AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DÉFENSE ET FORCES ARMÉES

Table des matières


Mercredi 3 mai 2000

- Présidence de M. Xavier de Villepin, président -

Eloge funèbre - Hommage à Roger Husson

M. Xavier de Villepin, président, a tout d'abord rendu hommage à Roger Husson, sénateur, décédé le 28 avril 2000. Les membres de la commission ont observé une minute de silence à la mémoire de leur ancien collègue.

Communications diverses

Par ailleurs, M. Xavier de Villepin, président, a informé les membres de la commission du remplacement de M. Jean-Luc Mélenchon, devenu membre du Gouvernement, par M. Louis Le Pensec, au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Audition de M. Pierre Steinmetz, directeur général de la gendarmerie nationale

Puis la commission a procédé à l'audition de M. Pierre Steinmetz, directeur général de la gendarmerie nationale.

En préambule, M. Pierre Steinmetz a rappelé que, dans notre société moderne, les institutions chargées de fonctions d'autorité exerçaient parfois leurs missions avec difficulté. Les conditions dans lesquelles la Gendarmerie assumait ses missions étaient par ailleurs amenées à changer, impliquant des modifications de comportement et des aménagements, en termes d'effectifs et de moyens. Il a enfin relevé que, compte tenu de la nature des missions de la gendarmerie, celle-ci était souvent l'objet d'une forte pression médiatique.

Après avoir reconnu que l'Arme avait été confrontée, au cours de ces derniers mois, à quelques troubles internes, M. Pierre Steinmetz a rappelé l'évolution institutionnelle que la gendarmerie avait connue depuis la dernière loi de programmation militaire. Celle-ci, a-t-il rappelé, avait induit un mouvement important au sein de l'Arme, entraînant notamment une requalification des emplois, un accroissement global des effectifs, gagé notamment sur les réductions de postes de sous-officiers. Le gouvernement a, par ailleurs, récemment décidé d'accroître, sur trois ans, de 1.500 unités, le nombre de postes de sous-officiers.

M. Pierre Steinmetz a souligné que la montée en puissance des gendarmes-adjoints se déroulait dans de bonnes conditions, de même que la diminution des effectifs de gendarmes-auxiliaires, qui s'opérait conformément aux prévisions. Celles-ci permettaient de chiffrer à 7.500 pour l'an 2000 les effectifs de gendarmes-adjoints et à 7.200, pour cette même année, ceux des gendarmes-auxiliaires. Sur une année, et compte tenu des départs, le taux de renouvellement des gendarmes-adjoints était de 65 %, ce qui permettait de disposer d'un vivier d'une qualité satisfaisante. La mise en place du corps de soutien, a-t-il poursuivi, s'effectuait correctement tant en quantité qu'en qualité, notamment en ce qui concerne la pyramide des âges.

Le directeur général de la gendarmerie nationale a ensuite évoqué le travail de la gendarmerie en milieu périurbain, conformément aux mesures décidées en conseil de sécurité intérieure. Il a indiqué que la restructuration du dispositif territorial était désormais reprise sur une nouvelle base et, conformément aux indications du Premier ministre, ne se faisait plus qu'au cas par cas.

S'agissant des redéploiements au sein de l'Arme, la substitution de gendarmes-adjoints aux sous-officiers permettait que ceux-ci soient dirigés vers des brigades plus chargées. Cela donnait au commandant de légion une plus grande latitude pour procéder à une meilleure affectation de ses personnels en fonction des besoins. Depuis le 1er octobre 1999, six escadrons de gendarmerie mobile ont par ailleurs été engagés dans des missions de " fidélisation " dans les zones " sensibles ", à la satisfaction des personnels concernés, estimant gratifiante cette rénovation de leurs missions. Il convenait cependant, a précisé M. Pierre Steinmetz, de prendre en compte certaines difficultés liées à la logistique, voire à la durée de la mission. Enfin, ces missions de " fidélisation " pourraient être de nature à entraîner quelques difficultés lors des nécessaires renforts à apporter dans les régions touristiques pendant la saison estivale.

Abordant ensuite le moral des personnels, le directeur général de la gendarmerie nationale a indiqué que depuis le milieu de l'année 1999, le commandement de l'Arme avait fait état d'une certaine dégradation du moral des gendarmes, liée notamment aux événements survenus en Corse. Cet élément se conjuguait à un accroissement constant de la charge de travail, ainsi qu'à une évolution du contexte social, en particulier la mise en oeuvre de la loi sur les 35 heures dans le secteur privé et l'annonce de l'application de cette législation à la fonction publique à partir de 2002. A l'heure où ces négociations s'engageaient sur cette question, les personnels craignaient un décalage par rapport à la société civile. Depuis la fin de l'année 1999, le ministre de la défense a engagé, a précisé M. Pierre Steinmetz, une large concertation sur le temps et les conditions de travail et sur les possibles aménagements dont ils étaient susceptibles de faire l'objet. La concertation s'est effectuée dans le cadre des groupements de gendarmerie et un groupe de travail commun, associant la direction générale de la gendarmerie nationale au Conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG), a fait un certain nombre de propositions d'aménagements. Les débats au sein des commissions de concertation ont démontré que les personnels étaient conscients de l'impossibilité de régler leur temps de travail sur la base des 35 heures hebdomadaires et sollicitaient, en contrepartie, la possibilité, soit de bénéficier de périodes de récupération, soit d'une compensation financière. A l'issue d'une phase de concertation dont il serait erroné, a précisé M. Pierre Steinmetz, de dire qu'elle aurait été insuffisante ou inutile, mais qui a, au contraire, abouti à des résultats tangibles, le gouvernement a retenu, en tout ou partie, 80 % des propositions concrètes émises par les intéressés. Si un certain malentendu et une relative déception ont pu, dans un premier temps, se faire jour au sein des personnels, ils sont liés, a précisé le directeur général de la gendarmerie nationale, à la décision du gouvernement de retenir l'option tendant à dégager du temps libre de préférence à l'octroi d'une prime, en y associant d'ailleurs un programme d'équipements supplémentaires (téléphones portables, véhicules, etc.) et un accroissement des crédits de fonctionnement et des effectifs. Au demeurant, le refus d'accorder une prime dans l'immédiat était lié au fait qu'à l'heure actuelle, les personnels de la fonction publique n'étaient pas encore concernés par la mise en oeuvre des 35 heures. M. Pierre Steinmetz a estimé que la mise en place progressive des mesures décidées par le gouvernement permettait des évolutions positives dans l'état d'esprit des personnels de la gendarmerie. Il existait, a-t-il néanmoins reconnu, une véritable attente de ces personnels, qui devait être prise en compte, de même que la nécessité de préserver l'attractivité de la fonction militaire.

La mise en place d'une nouvelle définition du commandement passait, par ailleurs, par un accroissement des responsabilités dévolues aux échelons déconcentrés. Le déploiement des équipements complémentaires devait être mis en oeuvre d'ici la fin de l'année 2000. Le renforcement des effectifs était en cours au niveau des centres opérationnels de groupements (COG) et pour la constitution de nouveaux pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG). Un comité de suivi de l'ensemble de ces mesures avait été mis en place, présidé par le général inspecteur technique, qui effectuera des sondages de vérification à l'échelon de la brigade.

Évoquant ensuite le volume de travail dont les unités de gendarmerie devaient s'acquitter, le directeur général de la gendarmerie nationale a demandé au contrôleur général Sandras de mettre en place un indicateur de charge, qui permettrait d'apprécier l'origine des tâches qui étaient demandées à la gendarmerie. M. Pierre Steinmetz a relevé à cet égard que les activités proprement militaires de l'Arme représentaient moins de 10 % de ses missions, à comparer aux 40 % dédiés aux missions d'ordre judiciaire. Il serait opportun qu'un débat s'instaure avec les administrations intéressées, de façon à maîtriser ces flux supplémentaires d'activités.

Abordant enfin le cas de la gendarmerie mobile, M. Pierre Steinmetz a indiqué qu'une réflexion était en cours sur le réexamen des gardes statiques ainsi que sur les conditions d'emploi des escadrons. Convenait-il, par exemple, de préserver toujours un format identique d'emploi de ces escadrons pour des missions pourtant très variées ?

Concluant son propos, le directeur général de la gendarmerie nationale s'est déclaré optimiste quant à l'évolution de l'Arme, celle-ci bénéficiant, en effet, d'un très fort coefficient de notoriété parmi la population française, d'un coefficient de satisfaction supérieur à 80 % et d'un coefficient de confiance qui dépassait les 90 %.

A la suite de l'exposé de M. Pierre Steinmetz, un débat s'est engagé avec les commissaires.

M. Paul Masson a d'abord félicité le directeur général pour la franchise de ses propos. Il serait très préoccupant, a-t-il estimé, que la dégradation du moral des militaires de la gendarmerie, largement liée à des considérations extérieures à l'Arme, puisse affecter le coefficient de sympathie considérable dont la gendarmerie continuait à bénéficier auprès de la population. Il a ajouté que le malaise actuel trouvait son origine principale dans la mise en oeuvre de la réforme relative aux 35 heures et que cette question devait être traitée, s'agissant de la gendarmerie, au niveau gouvernemental, sans que le statut militaire puisse être invoqué pour interdire tout changement.

M. Paul Masson a relevé en outre que l'échec du projet de redéploiement entre la gendarmerie et la police et les incertitudes actuelles sur les intentions du Gouvernement en la matière avaient également profondément affecté l'Arme. Il a également cité les suites de l'affaire corse, dont la gendarmerie avait eu le sentiment de payer seule le prix. Il a noté par ailleurs que la " fidélisation " des escadrons de gendarmerie mobile dans certaines zones urbaines sensibles conduisait nécessairement la gendarmerie à procéder à des comparaisons sur la situation qui lui était faite par rapport à celle réservée à la police. La multiplication des exigences de service, des contrats de sécurité et des charges induites, a-t-il poursuivi, mobilisait de manière croissante la gendarmerie. De plus, M. Paul Masson a estimé que les échelons intermédiaires tendaient à faire remonter les décisions au niveau central. Il a évoqué également les difficultés que présentait le recrutement des gendarmes adjoints, à l'heure où la croissance économique ne favorise pas nécessairement le volontariat dans les armées. Il a ajouté que la formation des gendarmes adjoints pourrait aussi se révéler plus difficile que celle des gendarmes auxiliaires.

M. Paul Masson a rappelé que les récentes décisions prises par le Gouvernement afin d'accroître les effectifs et les matériels auraient sans aucun doute des effets positifs, mais ne permettaient pas de satisfaire toutes les aspirations des gendarmes. Il a observé à cet égard que la mise en oeuvre des 35 heures et les références récurrentes à la " cagnotte " budgétaire ne pouvaient que nourrir un certain sentiment de frustration. S'il n'est pas question pour M. Paul Masson de remettre en cause le statut militaire de la gendarmerie, il convient de prêter une attention particulière aux préoccupations liées à la réduction du temps de travail, ainsi qu'à une éventuelle revalorisation de la rémunération du sous-officier. Il a appelé de ses voeux un allégement des effectifs des états-majors, une réduction des charges indues et une meilleure concertation avec les administrations. Enfin, il a rappelé que la confiance qui devait être manifestée aux gendarmes passait par l'adoption de mesures fortes, une prise en compte des aspirations relatives à l'aménagement du temps de travail et, sans doute aussi, un certain aménagement du dispositif de commandement. Il a souhaité que le projet de budget pour 2001 porte la marque de cette volonté de changement et a souligné que la commission devait se montrer particulièrement vigilante sur les orientations qui seraient adoptées en la matière.

M. Daniel Goulet a également insisté sur le fait que la confiance accordée à la gendarmerie devait s'accompagner d'initiatives concrètes, s'agissant notamment du partage des tâches entre la gendarmerie et la police. Il a regretté la multiplication des charges supportées par la gendarmerie et appelé de ses voeux une clarification des missions confiées à l'Arme. Il a rappelé son attachement aux qualités de disponibilité et de proximité reconnues à la gendarmerie, et souhaité qu'aucune remise en cause du dispositif territorial n'intervienne sans une concertation extrêmement approfondie. Il a observé enfin que pour l'ensemble des élus, notamment dans les zones rurales ou périurbaines, la gendarmerie apparaissait un partenaire de premier plan.

M. Jean-Guy Branger a souligné la spécificité du rôle de la gendarmerie au sein des armées, en rappelant la mission de service public auprès de la société civile confiée à l'Arme. Il a estimé que la charge de travail qui incombait aux militaires de la gendarmerie supposait en contrepartie une reconnaissance, notamment à travers une revalorisation des rémunérations. Il a ajouté que des mesures devaient être prises rapidement afin de prendre en compte les aspirations des gendarmes. Enfin, il a attiré l'attention de M. Pierre Steinmetz sur les risques que pourrait présenter la fidélisation des escadrons de gendarmerie mobile au regard de la disponibilité nécessaire pour assurer les renforts saisonniers.

M. Aymeri de Montesquiou a estimé que certaines des améliorations matérielles qui avaient été décidées en faveur de la gendarmerie pouvaient être considérées comme un simple rattrapage. Il a souligné que si la loi relative aux 35 heures était difficilement applicable à la gendarmerie, comme le reconnaissaient d'ailleurs les personnels de l'Arme, il convenait de s'interroger sur les compensations qui pourraient être accordées et le coût qu'elles représenteraient pour le budget.

M. Emmanuel Hamel a souhaité savoir si la gendarmerie avait bénéficié d'une partie de la " cagnotte ". Il s'est également interrogé sur la féminisation de la gendarmerie, ainsi que sur les moyens envisagés par la direction générale afin d'améliorer l'image de la gendarmerie, que les chaînes de télévision du service public, en particulier, pouvaient présenter. Revenant sur les 35 heures, il a demandé des précisions sur le coût des compensations qui pourraient être accordées à la gendarmerie. Il s'est également interrogé sur la situation des effectifs dans nos départements et territoires d'outre-mer ainsi qu'à l'étranger. Il a souhaité savoir si les pouvoirs publics envisageaient des mesures particulières, afin d'exprimer la gratitude de la nation à l'égard des gendarmes servant à l'étranger. Enfin, il s'est inquiété des effectifs des gendarmes qui lui paraissaient notamment insuffisants sur les autoroutes concédées.

M. Philippe de Gaulle a rappelé que la gendarmerie constituait le bras armé de l'Etat. Il s'est interrogé sur une éventuelle présence d'éléments de la garde républicaine au Kosovo. Il a estimé que les charges nouvelles devaient être prises en compte dans la solde accordée aux militaires, mais ne pas conduire à l'attribution de primes particulières. Il a rappelé que la gendarmerie devait, en tout état de cause, conserver sa disponibilité. Enfin, il a regretté que les médias ne présentent pas une image plus juste de la gendarmerie.

M. André Boyer a demandé des précisions sur les conditions de recrutement des gendarmes-adjoints ainsi que sur la qualité de cette ressource nouvelle.

M. Xavier de Villepin, président, a souhaité savoir quel rôle la gendarmerie jouait dans les interventions extérieures et comment s'opérait, dans ce domaine, la coopération avec les unités de l'armée de terre.

En réponse aux commissaires, M. Pierre Steinmetz a apporté les précisions suivantes :

- la dégradation du moral de la gendarmerie constitue certes un motif de préoccupation, mais n'affecte en aucune manière la qualité du service rendu, comme l'avait montré l'action exemplaire de la gendarmerie lors des intempéries qui ont touché la France en décembre dernier ;

- les médias locaux donnent une plus juste image de la gendarmerie que la presse ou la télévision nationale qui ne paraissent accorder d'attention qu'à ses dysfonctionnements ;

- la multiplication des contrats de sécurité peut donner le sentiment d'un dispositif complexe, mais elle permet de favoriser une meilleure communication entre les différents acteurs chargés de la sécurité ;

- la question des charges indues constitue un sujet de préoccupation récurrent pour la gendarmerie ;

- la stratification des échelons de commandement traduit la volonté de faire coïncider le dispositif de la gendarmerie avec les circonscriptions du ministère de l'intérieur ; elle peut constituer un facteur de lourdeur et faire l'objet d'améliorations ; la relative " timidité " des échelons déconcentrés qui conduit à faire remonter trop de dossiers à Paris peut être mise sur le compte d'une tendance générale que l'on observe dans la société actuelle et paraît moins marquée dans la gendarmerie que dans d'autres services publics ; la direction générale souhaite confier de plus larges responsabilités aux commandements déconcentrés, notamment au niveau de la compagnie ;

- la gendarmerie est consciente de la nécessité de garantir la sécurité des zones touristiques par des renforts saisonniers adaptés ;

- la mise en place de moyens matériels supplémentaires ne constitue pas seulement un rattrapage, elle permet aussi d'accroître de manière significative les moyens d'action des brigades, telle que la mise à disposition d'un deuxième véhicule pour les brigades à effectif de six gendarmes ; par ailleurs, l'achèvement du programme de télécommunication Rubis permettra de libérer une marge de manoeuvre financière supplémentaire pour les équipements de la gendarmerie ;

- l'attractivité de la condition de gendarme n'est pas aujourd'hui en cause ; la gendarmerie n'éprouve pas de difficultés à assurer ses recrutements et l'une des motivations des volontaires pour servir comme gendarme-auxiliaire est précisément d'intégrer l'Arme ;

- l'obligation de disponibilité en tout temps et en tout lieu, qui s'applique à la gendarmerie, n'est pas compatible avec l'application des 35 heures ; si l'allégement du temps de travail constitue un objectif légitime, le statut militaire doit assurer un équilibre entre avantages et servitudes ; il n'est pas encore possible de préciser quelles seront les compensations accordées à la gendarmerie, dans la mesure où les négociations sur les 35 heures dans la fonction publique sont en cours ;

- l'expérience de " fidélisation " des escadrons de gendarmerie mobile bénéficie d'une appréciation favorable de la part des personnels en raison du caractère valorisant des missions accomplies ; elle requiert cependant un effort de formation particulier, car elle n'entre pas dans la vocation habituelle de la gendarmerie mobile ;

- la montée en puissance des gendarmes-adjoints au sein de la gendarmerie provoque parfois des interrogations ; il s'agit là d'une réaction naturelle compte tenu de la qualité largement reconnue des gendarmes-auxiliaires appelés à disparaître à la suite de la réforme du service national ; il importe de rappeler cependant que les gendarmes-adjoints sont recrutés parmi des volontaires et reçoivent une formation adaptée ; la direction générale étudie par ailleurs, à la demande du ministre, la mise en place d'un module supplémentaire de formation après une année d'activité comme gendarme-adjoint ; la gendarmerie s'attache à écarter les candidats qui ne lui paraissent pas adaptés au rôle qu'elle entend leur confier ; ceux qui sont choisis peuvent constituer une source de recrutement très précieuse pour les sous-officiers de la gendarmerie ; il importe aujourd'hui de poursuivre la réflexion sur les capacités juridiques qui pourraient être reconnues aux gendarmes-adjoints ;

- les redéploiements d'unités ne peuvent intervenir qu'à la suite d'un examen au cas par cas ; au sein d'un dispositif territorial inchangé, les personnels peuvent faire l'objet d'une répartition différente selon les besoins ; une expérience de mutualisation de certaines brigades est aujourd'hui en cours afin de conférer une plus grande souplesse à l'organisation de la surveillance sur le territoire national ; cette sectorisation apparaît nécessaire dans la perspective souhaitable d'une meilleure utilisation du " temps de travail " de la gendarmerie ; le soutien des élus est indispensable à la mise en oeuvre d'une telle orientation ;

- la gendarmerie est représentée au Kosovo par un escadron de gendarmerie mobile déployé à Mitrovica, ainsi que par des gendarmes provenant des unités territoriales.

M. Philippe de Gaulle a observé que la gendarmerie n'assurait pas seulement le rôle de police militaire au sein des armées, mais assurait également le maintien de l'ordre entre les Serbes et les Kosovars.

M. Pierre Steinmetz a précisé qu'à l'exception des périodes de tension aiguë, qui supposent l'intervention de l'armée de terre, le maintien de l'ordre incombe à la gendarmerie, dont la capacité de prévention est largement reconnue ; la gendarmerie joue sur le terrain un rôle très apprécié par nos armées ainsi que par les responsables du commandement, qui jugent très utile de disposer d'un instrument de maintien de l'ordre en complément de la force proprement militaire ; il faut également relever la qualité des relations entre les différentes forces de gendarmerie émanant de différentes nations et présentes au Kosovo.

Il a précisé, à l'attention de M. Paul Masson, à propos d'un officier de gendarmerie soupçonné d'avoir communiqué certains documents, que le séjour de cet officier au Kosovo n'avait pas été prolongé.

Résolutions européennes - Réforme des structures économiques et sociales dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen (MEDA) - Examen du rapport et des amendements

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport de Mme Danielle Bidard-Reydet et de l'amendement extérieur sur la proposition de résolution n° 240 (1999-2000) présentée, au nom de la délégation pour l'Union européenne, par M. Louis Le Pensec, en application de l'article 73 bis du Règlement, sur la proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement n° 1488/96 du 23 juillet 1996 sur les mesures financières et techniques accompagnant la réforme des structures économiques et sociales dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen (MEDA) (n° E-1331).

Mme Danielle Bidard-Reydet, rapporteur, a d'abord indiqué que le projet d'acte du Conseil, qui faisait l'objet de la présente proposition de résolution, concernait la modification proposée par la Commission européenne du règlement MEDA, qui constituait le principal instrument financier de l'Union européenne pour la mise en oeuvre du partenariat euro-méditerranéen. Elle a relevé que la Commission souhaitait remettre en cause le principe de la double intervention, dans le cours de la procédure de mise en oeuvre des fonds MEDA, du Comité MED, qui représente les quinze Etats membres. Ce comité est en effet actuellement appelé à approuver les programmes indicatifs nationaux, avant de se prononcer, au cas par cas, sur les projets d'aide. La Commission propose, en conséquence, de supprimer l'examen, par le Comité MED, des propositions individuelles de financement.

Mme Danielle Bidard-Reydet a toutefois observé que cette réforme ne permettrait qu'un gain de temps -trois mois- dérisoire, au regard des délais inhérents au déroulement de la procédure de gestion de MEDA, qui peut s'étaler sur plusieurs années ; elle a ajouté, en outre, que l'examen, au cas par cas, des projets de financement par le Comité MED, garantissait aux Etats la capacité de contrôler l'utilisation des crédits, d'informer les entreprises sur l'organisation éventuelle d'appels d'offres et, enfin, de favoriser une meilleure coordination sur le terrain de l'aide communautaire et de l'aide bilatérale. Elle a regretté également que les propositions de la Commission ne comportent aucune indication sur les moyens financiers du partenariat euro-méditerranéen sur la période 2000-2006 dans le cadre du programme MEDA II.

Évoquant alors la proposition de résolution que pourrait adopter la commission, Mme Danielle Bidard-Reydet a suggéré de reprendre l'ensemble des recommandations faites par M. Louis Le Pensec dans le cadre de la proposition de résolution qu'il avait présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, tout en la complétant sur certains points. Elle a relevé que la proposition de M. Louis Le Pensec insistait sur quatre aspects : le rejet des propositions en l'état de la Commission, l'amélioration des procédures de mise à disposition des crédits, le nécessaire approfondissement des relations euro-méditerranéennes et, enfin, la participation des collectivités territoriales au processus de Barcelone. Elle a souhaité que l'accent puisse être mis sur quatre points complémentaires : le maintien du contrôle du Comité MED sur les propositions de financement individuel, la nécessité de fixer sans retard l'enveloppe financière qui devait être allouée à MEDA II, l'opportunité pour le Gouvernement de préciser les orientations qu'il entend adopter pour le partenariat euro-méditerranéen dans la perspective de la prochaine présidence de l'Union européenne et, enfin, la prise en compte des conséquences sociales de la libéralisation des échanges.

Mme Danielle Bidard-Reydet a souhaité insister sur ce dernier point, en soulignant que l'ouverture des marchés pouvait en effet déstabiliser des économies encore fragiles, et donc présenter des conséquences sociales préoccupantes. Dans cette perspective, a-t-elle ajouté, l'aide n'avait pas seulement pour vocation de favoriser l'adaptation de l'appareil industriel, mais aussi de prendre en compte les besoins de la population. Faute de soutien financier nécessaire, a-t-elle estimé, l'aggravation des conditions de vie pourrait fragiliser la mise en oeuvre du processus démocratique, à l'encontre de l'objectif poursuivi par le partenariat euro-méditerranéen. Il était dès lors important de prendre conscience des risques que présentaient les retards de décaissement des fonds MEDA et la déception de nos partenaires devant ces dysfonctionnements. Elle a conclu en indiquant que le partenariat euro-méditerranéen supposait qu'une attention égale soit accordée aux trois volets -politique, économique, social- du processus lancé par la Conférence de Barcelone ; le programme MEDA devait permettre le développement harmonieux des trois dimensions complémentaires d'un projet essentiel pour la stabilité de la Méditerranée et du continent européen.

Mme Danielle Bidard-Reydet a alors invité la commission à adopter la proposition de résolution dans cette rédaction complétée.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Robert Bret a présenté l'amendement qu'il avait déposé au nom du groupe communiste républicain et citoyen (CRC). Il a insisté sur la dégradation des conditions de vie liée à la mise en oeuvre progressive du libre-échange industriel. La proposition de résolution, a-t-il estimé, devait plaider pour un partenariat euro-méditerranéen orienté en priorité sur le bien-être des peuples et le développement d'échanges équitables. L'amendement du groupe CRC, a-t-il ajouté, avait aussi pour objet de demander une annulation de la dette des pays méditerranéens partenaires de l'Union européenne et d'attirer l'attention sur la question de la libre circulation des personnes et des idées, sur la base du principe d'égalité entre les ressortissants des pays de la rive nord et de la rive sud.

M. Xavier de Villepin, président, a alors observé que l'objectif de mise en oeuvre du libre-échange industriel poursuivi par le partenariat euro-méditerranéen n'était pas incompatible avec le bien-être social, dans la mesure où l'ouverture des marchés pouvait favoriser le développement économique. Il a souligné que la libéralisation des échanges pouvait cependant avoir des effets déstabilisateurs, à court terme, sur des économies fragiles, que le programme MEDA avait précisément pour objet de corriger.

Il a par ailleurs estimé que si une annulation de dettes apparaissait difficilement envisageable pour les pays méditerranéens qui n'étaient pas concernés par les initiatives prises en faveur des pays les plus pauvres, des aménagements demeuraient possibles, à l'image du mécanisme de conversion de dettes en investissements appliqué au Maroc. S'agissant de la libre circulation des personnes, il a relevé que le Gouvernement français avait mis en place une politique des visas moins restrictive, mais qu'il convenait de rester prudent dans ce domaine, dans la mesure où la pression démographique dans les pays du sud pouvait susciter des flux migratoires difficilement maîtrisables. Il a invité la commission à rejeter l'amendement de M. Robert Bret et à adopter la proposition de résolution présentée par Mme Danielle Bidard-Reydet, qui prenait en compte de manière équilibrée les considérations de caractère économique et social.

M. Philippe de Gaulle a également marqué son opposition à l'amendement de M. Robert Bret, en observant qu'il n'existait pas de lien entre la mise en oeuvre du libre-échange et la libre circulation des personnes.

La commission a alors rejeté l'amendement de M. Robert Bret.

M. Robert Bret a alors suggéré de modifier la proposition de résolution présentée par Mme Danielle Bidard-Reydet, afin que le bilan des conséquences sociales des accords euro-méditerranéens qui pourrait être demandé à la Commission européenne soit pris en compte, non seulement dans l'évaluation de l'aide apportée par l'Union européenne dans le cadre du programme MEDA, mais également dans l'éventuelle réorientation de cette aide.

M. Robert Del Picchia a estimé que cette proposition lui paraissait fondée au regard de l'expérience de l'aide accordée aux pays d'Europe centrale et orientale, qui n'avait pas toujours bénéficié directement aux économies de ces pays.

Mme Danielle Bidard-Reydet, rapporteur, et M. Xavier de Villepin, président, ont alors approuvé la nouvelle proposition de M. Robert Bret qui a été intégrée dans la proposition de résolution.

La commission a ensuite adopté la proposition de résolution ainsi modifiée.

Traités et conventions - Entente France-Québec en matière de sécurité sociale - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. Hubert Durand-Chastel sur le projet de loi n° 252 (1999-2000) autorisant l'approbation de l'avenant n°2 à l'entente entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement duQuébec en matière de sécurité sociale.

M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur, a tout d'abord rappelé la double particularité des relations franco-québécoises en matière de sécurité sociale liées, d'une part, à la large compétence de la province de Québec pour les principaux domaines de la législation sociale et, d'autre part, à sa capacité de conclure des accords internationaux, sous réserve que la possibilité en ait été prévue par un instrument d'Etat à Etat préalable.

Il a précisé que, dans ces conditions, avait été signée une entente franco-québécoise du 12 février 1979 relative à la sécurité sociale, afin de prévoir les modalités de coordination des régimes de sécurité sociale, cette entente ayant été complétée, en 1984, par un premier avenant permettant d'étendre son application à tous les travailleurs non salariés. Il a alors indiqué que le second avenant, signé le 19 décembre 1998 et faisant l'objet du projet de loi déposé au Sénat, visait à compléter une nouvelle fois l'entente, pour prendre en compte certains cas très particuliers de travailleurs non salariés exerçant leur activité, au cours d'une même année, simultanément en France et au Québec, en particulier les artistes du spectacle.

Il a conclu en demandant à la commission d'émettre un avis favorable sur le projet de loi soumis au Sénat. Suivant l'avis de son rapporteur, la commission a adopté le projet de loi.