brutalement cédé par son propriétaire à une autre officine située dans la commune d’Auzances, chef-lieu de canton. Il s’agit là d’une absorption sèche, opérée en l’absence de toute réflexion concertée et coordonnée avec les élus locaux et les professionnels de santé du territoire concerné : elle conduit à la disparition de ce lien essentiel desservant les quelque 550 habitants de la commune de Mainsat et ceux des communes environnantes.

Il n’est pas question de vouloir attenter aux libertés des pharmaciens libéraux titulaires d’officine dans la gestion de leur activité, pas plus que de prétendre interférer dans leur décision de fermer l’entreprise ou dans l’acte de la céder. Pour autant, ces situations profondément injustes accentuent la fracture territoriale déjà béante. Ces inégalités doivent être combattues.

Pour rappel, l’Ordre national des pharmaciens, dans sa carte actualisée le 1er juin dernier, dénombrait 59 officines dans le département, l’une des représentations les plus faibles et déficitaires du pays.

L’article 95 de la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite ASAP, issu d’un amendement sénatorial, s’attaque à la problématique de l’accès aux médicaments dans les communes isolées ou très peu peuplées, en permettant à l’agence régionale de santé (ARS), dans le cas où l’unique officine d’un village cesserait son activité sans avoir trouvé de repreneur, d’autoriser la mise en place d’une antenne de pharmacie qui serait rattachée à l’officine la plus proche, après avis du Conseil de l’ordre et des syndicats représentatifs.

Où en sommes-nous dans l’effectivité et la mise en place de ces succursales pharmaceutiques ?

Parallèlement, ce même article 95 prévoit d’étendre aux zones caractérisées par des difficultés dans l’accès aux médicaments le champ des expérimentations relatives à la présence de professionnels de santé pour une durée maximale de cinq ans. Néanmoins, les projets d’expérimentation semblent suspendus à la publication d’un décret d’application définissant les territoires au sein desquels ce service à la population n’est pas assuré de manière satisfaisante.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous renseigner sur l’échéance à laquelle ce texte pourrait être pris ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de lenfance et des familles. Monsieur le sénateur Jean-Jacques Lozach, j’ai bien conscience que la particularité de certains territoires pourrait amener leur population à connaître des difficultés d’approvisionnement en médicaments si ceux-ci venaient à perdre leur officine.

Je tiens tout d’abord à rappeler que toute cessation définitive d’activité d’une officine doit être déclarée par son titulaire à l’agence régionale de santé lorsqu’elle fait l’objet d’une indemnisation par une autre pharmacie. Un avis préalable du directeur général est requis afin d’anticiper au mieux les conséquences sur l’offre pharmaceutique, notamment dans les territoires ruraux.

C’est précisément pour apporter une réponse à ces territoires qu’un assouplissement de la réglementation a été prévu par certaines dispositions de l’ordonnance de 2018 relative à l’adaptation des conditions de création, transfert, regroupement et cession des officines de pharmacie.

Comme vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur, un projet de décret existe, qui vise à déterminer des territoires au sein desquels l’accès aux médicaments pour la population n’est pas assuré de manière satisfaisante. Sa publication pourrait intervenir au cours du premier semestre 2022 ; elle permettra ainsi aux agences régionales de santé d’identifier, selon une méthodologie qui se doit d’être précise, les territoires pour lesquels de sérieuses difficultés d’accès à une offre pharmaceutique se posent pour la population.

Au sein de ces territoires, des leviers sont prévus pour faciliter le maintien ou l’installation d’une officine. Le Gouvernement est évidemment très attentif à ce que la population de notre territoire puisse conserver une offre de soins de proximité, notamment lors des fermetures d’officines dans les territoires ruraux.

La réglementation actuelle permet déjà au directeur général de l’ARS, lorsque l’officine qui a fermé desservait jusqu’alors une population au moins égale à 2 500 habitants, de délivrer une nouvelle autorisation d’ouverture d’officine dans cette commune.

Par ailleurs, comme vous l’avez évoqué, monsieur le sénateur, la loi ASAP du 7 décembre 2020 contient une mesure autorisant les agences régionales de santé à expérimenter une nouvelle modalité de dispensation des médicaments dans des communes isolées dont la dernière officine aurait définitivement cessé son activité si l’approvisionnement de la population en est compromis au sens du code de la santé publique.

L’objectif de ce dispositif, qui vient compléter l’ensemble des autres mesures, est d’apporter une réponse aux spécificités de chaque territoire.

demande de remboursement des aides du dispositif d’indemnisation de perte d’activité versées par l’assurance maladie

Mme le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 1822, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le secrétaire d’État, la demande de remboursement des aides accordées au titre du dispositif d’indemnisation de perte d’activité (DIPA) versées par l’assurance maladie à la suite de la fermeture des cabinets dentaires ou autres établissements de santé libéraux dans le cadre de la crise sanitaire pose une véritable question de confiance dans la parole publique.

Contre toute attente, les modalités de calcul des pertes subies négociées avec la Caisse nationale de l’assurance maladie ont été revues, notamment la période de référence. Initialement prévue mensuellement, celle-ci s’est vue portée, par décret, sur une période plus longue, du 16 mars 2020 au 30 juin 2020.

Voilà qui a très largement pénalisé les professionnels qui, après avoir subi une période de fermeture, ont repris à un rythme soutenu dès la sortie de crise au mois de mai 2020.

Aussi, ce sont plusieurs dizaines de milliers de professionnels de santé qui se voient réclamer le remboursement de tout ou partie de cette aide, en totale contradiction avec les engagements initialement pris. À cette situation injuste et choquante s’ajoute le fait que les charges de ces professionnels ont considérablement augmenté pendant cette période au regard des coûts de fonctionnement, en raison de la mise en place des mesures sanitaires au sein de leur établissement.

On pourrait d’ailleurs transposer cette question à bien d’autres dossiers, notamment à la situation des collectivités territoriales, qui ont perdu des recettes d’exploitation de service public et qui ne sont toujours pas indemnisées, le décret promis tardant à être publié.

À l’heure où l’établissement du projet de loi de finances pour 2022 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 ne marque aucun repli de la dépense publique – bien au contraire ! – et doit faire face à des conséquences de la crise non encore financées, monsieur le secrétaire d’État, pensez-vous que le Gouvernement tiendra les engagements pris ?