M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je me rallierai à la position de la commission des finances concernant cet amendement.

L’article 27 terdecies vise à assouplir la règle de liaison entre les taux de la THRS et de la taxe foncière. Nous avons entendu des avis différents ; ils sont tous respectables tant ce débat est important.

Il est vrai qu’on ne peut que regretter la disparition de la taxe d’habitation telle qu’elle existait auparavant, d’autant que, je ne fais le procès de personne, il n’y a pas eu suffisamment de concertations avant que cette décision ne soit prise. Le fait est que cela a réduit l’autonomie fiscale et financière des collectivités locales.

Par ailleurs, le but était de redonner du pouvoir d’achat. Est-ce arrivé ? Est-ce que les personnes qui payaient la taxe d’habitation ont retrouvé du pouvoir d’achat ? Et puis, la suppression de la taxe d’habitation a entraîné celle de la redevance audiovisuelle : plus de 3 milliards d’euros de recettes en moins. Là aussi, est-ce que cette décision a réellement redonné du pouvoir d’achat ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Oui, 735 euros !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Comme le sénateur Capus revient à la charge, je vais essayer de lui donner une réponse complète – elle sera un peu technique, vous me pardonnerez.

D’abord, il n’y a pas d’incompatibilité juridique entre les deux séries d’amendements identiques, puisqu’on touche des alinéas distincts de l’article 1636 B sexies du code général des impôts.

Vous voici déjà éclairé sur ce premier point, mon cher collègue…

Ensuite, il n’y a pas d’incompatibilité de fond, ce qui est plus important : il y a transformation de la nature de la capacité de modulation, laquelle porterait non plus sur la règle de lien, mais sur le plafonnement de l’évolution de la THRS, tel qu’il est prévu aux amendements Bas et Raynal.

J’espère que le sénateur Capus est ainsi rassuré !

M. Emmanuel Capus. C’est limpide ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-125 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 27 terdecies, modifié.

(Larticle 27 terdecies est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article 27 terdecies (nouveau) (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2024
Discussion générale

4

Hommage à Gérard Collomb, ancien sénateur

M. le président. Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, c’est avec tristesse que nous avons appris, le 25 novembre dernier, la disparition de Gérard Collomb. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent.)

Gérard Collomb nous a quittés au terme d’un combat contre la maladie, qu’il menait avec un grand courage.

Ce matin même, ses obsèques se sont déroulées en la cathédrale Saint-Jean de Lyon, en présence du Président de la République et de Mme la Première ministre, qui va nous rejoindre. Lors de cette cérémonie d’adieux, à laquelle assistaient de nombreux habitants de sa ville et de son département, ainsi que de nombreuses personnalités politiques, l’émotion était, je le sais, présente. Mathieu Darnaud, notre premier vice-président, y représentait le Sénat.

Figure emblématique de la capitale des Gaules, Gérard Collomb voua sa vie entière à un engagement inlassable au service de ses compatriotes et de l’intérêt général. Ses facultés d’écoute, son esprit de solidarité étaient unanimement salués et suscitaient le respect.

Son élection, en 2001, à la mairie de Lyon restera le moment privilégié de sa vie publique. Il se consacrera à sa ville durant plus de dix-sept ans. Grâce à lui, Lyon fut capable de rivaliser avec les autres métropoles françaises et européennes, sans pour autant perdre son âme. Il transformera sa ville et mettra toute son énergie au service de ses habitants ; énergie qu’il mettra aussi au service de la communauté urbaine de Lyon, dont il fut le président.

Gérard Collomb fut aussi parlementaire, élu député dans la deuxième circonscription du Rhône, en juin 1981 ; il avait 34 ans.

Son arrivée au Sénat, en novembre 1999, marquera sa vie politique. Il sera réélu en 2004 et en 2014.

Il siégea au sein du groupe socialiste, alors présidé par Claude Estier. Il devint membre de la commission des affaires culturelles. Toujours tourné vers la modernité, il est, en 2007, l’auteur d’une proposition de loi relative à la coopération internationale des collectivités territoriales dans le domaine des technologies de l’information et des communications. (Mme la Première ministre fait son entrée dans lhémicycle.)

En 2009, il intégra la commission des lois, où ses collègues d’alors peuvent témoigner de sa connaissance des dossiers touchant aux collectivités territoriales et à la décentralisation.

Il intervint dans l’hémicycle dans le cadre de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, en juin 2013, à propos des compétences de la métropole de Lyon ; ce fut, je le sais, un temps majeur de sa vie de sénateur.

Après avoir été l’un des principaux soutiens d’Emmanuel Macron, il est nommé ministre d’État, ministre de l’intérieur, dans le gouvernement d’Édouard Philippe.

Il porte alors devant le Sénat le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, visant à transposer dans le droit commun certaines mesures de l’état d’urgence, et défend, en 2018, le projet de loi sur l’asile et l’immigration.

Il doit affronter l’attentat islamiste de Trèbes et mesure le danger du communautarisme qui ronge notre pays. Lors de son départ du ministère de l’intérieur, il laisse ce message : « Aujourd’hui, on vit côte à côte ; je crains que, demain, on ne vive face à face. » C’est à méditer.

L’hommage que nous lui rendons aujourd’hui n’est pas uniquement solennel. C’est un hommage à un humaniste, un hommage à un défenseur inlassable de sa ville de Lyon et de la métropole.

À ses anciens collègues, j’exprime notre sympathie.

À son épouse, à qui j’ai écrit, à ses enfants, à toute sa famille et à tous ceux qui ont partagé ses engagements, je souhaite redire la part que le Sénat prend à leur chagrin.

Je vous propose d’observer un instant de recueillement. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la Première ministre et Mmes et MM. les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)

La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce matin, autour de sa famille et de ses proches, autour du Président de la République, autour des habitants de sa ville, nous avons dit adieu à un grand républicain, à un Lyonnais passionné et à un homme d’État.

Gérard Collomb était un modèle de réussite républicaine. Rien ne le prédestinait ni à diriger sa ville ni à occuper d’éminentes fonctions ministérielles. Pourtant, sa passion pour les lettres, sa force de travail et la puissance de ses convictions lui ont permis de devenir enseignant, député, sénateur, ministre d’État, ministre de l’intérieur et, bien sûr, maire.

Gérard Collomb a été l’homme d’une ville. Pour Lyon, il avait un amour réel, sincère, inébranlable. Arpenter sa ville, c’est croiser à chaque coin de rue ses projets, ses idées, ses intuitions. Il s’est donné corps et âme à sa ville et l’a transformée. Les Lyonnais ne l’oublieront jamais.

Gérard Collomb, c’était encore un homme de conviction, porté par la volonté de servir au-delà des clivages, porté par l’attention aux problèmes des Français plutôt qu’aux étiquettes politiques.

Le Sénat, chambre des territoires et de l’apaisement, lui correspondait bien, et chacun dans la majorité présidentielle sait ce qu’il lui doit. « Ad augusta per angusta » – vers les voies célestes par des chemins étroits – était une de ses devises.

Aujourd’hui, Gérard Collomb a rejoint ces voies célestes, mais son empreinte restera. Il a changé la vie des Lyonnais. Il a changé la vie des Français. (Applaudissements prolongés.)

5

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres, ainsi qu’au respect du temps de parole.

otages retenus par le hamas

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Alain Cazabonne applaudit également.)

M. Cédric Chevalier. Madame la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, nous nous réjouissons profondément qu’Eitan, Erez et Sahar, Français et otages du Hamas, aient pu retrouver leurs familles. Leur libération est un premier pas, qui suscite un immense soulagement.

En premier lieu, madame la ministre, pouvez-vous nous informer sur l’état de santé de ces enfants, âgés de 12 à 16 ans, après des semaines de captivité ?

En second lieu, je voudrais rappeler que, parmi les 1 200 civils tués lors des attaques du 7 octobre, 40 d’entre eux possédaient la nationalité française. Nous ne devons pas oublier nos compatriotes assassinés.

Parmi les survivants, des dizaines d’otages, dont 5 Français, sont toujours aux mains des terroristes. Les familles sont depuis lors confrontées à une incertitude insoutenable.

À ce sujet, je tiens à rendre hommage aux agents de notre corps diplomatique, qui travaillent d’arrache-pied avec leurs collègues d’autres pays pour obtenir la libération des otages encore captifs.

Madame la ministre, disposez-vous de renseignements à leur sujet, pouvez-vous nous donner de leurs nouvelles ?

Enfin, la trêve entre Israël et le Hamas a été prolongée jusqu’au 30 novembre. Il est permis d’espérer que ce soit un signe favorable à une désescalade, que vous avez publiquement appelée de vos vœux, même si nous n’ignorons pas que les négociations sont très difficiles.

Madame la ministre, que pouvez-vous nous dire de ces discussions et des perspectives qu’elles ouvrent ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Bernard Buis et Alain Cazabonne applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Catherine Colonna, ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Chevalier, vous avez bien fait d’évoquer les noms d’Eitan, d’Erez et de Sahar, tant la libération de ces trois enfants français est un immense soulagement pour nous tous.

Vous le savez, la libération de nos compatriotes retenus en otage est la priorité numéro un du Président de la République et de notre diplomatie.

Je veux remercier de nouveau, comme le Président de la République et la Première ministre l’ont fait, tous ceux qui ont œuvré pour cette libération. Je pense en particulier au Qatar, à Israël, bien sûr, et à l’Égypte.

Jour après jour, croyez-le, nous avons été actifs et mobilisés, comme eux, pour obtenir ce résultat. Je vous remercie d’ailleurs de ce que vous avez dit à propos de nos agents diplomatiques et consulaires.

Nous avons partagé parfois, souvent, l’inquiétude des familles. Aujourd’hui, nous partageons leur joie. Mais c’est aussi une joie mêlée de douleur, en pensant à ce que ces enfants ont vécu, en sachant que, s’ils sont désormais en sécurité et avec leurs familles, ce qui leur est arrivé est proprement inhumain.

Cela doit nous rappeler quelle est la vraie nature du Hamas : une organisation terroriste et dénuée de tout scrupule.

Nous poursuivons nos efforts, tous nos efforts, sous la conduite du Président de la République, et nous restons pleinement mobilisés pour obtenir la libération de tous nos compatriotes retenus en otage.

Nous ne relâcherons pas nos efforts, vous le savez, car la France n’abandonne jamais les siens. Nous exprimons le souhait depuis plusieurs semaines, avec votre aide, publiquement, à haute voix, que la trêve en cours puisse être prolongée, qu’elle conduise à la libération de tous les otages et qu’elle soit un premier pas amenant d’autres pas positifs, menant aussi vers un cessez-le-feu, car il faudra bien qu’il y ait une solution politique.

Monsieur le sénateur, c’est à cette solution politique que nous travaillons, celle à laquelle nous devons travailler tous ensemble avec nos partenaires, sans délai aucun. Il y a effectivement urgence. Merci aussi de l’avoir rappelé. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDPI, RDSE et UC.)

problème des manifestations de l’ultradroite

M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Ahmed Laouedj. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville.

Permettez-moi, tout d’abord, d’exprimer une pensée pour Thomas. À sa famille, à ses amis, à tous ceux qui l’ont connu et aimé, les sénateurs de mon groupe adressent leurs plus sincères condoléances.

Sa disparition est une tragédie.

Il est tentant, dans ces moments-là, de céder à la colère, à la peur et à la division. Il est tentant de chercher des boucs émissaires, de stigmatiser, mais c’est précisément ce que veulent ceux qui cherchent à nous opposer les uns aux autres : tous ceux qui ont pour seul horizon la division.

Rapidement, l’extrême droite a instrumentalisé l’affaire de Crépol. Et une ultradroite décomplexée a pris le relais dans les rues de plusieurs villes de France.

Madame la secrétaire d’État, avec 1 300 fichés S, ces groupuscules représentent la deuxième menace terroriste en France. Il faut que tous nos concitoyens mesurent ce danger.

Les dissolutions de milices ne suffiront pas au combat contre la haine. Ces milices renaissent de leurs cendres, car les idées restent.

C’est donc aussi la bataille des idées qui éloignera notre pays du risque de batailles rangées.

Restons vigilants et déterminés. Aidons les jeunes de tous les territoires à se réapproprier les principes républicains, un axe qu’a porté ici le RDSE la semaine dernière lors de l’examen de son texte sur la citoyenneté.

Nous devons aussi avoir confiance en la justice, en ses représentants et en sa capacité à maintenir la paix sociale.

Dans un État de droit, c’est la justice qui doit rendre la justice.

Madame la secrétaire d’État, une certaine catégorie de la classe politique a soufflé sur les braises de la violence. Il y a urgence à agir. Nous vous demandons de condamner, sans équivoque, les discours de haine et de division.

Nous avons un devoir d’unité face à une société fragmentée, où le lien social est rompu, où le vivre-ensemble est sérieusement menacé par toutes les minorités violentes.

Madame la secrétaire d’État, comment comptez-vous empêcher les prochaines expéditions envisagées par l’ultradroite ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, GEST, SER et CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Ahmed Laouedj, je vous remercie infiniment de votre question et d’avoir eu un mot pour le jeune Thomas. Tous les mots que nous pourrons prononcer les uns et les autres ne seront jamais à la hauteur d’une telle perte, pour ses parents et pour le pays.

Vous avez raison de m’interroger – je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin – sur les mouvements d’ultradroite, qui ont mené en réalité ces derniers jours des actions coups de poing dans plusieurs villes de France. Vous avez raison, cela menace notre vivre-ensemble, profondément.

Nous ne cesserons de le répéter, nous condamnons avec la plus grande fermeté les groupuscules d’extrême droite, qui prétendent se substituer aux policiers ou aux gendarmes pour se faire justice eux-mêmes.

Je vous l’assure, la réponse de l’État sera implacable face à ces porteurs de haine, qui ne cherchent qu’à nous diviser. Nous n’hésiterons pas à dissoudre des associations et groupuscules d’extrême droite, s’il le faut, comme nous l’avons toujours fait, avec Génération identitaire, par exemple.

Le ministre de l’intérieur et des outre-mer proposera notamment, lors du prochain conseil des ministres, la dissolution de la Division Martel, ce groupuscule infâme.

Les forces de l’ordre sont également pleinement mobilisées pour interpeller les auteurs de ces troubles à l’ordre public, les traduire devant la justice et prévenir de nouvelles actions violentes. À Romans-sur-Isère comme à Lyon, de nombreuses interpellations ont eu lieu pour mettre fin à ces manifestations sauvages qui ne véhiculent que la haine de l’autre. Je rappelle également que treize attentats d’ultradroite ont été déjoués depuis 2017 par nos services de renseignement.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, l’État ne transige pas avec ce sujet gravissime pour la désunion de notre nation. Vous me trouverez toujours à vos côtés, avec le ministre de l’intérieur et des outre-mer, tout le Gouvernement, le Président de la République et l’ensemble des forces républicaines, pour combattre ces associations et groupuscules.

J’aurai un dernier mot à l’endroit de tous ceux qui, sur ce sujet, ont fait de la récupération politique : c’était un acte infâme, d’un autre âge, d’un autre temps ; j’ai honte pour eux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Maryse Carrère et M. Ahmed Laouedj applaudissent également.)

violences de l’ultradroite

M. le président. La parole est à M. Sébastien Fagnen, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Sébastien Fagnen. « Mort aux bougnoules » : c’est avec ces trois mots peints sur le portail de la mosquée que les habitants de Cherbourg-en-Cotentin se sont réveillés samedi dernier.

Ces menaces de mort sont intolérables. Ces mots sont abjects et d’une grande violence.

Ils ont suscité un émoi légitime dans notre ville, peu habituée aux expressions de haine. Je reprendrai les mots de l’un des fidèles de la mosquée : « En écrivant cela, ils nous menacent physiquement, mais ils cherchent aussi à nous exclure de la communauté nationale. »

En effet, au travers de ces menaces, c’est bien notre communauté nationale, dans son entièreté, qui est touchée et meurtrie.

Hélas ! les actes vécus samedi dans la Manche ne sont pas isolés.

Dès le printemps dernier, notre collègue Jérôme Durain alertait et proposait une résolution dénonçant les violences commises par l’ultradroite.

Depuis des mois, ces violences se multiplient partout dans notre pays : à Saint-Brieuc, à Saint-Brevin-les-Pins et dans bien d’autres lieux encore. Pas plus tard qu’hier, ce sont des croix gammées qui ont été découvertes sur la façade de la mairie de Lunas, dans l’Hérault.

Depuis la mort tragique du jeune Thomas, à Crépol, nous constatons une recrudescence de ces actes. Des individus peu scrupuleux utilisent un drame qui nous atteint toutes et tous pour mettre à exécution leur obsession d’une guerre civile et ethnique.

Dans ce climat de grande tension, nous déplorons sincèrement que le chef d’un grand parti républicain se refuse à condamner l’expédition punitive menée à Romans-sur-Isère par des militants d’ultradroite. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)

Nous devons prendre la pleine mesure de notre responsabilité historique. Quand la cohésion nationale se fissure sous les saillies d’une violence débridée, quand la concorde républicaine est menacée par les défilés de groupuscules fascisants, aucun républicain sincère ne doit manquer à l’appel.

Nous devons plus que jamais veiller à préserver la fraternité républicaine devant la recrudescence des actes racistes, antisémites et antimusulmans, qui menacent notre unité.

Madame la secrétaire d’État, comment comptez-vous faire front contre la haine et restaurer l’ordre républicain face aux menaces et aux violences de l’ultradroite ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et RDPI. – Mme Amel Gacquerre applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Monsieur le sénateur, votre question porte également sur les agissements récents de l’ultradroite.

Je tiens ici, tout d’abord, à fermement condamner au nom du Gouvernement les tags racistes apposés sur la mosquée de Cherbourg.

Je veux affirmer mon plein soutien et celui de l’État à nos compatriotes de confession musulmane de ce département, touchés par ces actes odieux. Ces croix celtiques qui ont notamment été taguées sont le symbole emblématique, comme vous le savez, de l’ultradroite.

En ce sens, j’entends votre inquiétude légitime, mais soyez rassuré : la République est et sera toujours intransigeante avec ces milices. Comme l’a précisé le ministre de l’intérieur et des outre-mer, une enquête est en cours et les forces de l’ordre sont d’ores et déjà à pied d’œuvre depuis ce week-end pour retrouver les auteurs de ces dégradations racistes, parce qu’il faut dire les mots, afin qu’ils puissent être présentés devant la justice.

Monsieur le sénateur, vous le savez, le respect de toutes les croyances est inscrit à l’article premier de notre Constitution et s’impose à tous. Jamais nous ne laisserons ces mouvances d’ultradroite piétiner notre cohésion nationale. Nous n’abandonnerons pas nos compatriotes de confession musulmane qui vivent sereinement leur foi dans le respect des valeurs de la République.

Je ne me résignerai jamais, nous ne céderons jamais à ce qu’ils soient la cible de ces groupuscules identitaires, lesquels n’ont qu’un seul objectif, je le dis et je le répète : le chaos par la guerre de tous contre tous. (Des bruits de conversation se font entendre sur des travées du groupe Les Républicains.)

Si l’on pouvait éviter de plaisanter pendant que je parle, ce serait bien… (Murmures réprobateurs sur les travées du groupe Les Républicains.)

La République leur fera face partout où ces derniers sèmeront leur idéologie mortifère, infâme et, encore une fois, d’un autre âge. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI. – Mme Émilienne Poumirol applaudit.)

banalisation de l’expression raciste, antisémite et xénophobe

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

M. Ian Brossat. Madame la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville, nous avons tous en tête l’effroyable assassinat de Thomas, 16 ans, qui a créé chez les Français une profonde émotion, une émotion sincère, une émotion légitime.

Nous avons aussi vu, dans les minutes qui ont suivi, alors que le sang de Thomas était encore chaud (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),…

Mme Cécile Cukierman. Ça va bien !

M. Ian Brossat. … une ignoble tentative d’instrumentalisation organisée par l’extrême droite, qui s’est livrée à un racolage électoral répugnant. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Nous avons entendu Mme Maréchal-Le Pen parler d’une « guerre ethnique ». Nous avons entendu M. Zemmour parler d’une « guerre de civilisation ». Nous avons entendu Marine Le Pen parler des « petits blancs contre les personnes de couleur ». Ce sont les mots employés.

Ensuite, il y a eu les actes, ces événements dans le quartier populaire de Romans-sur-Isère, avec des individus cagoulés, armés de barres de fer, qui étaient là pour casser du noir et de l’arabe.

Ceux qui appartiennent à ces groupes-là, je veux le dire, ne sont pas des zozos : ce sont des ennemis de la République, ce sont des néonazis, qui doivent être combattus comme tels ; face à eux, la République doit se défendre et se protéger pour protéger la concorde républicaine. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST. – Mme Corinne Bourcier ainsi que MM. Philippe Grosvalet et André Guiol applaudissent également.)

Vous nous avez annoncé, et c’est tant mieux, la dissolution d’un certain nombre de groupes d’extrême droite. Nous nous en félicitons. Il reste que, derrière, il y a des donneurs d’ordre qui ont micro ouvert sur un certain nombre de chaînes de télévision pour répandre leur bile raciste.

C’est la raison pour laquelle je vous demande, madame la secrétaire d’État, quand le Gouvernement va se saisir de la proposition de résolution des parlementaires communistes qui vise à rendre inéligibles les auteurs de propos racistes et antisémites ? Il est grand temps ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST. – Mme Corinne Bourcier et M. Ahmed Laouedj applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté et de la ville.

Mme Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, et auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Brossat, vous m’interrogez également sur les exactions récentes de l’ultradroite.

Vous avez raison, l’ultradroite est un danger, un danger permanent contre la République et les valeurs universelles qu’elle porte en elle.

Nous devons tous, unanimement, condamner avec la plus grande fermeté ces groupuscules identitaires, qui ne cherchent qu’une chose : l’affrontement. Les Irlandais ont pu notamment en constater les dégâts et la dangerosité ces derniers jours.

En ce sens, monsieur le sénateur, nous n’avons pas attendu les récents événements pour prendre cette menace au sérieux et pour la traiter au degré auquel elle doit l’être.

À ce titre, les forces de sécurité intérieure ont déjoué treize attentats d’ultradroite depuis 2017. Je le rappelle ici, près de 1 300 personnes sont fichées S et, donc, suivies par nos services.

À l’occasion des récentes manifestations sauvages, nos forces de sécurité intérieure ont été largement mobilisées dans le cadre des enquêtes menant à l’interpellation de ces individus violents.

C’est également ce gouvernement, monsieur le sénateur, qui a dissous, sur proposition du ministre de l’intérieur et des outre-mer, de multiples associations ou groupements de fait s’inscrivant dans cette mouvance ultraviolente. Gérald Darmanin a pu d’ailleurs annoncer hier matin que trois autres groupuscules feraient l’objet d’une procédure de dissolution. Je parlais à l’instant de la Division Martel, dont le nom, vous le concéderez, nous donne une certaine idée du projet violent fantasmé par ces individus. Elle en fera partie.

Monsieur le sénateur Brossat, les extrêmes, quels qu’ils soient – l’ultradroite, l’ultragauche –, sont des poisons pour notre démocratie. Ils doivent être combattus avec fermeté. C’est ce que nous faisons en remettant ces individus à la justice, en dissolvant des groupuscules tentés par l’ultraviolence contre nos concitoyens.

insécurité liée au trafic de drogue