M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. Le phénomène des salariés inaptes au travail fait réellement l’objet d’une sous-évaluation de la part des pouvoirs publics. Il n’existe aucun chiffre national consolidé du nombre d’avis d’inaptitude attribués par la médecine du travail aux salariés qui ne peuvent pas reprendre totalement ou partiellement leur emploi initial.

Pourtant, selon un rapport de la Haute Autorité de santé, plus de 90 % des salariés déclarés inaptes sont licenciés. La reconnaissance de cette inaptitude permet de toucher une indemnité en capital selon le taux d’incapacité, une rente d’incapacité versée par la sécurité sociale chaque trimestre pour les incapacités inférieures à 50 %.

Cette rente pour inaptitude, qui n’excède pas 25 % de leur salaire de référence, est jugée unanimement faible et ne permet pas de vivre une fois l’indemnité en capital et les droits au chômage consommés.

Ainsi, en 2017, on estimait à 100 000 nouveaux salariés inaptes inscrits chaque année à Pôle emploi et à 1 million ou à 2 millions le nombre total de salariés qui seraient menacés de désinsertion professionnelle.

C’est un phénomène qui ne cesse de se renforcer en raison du report de l’âge de départ à la retraite, car il touche particulièrement les salariés seniors ayant eu des métiers physiques ; il intervient en moyenne à 60,4 ans pour les hommes et à 65,9 ans pour les femmes, selon une étude de la Drees de 2020.

Même un faible degré d’inaptitude peut poser d’importantes difficultés d’insertion. Seuls 25 % des salariés inaptes sont envoyés vers des structures spécialisées dans l’insertion de travailleurs en situation de handicap. Les conseillers de Pôle emploi s’avouent démunis face à certains cas.

Les réformes successives de l’assurance chômage sont venues durcir les conditions d’indemnisation, sans égard pour les centaines de milliers de salariés qui ne peuvent plus accéder à la grande majorité des postes proposés.

Enfin, la question écologique est également à prendre en considération dans la mesure où les risques professionnels sont largement liés aux dangers de la pollution ou des produits chimiques.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2515.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 182 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 91
Contre 251

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 3174, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° L’article est complété par deux paragraphes ainsi rédigés :

« II. – Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises enregistrant un taux de licenciement pour inaptitude nettement supérieur à la moyenne de la branche concernée.

« III. – La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention à destination des inaptitudes se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L. 2312-33 du code du travail. »

L’amendement n° 3488, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles concernant des salariés de plus de 59 ans pour les entreprises enregistrant un taux de licenciement pour inaptitude anormalement élevé.

« La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention à destination des inaptitudes se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312 28 à L. 2312 33 du code du travail. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour les présenter.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je prends acte de la remarque de M. le rapporteur et lui offre l’opportunité d’émettre deux avis défavorables supplémentaires, puisque c’est non pas à l’AT-MP, mais à l’assurance maladie qu’il faudrait verser les pénalités. À défaut, j’imagine qu’il soutiendrait notre démarche.

Pourquoi instaurer une pénalité ?

Les aides à domicile, que l’on a évoquées tout à l’heure, sont massivement sorties de l’emploi pour inaptitude, y compris dans les structures les plus vertueuses. Elles le seront encore plus demain, si le départ à la retraite est repoussé de deux ans.

Nous voulons surtout sanctionner les entreprises qui ne font aucun effort et n’ont pas de plan d’actions ou de prévention pour remédier à ces difficultés. Il suffit d’aller voir dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp) si l’entreprise mène des actions pour essayer de se montrer vertueuse eu égard à des risques élevés dans certaines branches. Il faut donc toujours se situer relativement à une branche.

Le licenciement pour inaptitude est aussi dû aujourd’hui au fait que les entreprises ont beaucoup externalisé les postes allégés pour des raisons de coût et de moins-disant. Désormais, il ne reste que les postes les plus difficiles.

Lorsque l’on compare le coût des fonctionnaires par rapport au privé, on oublie que le privé externalise le coût social des salariés ayant des difficultés, alors que les trois fonctions publiques ne le font pas et essaient de trouver des postes adaptés. C’est quelquefois la cause du différentiel de coût que l’on met en avant quand on veut privatiser certains services de la fonction publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Vous avez bien compris le dispositif, ma chère collègue : l’inaptitude est prise en charge par l’assurance maladie quand l’incapacité permanente l’est par l’AT-MP.

Permettez-moi néanmoins d’apporter une précision. On ne travaillera pas deux ans de plus lorsque l’on est concerné par l’inaptitude. La retraite anticipée pour inaptitude est aujourd’hui fixée à 62 ans, c’est l’âge légal. Demain, dans la loi, la retraite au titre de l’inaptitude sera fixée à 64 ans moins deux ans, soit toujours 62 ans.

M. Olivier Dussopt, ministre. Exact !

M. René-Paul Savary, rapporteur. J’aurais préféré que l’on voie les choses différemment, car je partage vos préoccupations sur l’inaptitude. J’aurais souhaité faire baisser un peu l’âge de départ, mais M. le ministre m’a dit que ce ne serait pas raisonnable ; or nous avons besoin de son assentiment pour sortir du droit actuel.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut aller plus vite !

M. René-Paul Savary, rapporteur. Sur l’incapacité permanente, qui vous préoccupe, nous formulons des propositions allant bien au-delà de ce que souhaitait M. le ministre, qui m’en veut beaucoup parce que cela aura un coût.

Quoi qu’il en soit, j’espère pouvoir baisser l’âge de départ à 60 ans. Si vous êtes impatiente de délibérer sur l’inaptitude et l’incapacité permanente, avançons jusqu’aux articles 8 et 9, car il s’agit d’une réelle préoccupation de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de linsertion. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Ces amendements avaient pour objet l’inaptitude, qui relève de l’assurance maladie, et pas l’incapacité permanente.

En tout état de cause, vous avez raison : il n’y a pas de changement pour l’incapacité permanente. Les salariés pourront toujours partir à 62 ans. C’est pourquoi ce n’est pas une mesure d’accompagnement, messieurs les ministres. En aucun cas, ils ne doivent donc être soustraits des 18 milliards d’euros que vous allez économiser, soit par la baisse des pensions, soit par les apports contributifs de ceux – soit la moitié – qui continueront à travailler.

En revanche, si vous passez l’incapacité permanente à 60 ans, alors là, oui, monsieur le ministre, ce sera une mesure d’accompagnement. Vous pourrez alors déduire les 3 milliards d’euros indûment portés sur une mesure qui n’est qu’un maintien, et en aucun cas un surcoût !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3174.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 183 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 91
Contre 251

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 3488.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 2461 rectifié, présenté par M. Dossus, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 7 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :

« Section …

« Contribution pour inaptitude

« Art. L. 137 42. – I. – Il est institué une contribution pour « inaptitude » au taux de 3 %, lorsque des entreprises enregistrent un taux de licenciement pour inaptitude supérieur à la moyenne de la branche concernée pour des salariés de plus de 59 ans.

« II. – Le produit de cette contribution additionnelle est affecté à la caisse mentionnée à l’article L. 222 1 du code de la sécurité sociale.

« III. – Le produit de cette contribution additionnelle est affecté à la caisse d’assurance maladie mentionnée à l’article L. 221 1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Cet amendement de Thomas Dossus vise à créer une contribution exceptionnelle pour les entreprises qui enregistrent un taux de licenciement pour inaptitude de leurs salariés de plus de 59 ans supérieur à la moyenne de la branche concernée.

La situation professionnelle des seniors est souvent critique. De nombreux salariés de plus de 55 ans sont mis à la porte du jour au lendemain par leurs employeurs respectifs sans raison apparente.

Comme l’a rappelé Raymonde Poncet Monge, la Première ministre Élisabeth Borne l’a d’ailleurs elle-même admis lors de la présentation du projet de réforme le 10 janvier dernier, qualifiant cette pratique qui consiste à « faire partir les salariés quelques années avant la retraite » d’« abusive », voire de « discriminatoire ».

Ces employés licenciés peinent à retrouver du travail et font face à tout un tas de préjugés. Les employeurs craignent qu’ils aient des problèmes de santé ou qu’ils demandent une rémunération trop importante. Résultat, d’après une récente étude de la Dares, le taux d’emploi des 55-64 ans s’élève à 56 % en France, un chiffre bien en dessous de la moyenne européenne à 60,5 %.

Selon vous, monsieur le ministre, la réforme des retraites favoriserait l’emploi des travailleurs seniors, donc le plein emploi. En réalité, la réforme exclura du marché du travail ces mêmes travailleurs. C’est le constat qui a été fait à chaque décalage de l’âge légal de départ à la retraite, comme avec la réforme Woerth, en 2010.

Ainsi, en 2019, 16 % des personnes de plus de 50 ans n’étaient ni en emploi ni à la retraite. Pour ces personnes, décaler l’âge légal, c’est simplement être plus longtemps au chômage ou aux minima sociaux. La situation des plus de 59 ans va donc s’aggraver, contrairement à ce que le Gouvernement essaie de faire croire aux Français.

Parce que cette situation est insupportable, nous proposons d’instaurer une contribution exceptionnelle afin de dissuader les entreprises de licencier leurs employés de plus de 59 ans de manière abusive.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Là encore, l’exposé des motifs ne correspond pas à l’objet de l’amendement. Il s’agit ici de pénalités qui bénéficieraient à la Cnav – cela renflouerait judicieusement son budget ! – et frapperaient les entreprises enregistrant un taux de licenciement pour inaptitude des salariés plus de 59 ans supérieur à la moyenne de leur branche.

Il peut arriver qu’il y ait des accidents. Si le licenciement pour inaptitude intervient à 58 ans, il n’y aura pas de pénalité ? On discutait des effets de bord, j’ai cru comprendre tout à l’heure que vous n’étiez pas vraiment intéressés par le bornage. Quel sens cela a-t-il de critiquer les bornes d’âge pour en faire l’éloge quelques minutes après ?

Pour notre part, nous faisons preuve de cohérence. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur des pénalités supplémentaires, préférant les plans de prévention de l’inaptitude.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2461 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 184 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 90
Contre 252

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 2875 rectifié bis est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 3171 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.

« La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L. 2312-33 du code du travail. »

La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° 2875 rectifié bis.

Mme Isabelle Briquet. Cet amendement vise à financer le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (Fipu) dans les hôpitaux et établissements sociaux et médico-sociaux par un malus de cotisations patronales sur l’accidentologie au travail.

Aujourd’hui, nous le savons tous, nos hôpitaux manquent de personnel et peinent à recruter, notamment du fait de la pénibilité des métiers concernés.

M. Jean-François Husson. Et un peu des 35 heures !

Mme Isabelle Briquet. Ce malus ne serait qu’un juste retour des choses pour améliorer les conditions de travail dans ce secteur particulièrement sensible et ô combien indispensable pour nos concitoyens.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3171.

Mme Raymonde Poncet Monge. Comme il s’agit de nouveau d’un malus, je m’abriterai derrière le rapport de la Cour des comptes sur les politiques de prévention en santé au travail dans les entreprises du mois de décembre 2022, qui critique le manque d’ambition de la politique publique de l’État en matière de santé au travail et de prévention des risques professionnels, ainsi que l’absence de contraintes qui pèsent sur les entreprises. Si la Cour des comptes le dit, on m’autorisera à le dire également…

Je ne reviens pas sur les chiffres des contraintes physiques et de rythme de travail donnés par la Dares. Pour autant, monsieur le rapporteur, j’espère que, lorsque nous discuterons de l’article sur la pénibilité, vos propositions seront à la hauteur de la multiplication par trois ou par quatre, quelles que soient les catégories socioprofessionnelles, de ces contraintes de pénibilité physique et temporelle.

D’une part, allez-vous tenir compte de cette explosion ? D’autre part, la population plus vulnérable et moins résistante face à ces contraintes physiques et temporelles, qui devra travailler jusqu’à 64 ans, sera-t-elle en mesure de rester dans l’activité du travail ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Il s’agit encore de pénalités, mais en rapport avec la branche AT-MP.

Même motif, même sanction : demande de retrait ou avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2875 rectifié bis et 3171.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 2329 rectifié ter, présenté par MM. Henno et Détraigne, Mmes Guidez et Létard, M. Prince, Mmes Ract-Madoux, Saint-Pé et Vérien et MM. Chauvet et S. Demilly, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La partie des cotisations à la charge de l’employeur est réduite lorsque le salarié a 57 ans et plus, jusqu’à son départ de l’entreprise dans des conditions prévues par décret.

« Toutefois, en cas de licenciement de ce salarié senior, l’employeur devra rembourser l’équivalent des cotisations dont il a été exonéré. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Olivier Henno.

M. Olivier Henno. Nous sommes tous d’accord : l’emploi des seniors est une question essentielle.

Cet amendement, qui résulte d’une discussion avec un patron éclairé et ayant des préoccupations sociales, vise à prévoir une exonération – nous aurions préféré une prime, mais va pour l’exonération. Toutefois, que se passera-t-il en cas de rupture d’engagement, c’est-à-dire si le CDI ne va pas à son terme ? Il s’agit d’un amendement d’appel à seule fin de lancer le débat. J’aimerais entendre le rapporteur sur cette question.

Il me paraîtrait judicieux que les exonérations ayant bénéficié à l’entreprise puissent être remboursées si les engagements pris à l’embauche ne sont pas respectés. Cela n’est pas une sanction, c’est la logique du juste retour.

Par ailleurs, faut-il légiférer ? Étant attaché au paritarisme et à la discussion avec les partenaires sociaux, si l’on aborde toutes les questions législatives et de droit dans une logique d’entonnoir, on ne laisse pas suffisamment de grain à moudre aux partenaires sociaux…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Mon cher collègue, vous faites les questions et les réponses ! (Sourires.) Vous avez le mérite de bien poser le sujet.

Vous souhaitez déplacer les bornes à 57 ans. Déjà, M. le ministre trouve le coût de nos propositions pour 60 ans prohibitif. Votre proposition versera encore plus dans l’effet d’aubaine, si effet d’aubaine il y a, ce qui est à vérifier.

Le CDI senior étant un CDI différent du CDI classique, il appartiendra aux partenaires sociaux de le préciser pour bien marquer la différence et éviter tout risque d’effet d’aubaine.

Ensuite, si l’entreprise bénéficie d’exonérations et que l’engagement de conserver le salarié jusqu’à ce qu’il soit au taux plein ou à l’âge d’annulation de la décote n’est pas tenu, je ne suis pas contre un remboursement. Cependant, comme vous l’avez dit à la fin de votre intervention, il vaut mieux laisser les partenaires sociaux délibérer sur ce point avant de prendre nos responsabilités.

Nous aurons l’occasion de le faire, puisque M. le ministre du travail s’est engagé à nous présenter le projet de loi Travail après des discussions sur l’ANI et d’autres dispositifs, notamment l’intéressement des salariés. À cet égard, il peut être intéressant d’imaginer un dispositif différencié selon l’âge des salariés quand il y a une réelle volonté de l’entreprise de favoriser l’emploi des seniors.

C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement, en attendant les négociations avec les partenaires sociaux.

Mme Cécile Cukierman. Retrait du texte !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, j’entends votre intention. Nous sommes tous là pour chercher des mesures visant à favoriser l’emploi des seniors.

J’ai déjà eu l’occasion d’exprimer ma réserve sur le CDI senior, notamment sur les exonérations de cotisations liées à l’âge. En l’occurrence, vous proposez 57 ans. Le risque est de « décaler » le problème. Les candidats à l’embauche âgés de 56 ou 55 ans se verront demander par les entreprises sollicitées de revenir dans un an ou deux ans après, afin qu’elles bénéficient de l’exonération. Le salarié en question devra attendre et il aura des difficultés à retrouver un emploi avant d’avoir atteint cet âge. Par ailleurs, votre dispositif aurait un coût certain, chiffré à 3,6 milliards d’euros.

Cependant, monsieur le sénateur, je pense que vous vouliez surtout nous alerter et prolonger la discussion sur l’emploi des seniors. À ce sujet, Olivier Dussopt présentera bien au printemps prochain le projet de loi Travail. L’emploi des seniors fera évidemment partie des travaux que vous conduirez dans le cadre de ce texte.

Par conséquent, le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 2239 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Olivier Henno. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 2239 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 124 rectifié bis, présenté par Mme Estrosi Sassone, MM. Perrin, Rietmann et D. Laurent, Mme V. Boyer, MM. Milon et Calvet, Mme Joseph, M. Mandelli, Mmes Chauvin et Di Folco, M. Cambon, Mme Dumont, MM. Burgoa, Chaize et Savin, Mme Belrhiti, M. Daubresse, Mmes Richer et L. Darcos, M. Le Rudulier, Mme Gosselin, MM. Klinger, Anglars, J.B. Blanc et Bouchet, Mme Canayer, M. de Legge, Mme Demas, MM. Lefèvre et Sido, Mmes Malet et Bellurot, MM. Sol, J.P. Vogel, Bascher et Mouiller, Mme Chain-Larché, M. Karoutchi, Mme Muller-Bronn, MM. Cadec, Somon et Brisson, Mmes Drexler et Imbert, MM. Piednoir, Pellevat et Chatillon, Mme Lopez, MM. Panunzi et C. Vial, Mme Del Fabro, MM. Charon, Frassa et Genet, Mmes Raimond-Pavero et Boulay-Espéronnier, M. Rapin, Mme Renaud-Garabedian et M. Cuypers, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 241-14 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-… ainsi rédigé :

« Art. L 241-…. – Sont exonérées des cotisations d’assurance vieillesse à la charge de l’employeur les rémunérations versées aux salariés ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite prévu à l’article L. 161-17-2 du présent code. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Olivier Rietmann.