M. Philippe Bas, rapporteur. Ce n’est déjà pas mal !

Mme le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en montant les marches qui conduisent à cette tribune, je me demandais si c’était la dernière fois que nous examinions un projet de loi visant à lutter contre le covid et portant sur l’urgence sanitaire. Vraisemblablement, la réponse est non !

C’est bien l’unique mérite de la version définitive de ce projet de loi : la législation d’exception mise en place depuis la loi du 23 mars 2020 a été abrogée. Ces régimes successifs ont été adoptés ; nous en avons délibéré ici, et les Français s’y sont soumis, avec beaucoup de détermination et de courage.

J’ai entendu vos propos, monsieur le ministre. Votre gouvernement s’est présenté avec un texte que l’on pourrait qualifier de « minimal », sans doute parce que c’est la fin d’une séquence, sans doute aussi parce que le contexte politique de l’Assemblée nationale ne permet pas une ambition démesurée pour ce qui concerne son adoption définitive.

Néanmoins, ce texte a connu des soubresauts, puisque l’un de ses deux articles n’a pas été adopté. Il a donc fallu reprendre le travail au Sénat, ce qui a comblé de bonheur notre rapporteur, qui travaille toujours avec beaucoup d’enthousiasme et de talent. C’est ainsi que le régime d’exception a été abrogé.

Toutefois, de manière inquiétante, le rôle du Parlement, et singulièrement du Sénat, s’en est trouvé dévalorisé.

M. Loïc Hervé. Il ne faut pas exagérer !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En effet, en voulant protéger son groupe politique, M. le rapporteur a souhaité discuter et élaborer un texte qui serait intégralement adopté en commission mixte paritaire, puis intégralement voté par l’Assemblée nationale et le Sénat.

D’ailleurs, en commission mixte paritaire, une commission que j’ai qualifiée de manière ironique de « Potemkine », pas un seul terme de l’Assemblée nationale n’a été retenu.

Si je me permets de souligner ce point, monsieur le ministre, c’est pour montrer qu’il n’y a eu ni dialogue ni compromis, ou alors seulement avec certains groupes de cette assemblée. Vous-même avez souhaité, me semble-t-il, que soit maintenue la situation vaccinale dans le cadre du nouveau passe voyage, pour finalement vous résoudre à accepter que seuls les tests PCR soient valables, vous alignant d’ores et déjà sur la position de quelques collègues antivax, dont nous avons vu la parole fleurir ici.

Je garderai de cette soirée un sentiment un peu triste de retour en arrière. En effet, sept collègues du groupe LR se sont abstenus sur la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité présentée par M. Ravier.

Nous avons vu le vaccin retiré du passe sanitaire, alors que, depuis deux ans, nous plaidons sans relâche auprès de nos compatriotes pour qu’ils soient vaccinés, revaccinés, re-revaccinés, et qu’il y a des campagnes de publicité sur ce thème à la télévision.

Nous avons vu surgir, sur l’initiative du rapporteur, un article sur la réintégration des soignants. M. Philippe Bas a indiqué qu’il s’agissait simplement de tracer un chemin. Or les personnes concernées et les antivax ont parfaitement compris que cette mesure était une porte ouverte à la réintégration, laquelle, nous le savons, serait totalement choquante.

M. le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale l’a dit en commission mixte paritaire, puis publiquement, cet article est à la fois inutile et dangereux, voire inconstitutionnel. Malgré cela, M. le rapporteur et l’ensemble de la majorité du Sénat, que l’on a connus plus exigeants sur ces sujets, ont accepté de passer par-dessus ces difficultés importantes et de voter ce texte, pour privilégier le poids supposé du groupe LR dans le cadre de la majorité présidentielle.

Bon courage ! Je ne sais comment, demain, le groupe LR pourra s’adapter aux différentes exigences de la majorité présidentielle. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Chers collègues, vous aurez à revenir en arrière sur un certain nombre de sujets qui vous divisent. J’espère que M. Bas retrouvera la grande rigueur à laquelle il nous a habitués.

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est vous le professeur !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pour notre part, vous l’avez compris, eu égard aux questions relatives au vaccin, à la réintégration des personnels soignants suspendus et à la prolongation du système SI-DEP, nous nous abstiendrons, comme en première lecture et en commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. Alain Richard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons donc à nous adapter à un changement, favorable dans l’ensemble, de la situation sanitaire. Vous avez apporté sur ce point, monsieur le ministre, des réserves légitimes.

Cette adaptation se fait au travers d’un projet de loi, dont les deux objets concrets, peu contestés dans leur principe, sont les suivants : le maintien des systèmes d’information permettant de contrôler la diffusion des virus et un moyen de contrôle potentiel des mouvements transfrontaliers en cas de circulation accrue de virus menaçants.

L’accord conclu en commission mixte paritaire permet principalement l’entrée en application de ces deux mesures, qui étaient devenues incertaines après l’examen du texte en première lecture par l’Assemblée nationale. Notre groupe est satisfait de cet aboutissement, qui nous paraît relever du bon sens. Il s’est efforcé d’y contribuer, en séance plénière, mais aussi en commission mixte paritaire.

M. Philippe Bas, rapporteur. C’est vrai !

M. Alain Richard. Toutefois, le texte a également donné lieu à une série de débats complémentaires, honorables dans leur ensemble, mais parfois d’ordre budgétaire ou administratif. Je pense notamment aux conditions de remboursement des tests ou à l’évolution de nos capacités hospitalières, un sujet plus fondamental, mais d’un tout autre ordre.

L’évocation de ces sujets, extérieurs à l’objet du projet de loi, a permis à certains de détourner l’attention des enjeux du texte, lesquels répondent à une nécessité immédiate, et d’exposer des votes alibis.

Selon moi, un point important résulte de notre accord, à savoir le rapport à venir. En effet, les missions de santé, c’est-à-dire les obligations de l’État pour faire face aux crises sanitaires, déjà connues ou potentielles, sont une responsabilité première de l’État, à laquelle le Parlement doit apporter toute son attention.

Comme M. le ministre l’a précisé tout à l’heure au cours de son intervention, il est important que nous nous mobilisions pour participer à l’évaluation de ce qui a fonctionné et de ce qui est reproductible parmi les mesures de précaution et de prévention, qui sont de la nature même du code de la santé publique, afin de tirer les conséquences de cette crise dans ses différentes phases.

Quoi qu’il en soit, nous considérons que la manière dont le compromis a été atteint est honorable pour tous les participants. Nous constatons que les votes ont évolué positivement à l’Assemblée nationale ; je pense notamment à nos partenaires du groupe socialiste, qui ont voté pour à l’Assemblée nationale, ce qui montre que le texte n’est pas totalement dépourvu de mérite.

M. Patrick Kanner. Chacun sa position…

M. Alain Richard. Je le rappelle, il n’a pas d’effet sur l’obligation vaccinale des professionnels. M. le rapporteur l’a souligné à juste titre, lorsque le Gouvernement réfléchira à une évolution, éventuellement à une levée de l’obligation vaccinale, il devra le faire de façon différenciée, car la situation des soignants « directs », si j’ose dire, c’est-à-dire des agents en contact avec les malades et les personnes hébergées dans les établissements spécialisés comme les Ehpad, n’est pas la même que celle des pompiers ou du personnel administratif du système hospitalier.

Un tel outil, qui permet d’ouvrir une perspective, a été créé, sans remettre en cause l’importance de la vaccination. Nous serons parmi ceux qui soutiendront le Gouvernement lorsqu’il poursuivra ses efforts pour vacciner l’ensemble des Français et, en particulier, les plus vulnérables. Nous avons donc toutes les raisons d’être satisfaits de l’accord trouvé en commission mixte paritaire, que nous voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme le président. La parole est à M. Alain Marc, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Alain Marc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien que la pandémie de covid-19 ne soit pas terminée, nous nous apprêtons à tourner la page de l’état d’urgence sanitaire. Voilà quelques jours seulement, près de 200 000 contaminations étaient quotidiennement enregistrées dans notre pays.

Des variants apparaissent encore ici et là, comme le variant centaure. Fort heureusement, ces contaminations n’ont plus les conséquences dramatiques massives d’il y a deux ans. Les hospitalisations ne submergent plus notre système de santé, bien que le virus continue de tuer. La couverture vaccinale de notre pays permet de faire face à l’afflux de patients qui ont besoin de soins.

Dans ces conditions, le Gouvernement n’a pas souhaité proroger l’état d’urgence sanitaire après le 31 juillet prochain. Il a proposé au Parlement de prolonger certaines mesures de veille et de surveillance de l’épidémie.

Après un examen rapide par les deux chambres du Parlement, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur ce texte, reprenant bon nombre des ajouts et modifications adoptés par le Sénat. Afin d’envoyer un message clair à nos concitoyens, notre commission a fait le choix d’abroger les dispositions de l’état d’urgence sanitaire, qui étaient vouées à devenir caduques le 31 juillet.

Les traitements de données nécessaires à la surveillance de l’épidémie sont prorogés de quelques mois. Bon nombre de situations exigent toutefois le recueil du consentement des personnes concernées.

Le Sénat a par ailleurs rétabli l’article 2 du projet de loi, qui prévoit la possibilité de contrôler les déplacements entre les outre-mer et la métropole, ainsi qu’entre l’étranger et le territoire national. Cet article avait été rejeté par l’Assemblée nationale, bien que les amendements de suppression n’eussent pas été adoptés.

Il était important de rétablir la possibilité pour le Gouvernement, en cas de menace sanitaire grave, de réguler ces déplacements, afin, le cas échéant, de limiter la propagation d’un variant.

Nous regrettons cependant le choix arrêté dans la dernière version du texte : seul un test négatif serait, dans un tel cas de figure, exigé des voyageurs. À l’heure où la quatrième dose est ouverte aux personnes vulnérables, il nous paraît nécessaire de rappeler à nos concitoyens combien la vaccination est utile et importante. Nous aurions souhaité qu’un justificatif de vaccination ou qu’un certificat de rétablissement, le cas échéant, puisse suffire.

Une autre disposition majeure du texte concerne la réintégration des soignants non vaccinés. Aucune mesure du projet de loi initial ne modifiait le régime actuel : cette réintégration était possible par décret du Gouvernement pris après avis de la Haute Autorité de santé.

La commission des lois a souhaité que la HAS devienne décisionnaire sur cette question. Nous le regrettons, car il nous semble qu’il y va d’une décision éminemment politique, qui aurait dû rester entre les mains du Gouvernement.

Il faut souligner en effet que les soignants, dans leur très grande majorité, ont fait le choix de la vaccination, parce qu’ils ont à cœur de protéger les patients et parce qu’ils ont confiance dans la science, dont ils sont eux-mêmes des praticiens.

Si actuellement le virus n’est plus aussi dangereux qu’auparavant, si les contraintes s’allègent, si la vie des Français se dirige de plus en plus vers un retour à la normale, c’est bien grâce à ceux qui ont fait le choix de se vacciner et non grâce à ceux qui ont refusé de le faire. Certains parmi nous continuent pourtant de penser le contraire, malgré la réalité qui se présente sous leurs yeux. Regardez donc du côté de la Chine ! À défaut de couverture vaccinale, le gouvernement y est réduit à confiner largement sa population.

Quoique ce projet de loi contienne des mesures nécessaires, certaines de ses dispositions ne satisfont pas pleinement l’ensemble de notre groupe. Aussi chacun d’entre nous votera-t-il en fonction de ses convictions. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Loïc Hervé. C’est beau ! (Sourires.)

Mme le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi mettant fin aux régimes d’exception créés pour lutter contre l’épidémie liée à la covid-19.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Mme le président. Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 125 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 239
Pour l’adoption 209
Contre 30

Le Sénat a adopté définitivement. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il n’y a pas de quoi être fier !

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19
 

7

Ordre du jour

Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 27 juillet 2022 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à seize heures trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER