M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° II-921.

Mme Éliane Assassi. Il vient d’être très bien défendu.

Mon groupe a toujours souligné que la connaissance de la langue française était l’une des conditions de l’intégration dans notre pays ; elle est d’ailleurs exigée par l’administration. Cette exigence sera au cœur du projet de loi sur l’immigration qui devrait être présenté au début de l’année 2023. Sans moyens mis en œuvre pour l’apprentissage de la langue, cette exigence peut devenir discriminatoire ou, pire encore, un facteur d’invisibilisation, voire d’exclusion, des étrangers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial. Je suis heureux que nous tombions d’accord : parler le français est l’une des conditions de l’intégration – à entendre certains propos, on pourrait en douter.

Le montant de la dotation proposée est de 200 000 euros : de nouveau, on est dans les bonnes intentions.

J’invite Mme Assassi à écouter ce que j’ai dit en ouverture de ce débat : rien d’insultant ni d’ostracisant dans mes propos. Je l’ai connue beaucoup moins idéologue lors des travaux de la commission d’enquête sur McKinsey…

Mme Éliane Assassi. Quel rapport ? C’est de la provocation !

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial. Je ne m’intéresse qu’aux faits : je me défends de l’idéologie. Lorsque j’évoquais le lien entre insécurité et immigration, je ne faisais que relever un fait, puisque tout le monde reconnaît ce lien, y compris le Président de la République et le ministre de l’intérieur.

Peut-être n’aurais-je pas dû évoquer Georges Marchais, paix à son âme ? Vous avez dû bien le connaître… (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. Pas de provocation, monsieur le rapporteur spécial : quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial. Défavorable, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. Tous les étrangers en situation régulière et qui souhaitent s’installer durablement dans notre pays bénéficient, vous l’avez rappelé, de cours de langue dans le cadre du bien nommé contrat d’intégration républicaine.

Par contre, pour ce qui est des autres, votre proposition me semble soit en dehors de la loi soit satisfaite : un certain nombre d’associations financées par l’État s’occupent activement, entre autres, de donner des cours de français à ces personnes. Pourquoi créer des doublons, et ce, au surplus, d’une manière contestable ?

Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-828 et II-921.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° II-922, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Régularisation des travailleurs sans papiers

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

 

1

 

1

Intégration et accès à la nationalité française

 

 

 

 

Régularisation des travailleurs sans papiers

1

 

1

 

TOTAL

1

1

1

1

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Je ne vais pas entrer dans la polémique avec M. Meurant. Pour ma part, je refuse catégoriquement que l’on fasse l’amalgame entre les migrants et la délinquance. Nous aurons l’occasion d’y revenir, mais ces propos sont inadmissibles. (M. Stéphane Ravier sexclame.)

Cet amendement vise à relayer une revendication qui ne plaira pas à tout le monde, celle qui est portée depuis une quinzaine d’années par les travailleurs et travailleuses sans papiers, dont beaucoup sont exploités. Leur lutte a mis en lumière un véritable système qui pousse à la clandestinité. Depuis l’automne 2021, trois grèves de travailleurs sans-papiers se sont succédé ; tous disent les conditions infernales dans lesquelles certains employeurs les font ou les ont fait travailler, y compris pendant la crise de la covid-19.

Décider de les régulariser, c’est ne pas fermer les yeux sur ce système qui, dans la clandestinité, s’arrange d’une armée de réserve. C’est aussi reconnaître leur apport à notre société et au marché du travail, et mettre en garde les patrons qui s’accommodent trop facilement de cette situation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial. Il est défavorable.

Nous avons 5,5 millions de chômeurs – certes, ce chiffre est en baisse –, et la gauche et l’extrême gauche souhaitent régulariser les sans-papiers…

Il est assez étonnant de constater que cette partie de l’hémicycle se retrouve sur la ligne du grand capital, qui profite en effet de cette armée de réserve. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.)

Mme Éliane Assassi. Qui l’exploite !

M. Mickaël Vallet. Allez voir dans les cuisines des restaurants où vous dînez !

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial. Je citerai l’exemple de Mayotte : la moitié de la population, grosso modo, y est clandestine. De surcroît, une moitié de cette moitié est arrivée récemment sur l’île et pose d’infinis problèmes en matière de sécurité et d’accès à l’emploi, beaucoup de Mahorais étant à la recherche d’un travail.

J’aurais pu citer la Guyane ou d’autres départements. À propos de celui que je représente, le procureur général parlait, à la rentrée de septembre, de « seine-saint-denisation », ce qui n’était pas exactement un qualificatif positif dans sa bouche.

Mmes Éliane Assassi et Marie-Claude Varaillas. C’est honteux pour Mayotte et c’est honteux pour la Seine-Saint-Denis !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. Il s’agit, selon l’expression consacrée, d’un amendement d’appel.

Par respect pour le travail à venir du Gouvernement et du Parlement sur le projet de loi relatif à l’immigration qui sera déposé courant décembre, je vous propose d’ajourner ce débat. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Éliane Assassi. On verra ce que vote M. Meurant sur ce texte !

M. Jean-François Carenco, ministre délégué. J’émets donc, à ce stade, un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le ministre, il ne serait sans doute pas inutile de ne pas attendre la prochaine loi pour que toutes les préfectures puissent au moins recevoir les demandes d’admission exceptionnelle au séjour. Le simple dépôt de ces demandes est rendu parfois impossible par la situation de certaines préfectures.

Rappelons que la régularisation permet à une personne qui travaille et qui cotise sans bénéficier des droits afférents de revenir dans le droit commun.

La régularisation est le meilleur moyen d’éviter le dumping des salaires ; elle permet d’assurer l’égalité, mais aussi la croissance économique indispensable à notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – M. Daniel Salmon et Mme Esther Benbassa applaudissent également.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. La circulaire Valls le permet déjà !

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Mme Esther Benbassa. J’ajoute aux propos de mon collègue Jean-Yves Leconte qu’en cette période de tension dans certaines professions il serait adéquat de régulariser davantage de personnes pouvant assumer des fonctions dans ces secteurs.

M. Jérôme Bascher. Ce ne sont pas ceux-là qui viennent ! (M. François Bonhomme renchérit.)

Mme Esther Benbassa. Pourquoi tenir toujours le même discours de rejet des migrants alors que l’on a tant besoin d’eux dans certaines professions ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-922.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits ne sont pas adoptés.)

Mme Éliane Assassi. Nous avons voté contre, mais pas pour les mêmes raisons !

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Pouvoirs publics

Conseil et contrôle de l’État

Direction de l’action du Gouvernement

Budget annexe : Publications officielles et information administrative

État B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Motion d'ordre

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État », « Direction de l’action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

La parole est à M. le rapporteur spécial. (M. Michel Canévet applaudit.)

M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) prévoit qu’une mission spécifique regroupe les crédits alloués sous forme de dotations aux pouvoirs publics, pour lesquels le juge constitutionnel a rappelé le principe d’autonomie financière, qui relève de la séparation des pouvoirs.

Les institutions relevant de la mission « Pouvoirs publics », confrontées à des exigences croissantes d’efficacité et d’exemplarité, participent à l’effort de redressement des comptes publics, puisque, depuis plus de dix ans, leurs dotations ont progressé d’un montant nettement inférieur à celui de l’inflation constatée sur la même période.

Pour autant, en 2023, il est prévu d’augmenter cette dotation, bien que de manière modérée. Ainsi, dans le contexte inflationniste que nous connaissons, et en raison de la volonté des différentes institutions de préserver un niveau élevé d’investissements, le montant total des dotations consacrées aux pouvoirs publics augmente de 2,76 % par rapport à 2022, pour s’établir à un peu plus de 1 milliard d’euros.

Concernant tout d’abord la présidence de la République, après trois années de stabilité, la dotation augmente de 4,9 % et s’élève à un peu plus de 110 millions d’euros.

Parmi les faits notables, je signale qu’après un ralentissement constaté au cours de la période du covid-19 les dépenses de la présidence de la République font face à la reprise de l’activité internationale et, comme nous le verrons pour les autres institutions, à des dépenses de fonctionnement soumises à la forte inflation actuelle. Malgré cela, la présidence de la République souhaite maintenir ses investissements – nos interlocuteurs nous l’ont rappelé lors de nos auditions, en particulier Patrick Strzoda, directeur de cabinet du Président de la République –, notamment en matière de sécurité informatique ou d’économie d’énergie.

Je pense en particulier au projet de géothermie qui est en cours de déploiement dans les jardins de l’Élysée – celles et ceux qui les fréquentent assidûment pourront y jeter un œil. (Sourires.) D’un montant de 1,4 million d’euros, ce projet devrait permettre de réduire de 80 % les émissions de CO2 de l’Élysée.

Concernant, à présent, les dotations des assemblées parlementaires, la hausse octroyée cette année est de 3,35 % pour l’Assemblée nationale et de 2,28 % pour le Sénat. Les dotations s’élèvent ainsi respectivement à 571 millions d’euros et à 346 millions d’euros.

J’évoquerai principalement le budget du Sénat, dont les dépenses augmentent de 1,18 %. Les charges de fonctionnement augmentent de 6 %, pour les deux tiers en raison de l’inflation et pour un tiers du fait du renouvellement sénatorial de 2023. Quant à l’effort d’investissement, après une année où il a été exceptionnellement élevé – 33 millions d’euros –, il est ramené à 17,25 millions d’euros, soit une baisse de 48 %. Il servira à financer des projets d’envergure tels que la restauration des façades et des couvertures des pavillons situés à l’est du palais.

Pour ce qui est des chaînes parlementaires, leur budget augmente légèrement, de 0,6 %, celui de LCP-Assemblée nationale s’inscrivant en hausse de 1,2 % et celui de Public Sénat étant reconduit à l’identique.

Terminons par le Conseil constitutionnel et la Cour de justice de la République.

Le Conseil constitutionnel voit certes son enveloppe se réduire de 16,71 %, pour s’établir à 13,3 millions d’euros, mais cela fait suite à une forte augmentation l’année dernière en raison des élections présidentielles. Les moyens consacrés au contrôle des normes représentent 62 % de la dotation et sont en augmentation par rapport à l’année dernière, ce qui semble cohérent au moment où se déploie le portail de référence de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

Concernant, pour finir, la Cour de justice de la République, sa dotation, qui est de 984 000 euros, est identique à celle de l’an passé. L’été 2021 avait été marqué par un nombre de plaintes sans précédent : en raison de la crise du covid-19 et des opérations groupées menées par certains cabinets d’avocats, plus de 20 000 plaintes avaient été enregistrées. Depuis 2022, le phénomène s’est nettement ralenti, le nombre de plaintes s’élevant à 349 depuis le 1er janvier 2022.

Au vu de ces éléments, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Pouvoirs publics ». (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

M. Christian Bilhac, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en masse budgétaire, la mission « Conseil et contrôle de l’État » est une petite mission, puisque les crédits demandés pour 2023 s’élèvent à 817 millions d’euros. Elle n’en demeure pas moins d’une importance fondamentale pour notre État de droit.

Dès lors qu’elle est composée essentiellement des crédits des juridictions administratives et financières, l’efficacité du contrôle des actes de la puissance publique dépend de la dotation de cette mission. Celle-ci doit être suffisante et adaptée aux enjeux contemporains, notamment aux volumes contentieux, qui ne tarissent pas, tant s’en faut. Il apparaît ainsi que la mission est intrinsèquement liée à l’exercice des fonctions régaliennes de l’État.

Le budget du Conseil économique, social et environnemental (Cese) relève également de cette mission, mais ne représente que 5 % des crédits. Pour l’année 2023, l’enveloppe allouée à la participation citoyenne est de 4,2 millions d’euros, notamment destinée à l’organisation de la convention citoyenne sur la fin de vie. Je tiens à saluer l’internalisation en cours des procédures de participation citoyenne, qui devrait permettre d’en diviser les coûts par deux. Cela illustre une nouvelle fois l’efficacité de l’État, à moindre coût, par rapport aux cabinets de conseil, déjà mise en lumière par les travaux de la commission d’enquête du Sénat.

Si les crédits sont en hausse de 8,5 % par rapport à l’an passé, cette augmentation, corrigée de l’inflation, n’est en réalité que de 4 %, soit du même ordre que celle qui avait été prévue dans la loi de finances pour 2022.

En effet, l’inflation et la crise énergétique n’épargnent pas le budget de la mission « Conseil et contrôle de l’État », avec plus de 13 millions d’euros en autorisations d’engagement pour la consommation énergétique des juridictions administratives, contre 2 millions d’euros en 2022.

Par ailleurs, le volume de la mission est largement tributaire des moindres variations qui peuvent affecter les dépenses de personnel, lesquelles représentent 81 % des crédits demandés.

Pour 2023, ces dépenses sont mécaniquement accrues sous l’effet de la hausse de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique.

Pour les juridictions administratives, cette revalorisation du point d’indice représente un coût de 10,9 millions d’euros en année pleine. Pour les juridictions financières, dont les effectifs sont moins nombreux, cette augmentation représente 4,4 millions d’euros en année pleine.

Une revalorisation indemnitaire des magistrats administratifs et financiers a également été décidée pour maintenir l’attractivité financière de ces corps par rapport au nouveau corps des administrateurs de l’État, issu de la réforme de la haute fonction publique. Concrètement, la revalorisation équivaut à quelque 8 000 euros annuels pour les magistrats du premier grade et 6 000 euros annuels pour ceux du deuxième grade.

L’alignement des traitements est d’autant plus nécessaire que l’obligation de mobilité a été accrue pour les magistrats administratifs et que cette dernière n’est pas identique dans toutes les administrations de l’État.

Pour la haute fonction publique, la mobilité au sein des ministères consiste à passer d’une rue à l’autre du VIIe arrondissement de Paris. (M. Jérôme Bascher sesclaffe.) Pour les magistrats, la mobilité consiste à changer de région, avec toutes les conséquences que cela implique pour la vie familiale.

Vous le voyez, mes chers collègues, derrière la hausse des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État » se cachent des femmes et des hommes, essentiellement des magistrats administratifs et financiers, qui pourront exercer au mieux les missions de service public qui leur sont confiées.

C’est la raison pour laquelle, sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

M. Paul Toussaint Parigi, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Direction de l’action du Gouvernement » connaît cette année un rétrécissement attendu de son périmètre, puisque l’un de ses trois programmes a été supprimé, la présidence française de l’Union européenne s’étant achevée le 30 juin 2022.

Corrigée de cette importante mesure de périmètre et de l’inflation, l’augmentation des crédits de la mission est de 3,5 % en crédits de paiement et de 9 % en autorisations d’engagement. Il s’agit d’une hausse non négligeable, qui doit néanmoins être relativisée, puisqu’elle ne représente, en valeur absolue et hors inflation, que 30 millions d’euros en crédits de paiement et 73 millions d’euros en autorisations d’engagement.

Ces nouvelles dépenses semblent en outre justifiées, puisqu’elles reflètent la priorité accordée par le Gouvernement à la cybersécurité et, dans une moindre mesure, à l’écologie, deux enjeux dont l’actualité ne cesse de nous rappeler l’importance.

Le nombre de cyberattaques touchant aussi bien l’État que des collectivités territoriales, des entreprises ou des hôpitaux – on l’a vu récemment à l’hôpital de Corbeil-Essonnes –, a en effet triplé en seulement deux ans. Dans ce contexte, le renforcement des moyens alloués à la cybersécurité apparaît nécessaire afin de mieux prévenir ces attaques et d’aider les organismes touchés à y faire face. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) bénéficiera ainsi en 2023 d’un schéma d’emplois de 46 ETP supplémentaires, ainsi que d’une nouvelle dotation de 25 millions d’euros qui lui permettra d’acquérir de nouveaux locaux à Rennes.

L’écologie est le second enjeu justifiant la hausse des crédits alloués à la mission « Direction de l’action du Gouvernement », avec la création du secrétariat général à la planification écologique, dont les moyens sont définis par le présent projet de loi.

Ce nouveau secrétariat est placé directement sous l’autorité de la Première ministre, ce qui témoigne de la prise de conscience de la nécessité d’inscrire l’écologie comme une priorité transversale de l’action publique. Il aura pour mission d’assurer la coordination interministérielle de l’ensemble des politiques publiques visant à assurer la transition écologique du pays et il disposera pour ce faire de l’appui d’une équipe de 15 ETP et d’un budget de fonctionnement de 500 000 euros en 2023. Cela peut sembler peu au regard de l’immensité de la tâche que représente la planification écologique d’un pays de 68 millions d’habitants, mais nous attendons de ce secrétariat qu’il monte en puissance ces prochaines années afin de tenir la promesse de « faire de la France une grande nation écologique ».

Je terminerai mon propos par quelques mots sur le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Ce budget annexe tire principalement ses ressources des recettes d’annonces légales, qui dépendent fortement de l’activité économique. Pour cette raison, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une hypothèse de recettes prudente, à hauteur de 167 millions d’euros, soit une baisse de 7 millions d’euros par rapport aux recettes estimées pour l’année 2022. Malgré cette prévision prudente, le budget annexe devrait dégager en 2023 un nouvel excédent, estimé à 14 millions d’euros, grâce notamment à la maîtrise renouvelée des dépenses de personnel.

À la lumière de ces différentes observations, la commission vous propose d’adopter les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement » et ceux du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Olivier Cadic, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’avis que nous allons vous présenter, mon collègue Mickaël Vallet et moi-même, sur les crédits du programme 129 porte sur la coordination de la sécurité et de la défense, et plus précisément sur la cyberdéfense et les stratégies d’influence, que le Président de la République vient d’élever au rang de nouvelle fonction stratégique lors de son récent discours de Toulon.

L’enjeu de la guerre informationnelle, que j’avais mentionné lors des débats sur la loi de programmation militaire (LPM) en 2018, est enfin pleinement reconnu, et je m’en félicite.

J’avais salué, l’an dernier, la création de Viginum, le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères, mais je reste circonspect en observant le champ restreint de ses missions, qui s’arrêtent à la caractérisation de situations d’ingérence et de désinformation, sans faculté d’intervenir dans la réponse ou la contre-attaque. Nous sommes loin de Taïwan, qui répond à une désinformation en deux heures et 200 mots.

J’espère que l’impulsion donnée par la revue nationale stratégique sera de nature à rendre plus efficaces nos actions de contre-ingérence.

La passivité est une erreur qui nous a coûté très cher. Je parle de l’opération de désinformation dont l’armée française a été victime dans l’affaire de Bounti au Mali en janvier. Les leçons en ont été tirées ; l’efficace riposte pour déjouer le stratagème de Wagner à propos du charnier de Gossi l’a démontré. Il nous faut maintenant assumer une posture plus offensive, y compris dans le domaine de la cybersécurité.

Un nouvel ordre de bataille s’impose, car les menaces de cybersécurité croissent suivant un rythme exponentiel. L’augmentation, cette année comme les précédentes, des moyens humains et budgétaires du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) doit être saluée, quoiqu’elle n’ait pas permis de ralentir la progression des attaques contre les services publics, les collectivités territoriales et les établissements de santé.

Nos capacités techniques, notamment l’expertise de l’Anssi, sont reconnues par nos partenaires. Mais allons-nous nous contenter de regarder chaque année le compteur s’affoler et tendre l’autre joue lorsque les hackers auront paralysé un hôpital de plus ?

Nos principaux partenaires, américains et britanniques, ont compris qu’aller entraver les cybercriminels sur leur terrain, c’est aussi prévenir les attaques avant qu’elles n’arrivent et ainsi pratiquer une forme de dissuasion numérique.

Je formule donc la proposition que nous nous dotions d’une stratégie offensive face aux cyberattaques et d’un directeur national de la cybersécurité, mais aussi que nous nous coordonnions avec nos principaux partenaires, car il s’agit d’un combat sans frontières.

Pour conclure, je voudrais insister sur deux points.

Il est nécessaire tout d’abord de continuer à former tous les acteurs de la cybersécurité, à commencer par les simples utilisateurs, et de responsabiliser les gestionnaires de collectivités ou d’administrations, auxquels incombe une obligation de suivi des recommandations en matière de sécurité informatique comme en matière de sécurité incendie.

Il faut ensuite alerter sur la nocivité du paiement des rançons : ceux qui sont contraints de payer pour sauver leur entreprise doivent savoir qu’ils contribuent au financement du terrorisme.

J’émets un avis favorable sur l’adoption de ce volet des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». (M. Sébastien Meurant applaudit.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Mickaël Vallet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Olivier Cadic vient d’exposer les aspects « macro » du sujet de la cyberdéfense tel qu’il est traité dans le cadre du programme 129. Je me concentrerai pour ma part sur les menaces du quotidien qui pèsent sur les citoyens, les entreprises et les collectivités.

Si nous faisons de la plateforme cybermalveillance.gouv.fr un baromètre, nous constatons qu’elle a enregistré 2,5 millions de visiteurs en 2021, soit 101 % de plus en un an. Les grandes menaces demeurent l’hameçonnage, le piratage de compte et le rançongiciel.

En revanche, nos points de vigilance évoluent d’une année à l’autre. Je tiens ici à mettre en lumière la nécessité absolue de faire monter en gamme la sécurité informatique et la résilience dans les systèmes de santé, mais aussi de prendre conscience des faiblesses identifiées dans les outre-mer.

En effet, lorsque le système informatique de l’hôpital de Corbeil-Essonnes se trouve paralysé par une attaque au rançongiciel, le véritable préjudice n’est pas le coût de la rançon – 10 millions d’euros –, qu’un établissement hospitalier public est de toute façon dans l’incapacité de payer, mais bien l’atteinte portée à notre sécurité nationale.

La paralysie de tout un hôpital impose en effet de rediriger les patients vers d’autres établissements, avec le risque de perte de chances thérapeutiques que cela implique. Ce risque devient majeur dans les outre-mer : imaginez, mes chers collègues, une neutralisation du centre hospitalier dans une collectivité d’outre-mer, sans possibilité de redéploiement des lits à proximité…

Nous alertons par conséquent sur la nécessité de pérenniser et d’améliorer les nouveaux outils mis en œuvre dans le cadre du plan France Relance.

La fin de ce plan pose en particulier la question de la pérennité des centres de réponse à incidents (CSIRT, Computer Security Incident Response Teams) régionaux et sectoriels. Signalons que douze régions métropolitaines sur treize se sont inscrites dans le programme, la seule exception étant la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Se pose aussi la question de la montée en puissance des centres de réponse sectoriels, en outre-mer comme en métropole, vers la sécurisation et la labellisation des moyens informatiques du secteur de la santé, des collectivités territoriales et de l’industrie. Il s’agit de missions prioritaires vers lesquelles les moyens du plan de relance qui n’ont pas encore été engagés ainsi que les crédits dégagés pour 2023 doivent être fléchés.

Enfin, il est proposé que la plateforme numérique cybermalveillance.gouv.fr se transforme en un véritable centre d’appel apte à traiter les incidents de premier niveau et à rediriger les cas les plus graves vers des prestataires locaux ou vers l’Anssi.

Quand il y a le feu, on a le réflexe d’appeler le 18 ; les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) disposent de la compétence en matière de traitement des appels. Les incidents de cybersécurité pourraient faire l’objet d’une expertise coordonnée impliquant l’Anssi, le groupement d’intérêt public Action contre la cybermalveillance (GIP Acyma) et les régions qui ont mis en place des centres de réponse.

Pour résumer, nous approuvons l’augmentation des moyens de ce programme, non sans pointer certaines urgences et autres failles à combler. J’émets comme mon collègue un avis favorable sur l’adoption de ce volet des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – M. Olivier Cadic, rapporteur pour avis, applaudit également.)