M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud, pour explication de vote.

M. Rémi Féraud. La situation des transports en Île-de-France est très grave et nous allons au-devant, dans les prochains mois, d’un mur financier.

Je ne ferai pas de politique politicienne et ne vous parlerai pas de la gestion de Mme Pécresse. Ce n’est pas le lieu ; nous sommes ici pour rechercher des solutions.

Permettez-moi de vous dire tout de même, cher Philippe Dominati, que ce n’est pas la gauche qui demande l’augmentation du versement mobilité ! C’est Valérie Pécresse, présidente de région et d’Île-de-France Mobilités, qui nous a demandé de nous engager dans cette voie.

M. Christian Cambon. Car le Gouvernement n’a pas tenu parole !

M. Rémi Féraud. Elle l’a fait, parce que, grâce aux économies de fonctionnement, on peut sûrement acheter trois trombones de moins, mais où cela s’arrêterait-il, monsieur le ministre ?

Quand il n’y aura plus un seul conducteur de bus volontaire, nous aurons fait beaucoup d’économies de fonctionnement, mais nous n’aurons pas résolu les problèmes des transports publics.

Or les transports publics d’Île-de-France contribuent de manière essentielle à l’attractivité économique de la région, donc du pays, et les entreprises bénéficient également de notre système de transports.

Pourtant, les transports en commun sont un peu les demi-oubliés du « quoi qu’il en coûte ». Nous avions d’ailleurs dénoncé le fait que l’État décide de mettre en place des avances remboursables plutôt que d’assurer une prise en charge globale des conséquences de la crise.

Nous savons d’ores et déjà que les collectivités, en particulier la région, la Ville de Paris et le département des Hauts-de-Seine, vont devoir mettre la main à la poche.

Le Sénat a décidé de baisser la TVA à 5,5 %, si bien que, dans le cas où cette mesure perdure, l’État participera aussi au financement.

Les entreprises doivent-elles participer à ce tour de table financier pour passer le mur que j’évoquais à l’instant ? Je pense que ce serait logique et équitable.

C’est pourquoi nous voterons ces amendements qui prévoient d’augmenter le versement mobilité. (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. J’ai entendu certains se montrer favorables à une taxation qu’on pourrait appeler « premium »… Je voudrais leur rappeler que les entreprises de ces mêmes zones subissent déjà une surtaxe sur les bureaux de 40 % décidée il y a quelques années.

Tout le monde est bien content que ces entreprises soient installées en Île-de-France, y compris ceux qui habitent au-delà de la grande couronne et qui ont un RER direct pour se rendre à leur travail.

Serez-vous aussi contents, mes chers collègues, quand ces entreprises se délocaliseront dans les Hauts-de-France ou en Normandie, ce qui est assez facile maintenant avec le télétravail ?

Aujourd’hui, les entreprises participent au financement des transports en Île-de-France pour plus de 50 %. D’ailleurs, dans un rapport d’information de la commission des finances du Sénat sur les coûts et le financement du Grand Paris Express, cosigné par de nombreux parlementaires appartenant à quasiment tous les groupes politiques de notre assemblée, il est écrit que « taxer toujours davantage les entreprises franciliennes […] ne constitue pas une solution acceptable ».

Je sais que certains ont tendance à décrier les travaux de la Cour des comptes, mais son rapport annuel de février 2022 évoque des pistes d’évolution pour IDFM, dont l’une rejoint les travaux du Sénat, et l’augmentation du versement mobilité n’en fait pas partie.

C’est pourquoi je trouve intéressante la proposition du rapporteur général de tenir une conférence de financement dans les plus brefs délais afin de discuter du problème de manière globale.

Décider aujourd’hui d’augmenter le versement mobilité ne résoudra que partiellement le problème, d’autant que, comme le dit le rapport du Sénat que j’ai déjà cité, le financement du Grand Paris Express n’est lui-même pas assuré à ce stade : des ressources ont bien été trouvées pour la construction de ce nouveau réseau, mais qu’en est-il de son fonctionnement ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Ce qui a changé dans ce débat par rapport aux années précédentes, c’est l’urgence pour l’usager, que tout le monde reconnaît.

De ce point de vue, la conférence de financement proposée par le rapporteur général n’a pas de sens : ce qu’il faut, c’est changer le statut de l’Île-de-France et faire en sorte qu’elle ait les mêmes pouvoirs que les autres régions de France. C’est cela la véritable réforme à mener, mais de toute façon, nous n’avons pas le temps de le faire d’ici aux jeux Olympiques.

En tout cas, nous ne devons pas nous mettre d’accord sur le dos des entreprises, qui financent, Mme Lavarde l’a rappelé, 50 % du coût des transports en Île-de-France.

En fait, dans ce conflit entre la région, les départements et l’État, personne ne veut entamer le dialogue ! Il est plus simple, sous prétexte de paix sociale, de faire perdurer un système, alors qu’il ne fonctionne plus depuis des décennies.

Il s’agit de la région capitale et il est temps de mettre les choses sur la table. Nous avons par exemple un problème de qualité, mais on n’ose pas aborder le problème.

C’est pour ces raisons que je ne voterai pas ces amendements qui visent à augmenter le versement mobilité. La gauche défend cette position depuis des années ; c’est sa logique.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est Mme Pécresse qui le demande !

M. Philippe Dominati. Il revient maintenant à chacun de prendre ses responsabilités.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, ce que je regrette dans tout cela, c’est qu’on a l’impression que l’État est ailleurs.

M. Christian Cambon. Exactement !

M. Roger Karoutchi. En 2014, lorsque Jean-Paul Huchon, président de la région, a voulu mettre en place le passe Navigo à tarif unique, j’étais président de la commission des finances de la région et je m’étais opposé à cette décision, car j’estimais que nous n’en avions pas les moyens.

Jean-Paul Huchon avait alors fait venir Manuel Valls, Premier ministre, qui avait pris un certain nombre d’engagements sur le financement par l’État des transports publics en Île-de-France. Ces engagements n’ont pas été respectés.

Il en a été de même en 2020 : Édouard Philippe, Premier ministre, a également pris des engagements et ils n’ont pas été tenus.

Aujourd’hui, le Gouvernement semble rester en dehors du débat, tout en demandant aux autres de bien vouloir trouver une solution…

Or il pourrait tout à fait décider de transformer une partie des avances remboursables accordées durant la crise du covid-19 en dotations – cela simplifierait grandement les choses. Je rappelle que je m’étais opposé en commission mixte paritaire à ce système d’avances remboursables auquel le Gouvernement tenait. Finalement, on a l’impression que le Gouvernement n’assume pas ses choix.

Depuis le covid-19, l’État est intervenu massivement dans un certain nombre de secteurs : l’essence, l’électricité, le gaz… Il devrait le faire pour les transports publics, notamment en Île-de-France où il y a plusieurs millions d’usagers chaque jour.

Le Gouvernement ne peut pas, d’un côté, garder la responsabilité de nommer les PDG de la RATP et de la SNCF, de l’autre, ne pas financer les transports publics de la région. L’État doit assumer ses responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER. – Mme Éliane Assassi applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.

Mme Laure Darcos. Je voudrais aller dans le sens de Roger Karoutchi et citer un exemple. La SNCF a décidé de supprimer l’ensemble de ses guichets d’information en Essonne, alors même que de nombreux voyageurs ont du mal à se servir des bornes automatisées. C’est la région Île-de-France qui a dû prendre le relais.

Comme beaucoup de mes collègues, je me suis posé des questions sur ces amendements ; j’en ai parlé avec Christine Lavarde. Pourquoi taxer les entreprises, alors que nombre d’entre elles sont déjà aux abois ?

C’est évidemment compliqué, mais ces amendements visent en fait à défendre les TPE et les PME : elles ne sont pas concernées par le versement mobilité, alors qu’elles seraient touchées par une augmentation du passe Navigo, puisqu’elles doivent financer la moitié du passe de leurs salariés comme toutes les entreprises de la région.

Nous préférons donc demander un effort aux grosses entreprises et défendre les plus petites. Mais pensons toujours au fait que des transports de qualité permettent aux salariés d’arriver à l’heure à leur poste !

De la même manière que je soutiens la présidente de la région Île-de-France qui fait beaucoup d’efforts pour restructurer les réseaux ferrés de son territoire, je voterai les amendements identiques nos I-715 rectifié ter et I-958 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour explication de vote.

M. Philippe Tabarot. Bien que provincial – on me l’a assez reproché ! – (Sourires.), j’ai déposé l’amendement n° I-715 rectifié ter, parce que le combat d’IDFM pour éviter de devoir faire baisser drastiquement son offre de transport en commun me semble juste.

Tout d’abord, nous ne pouvons pas imputer ses besoins de financement urgents à une mauvaise gestion, bien au contraire. Sans recherche d’économies, c’est bien plus de 750 millions d’euros qu’il faudrait trouver.

Ensuite, IDFM est la plus importante autorité organisatrice des mobilités de France, puisqu’elle prend en charge près de dix millions de voyageurs en moyenne par jour.

J’ajoute que les projets d’extension et de modernisation du réseau arrivent : préexploitation du Grand Paris Express en 2023 ; extension de la ligne 14 jusqu’à Saint-Denis et Orly en 2024 ; RER E jusqu’à Nanterre en 2023. Ces projets avancent malgré l’absence de financements par l’État, pourtant promis par Édouard Philippe, Premier ministre.

Enfin, l’effort demandé est collectif. On en demande un à l’État, un aux collectivités locales – Valérie Pécresse montre l’exemple – et un aux usagers. Il est donc logique d’en demander un aux entreprises. En répartissant ainsi l’effort, la charge sera moins écrasante pour chacun.

En tout cas, une augmentation modérée du versement mobilité sera moins lourde à porter pour les entreprises, notamment pour les plus petites d’entre elles, qu’une augmentation de 25 euros du tarif du passe Navigo.

L’idée avancée par le rapporteur général d’une conférence de financement est intéressante, mais elle ne répond pas à l’urgence de la situation. C’est la raison pour laquelle je maintiens mon amendement. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Le groupe CRCE pense que l’État est en train de fuir ses responsabilités. En ce qui me concerne, je pense que le Gouvernement a des ambitions électorales sur la région… Mais sachez, monsieur le ministre, que cela n’intéresse en rien les usagers des transports publics !

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. Pascal Savoldelli. Revenons plutôt aux réalités : Île-de-France Mobilités est quasiment en faillite, sa capacité de désendettement atteint 14,57 ans. Or, quand une commune atteint un ratio de 12 ans, la chambre régionale des comptes se saisit de sa situation et définit pour elle une trajectoire de redressement. L’agence de notation Moody’s a d’ailleurs dégradé la note d’Île-de-France Mobilités.

Nous sommes donc dans une crise terrible et l’endettement va encore s’alourdir – on parle d’un montant de 4,9 milliards d’euros ! –, si Mme Pécresse décide de privatiser les bus de la RATP.

Il y a vraiment urgence à agir. On ne peut pas attendre un nouveau texte ni un énième PLFR !

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. En tant que présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, je ne suis pas très enthousiaste à l’idée d’accroître la fiscalité des entreprises, mais ce n’est pas notre assemblée, monsieur le ministre, qui le demande, c’est vous !

C’est vous, car vous êtes sourd à la situation d’urgence qui a été décrite sur quasiment l’ensemble de nos travées. Monsieur le ministre ; faisons une suspension de séance, proposez-nous une solution pour Île-de-France Mobilités et, immédiatement, nous retirerons nos amendements !

Je ne souhaite pas augmenter la fiscalité des entreprises, mais je voterai, malgré tout, les amendements nos I-715 rectifié ter et I-958 rectifié bis comme des amendements d’appel alimentant la navette parlementaire.

Il faut que le Gouvernement prenne ses responsabilités et trouve une solution à un problème qu’il a lui-même provoqué – je pense par exemple à la demande de transport pendant la crise ou aux jeux Olympiques. (M. Gabriel Attal, ministre délégué, fait un signe de dénégation.) Au moins, vous réagissez ! C’est heureux…

En tout cas, proposez-nous une solution et nous retirerons nos amendements.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. La question des transports est au cœur de la vie quotidienne des Franciliens et chacun peut mesurer la complexité de la situation et la difficulté de trouver une solution.

On demande à la région Île-de-France de boucler un budget pour IDFM dans un contexte figé et avec des opérateurs qu’elle ne maîtrise quasiment pas.

Néanmoins, il faut bien qu’elle approuve un budget et qu’elle trouve un équilibre pour assurer la continuité du service, sans réduire davantage l’offre de transport. Elle doit évidemment éviter d’aggraver la galère quotidienne des Franciliens.

Nous sommes parfaitement conscients de l’effort que nous demandons aux entreprises, en augmentant le plafond de 5 %. Je précise cependant de nouveau que nous pensions à l’origine le relever de 7,5 % et que les concertations avec la région nous ont amenés à proposer au Sénat un chiffre plus raisonnable.

Nous ne voulons pas par cet amendement figer les choses. Le Sénat est le représentant des territoires, il a une expertise reconnue sur la question des mobilités et nous estimons que l’effort doit être collectif.

Nous sommes prêts à assumer une augmentation du passe Navigo et du versement mobilité ; la région et les autres collectivités vont participer pour leur part à cet effort, mais nous devons aussi nous tourner vers l’État.

Pour conclure, nous devons bien avoir en tête que, si la question du financement du fonctionnement courant et de l’investissement d’Île-de-France Mobilités n’est pas réglée, nous allons vers de sérieux problèmes. Le président du conseil d’orientation des infrastructures évoque en effet le fait que nous sommes devant un « mur d’investissements » : il faudra certainement les doubler dans les années à venir.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je veux rebondir sur certains éléments qui ont été avancés.

On me dit que la conférence des financeurs est bien sympathique, mais qu’elle n’est pas suffisante… Et on ajoute aussitôt que personne ne veut entamer le dialogue – c’est ce que vient de dire par exemple Philippe Dominati. Une conférence des financeurs peut justement servir à cela, engager le dialogue. (M. Patrick Kanner proteste.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le dialogue existe déjà !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Un tel dialogue est indispensable au regard de la dégradation de la situation.

Je rappelle que, pendant la crise sanitaire, l’État a imposé des décisions aux collectivités, décisions qui ont provoqué les déséquilibres dont nous parlons. En contrepartie, si je puis dire, l’État a mis en place des avances remboursables. Comme Roger Karoutchi, il me semble tout de même étrange que celui qui vous impose une charge, à savoir fournir un service, vous laisse la financer entièrement… Cela n’est pas acceptable !

En tout cas, on le voit bien, cela provoque une dégradation du service et du mécontentement, tant de la part des usagers que de la part des entreprises, qui ont le sentiment de payer pour quelque chose qui ne répond pas aux besoins.

Monsieur le ministre, le fait générateur de tout cela, ce sont les décisions de l’État ; il n’est donc pas illogique – Roger Karoutchi l’a dit – que celui-ci transforme tout ou partie des avances remboursables en dotations.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Mes chers collègues, nous sommes dans une situation critique du fait de l’irresponsabilité du Gouvernement.

Et si nous ne votons aucun des amendements qui sont en débat à cet instant, nous allons tout droit vers une explosion sociale, en particulier quand il faudra expliquer aux usagers, qui subissent déjà de graves difficultés de transport, qu’ils devront payer leur passe Navigo 90 ou 100 euros !

M. Éric Bocquet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, pour explication de vote.

M. Sébastien Meurant. La France a le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé parmi les pays de l’OCDE, si bien qu’augmenter une taxe ne fait évidemment pas plaisir.

La conférence des financeurs est une idée intéressante, mais il faut travailler de manière globale sur toutes les mobilités – les trains, les bus, les routes, etc.

Mais que pouvons-nous faire à court terme ?

Cela a été dit, l’État n’a pas respecté ses engagements, en l’occurrence ceux pris par les deux derniers Premiers ministres ; il n’a plus de vision à long terme comme c’était le cas du temps de Georges Pompidou.

Sénateur du Val-d’Oise, je prends régulièrement les transports en commun, notamment la ligne H et le RER B, et de temps en temps ma voiture. Il est vrai que les normes pour le transport des animaux ne sont pas toujours respectées dans les transports publics d’Île-de-France… Chacun a déjà vu des photos où les voyageurs sont serrés comme des sardines.

Dans ces conditions, doit-on faire payer davantage les usagers pour un service qui n’est pas rendu ? La colère monte à la fois parmi ces usagers et parmi les personnes qui utilisent leur voiture. Les conditions de transport en Île-de-France se dégradent année après année.

M. Christian Cambon. Absolument !

M. Sébastien Meurant. Il faudra trouver une solution à moyen terme et il en existe, par exemple en utilisant l’intelligence artificielle.

Faire contribuer chacun un peu est aujourd’hui la moins mauvaise des solutions. Je n’en vois malheureusement pas d’autres à court terme. J’ajoute que le département du Val-d’Oise contribuera aussi de son côté.

M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.

M. Hervé Marseille. Je partage évidemment le diagnostic qui a été posé par tout le monde ce soir, mais ce qui me choque, c’est qu’aucun de ces amendements ne réglera le problème, cela risque même de faire empirer les choses.

Ces amendements provoquent une division entre la province et Paris. Stéphane Le Rudulier a évoqué la situation d’Aix-Marseille-Provence : on s’en moque. D’autres ont parlé de l’agglomération de Lyon : qu’ils se débrouillent !

Maintenant, nous parlons de l’Île-de-France et, à la demande de la région, on nous propose une taxation supplémentaire dans certaines communes, explicitement nommées, et dans certains départements où on utiliserait un zonage. À un moment donné, il faudra quand même regarder qui doit payer quoi, quels sont les potentiels fiscaux et où sont localisées les entreprises !

Je rappelle qu’il existe déjà une taxation spécifique sur les bureaux et les parkings au bénéfice de la Société du Grand Paris (SGP). Ce serait donc la double peine pour ces territoires !

Et tout cela, pour quoi faire ? Des trains qui ne seront inaugurés qu’après les jeux Olympiques ! Vous parlez d’un bonheur…

L’État, la région et les départements n’ont pas été foutus – pardonnez-moi l’expression – de régler le problème et nous devrions voter dans l’urgence pour pallier cette défaillance. Et on ne fait pas dans la dentelle : on désigne des cibles et on les taxe !

Cela ne va rien régler, mais fera référence pour l’avenir : on se servira ici ou là selon les potentiels fiscaux des uns et des autres.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ces amendements, parce que nous avons conscience de la situation explosive dans laquelle se trouve l’Île-de-France. L’État a été défaillant et il continue d’être absent ; nous devons donc prendre des mesures. Le ministre ne s’est d’ailleurs pas exprimé ; il est certainement très mal à l’aise. (M. Gabriel Attal, ministre délégué, sen défend.)

Néanmoins, je voudrais insister sur la différence de traitement qui se creuse de plus en plus entre la province et Paris.

Je le redis, la situation de Marseille et de la métropole d’Aix-Marseille-Provence est dramatique, ce qu’a d’ailleurs reconnu le Président de la République. Et pourtant, nous ne faisons rien !

Notre assemblée, nous l’avons vu tout à l’heure, refuse de faire quoi que ce soit pour la métropole d’Aix-Marseille-Provence, pour celle de Lyon ou pour les autres territoires concernés par ce problème. Mais pour Paris, c’est différent !

Mes chers collègues, il me semble que vous manifestez une certaine incohérence dans vos votes. En tout cas, en ce qui nous concerne, nous voterons ces amendements en faveur de Paris. Nous, provinciaux, serons solidaires ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Madame Primas, nous pourrions demander une suspension de séance et essayer entre nous de trouver une solution. Il me semble toutefois qu’il manquerait quelques personnes autour de la table : la présidente de la région Île-de-France et d’IDFM, le nouveau PDG de la RATP,…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il n’a pas le droit de vous parler !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. J’ai le droit de l’appeler !

Il manquerait aussi les représentants des entreprises, qui sont évidemment très concernés par ce sujet, ainsi que ceux des usagers.

Mme Sophie Primas. Il y a déjà eu des réunions.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je suis élu d’Île-de-France et je suis parfaitement conscient des difficultés que les usagers rencontrent dans les transports collectifs. Prenez le métro à la station Malakoff-Plateau de Vanves, celle qui est en bas de chez moi, vous devrez en laisser passer quelques-uns aux heures de pointe avant d’espérer pouvoir monter dans une rame…

Quelle réponse apporter à cette situation ?

Le rapport de la Cour des comptes sur les transports collectifs en Île-de-France, cité par Christine Lavarde, est utile de ce point de vue, mais il dit clairement qu’il n’y a pas de solution magique.

Nous devons notamment travailler sur le modèle de financement. Aujourd’hui, les transports publics d’Île-de-France sont majoritairement financés par un impôt sur les entreprises et nous devons peut-être trouver d’autres sources de financement.

Nous devons regarder les économies qu’il est possible de réaliser.

Monsieur Karoutchi, vous avez dit qu’il vous semblait que l’État était ailleurs. D’autres ont dit que l’État fuyait ses responsabilités. Pourtant, le rapport de la Cour des comptes dit qu’il y a eu, ces trois dernières années, « une intervention massive et inconditionnelle de l’État » pour Île-de-France Mobilités. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Inconditionnelle ? Ce terme n’est pas approprié.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. C’est la Cour des comptes qui le dit, monsieur le rapporteur général. Vous utilisez souvent des arguments de la Cour des comptes dans nos débats ; faites-le cette fois-ci aussi… Je le redis, la Cour des comptes parle d’une intervention massive et inconditionnelle de l’État pour Île-de-France Mobilités.

Nous avons apporté 2 milliards d’euros de soutien à Île-de-France Mobilités pendant la crise covid. (M. Rémy Pointereau renchérit.)

Ces amendements laissent penser qu’on peut régler le problème en augmentant les impôts sur les entreprises.

Mme Sophie Primas. Pas uniquement !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. De notre côté, nous estimons – souffrez que ce soit notre position – qu’il ne faut pas augmenter les impôts de production et qu’il faut même les diminuer.

M. Emmanuel Capus. Très bien !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Vous avez d’ailleurs fait le choix, lors de l’examen de ce PLF, de revenir sur la suppression de la CVAE que nous proposions.

Nous ne souhaitons pas que ce texte, dont un objectif initial était de baisser les impôts de production sur les entreprises de 4 milliards d’euros, ressorte de nos débats avec une augmentation de 1 milliard !

M. Pierre Laurent. Mais que proposez-vous ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je rappelle que le produit du versement mobilité a été très dynamique cette année : il a augmenté de 800 millions d’euros au niveau national pour dépasser les 10 milliards. Cela a représenté un gain de 200 millions d’euros pour Île-de-France Mobilités.

Pourquoi le versement mobilité augmente-t-il ? Parce que la masse salariale augmente. Pourquoi augmente-t-elle ? Parce que les entreprises embauchent. Pourquoi embauchent-elles ? Parce que nous diminuons les impôts et la pression fiscale sur les entreprises ! (M. Emmanuel Capus applaudit.)

Ces amendements qui visent à augmenter les impôts de production…

Mme Sophie Primas. C’est uniquement un plafond !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. … me semblent constituer une solution de court terme, mais à moyen et long terme, ils entraîneront une attrition des emplois, de la masse salariale, puis finalement des recettes du versement mobilité. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

Nous ne sommes pas en train de débattre de la mission de la seconde partie consacrée aux transports. Nous ne sommes pas non plus au conseil régional d’Île-de-France. Nous ne sommes pas davantage au sein des instances dans lesquelles il est discuté du sujet. Comme je l’ai indiqué, la question est prise en charge par la Première ministre elle-même et par mes collègues Christophe Béchu et Clément Beaune, qui a la responsabilité des transports.

Monsieur Karoutchi, vous avez affirmé que j’aurais une position fermée sur les avances remboursables. Pourtant, la question des avances remboursables a été posée précédemment par le rapporteur général et, que je sache, vous ne m’avez pas vu me lever et dire que je ne voulais pas en entendre parler ni en discuter !

M. Pascal Savoldelli. Il faut arrêter de mentir dans l’hémicycle !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je dis simplement qu’il y a un travail qui se poursuit avec la Première ministre et les ministres concernés pour envisager toutes les solutions possibles. Néanmoins, gardons-nous des solutions simplistes et cessons de mettre tout cela sur le dos de l’État, en affirmant qu’il pourrait transformer les avances remboursables en dotations !

J’ai entendu M. Savoldelli faire référence aux agences de notation – j’en étais très heureux –, notamment à Moody’s, et souligner l’importance de suivre leurs recommandations.