M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, auteure de la question n° 290, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications.

Mme Laurence Garnier. Madame la secrétaire d’État, je souhaite appeler votre attention sur le plan de fermeture du réseau téléphonique en cuivre, qui fait suite à l’arrivée de la fibre optique. Il s’agit d’un plan en deux temps : un temps de transition jusqu’en 2025, un temps de fermeture entre 2026 et 2030.

Si l’on comprend bien la nécessité de s’adapter aux technologies actuelles, ce plan de fermeture pose un certain nombre de questions aux élus des communes, notamment à ceux de la Loire-Atlantique, département que vous connaissez bien, madame la secrétaire d’État. (Sourires.)

Je me fais ici même le relais des interrogations du syndicat d’énergie de Loire-Atlantique, le Sydela, sur deux points en particulier.

Le premier point concerne tous les services d’urgence et les lignes téléphoniques qui utilisent aujourd’hui le réseau cuivre. Je pense à des infrastructures comme les gymnases, au service de téléalarme pour les personnes âgées, aux ascenseurs ou au centre de traitement des appels d’urgence dans notre pays.

Le second point concerne les modalités d’organisation et de financement du démantèlement du réseau cuivre.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous confirmer que, même si les communes peuvent être propriétaire d’infrastructures passives telles que des fourreaux, c’est bien Orange qui procédera au retrait des câbles et que ces opérations n’auront pas d’impact financier pour les communes ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat auprès du ministre des armées et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Madame la sénatrice Laurence Garnier, en effet, nous portons toutes les deux un regard particulier sur la Loire-Atlantique…

Orange a présenté son plan d’extinction du réseau cuivre, plan qui a fait l’objet d’une consultation publique – vous l’avez suivie, à l’instar des syndicats. L’arrêt du réseau cuivre est largement souhaitable pour l’ensemble de la filière à de nombreux égards, notamment pour des raisons écologiques, la fibre étant trois fois moins énergivore que le cuivre, ce qui, dans le contexte que nous connaissons, est un enjeu important qu’il faut prendre en compte.

Toutefois, madame la sénatrice, comme vous l’avez souligné, la transition du cuivre vers la fibre doit s’accompagner des garanties nécessaires de disponibilité, de qualité et d’abordabilité des services à l’égard de nos concitoyens et des collectivités.

Vous avez évoqué des cas très particuliers, comme la téléassistance pour les personnes âgées, qui sont parmi les publics les plus vulnérables et les plus susceptibles d’être en difficulté ; à ce titre, il nous faut préserver ce dispositif essentiel pour nos aînés. Si le numérique peut être une aide au quotidien pour nos concitoyens, tous ces services sont dépendants du réseau. Certains d’entre eux sont déjà compatibles avec la voix sur IP, donc via le réseau internet.

L’ensemble des fédérations ont été informées dès 2015 du programme de fin du réseau téléphonique commuté, le RTC. Les solutions sont donc clairement identifiées aujourd’hui : il s’agit soit de les faire migrer sur la fibre, soit de privilégier l’usage de la technologie GPRS/GSM (General Packet Radio Service/Global System for Mobile Communications).

Une circulaire a été transmise à l’ensemble des préfets pour les inciter à la vigilance que vous appelez de vos vœux : il leur incombe, car c’est une nécessité, de prévoir une information beaucoup plus large et transparente auprès des élus locaux et de rassurer nos concitoyens, nombre d’entre eux étant inquiets de l’arrêt du réseau cuivre.

Madame la sénatrice, je vous adresserai un état des lieux spécifique de la situation Loire-Atlantique, puisque vous y tenez.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour la réplique.

Mme Laurence Garnier. Madame la secrétaire d’État, vous avez répondu sur le premier volet de la question et m’avez rassurée sur un certain nombre de points, même si tout reste à construire.

En revanche, vous n’avez pas répondu sur le financement du démantèlement du réseau et la charge financière éventuelle pour les communes, qui s’en inquiètent. Je serai donc preneuse d’éléments supplémentaires sur cette problématique particulière.

déploiement de la fibre dans les territoires

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, auteur de la question n° 331, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications.

M. Jean-Raymond Hugonet. Madame la secrétaire d’État, lancé en 2013, le plan France Très haut débit, créé pour que l’ensemble des Français aient une connexion internet ultrarapide, fête cette année ses dix ans. Si le déploiement du réseau fibré a incontestablement progressé, les dysfonctionnements sont légion – et c’est peu dire !

Dans mon département, en Essonne, nous sommes raccordés à 93 %, mais ce chiffre n’est qu’un trompe-l’œil. Dans la pratique, les interventions sont bâclées, les armoires de connexions dégradées, les déchets de chantiers laissés sur place après travaux, etc. La liste est longue, et non exhaustive.

Sont en cause la multiplicité des réseaux et des acteurs ainsi qu’un recours excessif à plusieurs niveaux de sous-traitance. Résultat : en cas de problème, personne n’est responsable de rien et chacun se renvoie la balle !

Dernièrement encore, mon collègue Grégoire de Lasteyrie, maire de Palaiseau et président de la communauté d’agglomération Paris-Saclay, a été contraint de saisir à deux reprises le gendarme des télécoms, l’Arcep, ou Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, sur les dysfonctionnements du réseau très haut débit (THD). Il lui a transmis tous les éléments tendant à caractériser les délits, notamment les dégradations volontaires commises par les sous-traitants opérant sur les infrastructures de réseau.

L’Arcep, qui aurait dû dénoncer ces faits au procureur, s’est contentée de répondre que le taux de raccordement du territoire était conforme à la moyenne nationale. Fermez le ban !

C’est donc l’agglomération qui a dû adresser une plainte au procureur de la République d’Évry, conduisant celui-ci à diligenter une enquête judiciaire, laquelle est en cours depuis près de deux ans. C’est tout à fait inacceptable !

Le déploiement de la fibre doit être mieux encadré. Les règles et procédures doivent être revues en profondeur. Si l’Arcep ne souhaite pas agir concrètement, donnons aux collectivités les moyens de le faire, mais aussi d’obtenir des réparations !

Madame la secrétaire d’État, que comptez-vous faire pour soutenir les élus de la République et les populations qui les ont élus ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat auprès du ministre des armées et du ministre de léducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Monsieur le sénateur Hugonet, nous cherchons à vous soutenir toujours, chaque fois que nécessaire sur votre territoire, notamment sur les sujets qui nous réunissent dans le cadre des travaux de la commission de la culture, l’éducation et de la communication. Votre question porte sur la souffrance de certains territoires face aux dysfonctionnements particulièrement forts en matière de qualité d’exploitation des réseaux fibre.

Ces difficultés, qui pénalisent les usagers dans leur vie de tous les jours, sont le fruit de plusieurs facteurs.

D’abord, le rythme annuel de raccordements est extrêmement élevé.

Ensuite, certains réseaux FttH (Fiber to the Home) sont historiquement mal dimensionnés, ce qui est particulièrement vrai dans votre département de l’Essonne, monsieur le sénateur.

Enfin, il est recouru à un nombre trop important de niveaux de sous-traitance peu formée.

Face à l’accroissement des difficultés et des signalements sur les réseaux fibre, le Gouvernement et l’Arcep ont saisi la filière, afin qu’elle formule rapidement des propositions d’amélioration de l’exploitation de ces réseaux. Celles-ci s’articulent autour de trois axes.

Le premier axe porte sur le renforcement de la qualité des interventions.

Le deuxième axe porte sur le renforcement des contrôles à la fois par la transmission des opérateurs commerciaux de leurs plannings d’intervention et par la mise en œuvre de comptes rendus d’intervention permettant le contrôle mutuel entre opérateurs.

Le troisième axe porte sur la reprise des infrastructures dégradées, que ce soit au niveau des points de mutualisation ou des réseaux vieillissants ou mal dimensionnés qui nécessitent une reprise globale de l’infrastructure.

Plusieurs opérateurs ont déjà notifié un plan de reprise de 1 000 points de mutualisation à l’Arcep, correspondant à 450 000 locaux. Dans l’Essonne, ce sont environ 200 points de mutualisation que les deux opérateurs d’infrastructures, XpFibre et Altitude, se sont engagés à reprendre.

Le Gouvernement veille et veillera à la mise en œuvre effective de ces trois axes par les opérateurs et en a confié le contrôle à l’Arcep. Des points de suivi réguliers sont prévus en présence des associations d’élus, ce qui fait toute la différence.

L’annonce récente d’un droit au très haut débit permettra de garantir à l’ensemble de nos concitoyens une connexion de qualité nécessaire aux usages que vous mentionnez, personnels autant que professionnels.

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour la réplique.

M. Jean-Raymond Hugonet. Madame la secrétaire d’État, je connais votre dynamisme, mais le plateau de Paris-Saclay est un cluster d’excellence internationale ; or nous assistons à du bricolage. Il y a urgence à agir !

cancer du sein et prothèses capillaires

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, auteure de la question n° 260, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Élisabeth Doineau. Chaque année, l’opération Octobre rose nous réunit toutes et tous. Cette manifestation montre que la lutte contre le cancer du sein nous mobilise et qu’il s’agit d’une priorité. C’est le cancer le plus fréquent en France et il représente la première cause de décès par cancer chez la femme. Il fait l’objet d’un programme national de dépistage afin d’être détecté précocement et d’en réduire la mortalité, ce dont nous nous félicitons collectivement.

Il n’en reste pas moins que les traitements sont lourds. En matière de cancer du sein, les protocoles de chimiothérapie s’accompagnent immanquablement d’une alopécie dont on peut mesurer l’impact très négatif sur le quotidien des patientes.

La prise en charge par l’assurance maladie des prothèses capillaires fait apparaître d’importantes lacunes.

J’ai été interpellée sur ce sujet par Pascal Beau, directeur d’Espace social européen, qui partage l’analyse dressée à l’unanimité par les élus de l’assurance maladie, les associations de patients, la Ligue contre le cancer et la Fédération nationale de la mutualité française.

Malgré une amélioration de la réglementation depuis 2019, un défaut d’information à destination des patientes subsiste et il conviendrait d’aller davantage vers elles. Par ailleurs, la difficulté d’accès aux prothèses composées de cheveux naturels et leur coût contraignent les patientes à un renouvellement régulier des produits prothétiques, contrainte qui accroît le reste à charge.

Dans les faits, seulement 40 % des 60 000 personnes éligibles à une prise en charge en bénéficient. La Caisse nationale d’assurance maladie évalue le coût d’une prise en charge totale entre 15 millions et 20 millions d’euros, montant à partager entre le régime obligatoire et les acteurs complémentaires.

Aussi, madame la ministre, quand comptez-vous prendre un acte réglementaire pour inclure les prothèses capillaires dans le panier de soins prothétiques pris en charge à 100 % ? Bien plus, avez-vous prévu de faire évoluer la nomenclature des prises en charge ? C’est ce qui est demandé par l’ensemble des professionnels.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de lorganisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice Élisabeth Doineau, le ministre François Braun regrette de ne pouvoir être présent ce matin et m’a priée de vous fournir les éléments suivants en réponse à votre question.

Tout comme vous, je partage le bel élan que représente la campagne Octobre rose, mais c’est bien douze mois par an que le ministère de la santé et de la prévention est mobilisé pour soutenir la lutte contre le cancer du sein.

La prise en charge des prothèses capillaires a été revue en 2019, afin de prévoir deux catégories : une première sans reste à charge avec un tarif de remboursement de 350 euros ; une seconde avec une prise en charge de 250 euros par l’assurance maladie obligatoire (AMO) et un prix limite de vente à 700 euros. L’ancienne nomenclature présentait un tarif de remboursement de 76,22 euros TTC, sans prix limite.

Aujourd’hui, 60 % des patientes s’orientent toujours vers des prothèses avec un reste à charge important. Par ailleurs, le taux de recours global à ces produits reste faible.

L’adoption d’un amendement d’origine parlementaire lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 conduira à une amélioration de la prise en charge des prothèses capillaires. Il s’agira d’abord de mieux connaître la situation des femmes et de comprendre le phénomène de non-recours.

Ensuite, un travail sur les caractéristiques techniques des prothèses sera mené, en lien avec les associations, industriels et distributeurs, pour mieux définir les besoins. Les tarifs et prix limites pourraient alors être revus, afin de mieux calibrer la manière dont l’AMO et, le cas échéant, les complémentaires pourraient prendre en charge ces dispositifs.

Cette évaluation permettra ainsi de prévoir de nouvelles modalités de prise en charge des prothèses capillaires pour en améliorer le recours, ce qui constitue un véritable objectif. Des textes réglementaires devraient être publiés d’ici au deuxième semestre 2023 afin de mettre celles-ci en œuvre.

foyer de cancers pédiatriques en loire-atlantique

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 274, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Yannick Vaugrenard. Dans un rayon de quinze kilomètres autour de Sainte-Pazanne, en Loire-Atlantique, le constat est terrible : vingt-cinq enfants ont été atteints d’un cancer en six ans, sept en sont morts.

Alertée, l’agence régionale de santé (ARS), en partenariat avec Santé publique France, réalisait alors des études pour comprendre ce phénomène. Ses conclusions, au mois de novembre 2019, confirmaient un nombre de cancers pédiatriques élevé.

Cependant, au mois de septembre 2020, après des enquêtes supplémentaires, ces deux agences ont estimé, à la consternation générale, qu’il n’existait pas de foyer de cancers pédiatriques dans ce secteur !

Plusieurs éléments très concrets nous amènent à douter sérieusement de la qualité et de l’objectivité des recherches menées.

En effet, seuls treize cas sur vingt-deux recensés à l’époque ont été retenus, les jeunes de plus de 15 ans en ayant été écartés. Des dossiers ont été inversés. Le périmètre géographique retenu était également incompréhensible.

Ces constats alimentent un climat de doute et de défiance vis-à-vis des institutions sanitaires.

Madame la ministre, vous comprendrez en conséquence que la réponse du 3 janvier de François Braun à mon courrier de septembre 2022, laquelle s’appuie uniquement sur les discours de l’ARS, n’est pas acceptable.

Lorsque Alban, l’un des enfants victimes de ce fléau, en arrive à demander à sa maman : « Qui doit vivre ? Qui doit mourir ? », il est urgent d’agir pour faire toute la lumière sur ce phénomène inquiétant, en ordonnant une nouvelle étude beaucoup plus rigoureuse, beaucoup plus cohérente et, surtout, beaucoup plus crédible.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de lorganisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, je comprends votre inquiétude et celle des concitoyens de votre département, tout particulièrement les familles touchées par la maladie. Les cancers pédiatriques, qui affectent chaque année environ 2 500 jeunes patients, suscitent légitimement un sentiment d’injustice. Le ministère de la santé et de la prévention est mobilisé et engagé pour mieux prévenir, soigner et accompagner les malades et leurs proches dans ce combat.

Si des facteurs liés au mode de vie favorisant le développement des cancers ont été clairement identifiés chez l’adulte, les causes sont rarement identifiées chez l’enfant.

La situation du Pays de Retz a été suivie avec grande attention par l’ARS Pays de Loire et Santé publique France, qui ont mené les investigations approfondies et déployé des moyens importants pour déterminer la cause de ces cancers pédiatriques.

L’analyse statistique spatiotemporelle n’a pas montré d’anomalie épidémiologique locale, malgré la perception d’un excès de cas par la population.

Aussi, une surveillance renforcée des cancers pédiatriques d’une durée de trois ans, soit entre 2020 et 2023, a été engagée dès le mois de septembre 2020 par Santé publique France en lien avec les centres hospitaliers universitaires d’Angers et de Nantes ainsi que le registre national des cancers de l’enfant (RNCE).

Le point d’étape intermédiaire du mois de novembre 2022 suggère une situation épidémiologique globalement stable, avec une absence de nouveau cas de cancer pédiatrique diagnostiqué depuis le mois de juillet 2021. Les résultats de cette surveillance renforcée ne conduisent donc pas à reconsidérer la décision prise en 2020 de mettre fin aux investigations.

La poursuite de cette surveillance renforcée sera évaluée en fin d’année 2023. Nous ne manquerons pas de vous tenir informé des suites de cette décision, monsieur le sénateur.

Cette suspicion de cas groupés a mis en exergue les préoccupations de la population en matière de santé environnementale. Ces dernières trouvent leur traduction concrète dans le contrat local de santé (CLS) de Pornic agglo Pays de Retz, dont le premier axe stratégique vise la promotion d’un environnement favorable à la santé, dans une approche préventive de la lutte contre les cancers.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.

M. Yannick Vaugrenard. Ce changement de pied de l’ARS et de Santé publique France ne peut être entendu et n’est pas compréhensible par les parents qui souffrent de voir leurs enfants atteints de cette maladie.

C’est la raison pour laquelle, madame la ministre, je souhaite vraiment que vous demandiez au ministère de la santé et de la prévention que Laurence Huc, directrice de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), Marie Thibaud, porte-parole du collectif Stop aux cancers de nos enfants, et moi-même soyons reçus, de façon à mettre toutes les choses à plat et à éviter les incompréhensions qui peuvent être redoutables.

déserts dentaires

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 297, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. Stéphane Sautarel. Madame la ministre, par cette question, je souhaite appeler votre attention sur les déserts médicaux dentaires.

En effet, la difficulté et les inégalités d’accès aux soins bucco-dentaires constituent une réalité sur l’ensemble du territoire français, mais plus encore pour notre ruralité, aujourd’hui bien mise à mal.

Bien qu’il existe des mesures incitant notamment les jeunes professionnels de santé à s’installer dans les zones sous-dotées, ces mesures sont insuffisantes, voire inopérantes.

L’Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) recommandait déjà en 2021 la formation de 7 265 étudiants en odontologie sur la période 2021-2025. On en est loin ! Vous avez annoncé la création de huit nouvelles facs, mais elles n’ont pas de professeurs.

Il y a quelques semaines, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à la consolidation et à la professionnalisation de la formation des internes en médecine générale, afin de lutter contre les déserts médicaux. Ce texte prévoit de faire passer de trois à quatre années la durée du troisième cycle des études de médecine générale. Ainsi, cette quatrième année aurait pu amener les internes à exercer en priorité dans les zones sous-dotées, mais vous avez dévitalisé et rendu cette mesure inopérante dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ce dispositif aurait aussi pu être mis en place pour les étudiants en odontologie afin de lutter contre les déserts dentaires. J’imagine que ce n’est pas votre intention, là non plus !

Pourtant il y a urgence, les derniers travaux de la fédération des syndicats dentaires libéraux (FSDL) le montrent cruellement. La situation est très grave et continuera de se dégrader. Tous les territoires ne sont pas égaux. Plusieurs départements, notamment le Cantal, sont déjà sinistrés et la démographie, là comme ailleurs, est têtue.

Nous ne pouvons attendre que de nouveaux professionnels soient formés en nombre et seulement espérer qu’ils viennent s’installer là où près de 6 millions de Français n’ont plus accès aux soins !

J’élargis donc ma question. Madame la ministre, que comptez-vous enfin faire pour nos déserts médicaux et pour nos déserts médicaux dentaires en particulier ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de lorganisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, la suppression du numerus clausus traduit la volonté forte du gouvernement d’agir dans une perspective de long terme. Des efforts importants ont été produits afin que les capacités de formation soient portées à la hauteur des objectifs démographiques.

Pour la filière d’odontologie, entre 7 000 et 8 000 chirurgiens-dentistes seront formés pour la période 2021-2025, soit une augmentation de 14 % par rapport à la période quinquennale précédente.

En outre, le Gouvernement a soutenu, en collaboration avec les collectivités territoriales, la création de huit nouveaux sites universitaires de formation en odontologie.

Ces formations ont été installées pour la plupart dès la rentrée universitaire de 2022, à Amiens, Caen, Rouen, Dijon, Besançon, Grenoble, Poitiers et Tours. Ces sites ont été choisis en vue d’orienter les professionnels vers les territoires les plus fragiles du point de vue de la démographie en chirurgiens-dentistes.

La création de ces sites de formations s’accompagne d’un renforcement de l’offre de soins dentaires des établissements de santé de ces territoires. De nombreux dispositifs complémentaires ont été mis en place ; je pense au contrat d’engagement de service public (Cesp), dont le nombre de signataires est passé de 76 à 815 entre 2014 et 2021.

La quatrième année d’internat en médecine générale, créée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, répond à plusieurs préoccupations : aligner la durée de formation sur celle des autres spécialités, favoriser l’installation rapide des médecins en sortie d’études, corriger la lacune que représentait l’absence de phase de consolidation.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.

M. Stéphane Sautarel. Je regrette que la réponse de Mme la ministre ne fasse que rappeler un certain nombre de mesures que nous connaissons, mais qui s’inscrivent dans le long terme sans répondre à l’urgence du besoin.

permanence des soins et centres d’appels d’urgence

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, auteure de la question n° 305, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Marie-Pierre Richer. Madame la ministre, tenant compte des conseils du ministre de la prévention et de la santé pour désengorger les services d’urgence, les Français ont évité de s’y rendre en première intention.

La conséquence directe est que le Samu (service d’aide médicale urgente) peine à absorber le nombre d’appels au 15 et ne peut répondre comme il le devrait en moins d’une minute. Ne pouvant être orientés dans les délais requis, les patients composent alors le 18, qui, lui-même, est saturé.

Ainsi, récemment dans le Cher, un nombre incalculable d’appels non urgents au Samu, durant un quart d’heure, a saturé les lignes du service départemental d’incendie et de secours (Sdis), qui, de ce fait, n’a pu réceptionner les appels du 18.

Cette situation est le fruit de plusieurs facteurs.

D’abord, les samedis et dimanches, le Samu est devenu une plateforme de prise de rendez-vous médicaux alors que les médecins ne sont pas présents.

Ensuite, on constate une diminution inquiétante du nombre de médecins de permanence. Lorsque la permanence des soins ambulatoires était obligatoire, après vingt heures en semaine et les fins de semaine, le Cher comptait dix médecins de garde ; il n’y en a plus que deux aujourd’hui dans l’ensemble du département.

Le constat est alarmant et la situation, déjà inquiétante, risque de devenir gravissime à cause du manque d’opérateurs dans les centres d’appels, du manque de médecins de garde, du manque de médecins généralistes et, aussi, de la saturation de nos services d’urgence.

Comment les Français peuvent-ils avoir accès aux soins au quotidien et, plus dramatique encore, peuvent-ils être sauvés en cas d’urgence vitale si les numéros dédiés ne répondent pas dans les délais ?

Madame la ministre, quelles sont les mesures d’urgence envisagées ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de lorganisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, les tensions que connaissent actuellement les centres d’appels d’urgence proviennent à la fois d’un accroissement structurel de l’activité des Samu, mais également de la situation épidémique hivernale.

Plusieurs mesures ont été prises pour aider les centres 15 à y faire face.

Les mesures de soutien de la mission flash prévoient un renforcement des équipes de régulation des Samu par le recrutement d’assistants de régulation médicale (ARM) et la revalorisation de la mobilisation des médecins participant à la régulation.

Par ailleurs, la mise en place du service d’accès aux soins (SAS) permet de renforcer les centres 15 à travers une régulation médicale commune des appels. La création des SAS ne fait par ailleurs pas obstacle à la mise en place ou au maintien de solutions d’appui par un centre de réception et de traitement des appels d’un autre département.

Afin de permettre le déploiement des ARM, un accompagnement financier aux établissements a été mis en œuvre pour chaque place agréée, la formation des ARM ne relevant pas des formations décentralisées financées par les régions.

Il convient de souligner que le ministère a soutenu la démarche de déploiement des centres de formation des ARM, dont le nombre est passé de dix à la fin de 2019 à seize aujourd’hui, soit 641 places contre 400 auparavant.

Le ministère est d’ailleurs actuellement engagé dans une phase de concertation pour faciliter le recrutement d’ARM et adapter leur formation.

L’Assemblée nationale a voté la semaine dernière, lors de l’examen de la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé déposée par Stéphanie Rist, la reconnaissance des ARM comme professionnels de santé, notamment à la faveur d’un amendement gouvernemental, preuve du soutien que nous apportons à ces professionnels.