Mardi 17 janvier 2012

- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président -

Ouvrages d'art de rétablissement des voies - Examen des amendements
au texte de la commission

La commission procède à l'examen des amendements au texte n° 72 (2011-2012) sur la proposition de loi n° 745 rectifié (2010-2011) visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d'art de rétablissement des voies.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il nous reste un amendement à examiner sur ce texte.

Article premier

M. Christian Favier, rapporteur. - L'amendement n°10 rectifié ter présenté par M. Grignon propose de recourir à la médiation du préfet avant la saisine du juge en cas de conflit entre les deux parties. Bien qu'il s'agisse d'une faculté, je préfère en rester sur ce point au texte de la commission, pour laquelle le préfet peut être porteur des intérêts du gestionnaire de la voie ayant conduit à la réalisation d'un ouvrage d'art de rétablissement des voies. Au contraire, le recours au juge est une garantie de pleine indépendance en cas de conflit entre une collectivité et le gestionnaire des voies. Défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°10 rectifié ter.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Avec cet amendement s'achève l'examen en commission de ce texte, que nous avons entamé le 2 novembre dernier et que nous examinons en séance publique tout à l'heure.

La commission adopte les avis suivants :

Article ou
division

Objet de l'article

Numéro d'amendement

Auteur de l'amendement

Avis de la commission

Article 1er

Établissement d'une convention répartissant les charges et les responsabilités des ouvrages de rétablissement des voies

10 rectifié ter

M. Francis Grignon et plusieurs de ses collègues

Défavorable

Agents contractuels dans la fonction publique, lutte contre les discriminations et dispositions relatives à la fonction publique - Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission

La commission poursuit l'examen du rapport et établit le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 784 (2010-2011) relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Sur ce texte, 72 amendements sont à examiner.

Article additionnel après l'article 2

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-4 est présenté par le gouvernement. Il sécurise les contractuels occupant un emploi d'un établissement public administratif figurant sur la liste annexée au décret du 18 janvier 1984, par exemple l'Institut national de la propriété industrielle ou l'Office national de la chasse, dans l'hypothèse où leur établissement serait retiré de cette liste. Ils continueraient à être éligibles à la titularisation, si cette suppression intervenait dans les quatre ans de la publication de la loi, et ceux qui ne seraient pas titularisés continueraient à bénéficier de leur contrat. Je suis favorable à son adoption.

M. Christian Favier. - Ainsi les contractuels le resteraient. Nous nous abstiendrons.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cela résulte d'un arbitrage, qui n'a pas remis en cause le principe du recrutement des titulaires par concours, tout en reconnaissant la nécessité d'apporter une réponse, même partielle,  à la situation de nombreux contractuels.

L'amendement n° COM-4 est adopté.

Article 3

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-27, que je présente, est rédactionnel.

L'amendement n° COM-27 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-70, que je présente, a pour objet de ne pas exclure de l'ancienneté requise pour la titularisation les services accomplis pour assurer le remplacement de fonctionnaires en application du dernier alinéa de l'article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

L'amendement n° COM-70 est adopté.

M. Christian Favier. - La rédaction de l'alinéa 4 de cet article est trop restrictive : elle exclut du dispositif des agents dont l'ancienneté requise, au titre d'un ministère, n'est pas suffisante, contrairement à la durée totale de leurs contrats au sein de la fonction publique de l'Etat. Notre amendement n° COM-2 propose que l'ancienneté soit calculée non pour chaque département ministériel, mais pour l'ensemble de la fonction publique de l'Etat, dans l'un ou plusieurs de ses établissements publics, ainsi que dans un ou plusieurs établissements publics locaux d'enseignement.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cet alinéa reprend les termes de l'accord négocié avec les organisations syndicales, en précisant la notion d'employeur. La titularisation est fondée sur la valorisation des acquis professionnels, appréciée par la réalité des services assurés auprès de l'employeur.

Elargir la notion d'employeur, du département ministériel à l'Etat, c'est diluer ce lien et accroître la population éligible à la titularisation, donc le nombre de déçus, puisque le nombre de postes offerts sera limité.

Il ne faut pas trop élargir les conditions de titularisation au risque d'affaiblir le principe fondateur du statut, le recrutement par concours...

M. Jean-Jacques Hyest. - Eh oui !

M. Jean-Yves Leconte. - J'ai déposé l'amendement n° COM-23 dans le même esprit que celui de M. Favier. Dans certains ministères, après deux ou trois ans de contrat, on doit passer à un établissement public, avant de revenir, sans avoir la durée suffisante pour justifier un CDI. Au-delà du réalisme, il y a là une grande hypocrisie, à laquelle je propose de mettre fin.

M. Alain Richard. - Au sein de l'Etat, la gestion des contractuels et des agents non titulaires est ministérielle, voire infra-ministérielle, puisqu'elle revient aux directions générales. Ce serait l'un des défis les plus difficiles pour l'Etat, que décompter l'ensemble de ce personnel, qui n'est connu, et encore, que département par département. Aucun ministère n'est capable de se concerter avec un autre pour réemployer un contractuel...

M. Jean-Yves Leconte. - Il y en a au moins un qui le fait...

M. Alain Richard. - Le gouvernement qui changera cet état de fait, en facilitant la gestion intégrée des agents non titulaires au sein de l'Etat, marquera l'histoire !

L'amendement n° COM-2 est rejeté, ainsi que l'amendement n° COM-23.

Article 4

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-3 a pour objet d'associer les organisations syndicales à l'établissement de la liste des cadres d'emplois, pour lesquels seront organisés des concours réservés.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les concours réservés sont un des modes d'accès du dispositif de titularisation retenus par le protocole du 31 mars 2011. Le projet ne dit rien d'autre que ce protocole. Défavorable.

L'amendement n° COM-3 est rejeté.

Article 5

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'article 5 s'assure, dans une logique de reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle, que les agents disposent d'une ancienneté suffisante dans des fonctions d'un niveau égal à celui des corps d'accueil auxquels ils souhaitent accéder.  L'amendement n° COM-28 distingue la situation des agents en contrat à durée déterminée de ceux qui sont titulaires de contrats à durée indéterminée.

Ces derniers, en effet, ont nécessairement une ancienneté continue d'emploi de six ans dans des fonctions de même niveau. Ils pourront être titularisés dans un corps de même niveau que les fonctions occupées au 31 mars 2011, conformément à la loi du 26 juillet 2005.

En revanche, une ancienneté de quatre années est imposée par l'article 3 du projet pour les agents recrutés en contrat à durée déterminée. Notre amendement précise, si l'agent a quatre ans d'ancienneté, qu'il accède à la catégorie dans laquelle il a exercé le plus longtemps ; s'il a plus de quatre ans d'ancienneté, il accède à la catégorie la plus élevée, quel que soit le temps qu'il y a passé.

M. Christian Favier. - Pour les agents qui ont changé de catégorie, celle où ils ont exercé le plus longtemps n'est pas forcément la plus élevée. Ils risqueraient d'intégrer un corps où leur rémunération est inférieure à celle à laquelle ils peuvent prétendre.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - S'ils « grimpent » après le 31 mars 2011, la rédaction actuelle peut être plus avantageuse pour eux.

M. Jean-Jacques Hyest. - Oui.

M. Alain Richard. - Il est utile que la commission se penche avec attention sur cette question. L'objectif social de ce projet est d'assurer une continuité de carrière aux agents non titulaires de l'Etat et non pas de créer un raccourci pour l'accès à la catégorie A, dès lors que l'on confère cette capacité, dans l'administration, aux titulaires. Si un changement de catégorie peut être effectué sur simple décision discrétionnaire de l'employeur, il faut veiller aux conditions d'ancienneté requises, ainsi qu'aux conditions proposées aux titulaires, afin qu'il n'y ait pas là un raccourci...

M. René Garrec. - Une promotion accélérée !

M. Alain Richard. - Nous sommes ici un peu à la limite, comme me l'a dit un ancien collègue, qui fut directeur de la fonction publique.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il me semble que cet amendement laisse une liberté de choix à l'intéressé...

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Il améliore la situation de ceux qui ont plus de quatre ans d'ancienneté...

M. Alain Richard. - Avec quatre ans plus un mois, on passe en catégorie A sans concours !

M. Jean-Pierre Sueur, président. - N'oubliez pas qu'il y a une navette !

M. René Garrec. - Ce n'est pas une raison pour ne pas bien faire notre travail !

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous le faisons bien, mais nous pourrons y revenir.

L'amendement n° COM-28 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - La titularisation et la nomination des agents déclarés aptes s'effectuent dans les conditions prévues par les statuts particuliers des corps.

L'amendement n° COM-71 renvoie à ces statuts pour nommer et classer les agents déclarés aptes. Lorsque l'agent titularisé exerçait auparavant à temps incomplet pour au moins 70 %, et menait par ailleurs une activité privée lucrative, il devra respecter les dispositions législatives et réglementaires relatives au cumul d'activités, qui sont plus restrictives pour les agents à temps complet.

L'amendement n° COM-71 est adopté.

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-5 fait référence à la date du 31 mars 2011 pour la prise en compte de la rémunération des agents.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Je renvoie à l'amendement n° COM-28 que nous venons d'adopter, qui sécurise les conditions d'accès aux corps d'emploi. Je demande le retrait de votre amendement.

L'amendement n° COM-5 est retiré.

Article 7

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-24, présenté par M. Leconte, est satisfait par le 4e alinéa de l'article 7, selon lequel les modifications de périmètres ministériels n'ont pas de conséquence sur le bénéfice de l'ancienneté acquise.

L'amendement n° COM-24 est rejeté.

Article 8

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-6 précise que l'application de cet article ne peut entraîner une réduction de la rémunération perçue par les agents concernés.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement est satisfait par l'article 8 qui prévoit que l'agent « cdisé » conserve le bénéfice des dispositions de son contrat sous réserve de la modification éventuelle de ses fonctions. Elles doivent en tout état de cause être du même niveau de responsabilité que les précédentes.

L'amendement n° COM-6 est rejeté.

Article 9

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-29 harmonise la rédaction avec le droit en vigueur, en réunissant sous le même vocable d'administrations parisiennes la commune et le département de Paris, dont les fonctionnaires ont le même statut.

L'amendement n° COM-29 est adopté.

Article 10

L'amendement de rectification n° COM-30 est adopté.

Article 11

L'amendement rédactionnel n° COM-31 est adopté.

Article 13

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-32 rectifie une erreur de référence.

M. Alain Richard. - Ce n'est pas une erreur, puisque la référence porte sur l'article après modification...

M. Jean-Jacques Hyest. - C'est une habitude de certains grands corps...

M. Alain Richard. - De certaines institutions !

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Il faut bien faire référence à la loi telle qu'elle est !

M. Alain Richard. - Après promulgation ! Le terme d'erreur ne me paraît pas justifié !

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Disons qu'il s'agit de rectifier une référence !

L'amendement n° COM-32 est adopté.

L'amendement rédactionnel n° COM-33 est adopté.

Article 14

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Comme à l'article 5 pour les contractuels de l'Etat, l'amendement n° COM-34 propose de distinguer la situation des agents en contrat à durée déterminée de ceux qui sont titulaires de contrats à durée indéterminée.

Pour ces derniers, qui ont nécessairement une ancienneté continue d'emploi de six ans dans des fonctions de même niveau, la titularisation pourra s'effectuer dans un corps dont les fonctions sont de même niveau que celles occupées au 31 mars 2011.

Les quatre années de services exigées pour que les agents en CDD accèdent à la titularisation coïncident avec les quatre années d'ancienneté accomplies dans l'administration auprès de laquelle ils sont éligibles : si l'agent n'a pas acquis quatre ans d'ancienneté dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique, il accède à la catégorie dans laquelle il a exercé le plus longtemps ; s'il a exercé plus de quatre ans auprès de la même administration, il accède à la catégorie la plus élevée, quel que soit le temps qu'il y a passé.

M. Jean-Jacques Hyest. - C'est la reprise de ce que nous avons adopté précédemment, et que nous appliquons aux trois fonctions publiques.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest. - Il faut voter cet amendement par cohérence avec l'amendement n° COM-28 que nous avons adopté.

M. Christian Favier. - Nous nous abstenons, sur la fonction publique territoriale, comme sur la fonction publique d'Etat.

L'amendement n° COM-34 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-35 offre à l'autorité territoriale la faculté de confier l'examen de la recevabilité des dossiers des candidats à la commission d'évaluation professionnelle.

M. Christian Favier. - Nous sommes davantage favorables au jury qu'à une commission ad hoc, qui emporte un risque d'arbitraire. Le jury est plus rigoureux.

M. Jean-René Lecerf. - Je crains que cet amendement ne sème la confusion entre la recevabilité des dossiers, qui est une compétence liée de l'administration, et la vérification de l'aptitude des candidats, qui relève du pouvoir d'appréciation souverain du jury.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - J'entends bien votre objection. Toutefois, notre texte n'ouvre qu'une faculté et la commission n'est pas présidée par un représentant de la collectivité territoriale, mais par une personnalité qualifiée.

L'amendement n° COM-35 est adopté.

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-8 est de coordination. Nous demeurons favorables au jury.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - J'en demande le retrait, par coordination.

M. Christian Favier. - Je le maintiens.

L'amendement n° COM-8 est rejeté.

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-9 est un amendement de cohérence. Nous demandons l'instauration d'un jury à la place de la commission ad hoc.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les sélections professionnelles sont un mode particulier d'accès au dispositif de titularisation. Les commissions d'évaluation seront chargées d'apprécier l'aptitude du candidat après l'avoir entendu.

Leur composition concilie les garanties nécessairement offertes aux agents et le principe de libre administration des collectivités territoriales. Elles sont pluralistes : y siègent l'autorité territoriale, un représentant du personnel, ainsi qu'une personnalité qualifiée, qui la préside, désignée par le président du centre de gestion.

M. Alain Richard. - Qui représentera la collectivité territoriale ? Un cadre de la collectivité, soumis à l'autorité de l'employeur qui l'aura désigné ! Cette commission de sélection confèrera la qualité de fonctionnaire titulaire et il convient de s'entourer de garanties. Tôt ou tard, cette question sera examinée par le Conseil constitutionnel au regard du principe de l'égal accès de tous aux emplois publics. Il s'agit ici d'une procédure « à la bonne franquette ». Quel chef de service s'opposera à la liste établie par son directeur général des services ? Il me semble que nous sommes ici un peu en dehors de la ligne, quant à l'indépendance de l'autorité qui va conférer la qualité de titulaire.

M. Michel Delebarre. - Je suis d'accord. Il faut faire intervenir des personnalités extérieures, si l'on veut préserver un élément d'objectivité, qui ne soit pas soumis à la gestion de la collectivité.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Fera partie de la commission un membre du personnel de la catégorie à laquelle aspire le candidat...

M. Alain Richard. - Au moins de la catégorie !

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Et elle sera présidée par une personnalité qualifiée extérieure.

M. Alain Richard. - Le directeur général des services aura sa liste et le deuxième membre de la commission sera son subordonné. Un jour viendra où sera posée au tribunal administratif une question prioritaire de constitutionnalité et on sera borderline.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous aurons une navette.

L'amendement n° COM-9 est rejeté.

Article 15

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - La commission d'évaluation professionnelle est composée de l'autorité territoriale ou de son représentant, d'une personnalité qualifiée et d'un fonctionnaire de la collectivité ou de l'établissement appartenant au moins à la catégorie hiérarchique dont relève le cadre d'emplois auquel donne accès le recrutement.

Si l'administration de la collectivité ne comprend aucun fonctionnaire de la catégorie considérée, il faut en désigner un d'une autre collectivité ou établissement. Tel est l'objet de l'amendement n° COM-36.

L'amendement n° COM-36 est adopté.

M. Christian Favier. - L'amendement n° COM-10 exprime à nouveau notre opposition à la commission ad hoc.

L'amendement n° COM-10 tombe.

Article additionnel après l'article 18

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-72 inclut l'ensemble des agents contractuels des administrations parisiennes de droit public.

L'amendement n° COM-72 est adopté.

M. Michel Delebarre. - Il y a un toilettage à faire : l'Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris et l'Ecole des ingénieurs de la ville de Paris pourraient un jour rejoindre les formations supérieures de l'éducation nationale.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est une question sensible.

M. Michel Delebarre. - Historique !

M. Alain Richard. - Leurs fonctionnaires sont mieux payés que dans la fonction publique de l'Etat.

Article 21

L'amendement rédactionnel n° COM-37 est adopté.

M. Christian Favier. - Il ne serait pas juste que ce projet écarte les agents non contractuels justifiant de quatre ans et plus d'ancienneté dans l'ensemble des établissements publics de santé pour lesquels ils ont travaillé,  au motif qu'ils ne pourraient justifier d'une durée de quatre ans dans un seul et unique établissement.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Nous devons être attentifs à la liberté de recrutement, et à la maîtrise des procédures par les employeurs, sachant que la loi s'appuie sur la validation des acquis professionnels. Défavorable.

L'amendement n° COM-12 est rejeté.

Article 22

L'amendement rédactionnel n° COM-38 est adopté.

Article 23

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-39 applique à la fonction publique hospitalière les mêmes règles que nous avons adoptées pour la fonction publique d'Etat.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est homothétique !

L'amendement n° COM-39 est adopté.

M. Christian Favier. - Notre amendement n° COM-13 est de cohérence.

L'amendement n° COM-13 tombe.

Article 27

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'article 3 de la loi du 11 janvier 1984 mentionne des textes qui n'existent plus. L'amendement n° COM-73 toilette cet article pour tenir compte des modifications des textes de renvoi. 

L'amendement n° COM-73 est adopté.

Article additionnel après l'article 27

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Selon l'article 3 de la loi du 11 janvier 1984, les emplois de certains établissements administratifs, comme l'Office national de la chasse ou d'autorités administratives indépendantes, comme la CNIL ou le CSA, ne sont pas soumis à la règle de l'occupation des emplois permanents de l'Etat par des fonctionnaires.

L'amendement n° COM-7 présenté par le gouvernement prévoit que les agents occupant un emploi dans ces organismes conservent le bénéfice de leur contrat, au cas où leur établissement ou institution serait supprimé de la liste annexée au décret d'application de la loi. Je suis favorable à son adoption.

L'amendement n° COM-7 est adopté.

Article 30

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-67 propose de porter de trois à quatre mois la durée des interruptions entre deux contrats autorisant la prise en compte des services discontinus dans le calcul de la période de six ans requise pour donner droit à un CDI. Ceci devrait mettre fin à certaines pratiques, notamment dans l'éducation nationale.

L'amendement n° COM-67 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les amendements n°s COM-40 et

COM-41 apportent des précisions rédactionnelles.

Les amendements n°s COM-40 et COM-41 sont adoptés.

M. Jean-Yves Leconte. - L'amendement n° COM-22 propose d'inscrire dans la loi que les non-renouvellements des contrats à durée déterminée ne pourront être motivés que par l'intérêt du service.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cet amendement est satisfait par les dispositions de l'article 45 du décret du 17 janvier 1986 concernant les agents non titulaires de l'Etat.

M. Jean-Yves Leconte. - Certes, mais il me semble préférable d'inscrire cette obligation dans la loi, notamment au regard des cas de non-renouvellement de CDD que j'ai constatés, dont le but explicitement poursuivi était d'éviter que le contrat ne devienne un CDI.

L'amendement n° COM-22 est rejeté.

Article 33

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-42 est d'ordre rédactionnel.

L'amendement n° COM-42 est adopté.

Article 34

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les amendements n°s COM-43, COM-44 et COM-45 apportent des précisions rédactionnelles.

Les amendements n°s COM-43, COM-44 et COM-45 sont adoptés.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - A l'instar de dispositions que nous avons déjà adoptés, l'amendement n° COM-68 propose de porter de trois à quatre mois la durée des interruptions entre deux contrats autorisant la prise en compte des services discontinus dans le calcul de la période de six ans requise pour donner droit à un CDI.

L'amendement n° COM-68 est adopté.

Article 35

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-46 est un amendement de conséquence qui s'applique aux contrats saisonniers ou occasionnels utilisés par les départements et les régions.

L'amendement n° COM-46 est adopté.

Article additionnel après l'article 38

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-25, dont le dispositif est approuvé par les organisations syndicales, propose d'instituer des commissions consultatives paritaires pour les agents contractuels des collectivités territoriales à l'instar de celles existant pour les non-titulaires de l'Etat.

L'amendement n° COM-25 est adopté.

Article 39

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-69 applique à la fonction publique hospitalière l'augmentation de trois à quatre mois de la durée des interruptions entre deux contrats qui n'annulent pas le calcul de la durée de six ans déjà évoquée.

L'amendement n° COM-69 est adopté.

Article 43

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-47 est d'ordre rédactionnel.

L'amendement n° COM-47 est adopté.

Article 44

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-48 prévoit d'actualiser la référence des lois statutaires auxquelles ne sont pas soumis les fonctionnaires de la DGSE.

L'amendement n° COM-48 est adopté.

Article 48

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-49 apporte une simplification rédactionnelle.

L'amendement n° COM-49 est adopté.

Article 49

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-63 propose de prendre en compte la refonte du code du travail dans le statut de la fonction publique territoriale.

L'amendement n° COM-63 est adopté.

Article 50

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-50 prévoit de clarifier la portée de l'article 50 en autorisant explicitement la mise à disposition de fonctionnaires auprès d'Etats fédérés.

L'amendement n° COM-50 est adopté.

Article 52

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-51 prévoit une harmonisation des éléments de comparaison entre corps et cadres d'emplois auxquels il est donné accès par la voie du détachement ou de l'intégration dans les conditions prévues à l'article 43 du projet de loi.

L'amendement n° COM-51 est adopté

Article additionnel après l'article 52

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-11 concrétise l'engagement du gouvernement aux termes duquel le reclassement en catégorie B des personnels du corps des permanenciers auxiliaires de régulation médicale prend effet à la date d'entrée en vigueur du décret ayant introduit cette modification, c'est-à-dire le 16 juin 2011. Avis favorable.

L'amendement n° COM-11 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-14 propose de reporter de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2016, la période durant laquelle les fonctionnaires de la Poste ont la possibilité d'être intégrés dans les corps et cadres d'emploi de la fonction publique. Je suis favorable à son adoption.

M. Christian Favier. - Etant opposé par principe à la privatisation de la Poste et de France Télecom, nous ne pouvons voter en faveur de cette mesure, de surcroît non soumise aux organisations syndicales. Abstention.

M. Christian Cointat. - Qu'elle ait été soumise ou non aux syndicats, l'on ne peut qu'approuver cette mesure favorable aux salariés de la Poste.

L'amendement n° COM-14 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'objet de l'amendement n° COM 52 est la modification de l'intitulé du chapitre III afin de tenir compte de l'adoption de mesures relatives à la Cour des comptes, et non seulement aux chambres régionales de comptes et aux juridictions administratives.

L'amendement n° COM-52 est adopté.

Article 53

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-64 rend obligatoire la nomination, chaque année, au grade de maître des requêtes du Conseil d'Etat d'un second conseiller de tribunaux administratifs ou de cours administratives d'appel, alors que la rédaction actuelle prévoit que cette seconde nomination est facultative. Il est notamment justifié par les prévisions d'évolution de la démographie de l'institution présentées dans l'étude d'impact du projet de loi et a recueilli l'approbation du vice-président du Conseil d'Etat.

L'amendement n° COM-64 est adopté.

Article additionnel après l'article 53

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'objet de l'amendement n° COM-53 est l'insertion d'une nouvelle section 3 au chapitre III du titre III du Livre Ier du code de justice administrative consacrant le statut des fonctionnaires effectuant leur mobilité statutaire auprès du Conseil d'Etat. Leur serait conférée la qualité de maîtres des requêtes en service extraordinaire et ouverte la voie à une intégration. Avis favorable.

M. Jean-Jacques Hyest. - Je suis sceptique quant à l'opportunité de créer la catégorie nouvelle des maîtres des requêtes en service extraordinaire alors qu'il existe déjà de nombreuses voies d'accès au Conseil d'Etat.

M. Alain Richard. - L'expérience de l'accueil de fonctionnaires en mobilité par le Conseil d'Etat est très positive, d'autant plus qu'il s'agit généralement de fonctionnaires parmi les meilleurs des administrations dont l'apport est aujourd'hui indispensable à la haute juridiction. Pour autant, dans la mesure où l'on considère qu'ils ne donnent pas les mêmes garanties d'indépendance que les membres du Conseil d'Etat, ils ne sont pas admis à voter dans les formations de jugement. L'octroi du titre de maître des requêtes en service extraordinaire constituerait une reconnaissance de leur qualité de juger égale aux membres de l'institution. Je précise que cette proposition est unanimement soutenue par ces derniers, y compris par ceux qui sont les plus attachés à certaines traditions.

Quant à l'intégration, c'est une autre question.

L'amendement n° COM-53 rectifié est adopté.

Article 56

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Outre la reprise de la disposition permettant l'affectation de présidents de juridictions administratives ou assimilées au Conseil d'Etat, auprès de la mission d'inspection des juridictions administratives, l'amendement n° COM-54 rectifié propose la création des emplois de premier vice-président d'un tribunal administratif comptant au moins huit chambres, et de premier vice-président dans chacune des huit cours administratives d'appel. Seraient ainsi améliorées les perspectives de carrière de ces personnels dont nous avons un réel besoin.

L'amendement n° COM-54 rectifié est adopté.

Article additionnel après l'article 56

M. Michel Delebarre. - L'amendement n° COM-74 propose de reconnaitre comme magistrats les conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, l'article L. 231-3 du code de justice administrative disposant déjà qu'ils exercent des « fonctions de magistrats ».

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cet amendement, dont la portée est essentiellement symbolique, est très attendu par les membres du corps qui considèrent, à juste titre, que les ambiguïtés actuelles nuisent à la clarté et à la lisibilité de leur statut et jettent une ombre sur leur qualité effective de magistrat.

Même si je déplore que l'examen des dispositions relatives aux juridictions administratives et financières n'ait pu avoir lieu dans le cadre d'un projet de loi spécifique,  je suis favorable à cet amendement.

M. Alain Richard. - Il y a les symboles, mais il y a aussi le droit. N'oublions pas que les magistrats de l'ordre administratif demeurent des fonctionnaires chargés d'une fonction juridictionnelle pour certaines catégories de litiges, ce qui conduit à leur conférer certaines compétences. Mais constitutionnellement, il n'y a pas de séparation des pouvoirs entre le pouvoir exécutif et la justice administrative ; dans le cas inverse, les dispositions relatives à cette dernière relèveraient de la loi organique et non de la loi ordinaire. Quelle que soit l'importance du symbole, il ne changera rien à cette situation.

M. Jean-René Lecerf. - L'on pourrait aussi se demander si les procureurs sont eux aussi réellement des magistrats - ce sur quoi s'interroge la Cour de Strasbourg - ou encore revenir à ces propos de Michel Debré, dont nous fêtons cette année le centenaire de la naissance, qui affirmait qu'il n'existait pas de magistrats administratifs mais simplement des fonctionnaires exerçant le métier de juge.

Il me semble que beaucoup de temps a passé depuis, et que l'évolution des choses justifie l'amendement qui nous est proposé.

M. Michel Delebarre. - La grandeur du politique n'est-elle pas d'ériger le symbole en acte législatif ?

M. Jean-Jacques Hyest. - Mais rien n'est pire qu'une loi symbolique sans efficacité.

M. Jean-Pierre Michel. - Je partage l'opinion exprimée par Alain Richard, mais la situation n'est-elle pas identique pour les membres des juridictions financières ?

M. Alain Richard. - Le code des juridictions financières est plus affirmatif à propos de ces derniers.

L'amendement n° COM-74 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-55 vise à faciliter la mobilité des présidents de tribunaux administratifs et de cours administratives d'appel en limitant à sept le nombre d'années passées à la tête d'une même juridiction.

L'amendement n° COM-55 est adopté.

Article 57

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-56 rectifié vise à assortir de garanties l'extension des détachements de fonctionnaires dans le corps des magistrats des chambres régionales des comptes. A cette fin, elle tient compte de la jurisprudence du Conseil d'Etat selon laquelle le niveau de recrutement de ces fonctionnaires devait être celui atteint à l'issue de la scolarité suivie en principe pour les magistrats des chambres, en l'occurrence celle de l'ENA, et non celui du diplôme requis pour accéder par concours au corps d'origine du fonctionnaire détaché.

L'amendement n° COM-56 rectifié est adopté.

Article additionnel après l'article 57

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'objet de l'amendement n° COM-54 rectifié est d'autoriser la participation des magistrats des chambres régionales aux travaux de la Cour des comptes, notamment aux enquêtes communes ou aux travaux d'évaluation relatifs aux politiques conduites conjointement par l'Etat et les collectivités. La Cour des comptes a beaucoup insisté pour pouvoir ainsi bénéficier pleinement des compétences très précieuses des conseillers des chambres régionales.

L'amendement n° COM-57 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-58 propose de porter de 40 à 45 ans l'âge minimal requis pour être nommé conseiller maître au tour extérieur à la Cour des comptes, revenant ainsi à la règle qui prévalait en 2006. Il s'agirait d'un alignement sur l'âge requis pour être nommé conseiller d'Etat.

M. Christophe Béchu. - Quitte à procéder à un alignement, j'aurais préféré que l'on abaissât à 40 ans l'âge requis pour être nommé conseiller d'Etat.

M. Alain Richard. - J'attire votre attention sur le fait que ce type de mesures d'âge est désormais encadré par une jurisprudence très stricte, exigeant qu'elles soient justifiées par la nécessité de disposer d'une certaine expérience. Faute de quoi, ces dispositions peuvent être censurées. L'on voit ainsi de plus en plus souvent des dispositions réglementaires comparables être annulées par le juge.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Que pourrions-nous modifier alors pour prévenir un tel risque ?

M. Alain Richard. - Je souhaitais simplement rappeler que cette mesure, que j'approuve, pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel s'il ne lui apparaissait pas qu'elle est justifiée par la nécessité de l'expérience.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Nous ferons donc figurer cela plus clairement dans la présentation des motifs du texte.

M. Jean-Jacques Hyest. - Nous allons créer des dépressions chez les quelques quadragénaires concernés par cette mesure.

M. Alain Richard. - Il n'y en a guère...

L'amendement n° COM-58 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'objet de l'amendement n° COM-59 est de diversifier le vivier des recrutements effectués par la voie du tour extérieur dans le grade de conseiller référendaire à la Cour des comptes.

L'amendement n° COM-59 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-60 a pour objet de compléter les attributions des experts mentionnés à l'article L. 141-4 du code des juridictions financières en les faisant participer, sur une base contractuelle, à temps plein ou à temps partiel, aux missions dévolues aux magistrats en matière d'évaluation des politiques publiques.

M. Christian Cointat. - Je suis dubitatif, car si l'expert peut participer à la délibération, il risque de ne plus disposer alors de la même liberté d'expression. Il me semble préférable de bien distinguer la fonction d'expert de celle du décideur.

L'amendement n° COM-60 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'actuelle répartition des présidences de chambres régionales des comptes entre les membres de la Cour de comptes et les conseillers des chambres régionales se révélant inopérante, l'amendement n° COM-61 propose de la supprimer.

L'amendement n° COM-61 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - La loi de finances rectificative n° 2011-900 du 29 juillet 2011 prévoyant le recrutement complémentaire de conseillers de chambres régionales des comptes jusqu'au 31 décembre 2016, l'amendement n° COM-62 propose de supprimer cette date limite, afin d'aligner en partie le dispositif sur celui prévu pour les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

M. Jean-René Lecerf. - Je suis défavorable à cet amendement qui consiste à modifier une loi votée il y a quelques mois. D'ici à 2016, nous avons le temps de voir.

M. Patrice Gélard. - Il ne faut modifier la loi que d'une main tremblante écrivait Montesquieu.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Je précise que cette date de 2016 était le report d'une précédente date limite fixée à 2011 par une loi de 2001.

L'amendement n° COM-62 est adopté.

Articles additionnels après l'article 60

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Cet amendement précise que, lorsqu'il siège en tant qu'organisme supérieur de recours en matière disciplinaire, d'avancement et en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, le conseil supérieur de la fonction publique d'Etat doit être composé de façon paritaire. Avis favorable.

L'amendement n° COM-15 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-75 du gouvernement tire les conséquences de la réforme du conseil supérieur de la fonction publique territoriale pour l'attribution des sièges aux organisations syndicales au sein des conseils régionaux d'orientation (CRO), placés auprès des délégués régionaux du CNFPT, qui les président.

Afin de concilier les exigences du bon fonctionnement des CRO et la représentativité des organisations syndicales, il propose d'attribuer les sièges à ces dernières en fonction du nombre de voix qu'elles ont obtenues lors du renouvellement général des représentants du personnel aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics dans le ressort de la délégation, par ordre décroissant jusqu'à épuisement des sièges à pourvoir. Avis favorable.

M. Pierre-Yves Collombat. - Cette proposition me semble assez classique et assez cohérente pour pouvoir être adoptée.

M. Alain Richard. - Il n'est toutefois pas évident de parvenir, d'une part, à assurer la représentativité de toutes les organisations syndicales alors que leur nombre est fluctuant d'une élection à l'autre et, d'autre part, à veiller à ce que l'effectif du CRO demeure limité.

L'amendement n° COM-75 est adopté.

Article 61

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-18 prévoit une nouvelle habilitation de neuf mois après celle obtenue par la loi du 5 juillet 2010 pour achever la codification en matière de fonction publique, notamment en prenant en compte les conséquences du présent projet de loi. Avis favorable.

L'amendement n° COM-18 est adopté.

Article additionnel après l'article 62

M. Jean-Paul Amoudry. - L'amendement n° COM-21 a pour objet de faciliter le versement des allocations chômage dans certains cas, par exemple lorsque les collectivités ne peuvent que licencier des fonctionnaires en disponibilité dans la mesure où elles sont dans l'impossibilité de les réintégrer. Dans la mesure où il s'agit souvent de petites collectivités pour lesquelles le paiement de ces indemnités peut s'avérer problématique, l'amendement propose de faire obligation aux centres de gestion de souscrire un contrat d'assurance couvrant ce risque, et d'offrir aux collectivités la possibilité d'en bénéficier. Il repose sur l'idée que le centre de gestion, du fait de la mutualisation de l'ensemble des demandes des collectivités auxquelles il procéderait, serait à même de leur faire bénéficier de meilleurs tarifs, car mieux négociés avec les assureurs.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - Les collectivités disposent déjà de la possibilité de couvrir ce risque, soit par la souscription d'une assurance personnelle, soit par leur adhésion à la convention UNEDIC. Il ne semble pas raisonnable d'aller au-delà. Avis défavorable.

L'amendement n° COM-21 est rejeté.

Article additionnel après l'article 63

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-16 tire, pour le régime du congé spécial, les conséquences du report de la limite d'âge opéré par la réforme des retraites du 9 novembre 2010, en prévoyant un régime transitoire applicable aux fonctionnaires déjà en congé spécial et à ceux dont le congé spécial sera arrivé à terme entre le 1er juillet 2011 et la date d'entrée en vigueur de la présente loi. C'est une mesure d'équité, à laquelle je suis favorable.

L'amendement n° COM-16 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-17 propose d'aligner sur deux points particuliers le régime disciplinaire de la fonction publique territoriale sur celui des deux autres fonctions publiques, en ce qui concerne l'exclusion temporaire de fonction assortie d'un sursis. Avis favorable.

L'amendement n° COM-17 est adopté.

Mme Catherine Tasca, rapporteur. - L'amendement n° COM-19 tire les conséquences de la réforme des retraites du 9 novembre 2010. Il propose d'aligner le régime des agents publics ayant la qualité de travailleur handicapé sur celui du régime général d'assurance vieillesse, en abaissant l'âge d'ouverture des droits à retraite des travailleurs handicapés. Avis favorable.

L'amendement n° COM-19 est adopté.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article additionnel après Article 2

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Le Gouvernement

4

Situation des contractuels d'un établissement désinscrit de la liste prévue par l'article 3-2° de la loi du 11 janvier 1984

Adopté

Article 3
Condition d'ancienneté pour les contrats à durée déterminée
et inclusion des agents « CDIsables »

Mme Tasca, rapporteur

27

Amélioration rédactionnelle

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

70

Prise en compte des contrats sur des besoins temporaires dans la condition d'ancienneté

Adopté

M. Favier

2

Elargissement de la notion d'employeur

Rejeté

M. Leconte

23

Elargissement de la notion d'employeur

Rejeté

Article 4
Modes de titularisation

M. Favier

3

Liste par décret des emplois offerts aux concours réservés

Rejeté

Article 5
Corps accessibles à chaque candidat et condition de nomination et de classement

Mme Tasca, rapporteur

28

Détermination des corps accessibles

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

71

Régularisation au regard du cumul d'activités

Adopté

M. Favier

5

Détermination des corps accessibles par les fonctions exercées au 31 mars 2011

Retiré

Article 7
Transformation d'un CDD en CDI

M. Leconte

24

Notion d'employeur

Satisfait ou sans objet

Article 8
Modification des fonctions assurées dans le cadre du CDI

M. Favier

6

Garantie de rémunération

Satisfait ou sans objet

Article 9
Dérogation temporaire à la règle du recrutement statutaire

Mme Tasca, rapporteur

29

Harmonisation rédactionnelle

Adopté

Article 10
Conditions d'accès au dispositif de titularisation

Mme Tasca, rapporteur

30

Rectification de référence

Adopté

Article 11
Conditions d'ancienneté pour les contrats à durée déterminée
et inclusion des agents « CDIsables »

Mme Tasca, rapporteur

31

Amélioration rédactionnelle

Adopté

Article 13
Programme pluriannuel d'accès à l'emploi titulaire

Mme Tasca, rapporteur

32

Rectification de référence

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

33

Précision rédactionnelle

Adopté

Article 14
Mise en oeuvre du programme pluriannuel d'accès à l'emploi titulaire

Mme Tasca, rapporteur

34

Détermination des corps accessibles

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

35

Faculté de confier l'examen de la recevabilité des dossiers à la commission d'évaluation professionnelle

Adopté

M. Favier

8

Détermination de la catégorie de titularisation par les fonctions exercées au 31 mars 2011

Rejeté

M. Favier

9

Institution d'un jury pour les sélections professionnelles

Rejeté

Article 15
Modalités d'organisation des sélections professionnelles

Mme Tasca, rapporteur

36

Composition de la commission d'évaluation professionnelle

Adopté

M. Favier

10

Institution de jurys pour les sélections professionnelles

Tombe

Article additionnel après Article 18

Mme Tasca, rapporteur

72

Application du dispositif de titularisation aux contractuels des administrations parisiennes

Adopté

Article 21
Conditions d'ancienneté pour les contrats à durée déterminée
et inclusion des agents « CDIsables »

Mme Tasca, rapporteur

37

Amélioration rédactionnelle

Adopté

M. Favier

12

Notion d'employeur

Rejeté

Article 22
Modes de titularisation

Mme Tasca, rapporteur

38

Rectification rédactionnelle

Adopté

Article 23
Corps accessibles à chaque candidat - Conditions de nomination et de classement

Mme Tasca, rapporteur

39

Détermination des corps accessibles

Adopté

M. Favier

13

Détermination des corps accessibles
par les fonctions exercées au 31 mars 2011

Tombe

Article 27
Réorganisation textuelle

Mme Tasca, rapporteur

73

Rectification de références

Adopté

Article additionnel après Article 27

Le Gouvernement

7

Sécurisation de la situation des contractuels des établissements et institutions non soumis
à l'emploi statutaire

Adopté

Article 30
Clarification du régime du recours au contrat

Mme Tasca, rapporteur

67

Elargissement de 3 à 4 mois des interruptions de contrats qui autorisent l'accès au CDI

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

40

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

41

Précision rédactionnelle

Adopté

M. Leconte

22

Modalités de non-renouvellement d'un contrat

Rejeté

Article 33
Recrutement temporaire d'agents contractuels sur des emplois non permanents

Mme Tasca, rapporteur

42

Clarification rédactionnelle

Adopté

Article 34
Recrutement de contractuels sur des emplois permanents

Mme Tasca, rapporteur

43

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

44

Précision rédactionnelle

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

45

Clarification rédactionnelle

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

68

Elargissement de 3 à 4 mois de la durée
des interruptions de contrats qui autorisent l'accès au CDI

Adopté

Article 35
Coordinations

Mme Tasca, rapporteur

46

Coordination

Adopté

Article additionnel après Article 38

M. Portelli

25

Création de commissions consultatives paritaires pour les contractuels
des collectivités territoriales

Adopté

Article 39
Assouplissement des modalités de CDIsation

Mme Tasca, rapporteur

69

Allongement de 3 à 4 mois de la durée
des interruptions entre deux contrats
qui autorisent l'accès au CDI

Adopté

Article 43
Assouplissement des modalités de comparabilité entre corps et cadres d'emplois
pour l'accès par la voie du détachement ou de l'intégration

Mme Tasca, rapporteur

47

Précision rédactionnelle

Adopté

Article 44
Extension des droits à détachement et à intégration aux agents de la DGSE

Mme Tasca, rapporteur

48

Actualisation de références

Adopté

Article 48
Extension des cas de suspension de la période d'inscription sur une liste d'aptitude

Mme Tasca, rapporteur

49

Simplification rédactionnelle

Adopté

Article 49
Clarifications concernant le détachement

Mme Tasca, rapporteur

63

Coordination

Adopté

Article 50
Mises à disposition de collectivités étrangères

Mme Tasca, rapporteur

50

Clarification de la mise à disposition
auprès d'états fédérés

Adopté

Article 52
Intégration directe - Coordination

Mme Tasca, rapporteur

51

Harmonisation rédactionnelle

Adopté

Articles additionnels après Article 52

Le Gouvernement

11

Date d'effet du classement des personnels
du corps des permanenciers auxiliaires
de régulation médicale en catégorie B

Adopté

Le Gouvernement

14

Allongement de trois ans de la période d'ouverture des trois fonctions publiques
aux fonctionnaires de la Poste

Adopté

CHAPITRE III Dispositions relatives au recrutement et à la mobilité des membres du Conseil d'État et du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et des membres du corps des chambres régionales des comptes

Mme Tasca, rapporteur

52

Cohérence rédactionnelle

Adopté

Article 53
Recrutement obligatoire parmi les membres du corps des TA et CAA
d'au moins un maître des requêtes chaque année (et facultativement d'un 2ème)
et d'un conseiller d'État tous les deux ans

Mme Tasca, rapporteur

64

Deuxième nomination obligatoire d'un membre des TA et CAA
au grade de maître des requêtes

Adopté

Article additionnel après Article 53

Mme Tasca, rapporteur

53

Statut de Maître des requêtes en service extraordinaire au Conseil d'Etat

Adopté

Article 56
Affectation de présidents des tribunaux administratifs
et des cours administratives d'appel auprès de la mission d'inspection

Mme Tasca, rapporteur

54 rect

Création d'un emploi de premier vice-président dans les CAA et dans les TA
de plus de huit chambres

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 56

M. Delebarre

74

Consécration du statut de
magistrat administratif

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

55

Limitation du nombre d'années à la tête d'une même juridiction administrative

Adopté

Article 57
Détachement dans le corps des chambres régionales des comptes

Mme Tasca, rapporteur

56

Encadrement du niveau
des fonctionnaires détachés
dans les chambres régionales des comptes

Adopté

Articles additionnels après Article 57

Mme Tasca, rapporteur

57

Participation des magistrats de chambres régionales des comptes à des enquêtes communes avec la Cour des Comptes

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

58

Fixation à 45 ans de l'âge minimal
pour être nommé Conseiller maître
à la Cour des Comptes

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

59

Diversification du vivier de recrutement par la voie du tour extérieur à la Cour des Comptes

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

60

Statut de conseiller-expert
près la Cour des Comptes

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

61

Suppression des quotas au sein des présidents des chambres régionales des comptes

Adopté

Mme Tasca, rapporteur

62

Pérennisation du dispositif
de recrutement des conseillers de
chambres régionales des comptes

Adopté

Articles additionnels après Article 60

Le Gouvernement

15

Composition du CSFPT siégeant
comme organe supérieur de recours

Adopté

Le Gouvernement

75

Attribution des sièges des organisations syndicales dans les conseils régionaux d'orientation

Adopté

Article 61
Prolongation du délai d'habilitation législative
pour codifier le droit de la fonction publique

Le Gouvernement

18

Nouvelle habilitation législative pour achever la codification du droit de la fonction publique

Adopté

Article additionnel après Article 62

M. Amoudry

21

Souscription de contrats d'assurance chômage par les centres de gestion

Rejeté

Articles additionnels après Article 63

Le Gouvernement

16

Conséquences de la réforme des retraites de 2010 sur la durée des congés spéciaux accordés avant le 1er janvier 2012

Adopté

Le Gouvernement

17

Abaissement de la durée minimale du sursis
de l'exclusion temporaire de fonctions
dans la fonction publique territoriale

Adopté

Le Gouvernement

19

Alignement du régime des travailleurs handicapés de droit public
sur celui du régime général

Adopté

Contrôle de la mise en application des lois relevant de la commission - Communication

La commission examine le rapport sur la mise en application des lois promulguées entre le 1er octobre 2010 et le 13 juillet 2011.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Vous avez reçu le bilan annuel de la mise en application des lois, dressé cette année selon des modalités nouvelles : jusqu'à présent, les commissions permanentes du Sénat examinaient au 30 septembre les mesures réglementaires relatives aux lois adoptées lors de la session qui s'achevait à cette date ; en accord avec le Gouvernement, il a été décidé d'examiner cette année les lois promulguées entre le 1er octobre 2010 et le 13 juillet 2011, et de prendre en compte les mesures réglementaires d'application prises jusqu'au 31 décembre 2011.

Avec une période de référence de promulgation des lois plus courte et une période plus longue pour l'adoption de mesures réglementaires, les nouvelles références favorisent mécaniquement un meilleur taux d'application. Par un courrier adressé le 22 juillet au président de la commission des lois, alors M. Jean-Jacques Hyest, le Gouvernement avait souhaité parvenir à un taux de 100 % avant la fin du mois de janvier 2012 pour les lois votées jusqu'au 13 juillet 2011. Cet objectif est loin d'être atteint pour notre commission, puisque le taux d'application se limite à 46 %. Malgré sa progression, ce niveau n'est pas satisfaisant, d'abord parce qu'il confère à notre commission le plus faible taux de mise en application - alors que nous sommes parmi les plus chargés législativement du Sénat - ensuite parce que les nouvelles périodes de référence expliquent largement cette amélioration.

Cette année encore, l'activité de notre commission a été particulièrement chargée, avec 23 lois examinées et promulguées pendant la période de référence - dont sept d'origine parlementaire, quatre propositions de loi en navette à l'Assemblée nationale, une proposition de loi en instance d'examen en séance publique et trois propositions de loi examinées en commission puis en séance publique mais pas encore adoptées. En outre, la commission a publié dix rapports et rendu treize avis budgétaires, outre trois avis sur des textes examinés au fond par d'autres commissions. Enfin, au cours de la période de référence, notre commission a voté une proposition de résolution européenne.

Parmi les 23 lois promulguées, dix sont d'application directe, quatre ont été rendues applicables pendant la période de référence, et neuf ne le sont que partiellement. Je souligne que la mise en oeuvre des textes adoptés préoccupe nombre de nos collègues : ainsi, la seule loi du 24 novembre 2009, dite « loi pénitentiaire », a motivé seize questions écrites adressées au Gouvernement par des sénateurs depuis le 1er octobre 2010.

Enfin, j'attire votre attention sur quatre textes promulgués avant le 1er octobre 2010, mais dont la mise application reste incomplète : la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs ; la loi relative à la législation funéraire ; la loi relative à la mobilité et au parcours professionnel dans la fonction publique ; la loi tendant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale.

Le cas échéant, vous pouvez vous fonder sur le rapport pour interroger le Gouvernement : toute intervention sur ce sujet ira dans le bon sens, nonobstant les travaux conduits par la nouvelle commission sénatoriale sur l'application des lois.

M. Christian Cointat. - Nous travaillons comme des stakhanovistes pour voter des textes tardivement appliqués ! Dans certains pays voisins, les parlementaires disposent des projets de mesures d'application au moment où ils doivent se prononcer. Il semble que l'élaboration de semblables dossiers soit constitutionnellement impossible en France, mais ne pourrait-on considérer que l'étude d'impact devant accompagner tout projet de loi devrait comporter aussi les textes d'application ? Nous finissons par modifier des lois non concrétisées faute de dispositions réglementaires !

Il faudrait trouver les voies et moyens de ne voter que des lois dont nous sommes sûrs qu'elles seront mises en oeuvre.

M. Pierre-Yves Collombat. - Certes, mais la finalité de certaines se limite à l'envoi d'un message à l'opinion !

M. Christian Cointat. - C'est votre programme ?

M. Pierre-Yves Collombat. - Même le Conseil d'État a observé que l'élaboration des lois constituait le moyen le moins onéreux pour régler un problème !

Mme Virginie Klès. - Ou créer une commission...

M. Pierre-Yves Collombat. - Quant aux études d'impact, elles sont parfaitement illusoires. Pensez à la réforme territoriale, aux économies alléguées pour justifier la création du conseiller territorial.

Nous participons à un spectacle. Je n'en suis pas ravi, mais il faut en avoir conscience.

Il est normal de protester, tout en sachant que nos paroles resteront lettre morte.

M. Christian Cointat. - Pour établir son pouvoir, le Parlement européen a utilisé le moindre petit bout de phrase pouvant le concerner. Il a ainsi refusé d'examiner les textes tant qu'il ne lui manquait ne serait-ce qu'une toute petite information.

M. Pierre-Yves Collombat. - Il y a une autre solution : ne pas voter toutes les lois.

M. Patrice Gélard. - Exactement.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il y a sans aucun doute trop de lois de pur affichage, alors que les situations à traiter requièrent exclusivement des moyens et de la volonté.

Une délégation de notre commission a été reçue il y a un certain temps au Conseil d'État. M. Renaud Denoix de Saint-Marc a présenté l'étude d'impact comme une solution merveilleuse. J'étais en désaccord avec lui, et je le reste, car il est impossible de produire une analyse neutre et objective d'un texte politique. À mon sens, puisque le Gouvernement dispose des moyens d'expertise, le Parlement devrait également en être doté. Pensez à une loi sur les OGM. Après tout, légiférer consiste à se prononcer sur les incidences d'une disposition législative.

M. André Reichardt. - Je préfère conserver mes illusions, car, lorsque j'ai entamé des études de droit, je ne pensais pas me lancer dans une filière artistique.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - De communication.

M. André Reichardt. - Elaborer la loi ne me semble pas assimilable à la participation à un spectacle.

Il n'est pas scandaleux de constater aujourd'hui la publication de 46 % des textes d'application requis par les lois votées jusqu'au 13 juillet 2011. Ce qui serait scandaleux, ce serait d'en être là au 31 décembre 2012. Laissons du temps au temps ! Au demeurant, le peu d'intérêt de certaines dispositions législatives explique sans doute que l'administration hésite ou éprouve des difficultés à produire des textes réglementaires d'application.

M. Jean-René Lecerf. - Je m'interroge sur l'articulation du bilan établi par notre commission avec le travail de la nouvelle commission présidée par M. Assouline.

Bien que je n'en sois pas membre, j'ai assisté à une réunion importante de cette commission, où j'ai appris que les quatre derniers décrets d'application nécessités par la loi pénitentiaire étaient sur le point d'être publiés. Il serait dommage que notre travail soit accaparé.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est pourquoi nous avons deux corapporteurs pour l'application de la loi pénitentiaire inscrite au programme de la commission sénatoriale d'application des lois : Mme Borvo Cohen-Seat, membre de la nouvelle commission et de la nôtre, et M. Jean-René Lecerf, qui siège uniquement dans la nôtre. Cette démarche, unique au Sénat, évitera de nous dessaisir. Au contraire, ces deux éminents commissaires fourniront un magnifique travail en commun. (Nombreuses marques d'approbation.)

M. Pierre-Yves Collombat. - Une autre solution consisterait à voter des textes d'application immédiate, sans truffer les articles de renvois à des décrets, voire à des décrets en Conseil d'État.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il y a trois ans, nous avions voté une disposition d'application immédiate revalorisant chaque année les sommes déposées au titre des contrats obsèques. Elle n'est toujours pas mise en oeuvre, car Bercy et les assureurs sont défavorables. Résultat : nous avons inséré une disposition identique dans la loi sur les droits des consommateurs.

Les collègues du groupe RDSE ont eu l'heureuse initiative de proposer un dispositif tendant à imposer la publication des textes réglementaires. Je l'ai soutenue, en pensant notamment au Distilbène.

Il est anormal qu'un Gouvernement puisse neutraliser une loi votée par le Parlement. Aucune sanction n'existe.

M. Christian Cointat. - C'est ce qui ne va pas.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Un seul recours existe : saisir le Conseil d'État.

M. Christian Cointat. - Et encore...

M. Jean-René Lecerf . - Nous ne sommes pas compétents pour le faire.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Parmi les lois votées au 13 juillet, 43,5 % étaient d'application directe. Le taux de 46 % concerne de fait les autres textes.

M. Patrice Gélard. - La loi que nous avons votée en 2000 pour créer une fondation n'a jamais vu le jour faute de textes d'application ; une disposition Warsmann y a mis fin, enterrant cette fondation sans fleurs ni couronnes avant qu'un décret n'institue une mini fondation. Résultat : la coopération en matière de droit comparé entre la France et les pays étrangers n'en est qu'à ses balbutiements et le Qatar -pressenti en l'espèce- n'y participe plus, je crois.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je connais votre attachement à cette fondation, que je serais très heureux de remettre sur le tapis. Nous pourrions saisir l'occasion d'un débat de contrôle.

M. Patrice Gélard. - Très bien !

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Vous pourriez poser une question orale avec débat au nom de la commission.

M. Patrice Gélard. - Volontiers.

Compte rendu du déplacement à Bruxelles

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Pour rendre compte du déplacement studieux effectué à Bruxelles les 9 et 10 novembre dernier, le rapport n'a pas été articulé autour de chaque entretien, mais structuré en fonction des trois thèmes abordés : la réforme de l'espace Schengen ; la proposition de directive relative au droit à un avocat dans le cadre pénal ou après une arrestation ; le projet d'instauration d'un parquet européen.

La commission autorise-t-elle la publication du rapport ?

La commission autorise la publication du rapport.

Questions diverses

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je suis très heureux de vous annoncer que la proposition de loi Pélissard sur l'intercommunalité, reprenant pour l'essentiel une proposition que j'avais déposée, est inscrite à l'ordre du jour de la commission des lois de l'Assemblée nationale pour le 25 janvier. Elle sera discutée par les députés en séance publique le 9 février.

Après que je suis intervenu à de nombreuses reprises sur ce thème, le Premier ministre s'était engagé auprès de l'Association des maires de France à faire progresser le texte. Je souhaite son adoption avant la fin de la session, ce qui rendra service à nombre d'élus locaux.

M. Christian Cointat. - Très bien ! -

Mercredi 18 janvier 2012

- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président,
et M. Jean-Pierre Michel, vice-président -

Accord PNR avec les Etats-Unis - Communication

La commission entend une communication de M. Sutour, président de la commission des affaires européennes, sur la proposition de résolution présentée par la commission des affaires européennes relative à l'accord PNR avec les Etats-Unis.

M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - La commission des affaires européennes a adopté en décembre dernier une proposition de résolution sur l'accord avec les Etats-Unis concernant l'utilisation et le transfert des données PNR (passenger name record) des passagers des vols aériens au ministère américain de la sécurité intérieure.

Nous avions déjà étudié le dossier en 2004 puis en 2006 et en 2007. En outre, ici- même, sur le rapport de M. Yves Détraigne, nous avions examiné le projet de PNR européen - j'avais proposé une résolution européenne au nom de la commission des affaires européennes.

Les délais d'examen de l'accord avec les Etats-Unis étaient très courts : nous avons été saisis le 1er décembre, pour une adoption par le Conseil européen du 13 décembre. Néanmoins, le Parlement européen devra aussi donner son avis, conformément au traité de Lisbonne. C'est une garantie essentielle dans la protection des libertés fondamentales. Les parlementaires européens auront connaissance de notre position avant de se prononcer.

Les données PNR sont des informations fournies par les passagers et recueillies par les transporteurs aériens pour la réservation et l'enregistrement : dates de voyage, itinéraire, informations relatives au billet, adresse et numéro de téléphone, agence de voyage, informations relatives au paiement et aux bagages, numéro de siège. Elles sont principalement utilisées pour identifier les personnes susceptibles d'intéresser les services répressifs. Leur exploitation dans la lutte contre le terrorisme et la grande criminalité est jugé utile par les services concernés. Mais il y a débat sur ce point.

En dépit du droit d'accès prévu et des corrections ou rectifications apportées, le texte n'offre pas les garanties nécessaires. L'accord du même type signé tout récemment avec l'Australie nous a paru beaucoup plus précis et rigoureux sur la protection des données personnelles. Je souligne que la proposition de résolution a été votée à l'unanimité par la commission des affaires européennes.

Les données PNR pourront être utilisées pour la lutte contre le terrorisme mais aussi pour la répression d'autres infractions passibles d'une peine d'emprisonnement d'au moins trois années et de nature transnationale. Une infraction « transnationale »  est entendue au sens large, incluant l'infraction commise dans un pays par un auteur qui se trouve dans un autre pays ou qui « a l'intention de se rendre dans un autre pays ». Les dossiers passagers pourront aussi être utilisés en cas de menace grave, ou pour protéger les intérêts vitaux d'une personne, ou si une juridiction l'impose, ce qui élargit considérablement le champ !

Les dossiers passagers pourront également être mis au service de la politique américaine de l'immigration, en particulier pour identifier les personnes « qui feraient l'objet d'un interrogatoire ou d'un examen plus approfondis en arrivant aux Etats-Unis ou en quittant le pays ». Cette extension ne nous a pas paru acceptable.

L'utilisation des données sensibles, celles qui indiquent l'origine raciale, ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques, l'appartenance syndicale, les données sur la santé ou la vie sexuelle, n'est pas totalement exclue. Elle pourra être autorisée dans des circonstances exceptionnelles, menace sur la vie d'une personne par exemple. La commission des lois a toujours été opposée à une telle exploitation des données sensibles.

L'accord prévoit la conservation des dossiers passagers dans une base de données active jusqu'à cinq ans, puis dans une base de données dormante pour encore dix ans, bien au-delà de ce qu'avait préconisé le Sénat pour le projet de PNR européen : deux fois trois ans. Cette durée de quinze ans nous semble disproportionnée par rapport au but poursuivi.

Un droit de recours administratif et judiciaire sera ouvert quels que soient la nationalité, le pays d'origine ou le lieu de résidence. Garantie importante pour les ressortissants européens, en théorie. Mais comment sera-t-elle mise en oeuvre ? L'accord prévoit que cette faculté s'exercera conformément au droit des Etats-Unis, qui réserve les possibilités de recours aux seuls citoyens et résidents permanents, et les autorités américaines ont toujours refusé de modifier leur législation sur ce point.

Les conditions de partage des données avec d'autres autorités publiques nationales ne nous satisfont pas non plus. Lesquelles sont concernées ? L'accord avec l'Australie n'a autorisé un tel partage des données qu'avec des autorités publiques australiennes dont la liste figure en annexe.

Sur le point crucial du transfert des données à des Etats tiers, l'accord semble bien flou. Le transfert se fera « dans des conditions compatibles avec l'accord » et « conformément à des accords clairs prévoyant des garanties en matière de respect de la vie privée ». Le transfert ultérieur des dossiers passagers et la méthode de transmission seront établis ultérieurement, dans le cadre prévu par l'accord. Faible garantie...

En conclusion, ce nouvel accord ne répondait pas aux priorités retenues par le Sénat pour l'utilisation de données PNR. Manifestement, dans la négociation d'accords avec des tiers, l'Union européenne ne parvient pas à faire prévaloir des standards homogènes et conformes à ses propres règles et ses valeurs. La proposition de résolution réaffirme donc les positions du Sénat sur ce sujet essentiel pour les libertés fondamentales. Souhaitons que nos collègues du Parlement européen soient sensibles à nos arguments.

J'avais été saisi par le Gouvernement d'une demande d'examen en urgence portant sur la signature de ce texte lors de la réunion du Conseil du 13 décembre. Or, pour leur garantir de pouvoir adopter des résolutions en temps utile, les assemblées disposent d'un droit de « réserve d'examen parlementaire ». L'Assemblée ou le Sénat ont ainsi un délai pour manifester leur intention d'adopter une résolution : huit semaines pour un projet d'acte législatif de l'Union, quatre pour les autres actes. Le Gouvernement doit, tant que le délai n'a pas expiré, éviter de prendre une position définitive au Conseil européen, voire proposer un report du vote. Lorsque les délais sont contraints, le gouvernement me sollicite - de même que mon homologue de l'Assemblée nationale, Pierre Lequiller - pour que la réserve d'examen parlementaire puisse être levée en urgence.

Je n'aime pas cette procédure. Quand les circonstances l'exigent, je suis prêt à donner mon accord, s'il s'agit de textes mineurs. Ce n'est pas le cas ici et la commission des affaires européennes était unanime à exprimer des réserves sur le texte. J'ai donc refusé l'examen en urgence et le Gouvernement a dû s'abstenir lors du Conseil européen du 13 décembre. Ce sera un message à l'intention du Parlement européen qui va se prononcer dans les prochaines semaines. Le Conseil devra ensuite, si le Parlement l'a approuvé, autoriser la conclusion de l'accord. Si un certain nombre d'Etats veulent bloquer le processus, ils le peuvent s'ils disposent de suffisamment de voix au Parlement européen. C'est ce qui a failli arriver puisque l'Allemagne s'est abstenue. J'ajoute que les parlements nationaux ont des leviers d'action, même sur un texte approuvé par le Conseil européen.

La proposition de résolution a été votée il y a plus de quatre semaines par la commission des affaires européennes : elle est donc devenue proposition de résolution du Sénat.

M. Pierre-Yves Collombat. - Pourquoi une simple réserve alors que vous étiez opposé à l'accord ? Et maintenant, que va-t-il se passer : cet accord inacceptable s'imposera-t-il à tous les Etats ?

M. Simon Sutour. - Lever la réserve est une possibilité dont je dispose comme président de la commission, lorsque le gouvernement le sollicite. J'accède souvent à cette demande mais en l'occurrence je ne l'ai pas fait, si bien que le gouvernement a dû demander au Conseil le renvoi du texte à un examen ultérieur. A présent le Parlement européen va devoir donner son avis.

M. Pierre-Yves Collombat. - A-t-il le pouvoir de s'y opposer ?

M. Simon Sutour. - Oui.

M. Pierre-Yves Collombat. - Mais les gouvernements peuvent passer outre ?

M. Simon Sutour. - Oui. Les choses ne sont du reste pas si simples. Les Etats-Unis font pression pour que l'accord soit adopté, ou ils n'accepteront plus nos ressortissants. L'accord avec l'Australie, en revanche, était un bon accord.

M. Yves Détraigne. - Depuis plusieurs années, sur ces questions, la commission des lois a suivi unanimement la commission des affaires européennes. Elle a toujours été attentive à la protection de la vie privée et des données personnelles. Elle a jugé que trois ans de conservation étaient bien suffisants, les services de renseignement ne manifestant pas le souhait d'une plus longue durée. Suivons la position des affaires européennes et restons prudents car, derrière le PNR, il y a le fichage des personnes.

M. Jean Louis Masson. - Les Etats-Unis, comme en témoignent Abou Ghraib ou Guantanamo, n'ont pas la même conception des droits de l'homme que nous. L'accord signé peut déboucher sur un fichage ethnique, ne l'oublions pas. Si la majorité des Etats européens se décidaient à suivre les Américains, un Etat, une association, auraient-ils la faculté de contester la conformité de l'accord aux principes fondateurs de l'Union européenne ? Personne ne se gêne pour critiquer la Hongrie sur ce fondement.

M. Simon Sutour. - Le problème est différent. La Hongrie est un Etat membre, ici nous parlons d'un partenaire extérieur.

M. Jean Louis Masson. Si nous signons, nous serons complices des Etats-Unis.

M. Simon Sutour. - Il ne s'agit pas de n'importe quel partenaire. Le Conseil européen a approuvé l'accord, la France s'est abstenue et j'avoue mon contentement que le refus de lever la réserve ait eu cette conséquence. Notre rôle est de dire clairement que tout cela n'est pas suffisant. Quant à savoir si un Etat seul ou des associations ont qualité pour agir, je ne saurais le dire.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous aurons prochainement une audition conjointe avec la commission des affaires européennes : nous entendrons Mme Viviane Reding, la vice-présidente de la Commission européenne, en charge de la justice en particulier, sur les litiges liés à internet. S'ils sont jugés selon le droit du pays où l'opérateur internet a son siège, par exemple le droit irlandais, il en résultera de graves inconvénients pour les libertés. M. Sutour travaille à une résolution sur le sujet. Cette rencontre avec Mme Reding est nécessaire.

M. Simon Sutour. - Elle aura lieu le 21 février prochain et ce sera la première audition conjointe de nos deux commissions de la session. Je salue la remarquable disponibilité de Mme Reding à notre égard. Nous attendons les propositions concrètes de la Commission, et peut-être élaborerons-nous une proposition de résolution commune. Si tel était le cas, espérons que notre avis serait entendu.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il y a là un grave sujet, qui touche au champ de compétence de la Cnil et aux libertés personnelles.

Répression de la contestation de l'existence des génocides reconnus par la loi - Examen du rapport

La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Jean-Pierre Sueur sur la proposition de loi n° 229 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale, visant à réprimer la contestation de l'existence des génocides reconnus par la loi.

EXAMEN DU RAPPORT

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. - Nous sommes invités à nous prononcer sur la proposition de loi de Mme Valérie Boyer visant à réprimer la contestation de l'existence des génocides reconnus par la loi, adoptée par l'Assemblée nationale le 22 décembre 2011. Ce texte tend à punir d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende les personnes qui contestent ou minimisent de façon outrancière, publiquement, l'existence d'un ou plusieurs crimes de génocide, reconnus comme tels par la loi française.

En l'état du droit, le dispositif s'appliquerait aux personnes qui contestent ou minimisent l'existence du génocide arménien, seul reconnu comme tel par la loi du 29 janvier 2001. Mais il pourrait, à l'avenir, s'appliquer à la contestation d'autres génocides puisque des propositions de loi ou des amendements ont été déposés pour reconnaître officiellement le génocide tzigane pendant la Seconde Guerre mondiale, le génocide ukrainien de 1933-1934 ou encore le « génocide » entre guillemets vendéen de 1793-1794.

La proposition de loi pose la question des moyens dont dispose le pouvoir politique pour reconnaître solennellement les souffrances endurées par les victimes. En outre, quelles limitations à la liberté d'expression une société démocratique est-elle prête à accepter au nom de la protection de la mémoire et de la dignité des disparus ? L'intervention du législateur dans le champ de l'Histoire est-elle légitime ?

Les génocides et autres crimes contre l'humanité sont odieux, car au-delà des souffrances infligées aux victimes, ils remettent en cause l'identité et la part d'humanité de tout être humain et portent atteinte aux valeurs essentielles de nos civilisations. La contestation de ces crimes, parce qu'elle porte atteinte à la dignité des rescapés, encourt une réprobation morale : celle-ci doit-elle s'accompagner d'une condamnation pénale ? Telle est la question posée.

Ce n'est pas la première fois. Il y a quelques mois, le Sénat a examiné une proposition de loi de M. Serge Lagauche visant à réprimer la contestation du génocide arménien. Notre commission avait alors estimé à l'unanimité, sur le rapport du président Jean-Jacques Hyest, que cette proposition de loi présentait un risque sérieux d'atteinte à plusieurs principes fondamentaux reconnus par notre Constitution : le Sénat l'avait rejetée, adoptant une motion d'exception d'irrecevabilité présentée par notre commission.

Le présent texte soulève des interrogations identiques et les réserves que j'éprouvais alors n'ont pas varié : si la réalité du génocide arménien de 1915 est indéniable, la création d'un délit pénal de contestation ou de minimisation de ces faits soulève de nombreuses difficultés -légitimité de l'intervention du législateur dans le champ de l'Histoire et compatibilité avec plusieurs des principes fondamentaux de notre droit.

Je souhaite un débat apaisé. Il serait absurde d'affirmer que contester les lois mémorielles ou refuser de confondre le Parlement avec une juridiction fait le jeu du « négationnisme », qui est une attitude odieuse. Un tel amalgame n'est pas acceptable.

La loi du 29 janvier 2001, par laquelle la France a officiellement reconnu l'existence du génocide arménien de 1915, est la seule ayant expressément reconnu un génocide en tant que tel. Comme le rappelait il y a quelques mois M. Hyest, le déroulement des faits ayant conduit au génocide arménien de 1915 est largement connu. Si le nombre exact des victimes demeure difficile à établir avec certitude - entre 800.000 et 1,25 million de victimes - il est admis qu'il a conduit à la disparition des deux tiers de la population arménienne de l'Empire ottoman.

Les massacres de 1915 constituent le premier génocide du XXe siècle. Ce n'est toutefois qu'à l'issue de la Seconde Guerre mondiale que les notions de crime contre l'humanité et de génocide sont devenues des concepts juridiques autonomes : le crime contre l'humanité a été défini pour la première fois par le statut du tribunal de Nuremberg annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 ; et le génocide, par la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948.

Le droit pénal français s'est très largement inspiré de ces définitions. Pour l'essentiel, les éléments matériels constituant le crime de génocide ou les autres crimes contre l'humanité correspondent à des infractions réprimées par ailleurs par le code pénal, -tels qu'assassinats, tortures, violences-, qui prennent la qualification de génocide ou de crime contre l'humanité en présence d'un élément moral spécifique : l'exécution d'un plan concerté, guidé par des motifs idéologiques et tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d'un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire. Le génocide, comme les autres crimes contre l'humanité, est puni de la réclusion criminelle à perpétuité. Il est imprescriptible.

En l'état actuel de la recherche historique, il apparaît que la qualification de génocide doit être appliquée aux massacres commis contre les populations arméniennes en 1915. Comme l'écrivait en 1998 notre collègue député René Rouquet dans son rapport sur la loi du 29 janvier 2001, « le caractère systématique, dans toutes les régions de Turquie, des tueries, des conversions forcées, de la mise à mort des déportés par épuisement et dans des conditions inhumaines, est établi grâce aux archives de nombreux pays. Ces témoignages montrent que la déportation (...) faisait partie d'un processus de destruction systématique, organisé et prémédité ».

Suivant l'exemple de l'Uruguay en 1965, une quinzaine de parlements étrangers, le Parlement européen et l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe ont officiellement reconnu l'existence du génocide arménien. Ce fut le cas en France avec la loi du 29 janvier 2001. Le débat ne porte donc plus sur ce point : il y a eu un génocide et nous éprouvons tous l'infini respect dû aux si nombreuses victimes et à un peuple qu'on a voulu briser, nier, anéantir.

En proposant de créer un délit de contestation ou de minimisation de faits historiques que la loi a qualifiés de crime de génocide, la présente proposition de loi invite à s'interroger sur la légitimité des « lois mémorielles ». A sept reprises entre 1990 et 2005, le Parlement a légiféré sur des périodes ou des acteurs de l'Histoire. Chaque fois, cela a suscité un large débat sur la légitimité de l'intervention du législateur dans le champ de la recherche historique. Laissez-moi citer Robert Badinter, lors de son audition par la mission d'information de l'Assemblée nationale sur les questions mémorielles : « Il faut mesurer (...) ce que peut signifier, pour les descendants de victimes de crimes contre l'humanité, un déni de mémoire. (...) Mais l'émotion et la compassion que l'on peut éprouver devant ce que Jaurès appelait `le long cri de la souffrance humaine' n'empêchent pas le juriste de faire preuve de distance. (...) La mémoire est nécessaire, c'est un devoir vis-à-vis des morts. (...) Mais une chose est la commémoration, une autre chose est le recours à la loi. »

Robert Badinter ajoutait : «  Il est un principe constitutionnel fondamental, que le Conseil a maintes fois rappelé : la loi n'est l'expression de la volonté générale que dans le respect de la Constitution. (...) S'agissant de la loi sur le génocide arménien, beaucoup se sont interrogés sur la compétence du Parlement français à légiférer sur un évènement historique qui est survenu il y a près d'un siècle dans un territoire étranger, sans qu'on ne connaisse ni victimes françaises, ni auteurs français. Mais l'important est ailleurs : (...) à l'évidence, l'article 34 de la Constitution ne permet pas au Parlement de se prononcer ainsi sur un évènement historique ».

Sont régulièrement soulevés aussi les risques d'atteinte à la liberté d'opinion et d'expression, d'atteinte à la liberté des enseignants et de la recherche.

Je vous rappelle enfin que, depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Parlement a retrouvé le droit de se prononcer sur de tels sujets par le biais de résolutions.

Je suis, moi aussi, réservé sur la légitimité des lois mémorielles et je partage la préconisation formulée par le rapport consacré aux questions mémorielles de M. Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale, qui propose, sans remettre en cause les lois votées, de renoncer pour l'avenir à cette tentation.

La plupart des juristes estiment qu'il y a un risque sérieux d'inconstitutionnalité à créer un délit pénal. En outre, j'imagine difficilement que la commission des lois tranche dans un sens contraire à la position qu'elle avait prise il y a huit mois. Ce que je vous propose de défendre n'est pas la position d'un parti ou d'un groupe, mais une position fondée sur l'idée que nous nous faisons du droit et du rôle de la loi.

Quels sont ces risques d'inconstitutionnalité ? D'abord un risque de non-respect du principe de la légalité des délits et des peines. Bien qu'elle s'en inspire, la présente proposition de loi diffère en réalité du dispositif retenu par la loi dite « Gayssot », s'agissant de la pénalisation de la contestation de la Shoah. La loi Gayssot est adossée à des faits précis, reconnus par la convention internationale de Londres de 1945 ou par une juridiction internationale - le tribunal de Nuremberg - au terme de débats contradictoires. Comme l'avait alors observé notre ancien collègue Charles Lederman, rapporteur de cette loi, l'infraction créée n'avait pas pour but d'instituer une vérité officielle, mais de faire respecter l'autorité de la chose jugée.

Dans un arrêt du 7 mai 2010, la Cour de cassation a estimé que la question de la constitutionnalité de la loi Gayssot ne se posait pas « dans la mesure où l'incrimination critiquée se réfère à des textes régulièrement introduits en droit interne, définissant de façon claire et précise l'infraction ».

La situation est très différente ici : le génocide arménien de 1915 a été commis avant l'adoption de la convention de 1948 et ses auteurs n'ont jamais été jugés, ni par une juridiction internationale, ni par une juridiction française. De ce fait, il n'existe pas de définition précise des faits constituant ce génocide dans une convention internationale ni dans des décisions de justice. Cette difficulté vaudrait également pour d'autres génocides que le législateur pourrait souhaiter qualifier comme tels par la loi.

En outre, les termes de la proposition de loi sont imprécis. Le fait de « contester ou de minimiser de façon outrancière » l'existence d'un génocide est plus large que sa seule négation. Les difficultés d'interprétation seraient réelles s'agissant d'évènements historiques sur lesquels subsistent encore des zones d'ombre.

Le champ de l'infraction créée apparaît ainsi contraire au principe de la légalité des délits et des peines. Le Conseil constitutionnel considère que ce principe est respecté dès lors que l'infraction est définie « dans des conditions qui permettent au juge, auquel le principe de légalité impose d'interpréter strictement la loi pénale, de se prononcer sans que son appréciation puisse encourir la critique d'arbitraire ».

Il y a aussi un risque de non-respect du principe de liberté d'opinion et d'expression, protégé par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme. Cette liberté admet des restrictions, destinées à protéger d'autres droits et libertés - la sécurité publique, la prévention des infractions, la protection de la santé ou de la morale, ou encore le respect de la vie privée. Encore faut-il que ces restrictions soient proportionnées aux objectifs poursuivis. Si la loi Gayssot paraît compatible avec le principe de liberté d'opinion et d'expression, c'est qu'elle tend à prévenir la résurgence d'un discours antisémite. C'est ce qu'a jugé la Cour européenne des droits de l'homme dans sa décision Garaudy du 24 juin 2003. Or aucun discours de nature comparable ne vise aujourd'hui nos compatriotes d'origine arménienne : de ce fait, le Conseil constitutionnel pourrait considérer le délit créé comme excédant les restrictions communément admises.

Le principe de liberté de la recherche scientifique découle, d'une part, des principes de liberté d'opinion et d'expression, d'autre part, du principe d'indépendance des professeurs de l'enseignement supérieur. Le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 janvier 1984 a estimé que « par leur nature même, les fonctions d'enseignement et de recherche (...) demandent (...) que la libre expression et l'indépendance des personnels soient garanties par les dispositions qui leur sont applicables ». La création de ce délit de contestation ou de minimisation ferait peser un risque certain sur les travaux scientifiques que des historiens conduiraient de bonne foi, dès lors que leurs conclusions seraient regardées par certains comme minimisant des évènements tragiques.

Par ailleurs, la proposition de loi se présente comme la transposition en droit interne d'une décision-cadre en date du 28 novembre 2008, relative à la lutte pénale contre les manifestations de racisme et de xénophobie. En réalité, la transposition est très imparfaite. L'article 1er de cette décision-cadre prévoit que chaque Etat-membre prend les mesures pour faire en sorte que « soient punissables l'apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques des crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre » lorsque le comportement « risque d'inciter à la violence ou à la haine à l'égard d'un groupe de personnes ou d'un membre d'un tel groupe ». La finalité est donc ici de lutter contre le racisme ou la xénophobie, pas seulement de protéger la mémoire. Or l'infraction créée par la proposition de loi ne comporte pas cet élément intentionnel.

En outre, comme l'avait montré M. Badinter en mai dernier, la proposition de loi, si elle était adoptée, risquerait de mettre en péril la loi du 29 janvier 2001...

M. Jacques Mézard. - Exact !

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. - ... si le Conseil constitutionnel était saisi, soit avant la promulgation, soit dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité. Car le Conseil a la faculté, lorsqu'il examine la constitutionnalité d'une loi, d'examiner aussi celle des textes législatifs antérieurs dans laquelle le nouveau s'enracine. Et la constitutionnalité de la loi du 29 janvier 2001 est douteuse, comme l'a démontré le doyen Georges Vedel en 2005, dans le dernier texte qu'il publia. Le principe de séparation des pouvoirs législatif et judiciaire, expliquait-il, « met (outre le bon sens) un obstacle infranchissable à ce que le législateur se prononce sur la vérité ou la fausseté de tels ou tels faits, sur leur qualification dans une espèce concrète et sur une condamnation, même limitée à une flétrissure ». Or une déclaration d'inconstitutionnalité de la loi du 29 janvier 2001 serait un recul pour les rescapés de 1915 et pourrait être regardée comme une victoire par les négationnistes - ce que notre commission ne peut pas accepter.

Si, en l'état du droit, seule la négation de la Shoah est susceptible de donner lieu à des poursuites pénales, les rescapés d'autres génocides ne sont pas pour autant dépourvus de voies de recours contre les propos négationnistes. Diffamation, injure raciale ou religieuse, provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes en raison de leur origine sont passibles de sanctions pénales - l'apologie des génocides et crimes contre l'humanité l'est également. Par ailleurs, de tels faits sont susceptibles de donner lieu à une action au civil, sur le fondement de la responsabilité de droit commun édictée par l'article 1382 du code civil. C'est sur ce fondement qu'un historien a été condamné en 1995 par le TGI de Paris comme ayant « manqué à ses devoirs d'objectivité et de prudence, en s'exprimant sans nuance sur un sujet (...) sensible » ; le tribunal a estimé que ses propos, « susceptibles de raviver injustement la douleur de la communauté arménienne », étaient fautifs et justifiaient une indemnisation.

J'appelle à un débat serein. C'est notre conception du droit qui est ici en jeu, dans le respect infini des victimes du génocide arménien. Je vous propose, comme notre commission l'a fait il y a huit mois à l'initiative de M. Hyest sur la proposition de loi de Serge Lagauche, d'opposer à cette proposition de loi une motion d'irrecevabilité.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Nous sommes à l'origine, avec d'autres, de la loi de 2001. Et un certain nombre de sénateurs de notre groupe avaient déposé une proposition de loi identique à celle adoptée à l'Assemblée nationale. Nous savons aussi que la présente proposition de loi pose des problèmes mais tous les arguments juridiques invoqués par M. Sueur tendent à prouver que la loi de 2001 n'aurait pas dû être votée.

M. Patrice Gélard. - Evidemment. Et souvenons-nous que perseverare diabolicum...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - La Shoah a été reconnue en droit international et par la communauté internationale - il ne s'agit pas d'une loi du vainqueur. La situation juridique n'est pas identique ici. Ceux qui souhaitent l'adoption de la proposition de loi peuvent répondre qu'en 2001, le législateur a voté un texte sans conséquence juridique. Mais toute loi doit avoir une application ; et la reconnaissance du génocide peut prendre d'autres formes qu'une loi.

Ceux qui soutiennent la proposition de loi veulent en fait affirmer haut et fort que le génocide a existé et qu'il faut que cette reconnaissance emporte des conséquences sur le plan pratique.

Nous sommes conscients des conditions dans lesquelles se déroule ce débat, relancé par le président de la République à quelques semaines de l'élection présidentielle. Cette opération de mauvais aloi ne facilite pas nos discussions.

Je rappelle que l'ancienne majorité avait repoussé une proposition de loi identique.

Restant fidèles à la loi de 2001, dont je vous rappelle qu'elle a été votée à une très large majorité, nous nous abstiendrons sur cette motion d'irrecevabilité.

Mme Catherine Tasca. - Je voterai la motion d'irrecevabilité en reprenant, au-delà des problèmes posés par la précipitation dans le dépôt de ce texte, plusieurs des arguments avancés par le Président Sueur. Il ne saurait être question de nier le génocide arménien, mais je partage son raisonnement sur les risques d'inconstitutionnalité liés en particulier au non-respect du champ d'intervention du législateur. Contrairement à la loi Gayssot qui pouvait trouver des fondements dans le droit positif, la présente proposition représente un véritable détournement de la fonction législative. Elle constitue aussi une menace pour le travail des chercheurs, qu'il nous revient au contraire de protéger.

M. Jean-Jacques Hyest. - Je précise que je m'exprime à titre personnel et en particulier en qualité de rapporteur de la précédente proposition de loi qui avait rejetée par notre commission à l'unanimité sur le fondement d'arguments très semblables à ceux évoqués par le Président Sueur, notamment sur le terrain de la constitutionnalité. Le fait que l'on ait voté une loi en 2001 n'est pas une raison valable pour faire de même aujourd'hui car entre-temps, nous avons retrouvé la faculté de voter des résolutions, ce qui me semble l'instrument juridique le plus adapté à pareil sujet. Ne soyons pas le seul pays à voter une loi alors que d'autres parlements, dont le Parlement européen, ont adopté des résolutions. J'ajoute en outre que notre droit actuel permet déjà d'engager des poursuites, au civil certes, lorsque les propos tenus sont excessifs.

M. Jacques Mézard. - Nicolas Alfonsi et moi-même avions voté l'exception d'irrecevabilité sur le texte comparable qui nous avait été soumis au mois de mai dernier. N'oublions pas que nous sommes le législateur et il n'est pas sain que l'on nous soumette ce type de texte, motivé par des préoccupations que nous pouvons bien imaginer. Il sera d'ailleurs intéressant d'observer les changements de vote susceptibles d'intervenir entre le 4 mai 2011 et le 23 janvier 2012 ...

Sur ce sujet, il est instructif de relire le rapport, extrêmement intéressant en bien des points, de la mission d'information de novembre 2008 présidée par le président de l'Assemblée nationale, et notamment la première de ses recommandations : le rôle du Parlement n'est pas de voter des lois mémorielles, assorties de sanctions pénales.

Chacun peut, bien entendu, avoir son opinion sur la portée de l'article 34 de la Constitution mais, pour notre part, nous considérons qu'il ne revient pas au législateur de se prononcer sur des événements historiques, et nous partageons l'ensemble des motifs invoqués par le Président Sueur.

Par ailleurs, faire revenir ce texte ne contribue en rien à la réconciliation entre ces deux peuples dont l'histoire douloureuse a notamment été marquée par ce génocide dont nous ne contestons nullement l'existence. L'adopter ne donnerait décidément pas une belle image de notre République.

M. François Zocchetto. - C'est peu dire que notre commission des lois est opposée à l'idée de lois mémorielles. Mais le fait est que nous avons voté la loi du 29 janvier 2001 et que celle-ci doit désormais être déclinée, faute de quoi elle ne demeurera qu'une simple pétition de principe, d'autant plus qu'elle n'a reçu, à ce jour, aucune application juridictionnelle permettant d'en apprécier la portée et qu'elle ne peut donc s'appuyer sur l'autorité de la chose jugée. Un tel raisonnement a pu, nonobstant les arguments avancés par le rapporteur, qui méritent d'être examinés de près, justifier le dépôt de cette proposition de loi.

S'agissant de la question de sa possible inconstitutionnalité, j'estime, au risque de vous choquer, qu'il serait utile que la loi de 2001 fasse l'objet d'une question prioritaire de constitutionalité (QPC) qui constaterait l'existence d'une difficulté, auquel cas nous pourrions aussitôt déposer une proposition de résolution destinée en quelque sorte à remplacer cette loi. Nous avons en effet, avant tout, besoin de savoir à quoi nous en tenir sur la valeur des textes et leur applicabilité, d'autant plus qu'au-delà du génocide arménien nous risquons d'être sollicités par d'autres communautés.

D'une façon générale, ce débat provoque un malaise car il est l'objet d'un certain nombre de non-dits, à commencer par celui lié au risque d'une forme de hiérarchisation des différents génocides, ce qui serait un non-sens, puisqu'un événement est un génocide ou il ne l'est pas. En m'inspirant d'un article écrit par une de nos collègues de la commission, j'ajouterai que la multiplication des lois mémorielles constitue une menace pour la cohésion sociale. Après s'être intéressé aux Arméniens, n'en viendra-t-on pas, par exemple, à considérer d'une façon particulière les personnes ayant des noms d'origine turque ? Les réserves de la France face à la multiplication des lois mémorielles tiennent aussi à notre difficulté à aborder, au-delà des génocides étrangers, certains événements de l'histoire de notre pays. Par exemple, lorsque j'entends le président de notre commission parler du « génocide » vendéen en y mettant des guillemets, vous comprendrez que cela ne m'est pas indifférent.

En conclusion, regrettant le vote de la loi de 2001, j'estime que nous devons aborder ce débat en faisant abstraction du contexte électoral et en nous fondant à la fois sur une analyse juridique et sur l'évaluation des conséquences de son vote sur la société. Au sein du groupe centriste, chacun exprimera sa sensibilité propre mais, pour ma part, j'envisage de m'abstenir, voire peut-être ne pas prendre part au vote.

Mme Esther Benbassa. - En tant qu'historienne, je travaille sous le véritable diktat de la loi Gayssot imposée par les différentes communautés qui ne cessent de nous dire comment l'on doit écrire l'Histoire. Mon maître Pierre Vidal-Naquet, dont la famille a disparu dans les camps, s'était élevé, à l'époque, contre la loi Gayssot.

S'agissant du génocide arménien en particulier, je rappelle qu'il a toujours été nié par la Turquie, et que les archives de l'Empire ottoman sur les Arméniens et les Juifs ne sont pas ouvertes. Mais, quand j'ai rédigé ma thèse sur la période 1908-1920, j'ai vu voir de nombreux documents qui attestent de la réalité du génocide arménien. Mais l'essentiel aujourd'hui est que les Turcs eux-mêmes règlent cette question avec les Arméniens au moment où l'on assiste à une certaine ouverture, bien que l'utilisation du terme même de génocide demeure passible de condamnation pénale en Turquie.

Le génocide arménien qui n'a pas encore eu son Nuremberg mérite d'être reconnu et de donner lieu à une forme de règlement, par exemple au moyen d'une indemnisation, mais, pour ce qui nous regarde, n'ajoutons pas à la loi de 2001 des lois mémorielles qui empêchent les chercheurs de travailler.

N'oublions pas non plus le sort de la communauté arménienne en Turquie, qui s'élève à 50 000 personnes, et qui est inquiète. J'en ai parlé lors d'un bref séjour à Istanbul avec le patriarche arménien. N'oublions pas les pogroms de 1942, de 1955, au moment de la crise à propos de Chypre. Tout ceci me conduit à voter la motion d'irrecevabilité qui nous est proposée. Laissons les Turcs écrire leur histoire et trouver un modus vivendi avec les Arméniens.

Mlle Sophie Joissains. - Je m'étais déjà prononcée en faveur de la proposition de loi déposée par notre collègue Serge Lagauche, et même si cette nouvelle proposition de loi présente quelques défauts, je maintiendrai néanmoins ma position en votant contre la motion d'irrecevabilité, car il me semble que la loi Gayssot a ouvert une voie dans laquelle il est possible de s'engager sans que cela n'aboutisse à une quelconque hiérarchisation des génocides.

La communauté arménienne n'a pas eu droit à son Nuremberg, notamment parce que nous faisons face à un négationnisme d'État de la part de la Turquie, qui revient à perpétuer le génocide. Dès lors, les ressortissants français d'origine arménienne sont fondés, au moment où la Turquie est candidate à l'entrée dans l'Union européenne, à demander des comptes pour eux-mêmes mais aussi pour les membres de leurs familles restés en Turquie. L'Union européenne devrait d'ailleurs avoir une telle approche lorsqu'elle envisage la candidature de ce pays.

Il ne serait pas compréhensible qu'ayant affirmé certaines valeurs à l'occasion de la loi de 2001, nous renoncions à sanctionner ceux qui ne les respectent pas. Le vote de la proposition de loi fondée sur ces valeurs sera même favorable à la paix entre les Arméniens et les Turcs, car, comme le montre l'exemple allemand, la paix et la réconciliation ne se fondent jamais sur l'oubli mais exigent au contraire une reconnaissance préalable des évènements, y compris douloureux.

M. Alain Anziani. - Je comprends le sens de cette proposition de loi qui est, au-delà de la question arménienne, d'affirmer l'existence de droits fondamentaux. Mais si l'on souhaite faire respecter les droits fondamentaux, il faut d'abord commencer par faire respecter les principes fondamentaux qui fondent notre République, et, en la matière, nous les mettons à mal. Ce texte porte d'abord atteinte au principe de la séparation des pouvoirs en considérant que le politique peut disposer de tous les pouvoirs, en l'occurrence se substituer à la justice, ce que nous ne pouvons accepter sans conséquences désastreuses. Ensuite, si nous admettions l'idée que le Parlement puisse décider de l'existence d'un génocide, il faudrait admettre que la vérité historique variera selon les temps et les lieux, c'est-à-dire selon les majorités politiques et les Parlements concernés, alors que c'est précisément ce que veut combattre, me semble-t-il, la communauté arménienne.

Je voterai d'autant plus la motion d'irrecevabilité que la voie de l'action judiciaire, au civil, et celle de la résolution d'origine parlementaire peuvent d'ores et déjà répondre à ce type de question.

M. Pierre-Yves Collombat. - La liberté d'expression présente parfois certains inconvénients, mais je rappelle que la loi permet déjà d'y répondre pour ce qui est de l'injure et de la diffamation. Pour le reste, si l'expression d'une opinion est manifestement sans rapport avec la réalité, voire parfaitement absurde ou odieuse ou même faisant oeuvre de propagande, l'interdire reviendrait en fait à rétablir le délit d'opinion, ou même de blasphème aboli par la Révolution française. Ce serait une régression par rapport au régime libéral -au sens vrai du terme- sur lequel est fondée notre République, qui nous garantit le droit de dire ce que l'on pense, même si l'on pense mal. Je fais bien évidemment référence aux opinions et non aux actes qui pourraient en être le prolongement, ainsi que les appels à la haine raciale, l'apologie de l'antisémitisme ou de la xénophobie qui sont déjà par ailleurs sanctionnés. Bien que n'étant pas parlementaire à l'époque, j'étais favorable à la reconnaissance du génocide arménien. Mais il s'agissait seulement d'une affirmation, alors qu'il nous est demandé aujourd'hui de sanctionner ceux qui ne s'y conformeraient pas. J'entends l'argument selon lequel il est incohérent de ne pas sanctionner ceux qui contestent des valeurs que l'on affirmerait par ailleurs. Mais alors, dans ce cas, allons-nous par exemple  sanctionner ceux qui pensent que les droits de l'homme ne sont pas universels ? L'affirmation d'une valeur ne doit pas forcément conduire à la sanction de ceux qui ne partageraient pas cette valeur. Voilà pourquoi je soutiens la proposition de motion de notre rapporteur.

Mme Catherine Troendle. - Je souscris totalement aux propos de notre collègue François Zocchetto.

Notre groupe est dans sa majorité, mais de façon non unanime, sensible au fait que le Conseil constitutionnel ne s'est, à ce jour, jamais prononcé sur la loi dite « Gayssot » ; même si la Cour de cassation a été saisie d'une question prioritaire de constitutionnalité en la matière, celle-ci ne l'a jamais transmise au Conseil. S'il existe bien un risque d'inconstitutionnalité, force est de constater qu'il ne s'agit pas d'une certitude et que nous pourrions laisser le processus législatif aller à son terme et le Conseil constitutionnel se prononcer définitivement.

Nous avons légiféré sur les deux génocides que sont la Shoah et le génocide arménien ; le premier a été assorti d'un dispositif pénal, l'autre non, cette distorsion mérite à mon sens d'être corrigée pour des raisons de cohérence législative.

Enfin, je rappelle que, contrairement aux affirmations de notre excellent collègue Jean-Jacques Hyest, douze États européens se sont prononcés en ce sens, dont six qui ont mis en place des dispositifs législatifs présentant un volet pénal.

Mme Corinne Bouchoux. - Si nul ne conteste la réalité du génocide arménien, les débats que nous avons posent néanmoins la question de savoir à quoi sert le Parlement et quels sont les sujets sur lesquels nous devons et pouvons légiférer. L'opportunisme législatif dont ce texte est empreint et qui met un certain nombre de nos collègues dans l'embarras me semble justifier le vote de la motion d'irrecevabilité proposée par le rapporteur. Il faut refuser ce type de lois qui portent atteinte à la crédibilité même du Parlement et qui ne sont, en outre, absolument pas comprises hors de nos frontières.

M. Jean-Yves Leconte. - Tout en étant sensible aux arguments relatifs à l'atteinte à la séparation des pouvoirs et au risque de fragiliser la loi de 2001 par le vote d'un nouveau texte, il me semble que la reconnaissance de la réalité du génocide arménien est une priorité. Compte tenu de la gravité d'un tel événement, il me semble difficile d'y opposer le souci de la liberté de la recherche ou même de la liberté d'expression.

En outre, la pénalisation de la négation de ce génocide contribuerait à la cohésion nationale déjà évoquée par certains collègues, dans la mesure où je vous rappelle que 500 000 de nos concitoyens sont les descendants des victimes de ce terrible événement.

Tout cela conduit à justifier le texte qui est proposé, même si j'admets qu'à côté de ces considérations de fond, des considérations d'opportunité, tenant en particulier aux relations déjà compliquées entre la France et la Turquie, doivent être aussi prises en compte. Je suis partagé et prévois en conséquence de m'abstenir.

M. Christian Cointat. - Je suis mal à l'aise face à cette proposition de loi dont les conséquences nous échappent et qui concerne en réalité beaucoup plus d'étrangers que de ressortissants français. Je me retrouve totalement dans les propos de notre collègue François Zocchetto. J'ajouterai que, si effectivement nous comprenons le désarroi et les attentes de nombreuses familles arméniennes, il ne faut pas non plus oublier, d'une part, que de nombreuses familles françaises d'origine turque sont très critiques face à ce dispositif et que, d'autre part, ce sont les nombreux ressortissants français qui vivent aujourd'hui en Turquie qui subissent les conséquences de ces tensions. C'est pourquoi, quelle que soit l'issue de ce texte, car il y a autant de bonnes raisons de voter pour que de voter contre, faisons attention à ne pas mettre en péril nos compatriotes qui se trouvent en Turquie, ni les intérêts de la France dans un grand pays ami, dont le rôle est essentiel dans la résolution des conflits au Proche et Moyen-Orient. Je souhaiterais que l'on ne perde pas de vue le fait que la Turquie est un acteur essentiel à l'avenir de la paix sur la planète. A chacun donc de prendre ses responsabilités, je vous annonce que moi-même j'ai fait le choix de ne pas prendre part au vote de ce texte, car il ne devrait pas, selon moi, être traité par le Parlement.

M. Gaëtan Gorce. - Je me placerai essentiellement non sur un plan juridique mais du point de vue de l'idée que nous devons nous faire de notre Nation. Il s'agit d'une approche certes délicate mais indispensable pour aborder ce sujet difficile. J'ai la faiblesse de penser que la Nation est une personne, sinon comment expliquer qu'elle ait survécu au-delà des moments où sa sécurité ou sa défense ont été mis en jeu ? Cette personne s'est forgée au fil du temps et des épreuves, autour de valeurs communes qui constituent notre mémoire nationale, fruit de l'Histoire, mais aussi le résultat de choix, auxquels nous participons au-delà de nos différences. Si nous confondons la mémoire et l'Histoire nous commettrons une grave erreur.

Par ailleurs, eu égard à nos tentations à vouloir multiplier les lois mémorielles, nous devons être attentifs à notre mémoire nationale, synthèse de mémoires diverses et non pas addition de mémoires, qu'elles soient ouvrière, religieuse ou encore laïque. Si cette mémoire nationale, qui transcende les mémoires particulières, commence à être remise en cause au motif qu'elle devrait constituer une addition de mémoires spécifiques, tout aussi légitimes soient-elles, alors nous prenons le risque de la détruire et de mettre en danger la cohésion nationale. Cela ne signifie nullement que nous ne devons pas réactualiser cette mémoire, mais ce n'est pas le rôle de la loi. Nous devons le faire davantage par la commémoration, indiquant ainsi aux communautés visées, en l'occurrence la communauté arménienne, qu'elles font partie intégrante de la communauté nationale. Si nous commençons à décider dans un texte ce que doit être la mémoire nationale, nous risquons de déclarer une guerre des mémoires consistant à savoir si la Révolution française est bien notre socle politique ou si elle a commis un génocide en Vendée, alors c'est toute la construction politique, intellectuelle et affective de la Nation que nous mettons en danger.

Je regrette que des hommes et des femmes qui prétendent être des hommes ou des femmes d'État se soient permis des déclarations à ce sujet qui sont indignes de quiconque veut diriger la République.

M. Jean-René Lecerf. - Je me retrouve, pour ma part, complètement dans les propos tenus par les présidents successifs de notre commission des lois. J'éprouve personnellement une difficulté à voter une loi dans le dessein de permettre au Conseil constitutionnel d'en vérifier la constitutionnalité et par voie de conséquence de déclarer éventuellement l'inconstitutionnalité de la loi de 2001. Je crains aussi une forme d'effet de « contamination » de cette proposition de loi et que des propositions de lois soient déposées pour reconnaître officiellement qu'un génocide a été commis au Cambodge, au Rwanda, en Vendée, ou encore lors de la colonisation, entravant ainsi le travail des scientifiques.

Les victimes, comme les bourreaux, du génocide arménien ont disparu, la véritable réparation offerte aux familles des victimes serait la reconnaissance du génocide par la Turquie et je ne crois pas que nous y parviendrons de cette manière, alors même que les Gouvernements européens seraient parfaitement fondés à faire de cette reconnaissance une condition de l'entrée de cet État dans l'Union européenne.

M. Nicolas Alfonsi. - J'ai déjà dit en d'autres circonstances et en d'autres lieux que cette proposition de loi me paraissait totalement hypocrite, car elle constitue en réalité un projet de loi déguisé. Ce texte est aussi dangereux car il vient troubler nos relations avec ce grand pays qu'est la Turquie, le doyen Vedel soulignant déjà en son temps le débordement de compétences de la part du Parlement lorsque celui-ci s'immisce dans les relations internationales.

Quant au débat sur la question prioritaire de constitutionnalité, je vous soumets une question de politique fiction : si elle est posée ou bien si un recours permet de « purger » en quelque sorte la loi de 2001 et qu'aucun génocide n'est reconnu, quel service rendrions-nous vraiment aux Arméniens ?

Nous n'avons pas vocation à écrire l'Histoire. Dès lors, le problème n'est pas celui de la communauté arménienne auquel nous sommes tous sensibles, mais celui de savoir comment le Parlement doit écrire le droit. J'estime que nous avons le devoir de voter cette motion d'irrecevabilité.

M. Philippe Bas. - Il me semble effectivement que le premier devoir de notre commission est de se prononcer sur les questions juridiques. Celles-ci sont loin d'être simples car, si la loi du 29 janvier 2001 est certainement contraire à l'article 34 de la Constitution, à partir du moment où nous voterions cette proposition de loi, nous donnerions à la loi de 2001 un effet utile, autrement dit certaines de ses dispositions deviendraient exécutoires. Ainsi le fait de nier l'existence du génocide arménien serait passible de sanctions pénales. Par conséquent nous ne serions plus du tout dans le schéma d'une loi remplaçant une résolution qui ne pouvait pas, à l'époque, être adoptée par le Parlement, mais dans celui d'une loi comportant une sanction pénale.

L'autre problème de constitutionnalité, plus difficile à résoudre et tenant au texte même de la proposition de loi, concerne la séparation des pouvoirs. En effet, en condamnant la négation du génocide qui n'a pas fait l'objet de condamnations par un tribunal, le législateur s'immiscerait dans un domaine qui, par essence, relève du juge.

Pour autant, faut-il que nous tranchions nous-mêmes cette question de constitutionnalité ou bien devons-nous en laisser le soin au Conseil constitutionnel ? Les deux attitudes sont envisageables et, pour ma part, je suis prêt à laisser à la fois le débat se poursuivre et à donner l'opportunité au Conseil de se prononcer. C'est pourquoi je ne prendrai pas part au vote.

M. Christophe Béchu. - Je suis complètement opposé aux lois mémorielles, y compris à la loi de 2001, mais je ne souscris pas aux arguments relatifs à la constitutionnalité de la présente proposition de loi, en ce qu'elle prévoit que tout génocide reconnu ne peut être contesté.

Certes, il y a des difficultés, comme la signification exacte des termes « minimiser de façon outrancière ». Mais je suis aussi très surpris d'entendre en commission des lois des arguments tendant à protéger une loi que l'on considère comme constitutionnellement fragile et à éviter pour cela le risque qu'une QPC ne soit posée. Ne serait-ce pas une incitation à adopter des lois dénuées de toute portée réelle, qui ne seraient en quelque sorte des résolutions, ce qui serait absurde ?

Sur le fond du texte, si je souscris à plusieurs éléments de la présentation du Président Sueur, l'argument selon lequel on ne pourrait punir que la négation d'un génocide susceptible de se reproduire ou intervenant à l'encontre d'une population qui continue à faire l'objet d'une haine ou d'un risque de xénophobie me pose une vraie difficulté.

Je ne vous cache pas que j'ai aussi été étonné d'entendre invoqués des arguments d'opportunité tenant à la nécessité de ménager telle communauté ou nos relations avec tel pays, ce qui me semble être hors de propos s'agissant du texte d'harmonisation pénale qui nous est soumis.

Sur l'ensemble, sans savoir quel sera exactement mon vote sur la proposition de loi, je puis vous dire que pour les raisons que je viens de vous indiquer je m'opposerai à la motion d'irrecevabilité.

M. Patrice Gélard. - Vous avez constaté que chacun au sein du groupe UMP votera sur ce texte en fonction de son opinion personnelle dans la mesure où il n'y a pas d'unanimité sur ce sujet.

M. Pierre-Yves Collombat - Il n'y a pas que dans votre groupe !

M. Patrice Gélard. - Parmi les propos entendus, il est un argument juridique que je trouve inacceptable, selon lequel une loi dont l'inconstitutionnalité n'aurait pas été soulevée et qui serait, de ce fait, entrée en vigueur aurait vocation à s'imposer à l'ensemble des textes postérieurs. Elle me rappelle étrangement Pachoukanis, le théoricien du droit soviétique affirmant que le droit était au service du pouvoir ...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - On atteint des sommets !

M. Patrice Gélard. - Mais je ne m'en prends pas à l'U.R.S.S. et je pourrais tout autant faire référence à la tradition britannique selon laquelle le Parlement est supposé pouvoir tout faire, sauf changer un homme en femme. Ces conceptions sont éloignées de la nôtre qui repose depuis 1789 sur le principe de la séparation des pouvoirs, dont la loi de 2001 est pourtant la négation. En me référant notamment à la mise en garde du doyen Vedel sur ce sujet, j'estime que l'on ne peut pas continuer indéfiniment à vivre dans un système fondé sur un texte dont on peut penser qu'il présente des irrégularités au regard d'un principe constitutionnel, même si c'est bien entendu au seul Conseil constitutionnel qu'il revient de statuer sur sa constitutionnalité.

Le législateur ne peut pas tout et, s'il était tenté de tout faire, il perdrait alors sa légitimité. C'est sur la base des arguments juridiques et indépendamment du fond que, comme Jean-Jacques Hyest, je voterai la motion d'irrecevabilité.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.- Je tiens à remercier l'ensemble des orateurs pour le climat dans lequel nous venons de débattre.

Mme Borvo, qui avez estimé que la loi de 2001 n'aurait pas dû être votée, je vous rappelle que mes propos ne portaient que sur les risques de mise en cause de la constitutionnalité de celle-ci.

Je remercie Mme Tasca pour avoir été la première à soulever la question du rôle de la loi, ensuite reprise par plusieurs de nos collègues.

A M. Jean-Jacques Hyest, outre que je partage son opinion sur le fait que la résolution parlementaire constitue un instrument adapté à ce type de sujet, je tiens à dire que, si j'ai tenu à être rapporteur de ce texte, c'est au nom de la continuité des travaux de notre commission. Au-delà des circonstances politiques changeantes, il revient en effet à cette dernière d'affirmer un certain nombre de principes.

Merci, M. Mézard, d'avoir mentionné le remarquable rapport de Bernard Accoyer, qui pourrait inciter son auteur à prendre quelques initiatives ...

Merci, M. Zocchetto, pour vos propos, mais je souligne le paradoxe consistant à vouloir s'inscrire dans une continuité envers une loi dont la constitutionnalité est douteuse. Le doyen Gélard a répondu à ce raisonnement par l'absurde, mais je suis en phase avec M. Zocchetto quant aux lois mémorielles et au devoir de mémoire envers les victimes arméniennes de ce génocide.

Mme Benbassa s'est exprimée avec sa compétence d'historienne. Il est assurément souhaitable que les autorités arméniennes et turques continuent à se parler. Des actes ont déjà eu lieu, comme le fait d'assister ensemble à un match de football. Il serait bon que l'Unesco crée une commission mixte d'historiens, ce que souhaitent certains intellectuels turcs et arméniens.

Je remercie Mlle Joissains d'avoir explicité sa position. Il va de soi que la loi française n'influencera nullement le négationnisme en Turquie, puisque la loi française ne s'applique qu'en France. Les autorités arméniennes n'ont pas fait voter de loi pénalisant la négation du génocide, mais vous avez raison d'affirmer que la paix véritable ne peut être bâtie sur l'oubli.

M. Anziani a défendu la nécessaire séparation des pouvoirs. Le Parlement n'est ni un amphithéâtre universitaire où l'on fait de l'Histoire, ni un tribunal. S'il se charge d'établir la vérité historique, le résultat peut varier selon les majorités...

Merci à M. Collombat, qui s'est fondé sur les grands textes de la République pour plaider contre le rétablissement du délit d'opinion.

MM. Leconte, Cointat et Alfonsi ont mis l'accent sur nos relations avec la Turquie. Me limitant à l'exception d'irrecevabilité, je n'ai pas évoqué la diplomatie, mais il est vrai que la Turquie est un grand pays qui joue un rôle décisif dans une région périlleuse du monde. Les relations avec ce grand pays sont un sujet sensible pour tout ministre des affaires étrangères, notamment l'actuel. J'ai regretté à ce propos qu'une phase de très grande ouverture sur l'éventuelle adhésion de la Turquie à l'Union européenne ait débouché sur la fermeture absolue. En tout état de cause, les relations entre l'Union européenne et la Turquie sont très importantes.

M. Gorce, merci pour vos belles paroles sur la loi et la mémoire. Vous avez rappelé qu'en France, la mémoire nationale n'est pas l'addition de mémoires communautaires, mais leur synthèse réalisée par le creuset républicain.

M. Lecerf, merci d'avoir insisté avec chaleur sur la continuité de la commission, lourde de signification si ma proposition est adoptée.

Je souligne également les propos de M. Bas sur la séparation des pouvoirs, me réjouissant d'une forte tendance Montesquieu dans notre commission ... Devons-nous trancher nous-mêmes ou nous en remettre au Conseil Constitutionnel ? Nous pouvons nous prononcer, sans préjudice d'une éventuelle décision des Sages.

M. Béchu a montré les risques de la formule « minimalisation outrancière ». Je ne le rejoins pas au sujet du paradoxe dont a parlé M. Gélard. Dans une décision du 7 décembre 1976, la Cour européenne des droits de l'homme s'est prononcée sur la liberté d'expression et la nécessité de limitations proportionnées.

Enfin, je remercie M. Gélard, qui a rappelé l'opinion du doyen Vedel, dont nous connaissons l'autorité. Je le remercie également d'avoir souligné le paradoxe précité, puis d'avoir dit que le législateur ne peut tout faire : en définitive, notre débat porte sur le champ de la loi.

Vous avez finalement rappelé la liberté de vote laissée par chaque groupe à ses membres, ce dont je me réjouis car la Constitution dispose que « tout mandat impératif est nul.» Nous nous exprimons donc en toute liberté. Il est toujours bon que les autorités de la République disposent d'un Parlement qui s'attache à exercer sa mission dans une certaine indépendance.

La motion d'irrecevabilité est adoptée.

Droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et droit de communiquer après l'arrestation - Communication

La commission entend ensuite une communication de M. Jean-René Lecerf sur la proposition de résolution présentée au nom des affaires européennes relative au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et au droit de communiquer après l'arrestation.

M. Jean-René Lecerf. - Cette proposition de directive participe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice, pierre angulaire de la coopération judiciaire, qui suppose une confiance mutuelle des États membres dans leurs systèmes judiciaires respectifs, en particulier dans leur procédure pénale. C'est pourquoi la Commission européenne a présenté en 2004 une proposition de décision-cadre tendant à définir un socle minimal de droits procéduraux accordés aux personnes soupçonnées d'avoir commis des infractions pénales. Outre le droit de bénéficier gratuitement des services d'interprétation et de traduction, ce texte instituait le droit à l'assistance d'un avocat, celui d'être informé de ses droits, une attention particulière pour les personnes vulnérables mises en cause, ainsi que le droit de communiquer avec sa famille et les autorités consulaires. Après l'échec des négociations sur ce texte, la Commission européenne a opté pour une approche plus graduelle, formalisée dans une « feuille de route » fondée sur une approche par étapes.

Depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne en décembre 2009, l'Union européenne peut établir des règles minimales en matière de procédure pénale, par voie de directives selon la procédure législative ordinaire combinant majorité qualifiée au Conseil et codécision avec le Parlement européen.

La première application de la feuille de route fut l'adoption de la directive du 20 octobre 2010 sur le droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales. La deuxième étape concerne le droit d'être informé sur ses droits et sur les charges retenues, ainsi que le droit d'avoir accès au dossier de l'affaire. La directive sur ce point semble réunir un consensus. Enfin, le droit d'accès à un avocat et celui de communiquer après une arrestation constituent les troisième et quatrième mesures prévues dans le programme de 2009.

Quelles sont les principales dispositions de la proposition de directive ?

La première concerne le droit d'accès à un avocat, applicable dès qu'une personne est informée qu'elle est soupçonnée d'avoir commis une infraction pénale, ou dès qu'elle est poursuivie à ce titre. L'intéressé devrait avoir, dès que possible, accès à un avocat selon des modalités préservant les droits de la défense. Cet accès devrait être garanti au plus tard au moment de la privation de liberté et dans les meilleurs délais au regard des circonstances de chaque affaire. Qu'elle soit ou non privée de liberté, la personne concernée devrait pouvoir bénéficier d'un avocat dès son audition. L'avocat devrait aussi être autorisé à s'entretenir avec le suspect pendant un temps suffisant et à intervalle raisonnable pour exercer effectivement les droits de la défense ; il devrait pouvoir assister à tout interrogatoire ou audition. Sauf lorsque le risque d'un retard compromettrait la disponibilité d'éléments de preuves, il devrait pouvoir assister à toute mesure d'enquête ou de collecte de preuves pour laquelle la législation nationale exige ou autorise la présence de la personne soupçonnée ou poursuivie, il pourrait accéder aux lieux de détention pour vérifier les conditions de détention. La proposition reconnaît en outre aux personnes privées de liberté dans le cadre des procédures pénales le droit de communiquer, dès que possible après l'arrestation, avec au moins une personne qu'elles désignent, afin de l'informer de la mise en détention. Les détenus étrangers devraient pouvoir obtenir que les autorités consulaires soient informées de leur situation. Enfin, dans le but de garantir les droits de la défense, toutes les communications entre une personne soupçonnée ou poursuivie et son avocat devraient être totalement confidentielles. Les États membres ne pourraient déroger qu'à titre exceptionnel, au droit d'accès à un avocat. Les dérogations devraient être justifiées par des motifs impérieux tenant à la nécessité urgente d'écarter un danger pour la vie ou l'intégrité physique d'une ou de plusieurs personnes. Enfin, le texte prend en compte le mandat d'arrêt européen, puisqu'il étend le droit de bénéficier des services d'un conseil aux personnes arrêtées à ce titre dans l'État membre d'exécution. L'intéressé pourrait également avoir accès à un avocat dans l'État membre d'émission, afin d'assister l'avocat désigné dans l'État membre d'exécution.

J'en viens à l'appréciation qu'il nous revient de porter sur cette proposition.

Tout d'abord, nous devons approuver le renforcement des garanties procédurales, qui figure expressément dans le programme pluriannuel adopté en 2010 sous présidence suédoise, dit « de Stockholm ». La méthode graduelle retenue par le Conseil en 2009 permet de mieux sérier les questions et de trouver des points d'équilibre pour chaque aspect.

Conformément au traité, cette démarche doit se limiter à des règles minimales. Une directive ne peut donc tout régler ; elle doit laisser aux États membres une marge d'appréciation faisant la part des spécificités de chaque système juridique. Or, le texte qui nous est soumis s'inscrit dans la logique d'un système accusatoire davantage que dans celle de notre système, largement inquisitoire.

J'en viens au lien entre le droit d'accès à un avocat et l'harmonisation de l'aide juridictionnelle.

Dans le rapport d'information que j'ai élaboré conjointement avec Jean-Pierre Michel, nous avons fait valoir que les progrès du droit à l'assistance d'un avocat pouvaient faire courir un risque d'injustice sociale, exigeant que la collectivité revalorise l'aide juridictionnelle. Dans sa feuille de route, le Conseil avait expressément lié l'accès à un avocat et l'harmonisation des règles relatives à l'aide juridictionnelle. Cela me paraît essentiel pour éviter de fortes inégalités de droits entre personnes se trouvant dans des situations juridiquement identiques, mais aux moyens différents. Sur ce point, la Commission européenne n'a pas respecté la feuille de route, en renvoyant aux Etats membres cette question de l'aide juridictionnelle, malgré les très grandes disparités actuelles. La Commission a voulu promouvoir des droits sans se préoccuper de leur effectivité, et nous devons rappeler qu'il est essentiel d'harmoniser très vite l'aide juridictionnelle.

Nous devons aussi concilier les droits de la défense et la recherche des auteurs d'infractions, thème délicat entre tous ! Le conseil des barreaux européens estime que la présence de l'avocat assurerait l'impartialité des procédures et la recevabilité des preuves rassemblées en sa présence ; elle devrait être systématique dès lors qu'une privation de liberté est envisagée. Le conseil national des barreaux français fait valoir que le renforcement du rôle de l'avocat pendant l'enquête pénale est une garantie essentielle de l'État de droit, du procès équitable et du respect effectif des droits de la défense. A l'inverse, dans une note conjointe du 22 septembre 2011, la Belgique, la France, l'Irlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont exprimé de fortes réserves sur la proposition de la Commission européenne, en invoquant des difficultés substantielles dans les enquêtes et procédures pénales. Dans le rapport élaboré avec Jean-Pierre Michel, nous avons souligné que le droit à l'assistance d'un avocat risquait de judiciariser la garde à vue, ce qui pourrait conduire à confondre les phases policière et judiciaire de l'enquête.

Répondant le 18 novembre 2011 à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rappelé que le renforcement des droits de la défense n'avait pas pour effet de juridictionnaliser la garde à vue, qui demeure une mesure de police judiciaire : le débat contradictoire sur les éléments de preuve doit se dérouler devant la juridiction d'instruction ou de jugement. Le commentaire de la décision relève que l'évolution possible du droit induite par la proposition de directive ne trouve pas de fondement dans la jurisprudence actuelle du Conseil constitutionnel, sa décision du 30 juillet 2010 ayant imposé l'assistance d'un avocat à raison de la privation de liberté. Il n'en va donc pas de même si la personne consent à être entendue librement, un point que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme n'a d'ailleurs pas tranché. J'ajoute que le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions issues de la loi du 14 avril 2011 conformes à la Constitution, avec une importante réserve d'interprétation en imposant deux garanties minimales pour l'audition d'une personne soupçonnée d'avoir commis une infraction : avant de pouvoir être interrogée, elle doit connaître la nature et la date de l'infraction qu'on la soupçonne d'avoir commise ou tenté de commettre ; elle doit être informée de son droit de mettre fin à l'entretien en quittant les locaux de police ou de gendarmerie. Ces garanties étant posées pour l'audition libre, c'est bien l'existence d'une contrainte telle que la privation de liberté qui me semble devoir être le critère du droit d'accès à un avocat, non la notion de suspect figurant dans la proposition européenne.

À mon sens, le droit communautaire devrait se concentrer, conformément au Traité, sur des règles minimales permettant d'assurer un exercice effectif des droits de la défense, autorisant les États membres à les préciser en adéquation avec leurs traditions et systèmes juridiques. Est-il indispensable que l'avocat soit présent pendant la prise d'empreintes digitales ou lors d'un prélèvement ADN ? Faut-il confier à l'avocat le contrôle des lieux de détention, mission qui relève en France des autorités publiques - magistrats, parlementaires et contrôleur général des lieux de privation de liberté ? Je considère que non. En revanche, il est important que l'avocat bénéficie de droits au cours d'un interrogatoire ou d'une audition, mais sans bloquer le déroulement des enquêtes. Le texte doit donc fixer des règles minimales, en préservant la marge d'appréciation des États membres.

Il me semble en outre que le cadre européen devrait prévoir des dérogations adaptées aux infractions les plus graves, dans le prolongement des travaux de notre rapport d'information sur l'intervention de l'avocat auprès des personnes impliquées dans des affaires liées à la grande criminalité ou au terrorisme : nous avons préconisé que l'avocat soit choisi par la personne gardée à vue sur une liste agréée par le barreau, voire, comme en Espagne, prévoir une désignation d'office par le bâtonnier. La Cour européenne des droits de l'homme admettant elle-même des dérogations aux droits de la défense dans des circonstances exceptionnelles et pour des motifs impérieux et notre code de procédure pénale autorisant le report de la présence de l'avocat dans ces cas, la directive doit comporter un régime dérogatoire pour les infractions les plus graves.

Enfin, le droit de communiquer après une arrestation constitue certes une garantie importante, mais il faut l'encadrer : sans aller - comme l'envisage le texte - jusqu'à permettre de communiquer avec toute personne librement désignée par la personne privée de liberté, il serait plus équilibré d'autoriser - comme le fait déjà le droit français - à prévenir un proche et son employeur ou les autorités consulaires.

En conclusion, je crois que nous devons accueillir favorablement cette nouvelle étape dans le renforcement des garanties procédurales, mais nous limiter à établir des règles minimales prenant en compte les traditions et systèmes juridiques des États membres, en évitant toute confusion entre les phases policière et judiciaire de l'enquête.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je remercie M. Lecerf pour cette communication.

M. Pierre-Yves Collombat. - Félicitations ! (Nombreuses marques d'approbation.)

M. Jean-Pierre Sueur, président. - M. Collombat ne félicite qu'à bon escient.

M. Pierre-Yves Collombat. - Le travail est parfait.

Reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés - Examen des amendements au texte de la commission

Puis la commission examine les amendements au texte n° 42 (2011-2012) sur la proposition de loi n° 264 (2009-2010) tendant à modifier la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Ce texte sera discuté demain en séance. Nous avons déjà examiné le rapport. Il ne reste à voir qu'un amendement et un sous-amendement.

Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - L'amendement n°1 rectifié bis tend à combler une lacune du droit.

Certains commissaires ayant critiqué la manière dont les harkis étaient protégés contre les injures et la diffamation, l'amendement assimile les forces supplétives aux forces armées françaises, ce qui constitue pour les Harkis la plus justifiée des reconnaissances.

M. René Vandierendonck. - Merci d'avoir fait droit à une observation que j'avais formulée. Je souscris bien sûr à l'amendement.

Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - Le sous-amendement n°2 permettra de rattacher l'amendement à la loi du 23 février 2005.

Le sous-amendement n°2 est adopté.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n°1 rectifié bis sous-amendé.

Centres de gestion de la fonction publique territoriale - Examen des amendements au texte de la commission

Puis la commission examine les amendements au texte n° 248 (2011-2012) sur la proposition de loi n° 723 (2009-2010) tendant à modifier les dispositions relatives aux centres de gestion de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Le texte relatif aux centres de gestion a été retiré de l'ordre du jour.

Je me félicite de la réunion de travail positive organisée entre nos collègues qui permet de se diriger vers une insertion de ce texte dans le projet de loi rapporté par Mme Tasca.

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. - Nous sommes parvenus à un accord de principe sur ces dispositions, que Mme Tasca est disposée à accueillir dans le texte qu'elle rapportera prochainement.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je me réjouis de ce travail fécond.

Délinquance d'imprudence et délit de « mise en danger délibérée de la personne d'autrui » - Examen des amendements

La commission examine ensuite les amendements sur la proposition de loi n° 223 (2010-2011) présentée par MM. Pierre Fauchon, François Zocchetto et Jean-René Lecerf, relative à la délinquance d'imprudence et à une modification des dispositions de l'article 223-1 du code pénal instituant le délit de « mise en danger délibérée de la personne d'autrui ».

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Aucun amendement n'a été déposé sur ce texte.

Délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles autres que le viol - Examen des amendements

Enfin, la commission examine les amendements sur la proposition de loi n° 61 (2011-2012) présentée par Mme Muguette Dini et plusieurs de ses collègues, modifiant le délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles autres que le viol.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - La commission s'est déjà prononcée contre cette proposition de loi déposée par Mme Dini. Nous devons aujourd'hui examiner quatre amendements.

Mme Nicole Bonnefoy. - L'amendement n° 1 tend à supprimer l'article premier, qui modifierait l'architecture des prescriptions. En outre, augmenter la durée de la prescription n'aboutirait qu'à l'impossibilité pour les victimes d'apporter la preuve plusieurs années après les faits.

M. Yves Détraigne, rapporteur. - Avis favorable.

M. Jean-Pierre Sueur, président. - Dès lors que nous sommes défavorables à la proposition de loi, nous pouvons commencer par supprimer son article premier...

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 1.

M. Yves Détraigne, rapporteur. - L'amendement n° 4 n'aura plus d'objet si le précédent est adopté. Dans le cas contraire, j'y serai défavorable, par cohérence avec la position de notre commission.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 4.

M. Yves Détraigne, rapporteur. - L'amendement n° 3 relève de la même analyse.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 3.

M. Christian Favier. - L'amendement n° 2 tend à protéger les personnels de santé signalant des violences aux autorités.

À juste titre, l'exposé des motifs de la proposition de loi rappelle que l'on compte moins d'une plainte pour dix agressions, car les victimes éprouvent de réelles difficultés psychologiques à dénoncer les faits. La procédure de signalement est donc essentielle pour combattre les violences sexuelles. Afin que les personnes concernées par l'article 226-14 du code pénal puissent effectuer sereinement leur signalement, nous proposons d'inclure dans son champ les cas où les faits dénoncés n'ont finalement pas débouché sur des poursuites ou une condamnation.

M. Yves Détraigne, rapporteur. - Nous avons déjà évoqué cet amendement la semaine dernière, en précisant que le droit en vigueur protégeait les intéressés. Nous pourrions interroger le ministre sur l'application du droit.

Par cohérence avec la position de la commission, avis défavorable à l'amendement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.