Sénats d'Europe - Les Sénats et la représentation des collectivités locales



Palais du Luxembourg, 6 juin 2001

M. Gernot Mittler, Président de la Commission pour les Affaires européennes du Bundesrat d'Allemagne, ministre d'État :

L'Allemagne est un pays éminemment décentralisé. Nous avons seize Länder et ils ont créé le Bund, la Fédération. Nous avions donc d'abord les Länder puis le Bund. Et c'est cet ordre chronologique qui détermine notre organisation et il existe une délimitation très claire des compétences, ce qui est essentiel pour une structure fédérale. Les Länder sont par exemple compétents dans les domaines de la culture et de l'éducation. Leurs compétences sont entérinées dans la Constitution. Pour ce qui est des problèmes de l'agriculture, de l'écologie. Les Länder sont également particulièrement responsables, alors que le Bund est responsable de la politique étrangère, de la politique de sécurité, de la politique fiscale...

Il existe une délimitation très claire des compétences entre les Länder et le niveau fédéral. Mais à côté de cette délimitation des compétences, les Länder ont également la tâche de collaborer à la législation qui est élaborée au niveau fédéral. Ceci par l'intermédiaire du Bundesrat. A la différence de l'Autriche, les Länder allemands délèguent des membres auprès du Bundesrat ; ce ne sont pas des représentants des parlements des Länder mais des membres des gouvernements des Länder. Chaque Gouvernement dispose d'un certain nombre de voix. Le plus grand Land de l'Allemagne. La Rhénanie du Nord - Westphalie, avec 18 millions d'habitants, dispose de six voix et le plus petit Land, le Land de Brême avec 500 000 habitants, dispose de trois voix. La proportionnalité n'est donc pas entièrement respectée, bien au contraire. Il existe un principe essentiel qui nous guide et qui régit le rapport de force et la tension permanente qui peut exister entre des organes si divers : le droit élaboré au niveau du Bund est prioritaire par rapport au droit élaboré au niveau des Länder. Le deuxième principe est le suivant : les Länder se doivent d'être fidèles au Bund et c'est précisément à ce niveau là que se joue le rapport de force et que l'on peut trouver des solutions à des tensions existantes.

Il peut bien sûr exister des majorités politiques différentes au Bundestag et au Bundesrat, c'est le cas actuellement. Se pose donc la question de savoir comment, dans un tel cas, le processus législatif peut être assuré. Nous avons la commission d'intermédiation qui est composée de façon paritaire entre un nombre égal de représentants du Bundestag et de représentants du Bundesrat. Cette commission a pour mission d'essayer de trouver des solutions aux conflits existants en soumettant elle-même une proposition au Bundestag et au Bundesrat.

Pour ce qui est des communes et de leurs structures juridiques, ce sont les Länder qui sont responsables, comme pour la dotation des moyens financiers. Je tiens à préciser que, depuis 1992, nous avons, au niveau de notre loi fondamentale une disposition qui veut que pour les questions de l'Union européenne les Länder peuvent, par le biais du Bundesrat, avoir le droit à la parole. Les Länder sont ainsi co-décisionnaires.

A côté de cette présentation des structures juridiques, je voudrais dire que l'Allemagne est un pays décentralisé et c'est ce qui permet aussi de nous retrouver en Europe, car l'Europe se doit d'être une Europe des régions, en particulier si elle veut être vraiment acceptée par nos concitoyens. Le principe de subsidiarité doit être le principe porteur de l'Europe d'aujourd'hui et de demain, et ceci non seulement au niveau des Constitutions, mais aussi au niveau de la pratique quotidienne.

Nous avons entendu aujourd'hui qu'il existe un nombre important de modèles, qu'il existe des aménagements très différents selon les pays. Nous avons autant de configurations que nous avons de pays. Et je pense que la question qui se pose à nous au sein de cette association est la suivante : est-ce que nous réussirons réellement à rendre fertile, à rendre porteur cette diversité de configuration de l'Europe, afin que l'Europe reste proche de ses citoyens pour éviter que Bruxelles ne devienne un conglomérat d'anonymes ?

Ce sera la tâche qui va nous incomber et j'irai même au-delà. Nous venons de pays très différents, nous avons des traditions étatiques juridiques très différentes et les différents projets qui ont été élaborés concernant la Constitution européenne en témoignent. Le Chancelier Gerhard Schröder, le Premier ministre français Lionel Jospin ont leur point de vue à ce propos et je crois que ce sera réellement la question pertinente qu'il va falloir trancher à l'avenir. Je me demande si au cours d'une prochaine réunion nous ne devrions pas nous pencher également sur ce problème.

Comment pouvons-nous au niveau des Sénats apporter notre contribution afin que nous puissions trouver ici une solution commune en ce qui concerne l'avenir de l'Europe ? Comment pouvons-nous de façon efficace et pertinente aller de l'avant? C'est une remarque que je voudrais ajouter aux explications que j'ai données quant à l'architecture juridique de mon pays.

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