M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.

Mme Annie Le Houerou. Cet article 13 concerne deux dispositifs principaux : la création de droits à pension pour le cumul emploi-retraite ; l’extension de la retraite progressive à la fonction publique et aux indépendants.

Nous trouvons regrettable de ne pouvoir échanger sur ces deux outils nouveaux, puisque vous avez décidé de dévitaliser la fonction parlementaire par l’addition de toutes les procédures que vous offrent la Constitution et le règlement.

M. Philippe Pemezec. On va finir par le savoir !

Mme Annie Le Houerou. Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus. Nous ne lâcherons rien, nous ne les lâcherons pas.

Je reviens à l’article 13. La libéralisation du dispositif cumul emploi-retraite vise à faire travailler les retraités ayant une pension de retraite insuffisante. Le but affiché est de mettre un peu de beurre dans les épinards de ceux et celles qui ont travaillé dur et qui n’en peuvent déjà plus.

Le cumul emploi-retraite est inégalitaire. Seules sont concernées les personnes qui disposent de qualifications reconnues durant leur carrière, qui partent en bonne santé, avec des pensions déjà correctes, et qui peuvent reprendre facilement une activité. Au lieu de corriger les inégalités de carrière, notamment l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, cet article risque de fragiliser encore davantage la santé des personnes qui vont devoir poursuivre une activité salariée au-delà de 64 ans. Avec vos deux années de travail obligatoire, les personnes qui auront des carrières pénibles ne pourront plus travailler comme vous le leur demandez. Par exemple, dans les Côtes-d’Armor, mon département, que peuvent bien penser les ouvriers, les ouvrières, les aides à domicile sur le dispositif de cumul emploi-retraite, alors qu’ils sont déjà cassés à 45 ans ? Je puis vous dire qu’ils n’aspirent pas à ce cumul. Ils attendaient avec impatience de partir à 62 ans et ils devront attendre deux années pour prétendre à ce repos mérité.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Annie Le Houerou. Ce sont souvent des femmes, et elles demandent avant tout une revalorisation salariale.

M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi, sur l’article.

M. Jérémy Bacchi. L’article 13 du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale aurait mérité un véritable débat. Nous ne pouvons que regretter de ne pouvoir confronter nos arguments sur cette disposition. En effet, l’article 13 prévoit des mesures aux philosophies opposées.

D’un côté, il favorise et améliore le recours à la retraite progressive, qui permet aux travailleurs de partir à 60 ans, offrant aux seniors une transition vers la retraite en réduisant leur temps de travail, sans perte de salaire ni perte de droits à la pension de retraite. Ce mécanisme doit être encouragé. Nous déplorons la complexité des démarches pour en bénéficier et le choix des employeurs de souvent préférer les ruptures conventionnelles à ce dispositif de maintien dans l’emploi des seniors. Ainsi, en 2020, seuls 23 800 salariés bénéficiaient d’une retraite progressive.

D’un autre côté, cet article 13 ouvre des droits pour les retraités qui décideraient de reprendre le travail en ayant recours au cumul emploi-retraite. Cette disposition aurait dû être précédée d’un débat sur la société que nous voulons. Voulons-nous une société où nos anciens accomplissent de petits boulots pour compléter leur pension de retraite insuffisante ou voulons-nous d’une société où les travailleuses et les travailleurs peuvent recevoir une pension digne, financée par des cotisations sociales à l’assurance vieillesse, jusqu’à la fin de leurs jours ? Si les entreprises rémunéraient correctement les salariés, si les femmes étaient payées au même niveau que les hommes, à compétences et à poste équivalents, les retraités ne seraient pas obligés de travailler. Il faut bien avoir en tête qu’il s’agit non pas de retraités qui souhaitent reprendre une activité professionnelle, mais bel et bien de retraités qui n’ont pas d’autre choix financièrement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, sur l’article.

M. Daniel Breuiller. La retraite progressive est un dispositif qui pourrait être efficace pour faciliter la transition vers la retraite, surtout pour les emplois les plus difficiles, et même si nous jugeons que le Gouvernement ne va pas assez loin pour démocratiser et améliorer ce dispositif qui est loin d’être parfait. En effet, les retraités ne s’en saisissent pas assez puisque seulement 2 % d’entre eux le font.

Cet article vise à changer la donne en ouvrant ce dispositif aux fonctionnaires et en imposant aux employeurs de justifier leur refus quand un salarié en fait la demande. Nous proposons, pour notre part, de rendre impossible pour l’employeur le refus d’une telle demande : cela devrait donc devenir un véritable droit.

Le problème avec ce dispositif, c’est qu’il aurait fallu maintenir cette possibilité de départ à la retraite progressive à 60 ans, voire plus tôt pour les carrières longues. Mais nous ne partageons pas la philosophie selon laquelle il faudrait ouvrir la question du cumul emploi-retraite (CER). L’idée qui sous-tend ce dispositif, c’est que la vie n’est faite que pour travailler : il permet aux retraités pauvres de mettre un peu de beurre dans les épinards, ce que ne leur permet pas le montant de leur retraite.

Bien que la retraite progressive soit un élément très utile pour faciliter la transition vers la retraite, nous ne pouvons nous résoudre à voter ce dispositif… Heureusement, nous n’aurons pas à le voter, puisque vous avez choisi d’utiliser tous les moyens que vous donne la Constitution pour dévitaliser la fonction parlementaire par l’addition de toutes les procédures possibles : articles 47-1 et 44, alinéa 3, de la Constitution, et articles 38 et 42 du règlement du Sénat.

Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Ce ne sera pas le cas. Et même si on ne peut plus débattre, même si nos amendements ne sont pas votés, nous pouvons toujours – je vous en remercie, monsieur le président, de l’avoir souligné – les retirer.

Je signale au Gouvernement qu’il a aussi le droit de retirer son projet de réforme des retraites ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 3381 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

L’amendement n° 4002 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 3381.

Mme Raymonde Poncet Monge. Les réformes des retraites s’enchaînent, avec toujours le même but productiviste : travailler plus pour gagner des points de PIB.

Ces petits points de PIB reposent sur les travailleurs et sur l’augmentation sans fin de leur temps de travail. Dans la poursuite de cette logique sans fin, nous discutons donc d’un article qui vise à favoriser le cumul emploi-retraite pour, même à la retraite, travailler et produire encore et encore. Or, si les personnes recourent à ce dispositif, c’est souvent à cause de la baisse tendancielle du niveau relatif des pensions.

L’objet de l’amendement n’est pas, bien sûr, de remettre en question le cumul emploi-retraite, qui est un choix et un droit. Il s’agit d’interroger la poursuite d’une logique sans fond qui va droit dans le mur climatique, sans aucun questionnement sur le modèle de production.

L’urgence est non pas de travailler plus, mais d’avoir le droit de partir à la retraite dès l’âge de 60 ans pour profiter d’années de repos en bonne santé.

Les auteurs de cette réforme se targuent de pouvoir créer ainsi 300 000 emplois, grâce au report de deux ans du départ à la retraite. Or cette réforme aura aussi pour conséquence de laisser 200 000 seniors dans le sas de précarité.

J’aurais aimé développer mon propos, mais j’ai reçu à l’instant un message de Joël Labbé, qui me demande de vous lire le message suivant : « Vous avez décidé de dévitaliser la fonction parlementaire (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) par l’addition de toutes les procédures que vous offrent la Constitution et le règlement. »

M. Philippe Pemezec. Cela faisait longtemps !

Mme Raymonde Poncet Monge. « Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus. »

M. le président. Il faut conclure !

Mme Raymonde Poncet Monge. « Nous ne lâcherons rien et nous ne les lâcherons pas ! » (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE. – Mme Sophie Primas sexclame.)

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 4002 rectifié.

Mme Michelle Gréaume. L’article 13 prévoit la libéralisation du dispositif de cumul emploi-retraite, qui vise à faire travailler les retraités en raison du montant insuffisant de leur pension de retraite. Cette mesure était déjà présente dans la réforme des retraites de 2019, qui prévoyait de rendre le cumul emploi-retraite plus avantageux financièrement, et, ce faisant, d’accorder des points supplémentaires pour les pensions.

Cet article prévoit la constitution de droits à pension via le cumul emploi-retraite, qui permettrait d’augmenter les pensions de retraite. Sa philosophie converge avec celle du projet de loi gouvernemental, qui consiste à faire travailler tout le monde plus longtemps, y compris à partir du moment où les personnes liquident leurs droits à la retraite.

Notre conception de la société est à l’opposé : nous souhaitons que la retraite permette de profiter de la vie sociale, familiale, culturelle et sportive, de s’émanciper, de bénéficier du droit au repos et au temps libre.

J’en profite pour vous dire, monsieur le ministre, que je trouve scandaleuse la lettre du Président de la République adressée le 9 mars dernier aux syndicats, dans laquelle il leur indique qu’il refuse de les recevoir. Il est également scandaleux de dire que tous les points de vue se confrontent dans cet hémicycle. Car c’est faux !

Votre loi est injuste et injustifiée. Le recours aux procédures pour bloquer nos amendements rend ce texte illégitime. Et quelle que soit l’issue de son examen, la bataille pour son retrait se poursuivra. Je vous le dis, nous ne lâcherons pas, nous continuerons à soutenir le peuple qui est dans la rue et qui manifeste pour ce retrait, et nous sommes nombreux ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Quel dommage de vouloir supprimer ce dispositif de transition !

Nous nous étions tous mis d’accord, au cours de nos travaux, pour dire qu’il existait une période de transition entre la fin de la vie active et le début de la vie sédentaire, et qu’il était important que la société la considère différemment au travers de divers dispositifs, notamment la retraite progressive et le cumul emploi-retraite.

Pourquoi les retraités ayant un faible revenu ne pourraient-ils pas, s’ils en ont envie, continuer à travailler ? Pourquoi voulez-vous priver des personnes auxquelles l’inactivité ne convient pas forcément du choix de travailler ? (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)

Mme Raymonde Poncet Monge. On ne peut pas vous répondre !

Mme Laurence Cohen. Augmentez les salaires et les pensions !

M. René-Paul Savary, rapporteur. Un point doit nous faire réfléchir : 20 % des personnes qui bénéficient de la retraite anticipée pour carrière longue choisissent ensuite de revenir au dispositif de cumul emploi-retraite. Cela devrait nous interpeller !

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cela nous interpelle, en effet !

M. René-Paul Savary, rapporteur. S’agissant de la retraite progressive, c’est une avancée tout à fait significative. L’article 13 prévoit d’étendre ce dispositif, en plus des salariés du secteur privé, aux fonctionnaires et aux différentes professions, notamment libérales, et donc à tous.

Dans le cadre de la réflexion sur la transition entre la période active et la période sédentaire de la vie, nous avons considéré que le dispositif de retraite progressive devait pouvoir s’appliquer dès l’âge de 60 ans – à cet égard, nous avons une divergence avec le Gouvernement –, avec une quotité de travail de 80 %, pour que le coût de la mesure ne soit pas prohibitif.

Si vous en étiez d’accord, monsieur le ministre, nous pourrions aménager le dispositif afin que la prise de décision soit partagée entre le salarié et l’employeur.

Sur l’élargissement du dispositif à l’ensemble des professions, et notamment aux fonctionnaires, je comprends votre inquiétude, qui est tout à fait légitime. En effet, si cette voie était trop empruntée, cela pourrait perturber le fonctionnement de certaines administrations.

Il s’agit de doser ce dispositif de transition afin qu’il apporte une valeur ajoutée à cette période de la vie.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. L’avis du Gouvernement est, bien sûr, défavorable sur ces amendements identiques de suppression.

Faciliter l’accès à la retraite progressive est un progrès, de même que l’ouverture de ce dispositif aux agents de la fonction publique ; c’est la réponse à une attente exprimée depuis longtemps, car cela permet de « lever le pied », si vous me permettez cette expression, avant de partir à la retraite.

S’agissant du cumul emploi-retraite, certains retraités feront le choix de cumuler leur retraite avec un emploi, quand d’autres, qui n’auront pas le choix, devront continuer à travailler pour améliorer leurs revenus.

Mme Émilienne Poumirol. Ils sont déjà usés jusqu’à la moelle !

M. Olivier Dussopt, ministre. J’en profite pour vous dire que ce dispositif ne concerne pas uniquement les retraités qui ont des qualifications ou des compétences particulières.

En effet, madame Lubin, des retraités ayant une petite pension cumulent leur retraite avec une activité qui n’est pas nécessairement très qualifiée – distribution de prospectus ou activité de service, par exemple –, mais qui est contributive.

On peut considérer que la situation initiale qui est la cause de ce cumul n’est pas satisfaisante ; c’est le cas. Mais cela ne doit pas nous empêcher de faire bénéficier de ce droit ceux qui, par choix ou par contrainte, cumulent emploi et retraite.

Je veux apporter une précision sur le caractère contributif du cumul emploi-retraite dans le cadre du régime général. La loi ne peut se substituer aux partenaires sociaux pour étendre ce dispositif contributif aux régimes complémentaires.

Sans préjuger des décisions des partenaires sociaux et sans empiéter sur leurs prérogatives, je considère qu’il serait bienvenu, compte tenu du mouvement que nous lançons, que les règles des régimes complémentaires soient alignées en termes de capacités contributives du cumul emploi-retraite.

Enfin, M. le rapporteur a évoqué la possibilité de prendre une retraite progressive à l’âge de 60 ans, ou plus exactement quatre ans, au lieu de deux, avant l’âge d’ouverture des droits.

Le coût de l’élargissement de la disposition proposée par le Gouvernement serait de 400 millions d’euros par an.

Si nous restreignons cette possibilité, comme le disait M. le rapporteur, au maintien d’une activité professionnelle à 80 %, ce coût s’élèverait entre 130 et 150 millions d’euros par an.

Si nous décidons de travailler sur la question des règles d’autorisation d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, et que nous en revenons aux règles actuelles, lesquelles n’obligent pas à prouver, pour la période concernée, l’incompatibilité avec le fonctionnement de l’entreprise, nous devrions certainement trouver quelques marges de manœuvre permettant de « recalibrer » ce dispositif. Gageons que nos discussions avant la CMP permettront d’avancer !

M. le président. Le vote est réservé.

L’amendement n° 2166, présenté par M. Savary et Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après la référence :

L. 11 bis

insérer la référence :

, L. 84

La parole est à M. le rapporteur.

M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que l’estimation indicative globale (EIG), adressée tous les cinq ans aux assurés à partir de 55 ans, inclut également des informations sur les règles applicables aux fonctionnaires en matière de cumul emploi-retraite.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Favorable.

M. le président. Le vote est réservé.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 2552 est présenté par M. Gontard, Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 2951 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 4005 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 2552.

M. Guillaume Gontard. J’ai également reçu un message, cette fois de la part de ma collègue Mme Monique de Marco (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), qui se demande pourquoi vous avez décidé de dévitaliser la fonction parlementaire par l’addition de toutes les procédures que vous offrent la Constitution et le règlement.

M. Philippe Pemezec. Vous n’avez pas honte ?

M. Guillaume Gontard. Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus. Nous ne lâcherons rien, nous ne lâcherons pas !

Le présent amendement vise à mettre au jour l’inégalité du dispositif de cumul emploi-retraite.

Pour de nombreuses personnes qui craignent de ne pas pouvoir conserver leur niveau de vie après la fin de leur activité professionnelle, le cumul emploi-retraite peut sembler une option séduisante. En réalité, il met cruellement en lumière le montant insuffisant des pensions de retraite.

De plus, le cumul emploi-retraite est un dispositif profondément inégalitaire, car il s’adresse essentiellement aux personnes qui disposent de qualifications reconnues durant leur carrière, qui partent à la retraite en bonne santé, qui touchent une pension correcte et qui, à ce titre, peuvent prétendre plus facilement à une activité.

Selon l’Insee, les bénéficiaires de ce dispositif sont en majorité des personnes ayant accompli une carrière complète, occupé des emplois de cadre et percevant une pension de retraite supérieure à la moyenne.

Alors que l’article 13 vise à rendre le cumul emploi-retraite créateur de droits, nous pensons que la priorité est plutôt de corriger les inégalités de carrière, qui concernent particulièrement les femmes, et d’augmenter le montant des pensions. En l’occurrence, ce dispositif aboutira seulement à précariser un peu plus les retraités qui touchent une faible pension, et qui seront forcés de continuer à occuper un emploi salarié au-delà de 64 ans.

Cet article montre, une fois encore, que le Gouvernement – contrairement à ce qu’il répète depuis le 10 janvier dernier – n’essaie en aucun cas de réduire les inégalités. En effet, sa réforme injuste et brutale ne contient en aucun cas des mesures qui amélioreront le quotidien des Français, bien au contraire.

M. le président. Il faut conclure !

M. Guillaume Gontard. Son but est de pousser les Français les plus précaires à travailler plus longtemps via l’intégration du dispositif de cumul emploi-retraite.

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 2951 rectifié.

Mme Annie Le Houerou. Nous regrettons que vous ayez décidé, avec M. le ministre, de dévitaliser la fonction parlementaire par l’addition de toutes les procédures que vous offrent la Constitution et le règlement. Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus. Nous ne lâcherons rien et nous ne les lâcherons pas !

Le dispositif de cumul emploi-retraite concerne seulement les personnes qui ont des qualifications et partent à la retraite en bonne santé, et le report d’âge à 64 ans limite son intérêt.

Au lieu de renforcer la lutte contre les inégalités, l’esprit qui sous-tend cette mesure conduit à fragiliser les personnes qui devront continuer à travailler.

L’enjeu de l’emploi des seniors est non pas le cumul emploi-retraite, mais le maintien dans l’emploi des salariés âgés. Or rien n’est prévu à cette fin dans cette réforme, hormis l’index seniors.

À 60 ans, je le rappelle, une personne sur trois n’est ni en emploi ni à la retraite ; la majorité d’entre elles sont en invalidité, au chômage ou touchent le revenu de solidarité active, et vivent souvent en situation de précarité. Avec les deux années supplémentaires de travail obligatoire que vous prévoyez, ceux qui auront un travail pénible ne pourront pas travailler davantage, comme vous le demandez.

Nous aurions souhaité une loi Travail portant sur l’emploi des seniors et le vieillissement au travail. L’adaptation des conditions de travail à la fin de la carrière aurait dû être votre priorité !

Nous ne le répéterons jamais assez : agir sur le taux d’emploi des seniors et l’égalité salariale entre les femmes et les hommes sont des solutions pour le financement des retraites. Le Gouvernement a préféré laisser de côté ces leviers et faire porter sur les travailleurs tous les efforts d’une réforme brutale,…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Annie Le Houerou. … injustifiée et injuste ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour présenter l’amendement n° 4005 rectifié.

Mme Marie-Claude Varaillas. Nous souhaitons la suppression de l’alinéa 6 de l’article 13, pour les mêmes raisons que nous demandons la suppression dudit article.

Le cumul emploi-retraite est un dispositif inégalitaire, car il s’adresse essentiellement aux personnes qui disposent de qualifications reconnues durant leur carrière, qui partent en bonne santé avec des pensions correctes et qui, à ce titre, peuvent reprendre plus facilement une activité.

Selon l’Insee, les bénéficiaires actuels du cumul emploi-retraite sont ainsi majoritairement des personnes qui ont une carrière complète ou un niveau de pension supérieur à la moyenne.

Plutôt que de corriger les inégalités de carrière, qui concernent particulièrement les femmes, cet article risque de fragiliser encore davantage les personnes qui devront poursuivre une activité salariée au-delà de 64 ans.

Celles et ceux qui ont recours au cumul emploi-retraite sont également celles et ceux qui travaillent au-delà de 62 ans pour bénéficier de la surcote. Ce sont les salariés dont la rémunération ne permet pas de percevoir une retraite digne et qui doivent trouver des solutions pour avoir une pension suffisante et faire face à la hausse des prix du quotidien ainsi qu’au coût des soins non remboursés par la sécurité sociale.

Voilà encore un amendement qui ne pourra pas avoir de suite puisque vous avez décidé de dévitaliser la fonction parlementaire par l’addition de toutes les procédures que vous offrent la Constitution et le règlement du Sénat. Vous espériez sans doute que nous laisserions la retraite des Français entre les mains des droites coalisées. Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus. Nous ne lâcherons rien, et nous ne les lâcherons pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Enfin !… sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet avis, défavorable, vaudra pour les amendements de suppression de l’article, pour ceux qui visent à en modifier l’intitulé – ce qui n’est pas d’une grande utilité –, ainsi que pour les suivants.

Mes chers collègues, je ne vous comprends pas : vous êtes les défenseurs de ceux qui ont une petite retraite ; alors pourquoi voulez-vous les priver du cumul emploi-retraite, alors que ce dispositif leur ouvre des droits, leur permet de liquider de nouveau leurs droits à la retraite et d’améliorer leur pension ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Vives protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.) Ne pensez-vous pas que ce dispositif peut rendre service à ces personnes ?

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il faut augmenter leur retraite !

Mme Raymonde Poncet Monge. On peut répondre ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. La question des petites retraites nous interpelle, mes chers collègues ! C’est même pour cette raison que nous proposons une réforme…

Je vous rappelle que le niveau moyen des retraites, en France, représente actuellement 103 % du salaire moyen. Or les prévisions du COR, dont vous parlez tant, pour les interpréter, indiquent toutes une baisse de la pension moyenne dans les prochaines années : elle représentera non plus 103 %, mais 85 % du salaire moyen. Voilà pourquoi il faut réformer le système ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

La mesure qui permet d’obtenir un meilleur niveau des pensions de retraite, c’est la borne d’âge, et non l’allongement de la durée de cotisation.

Mme Laurence Cohen. Il y a d’autres solutions, mais vous les refusez !

M. René-Paul Savary, rapporteur. Très sensibles au problème du niveau des pensions, nous savons que le seul moyen pour que cette période, laquelle dure de plus en plus longtemps, ne soit pas une retraite de pauvre, c’est de prendre les mesures que nous proposons ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Michelle Gréaume sesclaffe.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre. Il est défavorable sur les amendements de suppression comme sur les suivants, à l’exception de l’amendement rédactionnel n° 2167 de la commission, qui sera présenté dans quelques instants.

Je tiens à préciser, pour la bonne information de tous, que le cumul emploi-retraite sera contributif, avec un caractère légèrement rétroactif puisque, si le projet de loi est adopté, nous intégrerons les activités exercées à compter du 1er janvier 2023.