M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

Articles 37 et 38
Dossier législatif : projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique
Explications de vote sur l'ensemble (début)

article 1er

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant de la sanction prend en compte la nature, la gravité et la durée du manquement, les avantages tirés de ce manquement et les manquements commis précédemment.

II. – Alinéa 7, première phrase

Remplacer les mots :

Le montant de cette sanction

par les mots :

La sanction prononcée

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Marina Ferrari, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement a déposé une série d’amendements. Il s’agit d’amendements de coordination ou tendant à corriger des erreurs matérielles ou des omissions. Ils ne visent pas à modifier le fond du texte.

Je considère l’ensemble de ces amendements comme défendus, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Morin-Desailly, au nom de la commission mixte paritaire. Il s’agit, je le confirme, d’amendements de coordination et de correction ; la commission n’a pas pu se réunir pour les examiner, mais nous sommes en mesure d’émettre un avis favorable. (MM. Loïc Hervé et Patrick Chaize le confirment.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 1er, modifié, est réservé.

article 2

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Remplacer les mots :

du service de communication au public en ligne

par les mots :

des services concernés

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 2, modifié, est réservé.

article 2 bis

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

1° Remplacer les mots :

I des articles 10 et 10-1

par les mots :

II de l’article 10 et au I de l’article 10-1

2° Après le mot :

ligne

insérer les mots :

ou le fournisseur du service de plateforme de partage de vidéos

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 2 bis, modifié, est réservé.

article 3 bis A

M. le président. L’amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2, troisième phrase

Après la référence :

III

insérer les mots :

de l’article 6

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 3 bis A, modifié, est réservé.

article 4 AD

M. le président. L’amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Remplacer le mot :

sa

par le mot :

la

2° Compléter cet alinéa par les mots :

du présent article

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 4 AD, modifié, est réservé.

article 5 bis

M. le président. L’amendement n° 6, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

à 222-18-1

par les mots :

et 222-18

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 5 bis, modifié, est réservé.

article 15

M. le président. L’amendement n° 8, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 5

1° Remplacer les occurrences des mots :

valeur totale

par les mots :

proportion maximale

2° Dernière phrase

Supprimer les mots :

du montant total

et après le mot :

entreprise

insérer les mots :

pour ce jeu

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 15, modifié, est réservé.

article 15 bis

M. le président. L’amendement n° 7, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 7, dernière phrase

Rédiger ainsi le début de cette phrase :

L’entreprise de jeux à objets numériques monétisables met en œuvre… (le reste sans changement)

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 15 bis, modifié, est réservé.

article 22

M. le président. L’amendement n° 9, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Le nom du directeur ou du codirecteur de la publication, au sens de l’article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, et le cas échéant celui du responsable de la rédaction ;

II. – Alinéa 12, seconde phrase

Remplacer les mots :

, au plus tard,

par les mots :

dans un délai maximum de

III. – Alinéa 13

Remplacer les mots :

l’article

par les mots :

le message

IV. – Alinéa 17

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

Si les imputations… (le reste sans changement)

V. – Alinéa 28

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« Art. 6. – I. – 1. On entend par fournisseur d’un “service d’accès à internet” toute personne fournissant un service de simple transport tel que défini au i du paragraphe g de l’article 3 du règlement… (le reste sans changement)

VI. – Alinéa 29

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« 2. On entend par fournisseur de “services d’hébergement” toute personne fournissant les services… (le reste sans changement)

VII. – Alinéa 41

Remplacer les mots :

départements d’outre-mer

par les mots :

collectivités régies par l’article 73 de la Constitution

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 22, modifié, est réservé.

article 26

(Pour correction d’une erreur matérielle)

M. le président. L’amendement n° 11, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 56

Remplacer les mots :

Au 3 du III

par les mots :

au C du V

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 26, modifié, est réservé.

article 32

M. le président. L’amendement n° 10, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 39

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) au premier alinéa du IV, tel qu’il résulte du b du présent 5° , la référence : « II » est remplacée par la référence : « III » ;

II. – Alinéa 48, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

III. – Alinéa 49

Supprimer cet alinéa.

IV. – Alinéa 57

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

8° L’article 28 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, la référence : « II » est remplacée par la référence : « III » ;

b) Au troisième alinéa, la référence : « III » est remplacée par la référence : « IV ».

Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission a émis un avis favorable.

Je le mets aux voix.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Le vote sur l’article 32, modifié, est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble du projet de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à M. Patrick Chaize, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Patrick Chaize. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous le savez, la commission mixte paritaire chargée d’examiner les soixante-trois articles restant en discussion du projet de loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique est parvenue à un accord le 27 mars dernier. Cette réunion, qui a duré presque quatre heures, a été interrompue par plusieurs suspensions, les négociations ayant été très difficiles.

M. Loïc Hervé. C’est vrai !

M. Patrick Chaize. À mon sens, l’adoption à venir de ce projet de loi est à la fois un échec gouvernemental et un succès parlementaire.

On le constate tout d’abord sur la forme : en effet, sous le vernis du marketing gouvernemental, ce texte demeure avant tout un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, un Ddadue qui ne dit pas son nom.

On l’observe ensuite en parcourant le calendrier : il aura fallu près d’un an pour que ce projet de loi soit adopté, en raison des deux avis circonstanciés transmis par la Commission européenne. Le Gouvernement ayant mal anticipé les contraintes procédurales inhérentes à l’examen d’un tel texte, celui-ci sera promulgué en retard par rapport au calendrier européen.

On le vérifie, surtout, sur le fond : le Gouvernement n’a pas toujours été facilitateur des initiatives parlementaires émanant des différents groupes politiques. Il a même bridé sa propre majorité jusqu’à la réunion de la commission mixte paritaire !

Il a donc fallu surmonter un grand nombre de difficultés. Le chemin a été semé d’embûches. Ce sera d’ailleurs de plus en plus le cas lorsque nous légiférerons afin de réguler l’économie numérique, pour faire d’internet un espace plus sûr, plus serein et moins violent.

M. Patrick Chaize. Je me félicite donc des avancées parlementaires que contient ce projet de loi, à commencer par les améliorations votées sous l’impulsion du Sénat pour défendre notre souveraineté et accroître la protection de nos données sensibles. La Haute Assemblée mène de longue date ce combat, que nous poursuivrons autant que nécessaire. Je tiens, en particulier, à saluer l’engagement tenace de Catherine Morin-Desailly.

Désormais, la loi fixera des obligations de protection face aux législations extraterritoriales pour les administrations de l’État, ses opérateurs et ses groupements d’intérêt public (GIP),…

M. Patrick Chaize. … dont la plateforme des données de santé, le Health Data Hub. C’est une avancée importante, que nous avons obtenue malgré une administration qui rechigne à se transformer et malgré le Gouvernement, qui, sur cette question, semble en plein déni de souveraineté.

Nous avons également fixé des obligations de protection et de localisation pour les prestataires d’hébergement des données de santé à caractère personnel.

Nos ambitions étaient certes plus grandes, mais ce sont là des avancées majeures, que nous avons obtenues grâce au soutien de très nombreux groupes politiques au Sénat et à l’Assemblée nationale ; je remercie encore l’ensemble de ces groupes.

Je me félicite également des avancées obtenues pour la régulation du marché de l’informatique en nuage, l’objectif étant d’établir un environnement concurrentiel plus sain afin que nos entreprises françaises et européennes puissent se développer davantage. Nous avons donc abaissé les barrières à l’entrée de ce marché, par exemple en limitant les crédits cloud à un an, et réduit les barrières à la sortie, notamment en confiant à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) un rôle de règlement des litiges relatifs à la facturation des données.

De même, je suis satisfait du travail accompli par les deux chambres afin de préciser le déploiement du filtre anti-arnaques, dont l’objectif est de lutter contre les actes de cybermalveillance qui polluent notre quotidien.

À titre personnel, j’ai veillé très attentivement au renforcement de la prévention et de la sensibilisation de nos concitoyens internautes : c’était une lacune de ce projet de loi.

En outre, je pense que nous sommes parvenus à un bon équilibre entre soutien à l’innovation et protection, en particulier pour les jeux à objets numériques monétisables. Autorisés à titre expérimental pour une durée de trois ans, ces jeux sont certes l’occasion de développer une nouvelle filière économique et de soutenir nos jeunes entreprises innovantes françaises, mais ils présentent aussi des risques. C’est pourquoi nous avons très strictement encadré cette expérimentation.

Tout d’abord, nous avons refusé catégoriquement le recours à une ordonnance, afin d’imposer un débat parlementaire que le Gouvernement souhaitait éviter. Cette discussion sera complétée par la consultation obligatoire des élus locaux, des casinotiers et des éditeurs de jeux vidéo.

Ensuite, nous avons proposé une première définition et fixé un cadre de régulation assez étoffé pour cette expérimentation.

Enfin, nous avons interdit par principe l’obtention de récompenses sous forme de gains monétaires, en autorisant par dérogation l’obtention à titre accessoire de récompenses en cryptomonnaies.

Nos collègues députés ont insisté pour que cette dérogation soit fixée par voie réglementaire. Toutefois, nous continuons d’émettre de sérieux doutes quant à la constitutionnalité de cette mesure.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Patrick Chaize. Dans l’incertitude, nous avons souhaité encadrer cette possibilité de manière très rigoureuse en fixant des critères de plafonnement, notamment un plafond annuel et par joueur.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Patrick Chaize. Mes chers collègues, telle a été notre feuille de route lors de l’examen de ce projet de loi, puis lors des négociations en commission mixte paritaire. À l’arrivée, je constate que ce texte ressemble davantage à une proposition de loi, dont le Sénat a pleinement su se saisir, et je nous en félicite collectivement. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans un monde où les technologies numériques occupent une place de plus en plus grande et où les données personnelles se vendent cher – elles font désormais figure de monnaie d’échange –, il est essentiel de bâtir ensemble des règles pour mieux nous protéger.

Conçu comme le prolongement des règles européennes relatives au numérique, le présent texte contribue à garantir un avenir numérique sécurisé et mieux régulé : c’est un pas important, mais, en la matière, il faudra s’adapter au gré des évolutions.

Ce texte s’attaque à un certain nombre de sujets, au premier rang desquels la lutte contre la diffusion de discours haineux et contre la désinformation. Les fake news envahissent nos fils d’actualité et sèment la confusion dans l’esprit d’un certain nombre de nos concitoyens.

Il s’attaque ensuite au harcèlement, qui est, hélas ! de plus en plus répandu sur les réseaux sociaux. Les plus jeunes en sont souvent les premières victimes : certains élèves sont poursuivis de leur cour d’école jusque dans l’intimité de leur chambre. Le harcèlement sévit partout, tout le temps. Il est sans limites et aboutit à des situations dramatiques face auxquelles les parents sont démunis.

En parallèle, les cyberattaques se multiplient. La sécurité en ligne et la protection des données sont devenues des enjeux pour nos sociétés. Il y a quelques jours, la Fédération française de football (FFF) a été piratée : au total, 1,5 million de données des licenciés de football se trouvent menacées. Les espaces numériques de travail (ENT), outils informatiques de nos établissements scolaires, ont eux aussi été pris pour cible. Plus de 400 établissements de France, des milliers de collégiens et de lycéens ont été visés par des menaces d’attentat : chacun peut imaginer l’impact psychologique de ces cyberattaques pour les élèves concernés et leurs familles.

Ce projet de loi est une des étapes permettant de créer, dans les années à venir, un espace numérique où nous pourrons évoluer avec moins de craintes.

La commission mixte paritaire chargée d’examiner ce texte s’est réunie la semaine dernière. Elle est finalement parvenue à un accord.

Parmi les dispositions restant en discussion figurait notamment la mise en place de systèmes de vérification de l’âge sur les plateformes proposant des contenus pornographiques, afin de protéger les mineurs. Nous pensons également aux nouvelles mesures visant à renforcer la protection de nos données numériques face aux législations extraterritoriales : c’est indispensable pour assurer la souveraineté des données.

Ce texte fait de la France un pays pionnier en matière de régulation de l’espace numérique. Toutefois – je l’indiquais en préambule –, il faudra remettre l’ouvrage sur le métier pour s’adapter aux évolutions qui ne manqueront pas de survenir.

Reste un sujet sur lequel nous devons avancer dès à présent : l’anonymat, ou plutôt la fin de l’anonymat, sur les réseaux sociaux.

Notre collègue député Paul Midy propose que les utilisateurs des plateformes soient contraints de s’enregistrer : ils pourraient ainsi être identifiés par la justice en cas de besoin. Une telle mesure semble frappée au coin du bon sens. À cet égard, le présent texte se heurte pour le moment à un certain nombre de règles destinées à assurer la protection des données personnelles, mais l’enjeu est si grand qu’il faudra y revenir tôt ou tard.

Les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires souscrivent aux objectifs de ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Loïc Hervé. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le présent texte vise à établir les conditions d’un internet plus sûr pour nos concitoyens, en particulier pour nos enfants.

Dans ce combat, nous nous sommes heurtés à une double muraille : les limites technologiques, bien sûr, mais aussi et surtout l’impérieuse nécessité du respect plein et entier du droit européen.

Nous avons été rappelés à l’ordre par la Commission européenne, laquelle a adressé deux avis circonstanciés à la France après le vote de ce projet de loi par nos collègues députés. Dans le même temps, notre marge de manœuvre a été réduite. Par un arrêt du 9 novembre 2023, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a en effet durci son interprétation du principe du pays d’origine.

La commission mixte paritaire a dû, en responsabilité, prendre en compte ces contraintes pour éviter de placer notre pays dans une position délicate à l’égard de Bruxelles.

Les articles 1er et 2, qui imposent une vérification d’âge aux éditeurs et aux fournisseurs de plateformes de partage de vidéos mettant à disposition des contenus pornographiques, ne pourront ainsi s’appliquer aux acteurs établis dans un autre pays membre qu’après mise en œuvre des notifications spécifiques imposées par la jurisprudence de la CJUE.

Mes chers collègues, malgré ce cadre étroit, nous avons réussi à inscrire dans le texte des dispositions qui renforcent la protection de l’espace numérique. Parmi elles, deux avancées sont directement inspirées du rapport d’information que notre délégation aux droits des femmes a consacré à l’industrie pornographique – je parle sous l’autorité de la présidente Annick Billon.

Premièrement, le texte qui nous est soumis impose aux producteurs de contenus pornographiques simulant la commission d’une infraction pénale, comme le viol ou l’inceste, d’afficher à tout moment un message d’avertissement rappelant le caractère illégal des comportements ainsi mis en scène.

Deuxièmement, ce projet de loi pose les premières bases d’un droit à l’oubli, permettant aux personnes ayant tourné dans des vidéos pornographiques d’obtenir le retrait de ces documents en cas de diffusion sur internet en violation des conditions contractuelles.

Mme Annick Billon. Très bien !

M. Loïc Hervé. Il s’agit là de deux progrès essentiels pour les droits des femmes, que le Sénat a fait adopter en dépit des réticences de l’Assemblée nationale. Nous pouvons être fiers d’avoir tenu bon sur ces sujets.

De même, nous pouvons nous réjouir que l’Assemblée nationale ait fini par se rallier à l’article 5 bis dans sa rédaction issue des travaux du Sénat.

En créant un délit spécifique d’outrage en ligne, assorti d’une amende forfaitaire délictuelle (AFD), nous avons fait le choix d’une évolution juridique parfaitement proportionnée. Il s’agit d’apporter une réponse pénale rapide et efficiente à un phénomène massif.

Ainsi, un officier de police judiciaire (OPJ) pourra intervenir très rapidement pour infliger une amende forfaitaire délictuelle, qui supposera la reconnaissance des faits par l’auteur ; et, si tel n’est pas le cas, la procédure classique suivra son cours.

Contrairement à ce qu’affirment des vidéos pullulant sur les réseaux sociaux, lesquelles émanent aussi bien de l’extrême droite que de l’extrême gauche, il n’y a donc aucun risque d’arbitraire. Le texte précise clairement que seuls les contenus diffusés au public seront concernés, puisqu’il fait explicitement référence aux réseaux sociaux et aux plateformes en ligne.

Ceux qui ont dénoncé la censure des échanges privés se sont eux aussi trompés. Je tiens à les rassurer : ce n’est ni l’objet ni l’effet de l’outrage en ligne. Au Gouvernement maintenant de se saisir de ce nouveau dispositif et de le mettre en œuvre, même s’il a été adopté contre son avis.

Au cours de la réunion de la commission mixte paritaire, le Sénat a accepté la création d’une réserve citoyenne du numérique : à quoi servirait-elle si elle ne contribuait pas à lutter contre les comportements illégaux en ligne et à constater la commission d’un outrage en ligne ?

Quel serait le sens de ce texte si, à l’issue de nos débats, perdurait l’impunité dont bénéficient tous ceux qui, isolément ou en meute, s’attaquent aux autres internautes ?

Enfin, quel serait le message adressé aux Français si le Gouvernement ne soutenait pas, à nos côtés, que ce dispositif est pleinement conforme à la Constitution ? L’outrage en ligne reprend presque mot pour mot la définition de l’outrage sexiste et sexuel, qui permet de lutter contre le harcèlement de rue.

Nous devons être unis pour défendre un internet plus sûr. Je sais que nous le sommes sur toutes les travées de cette assemblée et j’espère en conséquence que, comme en première lecture, nous saurons adopter ce texte à l’unanimité. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’ambition initiale de ce texte était louable. Elle peut être résumée ainsi : puisqu’il ne saurait y avoir de zone de non-droit numérique, on doit pouvoir réguler cet espace comme on le fait dans l’espace public.

Aujourd’hui, neuf mois après l’adoption de ce texte en première lecture au Sénat et six mois après son vote par l’Assemblée nationale, nous examinons enfin les conclusions de la commission mixte paritaire.

Si l’ambition du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique était claire, sa rédaction s’est heurtée à de nombreuses difficultés.

En effet, depuis le début de ce parcours législatif, plusieurs allers-retours ont eu lieu entre le Gouvernement et la Commission européenne. Dans deux avis circonstanciés, rendus le premier en octobre 2023 et le second en janvier 2024, la Commission européenne s’est montrée plutôt critique. Selon elle, le présent texte empiète sur le DSA, qui lui confère la compétence de surveillance et de régulation des grandes plateformes numériques, ou anticipe trop ses dispositions.

La situation a encore été compliquée par une nouvelle jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, qui limite très fortement la faculté des États membres à fixer, à l’échelle nationale, des obligations aux plateformes établies dans d’autres pays de l’Union. Or le présent texte comportait de nombreuses dispositions en contradiction avec ce principe, dit du pays d’origine, qui aurait permis à la France d’appliquer un pouvoir de régulation étendu. Je pense notamment à la régulation des sites pornographiques, laquelle s’en trouve désormais complexifiée.

La CMP a donc eu pour rôle d’assurer une mise en conformité avec ces avis. Elle a également dû effectuer un rapprochement, parfois difficile, entre les positions des deux chambres du Parlement français.

Où en sommes-nous aujourd’hui ? La lecture que nous, écologistes, faisons de ce texte n’a pas beaucoup changé depuis la première lecture. Il s’agit selon nous d’un catalogue de mesures relevant de domaines techniques très variés et parfois très éloignés les uns des autres. Dans certains cas, ces mesures sont bienvenues, mais elles sont souvent peu opérationnelles et quelquefois dangereuses. En définitive, on peine à cerner la cohérence globale de ce texte, si bien que l’on pourrait conclure : tout ça pour ça…

Mes chers collègues, je prendrai quelques exemples pour illustrer mon propos.

Au sujet du référentiel pour contrôler l’accès aux sites pornographiques, le présent texte a peu évolué depuis la première lecture au Sénat. Mon analyse reste donc la même : on se décharge sur l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) pour établir le référentiel technique auquel devront se soumettre les sites pornographiques. Or, à l’heure actuelle, en France comme partout ailleurs dans le monde, personne n’a de solution suffisamment efficace et assez protectrice des données.

Les deux contrôles les plus crédibles à ce jour passent par l’usage de la carte bleue et par le recours à un tiers de confiance ; mais l’une et l’autre de ces formules demeurent facilement contournables et peu satisfaisantes. Je reste donc extrêmement réservé quant au caractère opérationnel du référentiel que nous demandons à l’Arcom de concevoir.

J’en viens à présent à l’amende forfaitaire délictuelle. La commission mixte paritaire a rétabli l’article, extrêmement vague, trop large et potentiellement dangereux, voté par le Sénat en première lecture : l’article 5 bis, qui prévoit de doter l’administration d’un très grand pouvoir pour réprimer ce qu’elle considère comme injurieux.

Entendons-nous bien : nous ne sommes pas hostiles par principe aux amendes forfaitaires. Nous avions d’ailleurs proposé d’en instaurer une pour les délits d’outrage sexiste en ligne. Mais, dans un pays où l’on peut finir au poste pour avoir écrit sur les réseaux sociaux « Macron démission »,…