Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 93 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. L’amendement n° 150 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Pla, Devinaz, Bourgi et Tissot et Mme Poumirol, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de douze mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’impact sur la biodiversité de l’application de l’objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050 et des politiques publiques de rénovation des bâtiments en particulier celle de la rénovation énergétique. Ce rapport présente des éléments chiffrés d’appréciation de cet impact, ainsi que des propositions visant à améliorer la prise en compte de la biodiversité afin de tendre vers une absence de perte nette de biodiversité pour l’application de ces politiques.

La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. Il s’agit d’une nouvelle demande de rapport, cette fois pour mesurer l’impact de l’objectif de zéro artificialisation nette en 2050, qui va amener à reconstruire la ville sur la ville, à densifier et donc à détruire de l’ancien pour faire du neuf.

Cette destruction d’anciens bâtiments a un impact important sur la biodiversité. La majorité des espèces inféodées au bâti sont des espèces protégées. Malgré la législation sur le sujet ainsi que les sanctions en cas de destruction d’habitats, elles ne sont que trop peu souvent prises en compte, quel que soit le type d’opérations, et les sanctions restent souvent inappliquées.

De ce fait, les espèces du milieu bâti connaissent un déclin important avec une diminution des populations de 27,6 % en trente ans : les martinets noirs, les hirondelles de fenêtre et les hirondelles rustiques sont particulièrement touchés, et leur population diminue respectivement de 46 %, 23 % et 25 %.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur. Avis défavorable.

J’indique toutefois à notre collègue qu’une commission d’enquête présidée par Mme Estrosi Sassone et rapportée par M. Gontard est en cours. Certes, elle ne porte pas strictement sur le sujet.

Nous attendons toujours le rapport prévu dans la loi Climat et résilience sur l’impact sur la biodiversité.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christophe Béchu, ministre. Avis défavorable.

Mme Angèle Préville. Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme le président. L’amendement n° 150 rectifié est retiré.

L’amendement n° 245 rectifié n’est pas soutenu.

Vote sur l’ensemble

Mme le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Finalement, nous allons achever l’examen de ce texte à une heure presque raisonnable par rapport à nos estimations les plus pessimistes.

En réalité, j’ai l’impression que nous allons voter sur deux lois différentes. La première, nécessaire, tend à améliorer la partie de la loi Climat et résilience consacrée au ZAN, grâce à l’introduction de très bons articles, et je rends hommage au rapporteur et à la présidente de la commission spéciale, qui ont réalisé un gros travail, par exemple sur l’article 6 ou sur les dispositions visant à intégrer les renaturations depuis la période précédente. Un certain nombre d’articles dans ce texte rendent la loi Climat et résilience plus facilement applicable. S’il n’y avait que ceux-là, nous voterions bien évidemment le texte.

Mais il y a un deuxième ensemble d’articles qui remettent tout de même en cause la loi Climat et résilience, par exemple sur le rapport de compatibilité, sujet dont nous avons parlé mardi dernier. De même, après la discussion au Sénat, le texte intègre une liste extrêmement importante de projets qui remonteraient à l’échelon national et qui partiraient en pertes et profits puisqu’il n’est pas prévu, à ce stade, de les remutualiser à l’échelon des régions. Enfin, l’article 9 reste pour moi totalement incompréhensible. Mais M. le ministre a très bien expliqué qu’il constituait une véritable remise en cause du ZAN et une machine à gaspiller et, si j’ose dire, à « bouffer » de l’espace agricole.

Il y a donc tout de même un détricotage de la loi Climat et résilience. Je le regrette d’autant plus que je considère que la commission spéciale a réalisé un travail nécessaire pour rendre le ZAN beaucoup plus applicable.

Comme nous l’avions annoncé dans la discussion générale, le groupe écologiste votera contre cette proposition de loi.

Mme le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.

M. Christian Redon-Sarrazy. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera cette proposition de loi, d’une part, parce qu’elle a été coproduite au sein de cette commission spéciale, d’autre part et, surtout, parce qu’elle répond aux attentes des élus.

À de nombreuses reprises, mardi soir et ce soir encore, il a été fait état de leurs inquiétudes face à l’application du ZAN, qu’ils ne contestent pas par ailleurs. Or nous savons tous que la capacité que nous aurons à atteindre ces objectifs dépend en grande partie de leur acceptabilité et de leur appropriation par les élus locaux.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cette proposition de loi est donc une première réponse, que je qualifierais de réponse « d’urgence ». En effet, comme nous l’avons évoqué à plusieurs reprises, le volet sur la fiscalité, celui sur l’aspect financier, sur la situation des friches, sur les objectifs en matière de logement social ou sur la réindustrialisation sont autant de sujets que nous serons amenés à traiter probablement dans les mois à venir.

Cependant, grâce à cette proposition de loi, nous avons aujourd’hui la possibilité de rassurer tous ceux qui sont impliqués dans le ZAN.

Pour dédouaner les élus, en terminant par une pirouette, reconnaissez tout de même, monsieur le ministre, que leur demander des efforts pour tendre vers le zéro, alors que c’est la plus mauvaise note d’après ce que l’on nous apprend depuis le plus jeune âge, ce n’est pas leur rendre la vie facile. (Sourires.)

Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Mme Maryse Carrère. Je tenais à remercier au nom du groupe du RDSE le rapporteur et la présidente de la commission spéciale de cette proposition de loi coconstruite, comme l’a dit mon collègue à l’instant ; elle vient concrétiser le travail substantiel réalisé dans le cadre de la mission d’information. Je les remercie aussi pour l’esprit transpartisan qui a guidé ces travaux et qui prouve que, lorsqu’on s’attache à travailler pour les collectivités et les territoires, le Sénat sait parler d’une voix apaisée, constructive et assez unanime à quelques exceptions près.

Aujourd’hui, nous aurons voté deux propositions de loi qui correspondent et qui répondent aux préoccupations des collectivités, notamment les plus rurales. À travers elles, nous avons essayé de traiter deux irritants qui préoccupent les maires et les élus et qui soulèvent – je peux vous l’assurer, monsieur le ministre – des questions récurrentes que l’on nous pose au quotidien. Il s’agit, d’une part, du transfert de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes, d’autre part, du ZAN.

Aujourd’hui, les élus ne parviennent pas à envisager l’avenir de leur commune avec confiance, parce qu’ils se sentent dépossédés de la possibilité de développer leur territoire et leur commune.

Je n’ose imaginer que ces deux propositions de loi ne trouvent pas la concrétisation d’un examen à l’Assemblée nationale. Les attentes sont fortes. Dans les territoires, les élus nous regardent. Ils souhaitent une juste répartition des efforts que nous avons à faire en matière d’artificialisation.

C’est la raison pour laquelle, avec enthousiasme et reconnaissance, le groupe du RDSE votera cette proposition de loi unanimement.

Mme le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.

M. Michel Dagbert. Les élus du groupe RDPI sont, comme de nombreux collègues, sensibles à la notion d’acceptabilité par les maires, dont un certain nombre s’est manifesté auprès de nous.

Cependant, l’ensemble des dérogations qui ont été examinées et les avis qui ont été rendus ce soir nous amènent à reconsidérer l’abstention, choix que nous envisagions initialement. Finalement, le groupe RDPI votera contre cette proposition de loi.

Mme le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Malgré les conditions d’examen particulières du point de vue tant des horaires que de l’ambiance politique, le Sénat achève ce soir ses travaux sur un texte extrêmement attendu par les élus.

Les maires partagent tous l’ambition d’une plus grande sobriété foncière, qui est déjà engagée depuis plusieurs années – surtout à Digoin, cher Fabien Genet –, mais pour que le ZAN ne se transforme pas en un corset paralysant qui briderait toute liberté d’action, il convenait que le Sénat agisse. Je veux moi aussi remercier la commission spéciale, son rapporteur, sa présidente, et son équipe de collaborateurs.

En revenant sur les décrets d’application contestés – je sais de quoi je parle, ayant participé à la commission mixte paritaire, qui fut trahie ensuite –, en créant un droit à l’hectare pour chaque commune, en prévoyant un compté à part pour les projets nationaux, nous envoyons un signal d’espoir à tous les élus locaux.

Nos débats l’ont montré : l’objectif de transition écologique, au cœur du ZAN, ne peut pas être atteint sans décentralisation, sans adaptation et sans prise en compte des réalités locales.

Monsieur le ministre, la balle est désormais dans votre camp. Nous avons compris que nous avons quelques désaccords, que vous étiez contrarié, et peut-être même agacé, mais chacun est fatigué ce soir. Il n’est nul besoin de menace. La discussion parlementaire est faite pour cela, pour mûrir ensemble ce projet. Il reste à savoir, bien évidemment, qui siégera à l’Assemblée nationale.

Néanmoins, l’engagement de la procédure accélérée est un signal fort qui manifeste la pertinence de nos travaux et l’urgence d’apporter des réponses ensemble.

Aussi, le groupe Les Républicains votera ce texte, qui fait honneur à notre assemblée, et nous en avons bien besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.

Mme Valérie Létard, présidente de la commission spéciale. Tout d’abord, je veux très sincèrement remercier M. le rapporteur Jean-Baptiste Blanc de l’investissement et de l’engagement considérables dont il a fait preuve tout au long de ces travaux qui ont commencé voilà des mois. (Applaudissements.)

Ensuite, je veux vous remercier toutes et tous, parce qu’il n’y a sur ces travées, depuis la gauche jusqu’à la droite de l’hémicycle, que des gens passionnés et engagés, qui ont été extrêmement présents et à l’écoute de toutes celles et tous ceux que nous avons entendus en audition. Ces personnes nous ont fait entendre, monsieur le ministre, la voix des territoires : celle des experts et de tous ceux qui auront à mettre en œuvre le zéro artificialisation nette.

Monsieur le ministre, je sais que vous nourrissez des interrogations par rapport à la distance qui nous sépare de la position du Gouvernement, du texte initial et de la direction que vous souhaiteriez prendre. Mais c’est là tout l’objet du débat et du travail parlementaire. Nous affirmons un certain nombre de choses qui sont ni plus ni moins la traduction de ce que nous avons entendu. Toutefois, nous savons bien que la navette parlementaire, les échanges avec l’Assemblée nationale et ceux que nous aurons avec vous doivent conduire à la voie du compromis. Nous l’espérons en tout cas.

Cependant, comme Sophie Primas l’a souligné, il y a des fondamentaux qui ont été rappelés à de nombreuses reprises dans le débat : le compté à part ou le droit à l’hectare, etc. Toutes ces questions, vous le savez, sont essentielles.

D’autres sujets pourront être travaillés, nous en sommes conscients, mais aujourd’hui il n’était pas question – loin de nous cette idée ! – de nous éloigner ou pas de la position du Gouvernement. Il s’agissait de poser les sujets, de relayer ce que nous avons entendu dans les territoires et d’affirmer ce que nous souhaitons défendre. Cheminons ensemble sur un sujet qui est au cœur des préoccupations de nos concitoyens, après celui des retraites qui a donné lieu à des débats animés et qui a durci le sentiment général à l’égard de ce que le Parlement pouvait faire.

Aujourd’hui, de façon transpartisane et également consensuelle – du moins, je l’espère – montrons un visage uni en privilégiant le sens de l’intérêt général pour faire atterrir dans nos territoires un texte essentiel, celui de la loi Climat et résilience qui est peut-être encore trop éloignée de la réalité du terrain. Respectons les objectifs fixés – et c’est le cas, monsieur le ministre, vous le savez, car nous n’y avons pas touché –, mais rendons le texte applicable au plus grand nombre, dans chacun de nos territoires en tenant compte de leurs différences et de leur complémentarité. (Applaudissements.)

Mme le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Béchu, ministre. Nous nous sommes éloignés. Vous aviez commencé en disant que vous ne vouliez pas toucher à la trajectoire. Mais nous aboutissons à un article 9 qui, sans étude d’impact, peut entraîner une augmentation de la trajectoire d’artificialisation ; à un compté à part qui, sans étude d’impact, peut nous éloigner de la trajectoire de réalisation. De plus, sur la quasi-totalité des amendements, vous avez systématiquement décidé par rapport à des positions d’entrée.

J’avais pourtant pris soin de faire en sorte qu’un texte soit déposé à l’Assemblée nationale pour que vous ayez une idée claire des quelques lignes rouges à ne pas franchir. J’ai aussi précisé au fur et à mesure de la discussion les éléments sur lesquels il me semblait que nous pourrions bouger et ceux sur lesquels ce serait plus complexe.

Indépendamment de ce que peut être l’esprit d’une navette parlementaire, mon inquiétude reste la suivante : s’il n’y a pas d’accord entre les deux assemblées – et le sujet n’est pas de savoir ce que le ministre pense, même compte tenu de la position actuelle de l’Assemblée nationale – hormis en faisant les modifications par décret, une partie des évolutions que nous souhaitons collectivement seront complexes à obtenir dans le cadre du vote final.

M. Fabien Genet. Il y a des commissions mixtes paritaires pour cela !

Mme Sophie Primas. Comment pouvez-vous préempter l’issue de la commission mixte paritaire ?

M. Christophe Béchu, ministre. Je vous explique ici ce qui a pu être ressenti comme un agacement. En effet, je suis entré dans cet hémicycle en souhaitant réellement que l’on puisse disposer d’un texte qui serait à moyen terme appliqué et pas seulement voté, pour envoyer un message aux élus locaux. Mon inquiétude ce soir, je le redis, c’est que la façon dont il risque d’être accueilli, en particulier s’agissant de l’article 9 et de l’élargissement de la catégorie des grands projets d’envergure nationale, complexifiera le travail.

Je suis convaincu qu’il faut à la fois aller vers la sobriété et trouver des assouplissements pour les élus locaux. Je m’efforcerai donc dès demain d’œuvrer à rapprocher les points de vue.

Mme Sophie Primas. C’est surtout le travail des parlementaires.

M. Christophe Béchu, ministre. Mais je vous indique qu’il faudra aussi, dans ce dialogue, envoyer des signaux…

Mme Cécile Cukierman. C’est aussi aux députés de faire un pas vers nous !

M. Christophe Béchu, ministre. … pour montrer qu’au-delà du texte, il sera encore possible de faire bouger les lignes.

M. Stéphane Sautarel. Que le Gouvernement écoute aussi !

M. Christophe Béchu, ministre. Sinon, nous nous retrouverons devant une impasse, ce que personne ne souhaite. (Exclamations.)

M. Cédric Vial. C’est scandaleux !

Mme Sophie Primas. Ce n’était pas le soir de dire cela, monsieur le ministre !

M. Max Brisson. Non, vraiment pas le soir ! Ne vous étonnez pas de ce qui est en train d’arriver dans le pays !

Mme le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi relative aux objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires.

(La proposition de loi est adoptée.)

Après l’article 13 (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux
 

10

Ordre du jour

Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 21 mars 2023 :

À neuf heures trente :

Questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :

Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale du 6 novembre 2014 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie (procédure accélérée ; texte de la commission n° 431, 2022-2023) ;

Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas (texte de la commission n° 409, 2022-2023) ;

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à ouvrir le tiers-financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique (texte de la commission n° 422, 2022-2023) ;

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs (texte de la commission n° 429, 2022-2023) ;

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales (texte de la commission n° 401, 2022-2023) ;

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier et amplification des encarts publicitaires destinés à informer le public sur la transition écologique (texte de la commission n° 426, 2022-2023).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 17 mars 2023, à une heure trente-cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER