M. le président. L’amendement n° 311 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 341.

Mme Isabelle Briquet. Monsieur le ministre, vous avez indiqué tout à l’heure que le déficit était bien moindre que prévu grâce aux fruits de votre politique. Je m’interroge donc : pourquoi cette réforme ? Il suffisait d’attendre un peu, tout simplement.

Cet article entérine pourtant financièrement une réforme injustifiée qui relève des seuls choix du Gouvernement, et ce afin d’afficher une réduction globale du déficit qu’il a lui-même aggravé par les cadeaux fiscaux généreusement distribués ces dernières années.

D’autres solutions existent, qui imposent – il est vrai – de se poser la question des recettes du système.

Il convient de supprimer cet article liminaire, qui ne traduit nullement une nécessité, mais bien une vision idéologique qui consiste à réformer au détriment de toute justice sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Monique Lubin. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 365.

Mme Corinne Féret. Je ne reviendrai pas sur les arguments développés par mes collègues à la gauche de l’hémicycle, auxquels je m’associe pleinement, en faveur de la suppression de cet article liminaire.

Je souhaite revenir sur l’enveloppe de 750 millions d’euros consacrée au rehaussement de l’Ondam, en particulier pour l’hôpital public. Si l’on tient compte de l’inflation, les crédits sont en baisse de 5,2 % par rapport à 2022. Compte tenu de la crise que traversent nos hôpitaux publics, cette enveloppe est nettement insuffisante.

Dans mon département du Calvados, comme ailleurs sur le terrain, nous voyons les effets très concrets de cette crise : au centre hospitalo-universitaire de Caen, à l’hôpital de Falaise, à l’hôpital de Lisieux ou dans les hôpitaux de proximité, les besoins en personnel sont alarmants.

Beaucoup de ces établissements ont été contraints de fermer – fort heureusement de manière provisoire – leur service d’urgences, tandis que d’autres ont été contraints de fermer d’autres services.

Cela n’est acceptable ni pour nous, parlementaires, ni surtout pour nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l’amendement n° 448.

M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement vise à supprimer le présent article liminaire, car celui-ci entérine financièrement une réforme paramétrique des retraites injustifiée et injuste.

Cette réforme répond à un impératif d’équilibre des comptes publics, conséquence d’une politique intensive de cadeaux fiscaux faits aux grandes entreprises – fin de la CVAE (contribution sur la valeur ajoutée des entreprises) – et aux ménages les plus riches – suppression de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune), création de la flat tax –, mais aussi d’un transfert de la dette covid-19 sur les comptes de la protection sociale.

Or d’autres solutions existent. Elles exigent de poser la question des recettes du système, question absolument taboue pour le Gouvernement.

Les exonérations de cotisations sociales, dont certaines sont sans effet notable sur notre économie, coûteront pourtant à la branche vieillesse 18,9 milliards d’euros en 2023, soit un peu plus que les 17,7 milliards d’euros que le Gouvernement cherche à économiser d’ici à 2030 par sa réforme, montant qui par ailleurs ne tient pas compte des coûts induits par le report à 64 ans de l’âge légal du départ à la retraite pour l’assurance chômage et les minima sociaux.

M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° 483.

M. Yan Chantrel. Cet amendement de suppression de l’article liminaire est l’occasion de parler du fond.

L’indigence de l’annexe explicative jointe à ce projet de loi nous laisse sans voix, monsieur le ministre, car le législateur est sciemment mal informé.

Pourquoi ? Qu’avez-vous à cacher ? Publiez cette note de synthèse, comme mes collègues vous l’ont déjà demandé ! Pourquoi avez-vous peur de la transparence ? Nous attendons toujours plus de précisions.

Pourquoi prévoyez-vous une diminution de 11 % de la masse salariale des fonctionnaires ? Est-ce à dire que ceux-ci connaîtront une paupérisation relative et absolue sans précédent ?

Le COR souligne dans son rapport les effets d’un gel du point d’indice jusqu’en 2027 et de l’augmentation très réduite qu’il connaîtrait à partir de cette date.

Pourquoi présentez-vous certains déficits en euros constants et le PIB en euros courants, ce qui empêche toute comparaison juste ?

Autre question importante : pourquoi la part des rémunérations des agents des collectivités territoriales dans l’ensemble des rémunérations diminue-t-elle alors que le taux de cotisation de ces agents est supérieur à celui d’autres régimes ?

Pourquoi n’avoir pas pris en compte une augmentation du taux d’emploi des seniors sur laquelle vous fondez pourtant quelques espérances ?

Pourquoi les femmes ont-elles dans vos prévisions un taux d’emploi inférieur de 8 % à celui des hommes, alors que l’égalité salariale est censée être l’une des grandes causes nationales ?

Au final, le déficit que vous mettez en avant pour justifier cette réforme ne viendrait-il pas des hypothèses factices ou trompeuses que vous avez fournies au COR, dont je salue par ailleurs le travail dans ces conditions ?

Vous employez toujours la même méthode : vous diminuez les cotisations sociales – le chien a la rage, donc il faut le noyer – et vous remédiez au manque à gagner, non pas en les réaugmentant, mais en repoussant sans cesse l’âge de départ légal.

M. le président. L’amendement n° 517 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 566.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le ministre, l’article liminaire révèle beaucoup de choses que vous ne voulez pas entendre sur l’état de la France.

Notre pays est structurellement abîmé, qu’il s’agisse de son industrie ou de ses investissements. Selon les prévisions récemment publiées par la Commission européenne, des vingt pays de la zone euro, la France est celui où l’investissement reculera le plus en 2023.

C’est pour cela qu’au lieu d’engager cette réforme injuste et inutile, vous feriez mieux de vous occuper de l’état de la France, de son industrie et des investissements.

Vous dites vouloir faire grâce à la réforme une économie de 18 milliards d’euros dont les deux tiers seront payés par les femmes. Mais combien d’argent avez-vous gaspillé en n’ayant pas renégocié le prix de l’électricité ? Pour l’année 2023, ce montant sera de l’ordre de 30 à 50 milliards d’euros.

Vous appauvrirez ainsi l’industrie française, les commerçants, les TPE, les PME. Car tel est bien le sujet cette année : réduire le prix de l’énergie afin que les artisans, les TPE et les PME continuent à investir.

Je souhaite également évoquer le rapport du COR, dont il a peu été question jusqu’à maintenant.

Vous le savez, monsieur le ministre, les conclusions du rapport ne confirment pas le bien-fondé des discours qui s’appuient sur l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraites. Ce rapport précise même que « à plus long terme […], malgré le vieillissement progressif de la population française, la part des dépenses de retraites dans la richesse nationale serait stable ou en diminution ».

Telles sont les raisons, monsieur le ministre, pour lesquelles nous considérons que cet article liminaire, qui, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, n’est par ailleurs appuyé sur aucune loi de programmation des finances publiques, doit être supprimé.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 578.

M. Christian Redon-Sarrazy. Nous souhaitons la suppression de cet article liminaire, car celui-ci entérine financièrement une réforme que nous jugeons injustifiée et injuste.

Cette réforme est injuste, car depuis déjà plus de cinq ans, monsieur le ministre, vous n’avez de cesse de faire supporter les efforts, non pas aux plus riches, mais à ceux de nos concitoyens les plus modestes.

Pour votre gouvernement, les plus riches doivent être épargnés de tout effort, qu’il soit fiscal ou de solidarité. J’en veux pour preuve la fin de l’ISF et de la CVAE, ainsi que l’instauration de la flat tax – mais sans doute avez-vous d’autres cadeaux en réserve pour demain.

Il est hors de question pour vous d’envisager de nouvelles recettes ni même de revenir sur des exonérations très coûteuses pour les comptes de la branche vieillesse, et ce bien que leurs effets sur l’économie restent à démontrer.

Nous aurons l’occasion, tout au long de ces débats, de vous montrer que le coût des économies que vous escomptez par le report de l’âge de départ à la retraite à 64 ans risque de se reporter vers l’assurance chômage et les minima sociaux. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 665.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à supprimer l’article liminaire, car celui-ci entérine financièrement une réforme paramétrique des retraites, injustifiée et injuste, qui préempte deux ans de la vie des Français.

Les 17,7 milliards d’euros escomptés ne tiennent pas compte des coûts induits par le report à 64 ans de l’âge légal. En augmentant l’âge de départ dès 2023, la réforme entraînera des dépenses supplémentaires pour l’assurance chômage, les aides sociales ou encore l’assurance maladie.

Deux salariés sur cinq ne sont déjà plus en emploi, mais au chômage, en maladie ou en invalidité lorsqu’ils font valoir leur droit à la retraite – selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), la proportion est de 35 % pour les hommes et de 45 % pour les femmes.

Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, s’indigne que l’on débatte de l’allongement de la durée de carrière alors que le sort de tous ceux qui sont en dehors de l’emploi avant la retraite n’est pas tranché.

Les coûts cachés s’élèveraient à 36 milliards d’euros de dépenses supplémentaires, sans compter les dépenses d’assurance chômage, et à 970 millions supplémentaires au titre des arrêts de travail.

Vous faites l’impasse sur ces éléments. À défaut d’une étude d’impact sérieuse, nous ne disposons pas d’une vision claire des comptes.

D’après les prévisions du COR, le déficit de l’ordre de 3 % est tout à fait résorbable dans les prochaines années. Contrairement à ce qu’on nous martèle depuis des mois, la pérennité de notre système n’est pas en jeu, et ce même en l’absence de réforme.

Le déficit du système de retraite représente moins de 1 % du PIB. Pour rappel, l’aide aux entreprises que constitue la suppression de la CVAE entraînera un manque à gagner d’un montant équivalent à 8,5 % du PIB.

Pour vous, le courage consiste à faire payer votre politique en faveur des plus riches par les plus pauvres. Telle est la réalité ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° 695.

Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article liminaire qui entérine financièrement la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron, lequel veut imposer aux Françaises et aux Français de travailler deux années supplémentaires et, par conséquent, leur prendre deux années de repos.

Repousser l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans n’a rien d’inéluctable, puisque la trajectoire financière de notre régime est maîtrisée.

Cette mesure créera des inégalités, car ce sont les plus modestes, les femmes, qui en paieront le prix fort. C’est un choix de société injustifié et injuste.

Ce report de deux ans ferme suscite un rejet massif et un mouvement social historique.

Cette grande régression est, de surcroît, imposée de façon brutale, dans le cadre d’un véhicule législatif qui ne permet pas un vrai débat. Par le choix du PLFRSS, le Gouvernement peut en effet recourir à l’article 47-1 pour contraindre le débat parlementaire, sans compter le nombre important d’amendements déclarés irrecevables.

Au cynisme face aux Français, Emmanuel Macron ajoute le mépris de la représentation nationale.

Cette réforme se justifie, dites-vous, messieurs les ministres, par le déficit. Au cours du précédent quinquennat, les baisses d’impôt au profit des plus riches et des grandes entreprises ont amputé le budget général de l’État de 50 milliards d’euros par an.

À cela s’ajoutent les exonérations de cotisations en tout genre. Ces dernières ont augmenté trois fois plus vite que les aides sociales au cours de ces dix dernières années. En 2023, le montant de ces exonérations s’élèvera à 19 milliards d’euros, en partie supportés par la branche vieillesse de notre sécurité sociale, soit un peu plus que les économies que le Gouvernement cherche à réaliser par cette réforme.

Les travailleurs ne doivent pas avoir à supporter le coût de ces exonérations pour les finances publiques.

Ce déficit, qui n’est pas une « paille », monsieur le ministre, résulte d’un choix politique, et la dramatisation à laquelle vous vous livrez relève d’une tromperie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour présenter l’amendement n° 725.

M. Mickaël Vallet. Mon intervention porte également sur la suppression de l’article liminaire et l’approche purement comptable de celui-ci.

Monsieur le ministre, vous avez indiqué tout à l’heure : « 13 milliards d’euros, ce n’est tout de même pas une paille. » Soyez rassuré, sur les travées situées à la gauche de cet hémicycle, nous savons encore faire la différence entre les millions et les milliards ! Pour avoir géré des budgets dans nos collectivités, nous savons à peu près ce que cela peut représenter.

Causons recettes !

Sur ces travées, nous estimons que les difficultés s’expliquent non pas par l’impôt ou les taxes, qui ne sont pas des gros mots, mais – c’est ce qui différencie votre approche de la nôtre, monsieur le ministre – par l’insuffisance de la redistribution.

Tel était d’ailleurs le fondement de l’idée, formulée il y a quelques mois à défaut de proposition gouvernementale en ce sens, d’un référendum d’initiative partagée sur la taxation des superprofits. Selon nos calculs, une telle taxation aurait pu rapporter 10 milliards d’euros. Nous n’étions pas très loin des 13 milliards d’euros que vous semblez rechercher…

Monsieur le ministre, puisque vous aimez tant, avec certains de mes collègues de la majorité sénatoriale, arguer que le choix des autres pays européens nous oblige, nous qui sommes encore – je l’espère du moins – une nation souveraine, nous pourrions emprunter le même chemin que d’autres pays pour ce qui est de trouver des recettes.

En Espagne, la taxation exceptionnelle prévue pour 2023 et 2024 permettra d’engranger 7 milliards d’euros de recettes en deux ans, et partant, de financer diverses mesures sociales.

En Grande-Bretagne, dont on ne peut pas dire que le gouvernement pratique la politique avec un couteau entre les dents, une taxe additionnelle a été instaurée, à titre provisoire, sur les compagnies nationales de pétrole exploitant sur le territoire national.

En Italie, les profits exceptionnels du secteur de l’énergie sont taxés à hauteur de 10 %.

Je pourrais donner d’autres exemples.

Si le véhicule législatif l’avait permis, nous aurions pu débattre des possibilités de trouver de nouvelles recettes.

M. le président. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Mickaël Vallet. Ayons un peu de mémoire, monsieur le ministre : pendant les deux guerres mondiales, nous avons taxé les superprofits. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 807.

M. Olivier Jacquin. La réforme des retraites ne devrait pas passer par une loi de financement rectificative de la sécurité sociale tant elle engage la vie de toutes les Françaises et de tous les Français.

Elle est inopportune et rejetée par l’immense majorité de nos concitoyennes et de nos concitoyens, par toutes les travailleuses et tous les travailleurs du pays.

Cet article liminaire – obligatoire dans une loi de financement de la sécurité sociale –, qui entérine financièrement cette réforme des retraites injuste et injustifiée, doit dès lors être supprimé.

Loin d’une véritable réforme du fonctionnement global de notre système de retraite, cette réforme purement paramétrique est conservatrice, injustifiée et injuste.

Elle répond au seul impératif d’équilibre des comptes publics, conséquence d’une politique intensive de cadeaux fiscaux faits aux grandes entreprises – fin de la CVAE – ainsi qu’aux ménages les plus riches – suppression de l’ISF, création de la flat tax –, mais aussi du transfert de la dette covid-19 sur les comptes de la protection sociale.

Or d’autres solutions existent. Elles exigent de poser la question des recettes du système, question absolument taboue pour votre gouvernement, messieurs les ministres.

Les exonérations de cotisations sociales, dont certaines sont sans effet notable sur notre économie, coûteront pourtant à la branche vieillesse 18,9 milliards d’euros en 2023, soit un peu plus que les 17,7 milliards d’euros que le Gouvernement cherche à économiser d’ici à 2030 par sa réforme.

Du reste, ces 17,7 milliards d’euros escomptés ne tiennent pas compte des coûts induits par le report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite pour l’assurance chômage et les minima sociaux.

Le Gouvernement crie à l’urgence. Il est démenti par le Conseil d’orientation des retraites, par de nombreux économistes, par l’intégralité des syndicats, et même par certaines organisations patronales.

Il est urgent de retirer ce texte, de reprendre de véritables discussions et d’envisager une réelle réforme qui alliera sauvegarde de la répartition et progrès social. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. Les amendements nos 820 et 860 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 895.

M. Victorin Lurel. Le citoyen qui suit nos débats depuis son salon observe un étrange ballet : d’un côté, une gauche qui se lève et qui défend ses principes et ses convictions, et de l’autre côté, une droite déjà assoupie et vaguement irritée par la prétendue obstruction dans laquelle nous donnerions. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Nous avons déposé 4 335 amendements ; vous en avez écarté un millier, si bien qu’il en reste 3 732 à examiner. En dépit de cela, vous affichez la componction du responsable qui s’irrite que nous ne débattions pas plus vite, car il faut absolument voter ce qui est le cœur même, l’architecture fondamentale du financement sur lequel vous allez vous appuyer.

Je peux comprendre qu’il soit gênant, et même irritant, de s’entendre rappeler les cadeaux fiscaux qui ont été faits.

En tout état de cause, l’exercice auquel nous nous livrons est dantesque, kafkaïen. En vingt ans d’hémicycle, je n’avais jamais assisté à cela.

Il faut dire que je n’ai jamais vu être appliqué l’article 47-1 de la Constitution, qui a limité à vingt jours le temps des débats à l’Assemblée nationale, alors qu’ils auraient pu y être prolongés sans empiéter sur le délai de quinze jours réservé au Sénat. On ne peut pas se satisfaire de cette situation.

M. Victorin Lurel. Vous avez bien sûr le droit de défendre votre idéologie, votre vision et le prisme par lequel vous appréhendez les choses. Mais nous en avons également le droit, sans que nos propos soient taxés d’obstruction pour autant. Nous demandons la suppression de cet article inique. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. – M. Roger Karoutchi sourit.)

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour présenter l’amendement n° 929.

Mme Viviane Artigalas. Par le présent amendement, je demande à mon tour la suppression de cet article liminaire.

En effet, celui-ci entérine financièrement une réforme injuste qui ne se justifie, messieurs les ministres, que par votre volonté de récupérer des ressources financières sur le travail des Français, en particulier les plus précaires et les femmes.

Cette réforme répond exclusivement à un impératif de réduction des dépenses publiques. Or, comme cela vient d’être démontré dans cet hémicycle par mes collègues, il n’y avait pas d’urgence à mener celle-ci, et surtout pas avec ce véhicule législatif.

Ce n’est pas le moment de la faire. Je vous rappelle, messieurs les ministres, qu’après avoir subi la crise sanitaire, les Français subissent la crise économique. Du fait de l’inflation, ils sont nombreux à rencontrer des difficultés pour boucler leur budget, se soigner, se loger, se déplacer et se chauffer.

Ne pouvait-on pas attendre de voir les effets de la réforme Touraine avant de réformer de nouveau ?

Par ailleurs, pourquoi ne revenez-vous pas sur ce dogme du non-remplacement des fonctionnaires ? Nos services publics ont besoin d’être renforcés, particulièrement dans le domaine de l’éducation et de la santé. L’augmentation du nombre de fonctionnaires permettrait peut-être de rééquilibrer en partie notre système de retraite. En tant qu’employeur des fonctionnaires, vous payez les cotisations, mais vous récupérez aussi les recettes. Réfléchissez-y donc !

Vous disposez de leviers pour augmenter les recettes du système de retraite. Prenez vos responsabilités, et saisissez-vous de ces possibilités !

Telles sont les raisons pour lesquelles je demande la suppression de cet article liminaire et, au-delà, de cette réforme des retraites.

M. le président. Les amendements nos 940, 979, 1007 et 1028 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 1058.

M. Jean-Michel Houllegatte. Selon le dicton populaire cité par Yan Chantrel tout à l’heure, « lorsque l’on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage ». Cette expression proverbiale, qui date du XIIIe siècle – époque où l’on ne se souciait guère de la condition animale –, illustre le fait que l’on trouve toujours une cause afin de se justifier.

Aujourd’hui, les déficits de la branche retraite sont présentés comme un épouvantail qui justifierait cette réforme injuste et non nécessaire.

Je ne reviendrai pas sur le rapport du COR, que vous bafouez. Il indique que les dépenses sont maîtrisées, mais souligne un manque de recettes : c’est donc bien sur ce dernier volet qu’il faut se pencher.

On nous indique également que le ratio entre actifs cotisants et retraités se dégrade à terme, ce qui est vrai, mais en omettant de mentionner les gains de productivité et la richesse produite par salarié, laquelle augmente plus vite que le ratio ne baisse. Notre système de retraite par répartition doit aussi être un système de répartition de la richesse produite par le travail.

J’en viens aux incidences de cette réforme sur les autres mécanismes de solidarité. Comme l’indique une étude de la Drees, qui s’est penchée sur la réforme Fillon-Woerth de 2010 qui a reculé de 60 ans à 62 ans l’âge de la retraite, les bénéficiaires du RSA ou de l’allocation de solidarité spécifique ont vu leur situation mécaniquement prolongée de deux années supplémentaires, ce qui a entraîné un surcoût de 600 millions d’euros par an pour ces régimes. Malheureusement, lorsqu’on est au RSA à 60 ans et trop éloigné de l’emploi, on le reste à 62 ans et on le reste encore à 64 ans. (Mme Monique Lubin approuve.)

Le tableau ne tenant pas compte de ces coûts induits, il est donc insincère et j’en demande la suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 1074.

M. Jean-Claude Tissot. Par cet amendement, je vous propose de supprimer cet article liminaire, hautement symbolique de tout ce qui ne va pas dans ce texte.

Comme beaucoup de mes collègues, je suis très favorable à ce que nous nous attelions à une réforme des retraites, mais pas dans ce cadre contraint et tronqué que le Gouvernement nous impose au travers de l’article 47-1 de la Constitution, pas en n’y consacrant que douze jours et pas dans le cadre d’un PLFRSS qui limite autant notre capacité d’amender et de proposer.

Plus de 1 000 amendements ont été retoqués avant même que nous puissions en discuter ! Certains auraient pourtant permis d’ouvrir des débats intéressants, notamment sur la reconnaissance de nos responsables associatifs ou de nos élus locaux par une bonification de leur retraite.

Nous en sommes donc réduits à devoir nous prononcer sur une approche purement paramétrique des retraites, entérinée par cet article liminaire. Il n’est pas sérieux d’examiner un tel texte sans évaluer les conséquences particulièrement importantes qu’il emporte. Pourtant, vous avez volontairement écarté les prévisions qui en tiennent compte, même les plus sérieuses, comme le modèle Mésange, développé par l’Insee et la direction générale du trésor. Il faut dire que ce modèle démontre les effets négatifs de votre réforme sur le plan macroéconomique !

Vous avez donc choisi une démarche « comptable », que je qualifierai plutôt de « cynique ». Vous venez simplement chercher de l’argent dans les caisses de retraite, fort bien gérées par les partenaires sociaux, pour compenser celui que vous n’avez de cesse de jeter par les fenêtres.

Cela a commencé par le « quoi qu’il en coûte », pendant la crise sanitaire, durant laquelle vous avez refusé tout ciblage des aides et toute mise à contribution de ceux à qui la situation profitait. Et cela s’est poursuivi avec des cadeaux aux plus riches et aux entreprises qui n’ont aucun caractère d’intérêt général. Dernière gabegie en date : la suppression de la CVAE, qui a déjà été évoquée, coûtera 8 milliards d’euros en année pleine !

Aujourd’hui, vous présentez la facture aux travailleurs : deux années de leur vie pour s’acquitter de votre « quoi qu’il en coûte ».

Revoyez vos prévisions, revoyez vos priorités, et ensuite nous pourrons vraiment parler des retraites. D’ici là, je propose la suppression de cet article liminaire, fondé à la fois sur des estimations auxquelles nous ne pouvons faire confiance et sur une démarche trop cynique pour que nous puissions y adhérer. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Éblé, pour présenter l’amendement n° 1095.

M. Vincent Éblé. Mon amendement vise à supprimer l’article liminaire,…

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Quelle surprise !

M. Vincent Éblé. … qui entérine financièrement une réforme paramétrique des retraites à la fois injuste et injustifiée.

Cette réforme répond à un impératif de strict équilibre des comptes publics, à la suite, d’une part, d’une politique extrêmement intensive de cadeaux fiscaux faits non seulement aux grandes entreprises, par exemple avec la fin de la CVAE, mais aussi aux ménages les plus riches, avec la suppression de l’ISF et la création de la flat tax – et la liste pourrait être prolongée – et, d’autre part, d’un transfert de la dette covid sur les comptes de la protection sociale.