M. Rémi Féraud. Le déséquilibre qui caractérisait votre politique lors du premier quinquennat se poursuit donc, avec l’approbation de la majorité sénatoriale, à laquelle, on l’a bien senti tout au long des débats, le budget présenté convient pour l’essentiel.

Ensemble, vous persistez dans cette politique économique et fiscale en faveur du capital, alors que vous devriez avoir deux priorités : le travail et le climat.

Avant de conclure, je veux revenir sur l’enjeu essentiel qu’est celui des collectivités territoriales.

Après la taxe d’habitation, le Gouvernement s’attaque cette année à une autre ressource : la CVAE. La méthode et la conséquence sont les mêmes : dès que vous actez une baisse d’impôt, l’État s’appauvrit en perdant des recettes de TVA, et les collectivités territoriales aussi s’appauvrissent, car elles sont la variable d’ajustement.

Toutefois, contre l’avis du Gouvernement, la discussion du texte par le Sénat a été l’occasion de progrès notables, souvent arrachés, disons-le clairement, à la majorité sénatoriale. C’est notamment sur l’initiative de notre groupe que la Haute Assemblée a eu la sagesse d’annuler la suppression de la CVAE ; je m’en réjouis. Elle a également adopté le principe de l’indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation, que nous proposions, et a amélioré le filet de sécurité pour les collectivités.

Grâce à ces votes, le Sénat montre qu’il est et reste la chambre qui défend les territoires. Qu’en restera-t-il ? Qu’il décide ou non de recourir au 49.3, le Gouvernement doit maintenant prendre ses responsabilités et les assumer devant les élus locaux et devant nos concitoyens.

Mes chers collègues, nos votes en faveur des collectivités ne bouleversent néanmoins pas le déséquilibre profond d’un budget injuste et imprévoyant. Les chiffres de l’Insee ont montré cette semaine que les deux dernières années ont été favorables aux plus riches de nos concitoyens. Je vous l’annonce : avec ce budget, l’année prochaine le sera également !

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera évidemment contre la première partie de ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées des groupes CRCE et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Pascal Savoldelli. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « qu’est-ce que provoquer ? C’est avoir le courage d’affronter des idées reçues, de s’opposer à la pensée majoritaire ». Ce n’est pas de moi, c’est d’Élisabeth Badinter…

Par le dépôt d’une question préalable, défendue en séance par notre présidente, nous nous étions opposés à ce texte. Le groupe CRCE exprimait ainsi ses craintes quant aux conditions politiques posées par le Gouvernement, qui menaçaient de fausser le débat, le plaçant sous l’arbitrage des droites du Sénat. On vient d’en constater les résultats, avec l’adoption de trois amendements de la commission par lesquels le Sénat s’excuse, baisse la tête, admet s’être trompé, reconnaît que le Gouvernement avait raison et qu’il faut faire attention…

Ensuite, on a brandi la menace de la navette. Je vous ai demandé d’arrêter avec cette menace, monsieur le ministre, vous avez obtempéré ; dont acte. Mais que venez-vous encore de faire, voilà quelques instants ? De nouveau vous nous avez menacés, en nous disant, en substance : « faites gaffe, vu ce que vous avez voté, il va falloir trouver 10 milliards d’euros de dépenses publiques en moins ! » Cela s’appelle un 49.3, non pas juridique, mais politique !

M. Pascal Savoldelli. Dans ce contexte, notre comportement et nos amendements ont été ceux d’une opposition politique de gauche aux choix budgétaires du Gouvernement et à l’invocation à quatre reprises du 49.3 – pour les budgets de l’État, des collectivités et de la sécurité sociale –, sans compter, dans l’intervalle, un cinquième passage en force…

La démocratie parlementaire est encore une fois malmenée. Notre démocratie, qui devrait pourtant, dans le contexte d’une absence de majorité, tenir enfin toutes ses promesses, s’apparente à une succession de coups de boutoir donnés au peuple, à ses aspirations, à ses représentants. Il suffisait pour s’en convaincre d’entendre le mot « Défavorable ! » répété d’innombrables fois par M. le ministre, tantôt laconiquement, tantôt en conclusion d’une tirade libérale, éventuellement moralisatrice.

Les débats se sont donc tenus sous le joug du 49.3, dans la ligne de mire d’un gouvernement « défavorable » par principe aux propositions responsables des oppositions.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, certes, « les erreurs font partie de la vie ». Mais « c’est la réponse qu’on leur oppose qui est importante ». Le Sénat a voté, nous nous en félicitons, pour le maintien de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Plutôt que d’acter que la seule assemblée ayant pu en débattre rejette la disparition de cet impôt, le Gouvernement persiste, en se gardant bien de rappeler que les élus locaux sont farouchement attachés à la territorialisation de la valeur ajoutée, à ce lien économique entre la commune et le lieu de production.

En effet, la CVAE n’est pas si décriée que cela par les entreprises, n’en déplaise à certains. Sur quoi les chefs d’entreprise se focalisent-ils ? Sur les infrastructures et sur la qualité du bassin d’emploi et du réseau de service !

Du reste, cette suppression est une aberration pour une France dont le ministre Le Maire a dit qu’elle était « à l’euro près » ; elle l’est tellement, à l’euro près, que le Gouvernement passe outre au débat parlementaire et entend faire voter une suppression pérenne de CVAE qui nous coûte 9 milliards d’euros. Bonjour « l’euro près »…

Pourtant, tous le concédaient : une telle suppression n’était ni possible – la Cour des comptes le soulignait elle-même – ni souhaitable et, en toute hypothèse, ce n’était pas le moment !

Il arrive que les différents groupes du Sénat votent dans le même sens ; il est plus rare que ce soit pour les mêmes raisons. L’exigence de clarté et la responsabilité m’obligent à vous le dire, mes chers collègues : le groupe CRCE est pour la préservation et le renforcement de la fiscalité économique territoriale, il plaide pour une refonte, du sol au plafond, de la fiscalité des entreprises.

Monsieur le ministre, il faudra respecter ce vote. Nous vous le demandons avec solennité : respectez ce vote ! Cette décision souveraine engage notre pays et elle vous engage.

Je souhaite maintenant dire quelques mots sur un amendement qui a été adopté par le Sénat.

Veuillez m’excuser d’employer ce mot, mes chers collègues, mais il s’agit, selon moi, d’un amendement scélérat.

Juste avant la séance, un amendement du Gouvernement, identique à celui-ci, avait été retiré : il fallait protéger le ministre, ainsi en avait décidé l’Élysée. Par conséquent, on est passé par les sénateurs En Marche, Renaissance, RDPI ou, pour simplifier – je ne sais jamais comment vous nommer, mes chers collègues –, de la majorité présidentielle : c’est plus discret et moins engageant.

Cet amendement, c’est peu de le dire, aidera les grandes entreprises, puisque ce sont les seuls agents économiques à s’assurer eux-mêmes, via une filiale, ce qui constitue d’ailleurs un outil d’optimisation des plus agressifs. Les captives de réassurance sont pour la plupart hébergées au Luxembourg, en raison de la « fiscalité attractive » de ce pays, version euphémisée de « paradis fiscal au cœur de l’Europe ».

Par cet amendement est rendue non imposable la provision constituée auprès d’une filiale en prévision de dommages aux biens professionnels et agricoles, de catastrophes naturelles, en matière de responsabilité civile générale, et j’en passe.

Que s’est-il passé ? En gros, on est passé par la bande pour faire un cadeau aux plus grandes entreprises. C’est un non-sens économique, c’est la preuve d’un capitalisme qui considère que tout est marchandise, y compris, monsieur le ministre, le travail.

Mon groupe a été, comme d’autres, force d’idées et de persuasion, militant en faveur d’avancées majeures pour les collectivités territoriales : l’indexation de la DGF sur l’inflation, bien que nous préférions une indexation pérenne, la compensation pour les départements de la revalorisation du RSA calée sur l’inflation, l’engagement pris de réviser les valeurs locatives des locaux d’habitation ou encore l’intégration au fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) des dépenses d’aménagement et d’agencement de terrain.

Néanmoins, pour toutes les raisons énumérées au début de mon intervention, puisque, malheureusement, les seuls qui sont rassurés ce soir sont ceux qui font des profits et des superprofits, le groupe CRCE votera contre la première partie de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER. – M. Daniel Breuiller et Mme Nathalie Goulet applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Franck Menonville applaudit également.)

Mme Sylvie Vermeillet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant que nous ne nous prononcions solennellement sur la partie relative aux recettes de ce premier projet de budget de la législature, je veux revenir sur les grandes orientations que ce texte fixe et sur les points de vigilance signalés par le groupe Union Centriste.

Nous avons consacré les précédentes lois de finances initiales et rectificatives au sauvetage de notre économie, à la suite de la crise sanitaire, et l’examen de ce PLF pour 2023 a débuté le lendemain de l’adoption, par la Haute Assemblée, d’un second collectif budgétaire pour 2022, lui-même destiné à protéger les Français des dangers que représentent l’inflation élevée, la guerre en Ukraine et les aléas climatiques.

La succession de ces crises, qui sont loin d’être conjoncturelles, met lourdement à contribution nos finances publiques. Or le resserrement de la politique monétaire amorcé par la Banque centrale européenne pour juguler l’inflation change inéluctablement la donne budgétaire.

Dans ces conditions, certes nouvelles, mais attendues, les membres du groupe Union Centriste ont abordé l’examen de ce PLF dans un esprit de responsabilité. Fidèles à notre ligne constructive, nous avons été force de proposition.

Oui, nous devons collectivement concourir au redressement des comptes publics, afin de conserver la maîtrise de notre destin. Notre groupe juge néanmoins impératif d’associer à la maîtrise des dépenses publiques l’optimisation des rentrées fiscales dans les caisses de l’État.

En votant pour la suppression de l’article 5, nous avons décidé le maintien, pour l’année 2023, de 4 milliards d’euros de CVAE, actuellement perçus par le bloc communal et par les départements. L’objectif, ce faisant, n’est pas seulement de préserver l’autonomie financière des collectivités locales, il est aussi de sauvegarder de substantielles ressources publiques dont on ne peut se priver, fût-ce pour financer un soutien exceptionnel aux entreprises.

Nous avons également inséré dans ce projet de budget plusieurs de nos propositions volontaristes visant à rationaliser notre système fiscal, dans un double souci d’efficacité économique et d’équité sociale. Je pense au remplacement de l’impôt sur la fortune immobilière par un impôt sur la fortune improductive, mais également à la suppression d’une niche fiscale implicite sur la transmission du patrimoine des plus fortunés, qui permettait de contourner l’impôt sur le revenu en exploitant une faille du nouveau plan d’épargne retraite issu de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte).

En faisant adopter notre amendement, nous avons corrigé une anomalie, qui se chiffrerait, d’après certaines estimations, à plusieurs milliards d’euros, mais qui ne fait l’objet d’aucune évaluation dans l’article d’équilibre qui nous a été présenté.

Par ailleurs, nous nous réjouissons d’être parvenus, avec le concours et l’aval du rapporteur général de la commission des finances, à améliorer et à renforcer le dispositif du filet de sécurité destiné aux collectivités territoriales. Monsieur le ministre, les élus du bloc communal, qui sont confrontés à l’explosion de leurs dépenses d’approvisionnement en énergie, ont besoin d’une réponse claire, lisible et rapide. Nous espérons vivement que le dispositif adopté par le Sénat survivra au 49.3 !

Voilà un balayage, nécessairement rapide et non exhaustif, des apports du Sénat et de notre groupe ; nous souhaitions mettre en valeur ces quelques dispositions avant le vote sur l’ensemble de la première partie qui aura lieu dans quelques minutes.

Monsieur le ministre, vous venez de tracer pour nous une trajectoire d’économies, nous assignant à la respecter dans l’examen de la seconde partie du PLF. Je veux tout de même vous rappeler que nous vous avons proposé, au cours des huit derniers jours, des milliards d’euros de recettes supplémentaires ou de suppressions de dépenses fiscales.

M. Rémi Féraud. C’est vrai !

Mme Sylvie Vermeillet. Parce qu’elles ne vous conviennent pas, vous les ignorez. Le groupe Union Centriste est pourtant allé bien au-delà du redressement attendu et je vous prie d’en prendre acte.

Bien évidemment, nous regrettons de ne pas avoir pu élargir la contribution exceptionnelle de solidarité du seul secteur de l’énergie à l’ensemble des activités économiques. Il demeure inacceptable de taxer sans limites certains acteurs, particulièrement ceux qui ont besoin de ressources pour réussir leur transition écologique, quand d’autres, non concernés, continuent d’accumuler des profits records.

Cette obstination à instaurer des privilèges dans un contexte de déficit public excessif engage la responsabilité du Gouvernement, mais nous ne savons pas exactement de quoi sera faite l’année 2023 et peut-être n’aurons-nous plus le choix dans quelques mois.

Quoi qu’il en soit, mes chers collègues, le groupe Union Centriste se réjouit de la qualité des échanges que nous avons eus dans cet hémicycle et il continuera d’être force de proposition dans la suite de l’examen de ce PLF.

Il votera en faveur de la première partie du projet de loi de finances pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. le rapporteur général, ainsi que MM. Franck Menonville et Thierry Cozic, applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Bilhac, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Christian Bilhac. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’issue de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023, l’heure est à la fois à la prospective et au bilan.

Après un budget pour 2021 placé sous le signe du covid-19 et un budget pour 2022 sous celui des élections, le budget pour 2023 s’inscrit sous le signe du bouclier énergétique et d’une inflation qui s’installe.

Je rappellerai pour commencer que, l’année dernière, notre débat budgétaire avait été tronqué par le rejet de la première partie du PLF par une majorité de circonstance, nous privant de la discussion sur la seconde partie du budget. Pour sa part, le groupe du RDSE avait voté en faveur de la première partie, non en signe d’assentiment, mais pour permettre la poursuite de la discussion et conforter ainsi le rôle du Sénat et le bicamérisme, auquel notre groupe est très attaché. Je me réjouirai donc si, comme on peut l’espérer, la discussion budgétaire va à son terme cette année.

Notre examen de ce texte a été marqué par un fil directeur : la prise en compte du contexte énergétique et inflationniste en tant qu’il pèse sur les particuliers, sur les entreprises et sur les collectivités locales.

Si je regrette le report à des temps meilleurs de la réduction de notre dette abyssale, je comprends la volonté du Gouvernement de répondre aux demandes et aux inquiétudes.

Les débats du Sénat ont été occupés par des questions portant sur la taxation des profits, sur l’impôt sur le revenu et sur la redistribution, mais aussi sur la fiscalité outre-mer, avec l’amendement de notre collègue Stéphane Artano.

Pour ma part, j’avais déposé deux amendements, qui n’ont pas été adoptés ; je le regrette. Si je me félicite que le Sénat ait rendu facultatif le partage de la taxe d’aménagement entre les communes et les intercommunalités, je déplore que n’ait pas été adopté mon amendement visant à instaurer le paiement de cette taxe à l’ouverture du chantier plutôt qu’à la déclaration d’achèvement des travaux. Cela plongera nombre de collectivités et de particuliers dans des difficultés financières dont nous reparlerons…

Autre regret : le rejet de mon amendement sur le report de la révision des valeurs locatives pour les locaux d’habitation. Je continue de penser que, face aux difficultés et aux incohérences constatées dans le processus de révision concernant les locaux professionnels, c’est une erreur de continuer selon le même canevas. Il eût fallu tirer les conclusions de telles difficultés et laisser beaucoup plus de marge de manœuvre aux commissions communales des impôts directs. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on risque d’arriver rapidement à un constat d’échec.

Je regrette enfin le rejet de nombreux autres amendements déposés par le groupe du RDSE.

Ces remarques étant faites, je me réjouis néanmoins que de nombreux amendements favorables aux collectivités territoriales aient été adoptés. Je tiens en particulier à évoquer l’indexation de la DGF sur l’inflation et les mesures relatives à la dotation de solidarité rurale (DSR), favorables à la ruralité.

À l’occasion des précédentes discussions budgétaires, j’avais déposé des amendements visant à rééquilibrer modestement, en faveur des territoires ruraux, la péréquation mise en œuvre via la DSR. Le texte du Gouvernement va en ce sens et dépasse même mes demandes, en consacrant 200 millions d’euros supplémentaires à la DSR, contre 90 millions pour la dotation de solidarité urbaine et 30 millions pour les dotations d’intercommunalité.

Le critère de répartition de la DSR a également été redéfini, avec la mise en place d’un indicateur prenant en compte la superficie, la densité et la population. Pour ma part, je persiste à penser que la longueur de voirie constituait un meilleur critère, mais je retiens l’effort consenti en faveur de la ruralité, qui tend à réduire l’écart entre la DSR et la DSU (dotation de solidarité urbaine). On commence à comprendre qu’un pauvre des champs doit être aidé tout autant qu’un pauvre des villes, même s’il reste encore bien du chemin à parcourir…

Je me félicite également que le critère du potentiel financier ait été supprimé pour l’attribution de la dotation particulière « élu local ».

En ce qui concerne le FCTVA, je me félicite de l’adoption de l’amendement visant à permettre aux collectivités d’en bénéficier de nouveau pour les acquisitions et aménagements de terrain ainsi que pour les travaux en régie.

Après ce rapide panorama, j’indique que, pour ma part, je voterai pour la première partie de ce PLF, en espérant que les travaux du Sénat seront pris en compte dans la version définitive du texte et que la commission mixte paritaire sur ce projet de loi se tiendra dans le même esprit que celle qui s’était réunie pour examiner le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022, dont nous examinerons les conclusions demain.

Les membres du groupe du RDSE se prononceront majoritairement en faveur de la première partie de ce projet de loi, en attendant la fin de la discussion budgétaire. (Applaudissements sur des travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Christine Lavarde. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à adresser mes félicitations au rapporteur général et au ministre, qui viennent de réussir une épreuve physique difficile et inédite. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Maryse Carrère et Daphné Ract-Madoux applaudissent également.) J’ai compté : nous avons siégé cinquante-sept heures pour examiner la première partie de ce texte !

Aussi, monsieur le ministre, je vous invite à courir avec moi un semi-marathon organisé dimanche prochain aux limites de votre circonscription. Je ne sais pas si la performance sera au rendez-vous, mais, au moins, l’endurance ne devrait pas poser problème… (Sourires.)

M. François Bonhomme. C’est bon pour la santé !

Mme Christine Lavarde. Trêve de bons mots…

Comme j’ai quelques doutes sur les conclusions de la CMP et comme, par ailleurs, Noël approche, j’ai envie de vous adresser une petite liste, monsieur le ministre, sur les sujets que nous avons mis en avant et sur les dispositions qu’il nous semble important de conserver dans le texte, dans l’intérêt du pays.

Nous avons défendu un certain nombre de mesures, qui ont été adoptées, de soutien aux entreprises, notamment aux PME ; je pense notamment à la revalorisation du plafond en deçà duquel il est possible d’être assujetti à un taux réduit de l’IS.

Nous avons également demandé que le filet de sécurité soit potentiellement accessible à toutes les communes. J’y insiste, soumettre cet accès à des critères – la richesse ou l’épargne – n’a aucun sens quand on vit un choc inflationniste d’une telle ampleur.

Mme Christine Lavarde. Le dispositif que nous vous avons proposé me paraît juste, car il permet de réserver un pourcentage des recettes pour financer les autres chocs inflationnistes – revalorisation du point d’indice, alimentation ou autre – et de garantir un soutien de l’État à toutes les communes.

J’ajoute que, pour relancer l’investissement local, particulièrement important en cette période – le premier investisseur public n’est pas l’État, ce sont les collectivités territoriales –,…

Mme Christine Lavarde. … il faut réintégrer parmi les dépenses éligibles au FCTVA les dépenses d’aménagement de terrain. Sans cela, un très grand nombre de communes, notamment les plus petites, ne pourraient plus faire vivre les entreprises locales en leur demandant d’aménager un cimetière, de créer un terrain de football, etc.

Enfin, avant d’attaquer l’examen de la seconde partie, je veux revenir sur mes propos antérieurs.

Il est des sujets, comme celui de l’énergie, dont nous savions et dont vous saviez qu’ils se trouveraient nécessairement au cœur de ce PLF. Or, pour examiner convenablement les mesures budgétaires, nous avons besoin d’avoir le même niveau d’information que vous, sans quoi, au travers de la représentation nationale, c’est aux Français que l’on cache des choses. Ainsi, plus j’entends vos explications, plus j’ai de questions à vous poser.

Monsieur le ministre, vous nous avez attaqués sur notre crédibilité au regard du projet de loi de programmation des finances publiques, mais, contrairement à vous, nous n’avons pas la possibilité de sortir de notre chapeau des milliards d’euros de recettes imprévues.

Vous nous annoncez par exemple un montant pour le produit de la contribution sur la rente inframarginale ; je le mets en regard des annonces concernant les amortisseurs. Si l’on tire tant de recettes de cette contribution, cela implique de consacrer davantage aux amortisseurs, sinon le dispositif ne fonctionne pas et un certain nombre d’acteurs économiques se retrouveront en très grande difficulté l’année prochaine.

Je le sais, vous allez m’inviter à un groupe de travail sur le sujet (Sourires.), mais je ne suis pas sûre qu’un tel groupe ait le temps, d’ici à vendredi prochain, de se réunir…

En tout état de cause, nous allons devoir continuer de travailler ensemble sur un certain nombre de sujets ; je me demande d’ailleurs s’il ne faudra pas commencer dès le 1er janvier. Il est en effet indispensable de constituer un groupe de travail pour étudier la question des valeurs locatives et de s’engager dès à présent dans la révision des valeurs locatives d’habitation, que l’on ne pourra pas éternellement reporter. Surtout, il faut à tout prix éviter de faire cette révision en 2025, très mauvaise année pour mettre en œuvre une telle réforme… (Nouveaux sourires.)

Il nous faudra également travailler sur le financement des transports. L’Île-de-France sera de nouveau l’objet de débats en seconde partie ; mais les amendements présentés hier montrent que ce problème va bien au-delà du seul périmètre de cette région. Il y va de la décarbonation de notre économie et, plus largement, de la réussite de la transition écologique à laquelle tous nous aspirons.

Il conviendra sans doute aussi de débattre du fonds vert. On n’en connaissait pas grand-chose ; plus nous en entendons parler, plus il semble s’apparenter à un ramassis de tout ce que nous ne savons plus financer ailleurs – nous en débattrons de nouveau vendredi prochain dans cet hémicycle.

Surtout, il va falloir sans attendre nous mettre autour de la table pour définir les modalités de compensation de la suppression de la CVAE pour les collectivités. Je le redis, notre groupe est très attaché à la baisse des impôts de production. Le seul élément qui nous a heurtés dans l’article 5 tel qu’il était proposé par le Gouvernement, justifiant que nous ne puissions le voter, c’est que nous ne savions absolument pas, ne disposant d’aucune information ni d’aucune garantie en la matière, si les modalités de compensation de cette suppression pour les collectivités permettraient d’assurer le dynamisme de leurs recettes.

En somme, monsieur le ministre, si des groupes de travail s’étaient réunis avant le début de nos débats, alors nous aurions peut-être pu tomber d’accord sur un texte conciliant baisse des impôts de production et garantie dans la durée de recettes dynamiques pour les collectivités.

À l’issue de cette première partie du projet de loi de finances, nous avons envie de vous inviter à continuer de travailler avec nous et, surtout, à partager davantage d’informations, afin que nous en sachions autant que vous au moment de légiférer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (M. Franck Menonville applaudit.)

M. Emmanuel Capus. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, un budget a pour objectif de rassurer les Français ; cela est particulièrement vrai cette année. Il s’agit de rassurer les Français sur notre solidarité face à l’inflation ; sur notre volonté de tenir le cap, malgré les incertitudes liées à la crise en Ukraine ; sur notre sérieux budgétaire.

Il faut faire tout cela à la fois. Mais l’urgence, cette année, est avant tout de maîtriser les coûts de l’énergie : leur hausse menace la stabilité de notre économie. Nous avons, à cette fin, voté des mécanismes de soutien face à l’inflation ; le Sénat les a drastiquement renforcés pour ce qui est des collectivités en supprimant même tout critère d’éligibilité au filet de sécurité.

En l’espèce, l’amendement du rapporteur général sur l’article 14 ter est nécessairement coûteux, même si j’ai bien compris que son impact n’était pas chiffré dans l’article d’équilibre.